Projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2010 avant adoption : première partie

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) 2010, dans sa version initiale, comprenait cinquante-quatre articles, auxquels se sont ajoutés vingt-neuf articles additionnels introduits par l’Assemblée nationale. Le Sénat en a modifié vingt-huit, supprimé cinq et a introduit vingt-trois nouveaux articles. Ce sont ces cinquante-six articles qui ont fait l’objet d’un examen en commission mixte paritaire. Voici les points intéressants concernant les 50 premiers articles…


Les organismes régis par le code de la mutualité, les institutions de prévoyance régies par le livre IX du code de la Sécurité sociale ou par le livre VII du code rural et les entreprises régies par le code des assurances vont devoir régler une contribution exceptionnelle dans le cadre de leur participation à la mobilisation nationale contre la pandémie grippale. Son taux est fixé à 0,94 % de la contribution assise sur le montant hors taxes des primes ou cotisations émises au cours d’un trimestre civil, déduction faite des annulations et des remboursements, ou, à défaut d’émission, recouvrées, afférentes à la protection complémentaire en matière de frais de soins de santé, à l’exclusion des réassurances (art. 10).

Les laboratoires seront moins taxés cette année, car ils ont, en théorie, souffert de la crise. Qu’ils aient profité de la grippe ne semble pas avoir été pris en compte par les parlementaires (art. 11). Les Français, qui ont eux aussi souffert de la crise, n’auront pas eu la chance de voir leurs impôts locaux revus à la baisse.
Oubliée aussi l’idée de taxer « le secteur des dispositifs médicaux, en particulier certains dispositifs du titre II de la liste des produits et prestations remboursables (notamment l’optique et les audioprothèses) » qui « connaît un très fort développement commercial » (art. 12).

Les gains réalisés à l’aide de numéros surtaxés lors des jeux télévisés vont être soumis à prélèvement social à un taux de 9,5 % (art. 17 A).

Le surcoût lié à la pandémie grippale impacte l’ONDAM

En 2010, le surcoût induit par les dépenses exceptionnelles liées à la pandémie grippale sera pris en compte par le comité d’alerte sur l’évolution des dépenses de l’assurance maladie pour l’évaluation, en application de l’article L. 114-4-1 du code de la sécurité sociale, malgré le risque de dépassement de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM) qui va entraîner des mesures de redressement (art. 28) !

Un patient qui guérit d’une affection de longue durée (ALD), comme un cancer, va voir les examens de suivi pour s’assurer qu’il n’y a pas de récidive (bien qu’il soit guéri…) pris en charge par l’assurance-maladie (art. 29).

Les génériques sous forme orale pourront avoir une apparence et une texture identiques ou similaires au médicament princeps, pour mieux entretenir la confusion du patient qui devrait être ainsi moins réticent à accepter une substitution (art. 29 bis).
Les médecins ne vont pas être obligés de prescrire un générique quand celui-ci existe, comme le prévoyait l’article 29 quinquies. Les pharmaciens vont pouvoir continuer à substituer. Les sages-femmes, pour leur part, sont autorisées à assurer la surveillance et le suivi biologique des contraceptifs locaux et des contraceptifs hormonaux (art. 29 quater).

Pour les examens de télémédecine, la totalité ou une quote-part des honoraires pourra être reçue par une personne ne remplissant pas les conditions requises pour l’exercice de la profession médicale. Cette mesure concerne aussi les coopérations entre professionnels de santé, comme les transferts de tâches ou d’actes (art. L 4011-1 du code de la santé publique) à l’article 29 ter du PLFSS 2010.

Le CAPI déjà modifié

Il n’aura pas fallu attendre longtemps pour voir le contrat d’amélioration des pratiques (CAPI) évoluer et de nouveaux objectifs s’ajouter à ceux qui existent déjà. « Le contrat peut faire l’objet d’avenants destinés à y intégrer les objectifs fixés chaque année en matière de maîtrise médicalisée des dépenses d’assurance maladie » (art. 29 sexies).
C’est vraisemblablement le CAPI qui a inspiré les rédacteurs de l’article 30 qui prévoit, quant à lui, que les « gros prescripteurs » ne soient plus mis systématiquement sous entente préalable, mais qu’ils puissent se voir proposés par le directeur de leur organisme d’assurance-maladie local, en lien avec l’échelon médical du service médical, un objectif de réduction des prescriptions en cause dans un délai maximum de 6 mois. Si cet objectif n’est pas atteint, le médecin se verra infliger une pénalité financière.
Normalement, un médecin, un chirurgien dentiste ou une sage-femme est obligé de soumettre tous les contrats en rapport avec l’exercice de sa profession qu’il signe au conseil départemental de l’ordre dont il dépend. Afin d’éviter qu’un conseil de l’ordre vienne émettre un avis défavorable sur un contrat comme le CAPI, les parlementaires ont décidé que cette obligation ne concernait pas les contrats conformes à un contrat-type soumis à l’approbation des ministres chargés de la santé et de la Sécurité sociale (art. 30 bis).

Le développement professionnel continu (DPC) vient de voir l’origine de son financement précisé (art. 30 bis A).

Après le renouvellement des lunettes par l’opticien et celui des orthèses plantaires par les pédicures-podologues, les orthoprothésistes, les podo-orthésistes et les orthopédistes-orthésistes n’ont pas obtenu l’adaptation, dans le cadre d’un renouvellement, les prescriptions médicales initiales d’orthèses plantaires datant de moins de trois ans dans des conditions fixées par décret et sauf opposition du médecin (art. 30 ter supprimé).

Une avancée en matière d’assurance responsabilité civile professionnelle

En matière de responsabilité civile des professionnels de santé, le passage au Sénat et en commission mixte paritaire a relancé le problème assurantiel qui s’y attache. Il a été décidé une substitution de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à l’ensemble des praticiens libéraux après l’expiration du délai de validité de leur couverture d’assurance, à savoir au bout de dix années après leur cessation d’activité. Ce texte prend en compte le risque de condamnations qui pourraient être prononcées, après le décès du professionnel, contre sa famille, laquelle ne serait pas en mesure de faire aux charges élevées que peuvent représenter les indemnisations. La lecture des débats en commission mixte paritaire à ce sujet est intéressante (art. 30 quater).

Les dépenses des établissements de santé dans le domaine des transports sanitaires ne devront pas dépasser des prévisions annuelles. « Un taux national d’évolution des dépenses de frais de transport des établissements de santé » va être fixé et les établissements dont la prescription dépassera ce taux seront sanctionnés (art. 31).

Convergence tarifaire de l’hôpital : l’arlésienne

Nouveau sursis pour l’hôpital qui voit la convergence tarifaire repoussée en 2018 ! Pourtant, Alain Vasselle, rapporteur pour le Sénat, a rappelé que « le report de la convergence de 2012 à 2018 a été annoncé, de façon très déplaisante eu égard aux compétences du Parlement, par un communiqué de presse du gouvernement lors de l’examen du projet de loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires. Il s’agissait en fait d’obtenir un accord de la Fédération hospitalière de France sur ce texte. Le report de la convergence à 2018 est donc le fruit d’un accord politique entre le gouvernement et cette fédération hospitalière.
Depuis 2004, on déplore une grande inertie du ministère de la santé en la matière. Il paraît ainsi anormal de constater que la médecine de ville est parvenue à une maîtrise des dépenses médicales, alors que la maîtrise médicalisée des dépenses n’a toujours pas été introduite à l’hôpital public, du fait notamment d’une absence d’identification des médecins prescripteurs. On trouve toujours une bonne raison – études à mener, problèmes informatiques ou technologiques… – pour ne pas maîtriser les dépenses. Force est de constater que quand l’hôpital public marque des avancées, c’est que le législateur l’y a obligé, notamment en donnant à la Caisse nationale d’assurance maladie de nouveaux moyens juridiques d’action. Il est vrai que ce sujet est socialement sensible et qu’il pousse à toujours reporter les décisions nécessaires, mais ce n’est pas sérieux de la part du gouvernement de vouloir reporter la convergence à 2018. »
Mais il est évident que le courage politique d’affronter les personnels hospitaliers et surtout leurs syndicats n’est pas là. Bien que le sénateur Jean-Jacques Jégou ait expliqué que la ministre de la santé, Roselyne Bachelot, a donné plusieurs exemples patents d’insuffisances de l’hôpital public qui démontrent la nécessité de la convergence, d’autres comme Pierre Méhaignerie ont précisé qu’il convient « d’indiquer clairement, pour ne pas inquiéter les agents hospitaliers du secteur public, que la convergence n’aboutira pas à un même tarif pour les deux secteurs. »

Enfin, les soins effectués dans des hôpitaux établis hors de France vont être pris en charge directement par la Sécurité sociale. Il n’est pas question ici des ressortissants français tombant malade à l’étranger, mais bien des Français « résidant et exerçant leur activité en France et tombant malade sans avoir quitté la France » qui veulent être traités dans un hôpital étranger, en substitution d’un établissement français. Ces dépenses seront comptabilisées dans l’ONDAM. S’il s’agit là d’une mesure devant servir à améliorer certaines situations transfrontalières. Il n’a pas été fait mention des possibilités ainsi offertes aux patients pratiquant le tourisme médical (art. 32).

Voilà pour les cinquante premiers articles du PLFSS 2010. Les cinquante articles suivants feront l’objet d’un autre article.

 

Mise à jour – 25 novembre 2009 – 23 h 35

Malgré les accords trouvés entre les députés et les sénateurs par le biais de la commission mixte paritaire, Roselyne Bachelot a réussi à faire modifier, en séance, les textes votés à l’Assemblée nationale aujourd’hui. Il s’agit là d’un fait inhabituel.
Reste à savoir comment les sénateurs vont réagir dans quelques heures à ce coup de force du gouvernement, tout particulièrement concernant l’article 30 quater relatif à l’assurance responsabilité civile professionnelle dont les dispositions prévues pour tous les médecins libéraux ne sont plus réservées qu’aux anesthésistes, aux chirurgiens et aux gynécologues-obstétriciens…
La ministre de la santé a aussi fait voter un nouvel amendement visant à ce que le surcoût induit par les dépenses exceptionnelles liées à la pandémie grippale ne soit pas pris en compte dans l’ONDAM.

 

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