Gestation pour autrui : entrain de sénateurs

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Procréation et gestation pour autruiCe n’est pas une, mais deux propositions de loi « tendant à autoriser et encadrer la gestation pour autrui » qui ont été enregistrées à la présidence du Sénat le 27 janvier 2010. L’une des propositions émane de sénateurs appartenant au groupe socialiste, l’autre de sénateurs du groupe Union pour un mouvement populaire, mais en fait les deux textes sont strictement identiques ! Au-delà du ridicule d’une telle situation, voilà au moins qui pourrait simplifier les débats…

Reconnue comme une pratique séculaire pour pallier l’infertilité d’une femme et longtemps tolérée tant qu’elle restait discrète, la gestation pour autrui a vu sa pratique évoluée avec les progrès de la génétique pour en arriver à la procréation pour autrui. La mère génétique n’est plus obligatoirement la mère utérine et la paternité n’est plus simplement déclarative, mais peut être connue avec certitude grâce à de simples examens de laboratoire. Ces changements conduisent petit à petit à révolutionner le droit de la filiation dans les États occidentaux.

« La gestation et la procréation pour autrui sont des pratiques strictement prohibées en France — la loi de bioéthique de 1994 les a rendues passibles de sanctions civiles et pénales —, au nom des principes de l’indisponibilité du corps humain et de l’état des personnes, de la volonté d’empêcher l’exploitation des femmes démunies et de l’incertitude qui pèse sur leurs conséquences sanitaires et psychologiques pour l’enfant à naître et la femme qui l’a porté. » C’est pour ces raisons que le tourisme médical dans ces domaines s’était développé au fil du temps, mais la Cour de cassation est venue mettre un frein à la reconnaissance par l’état civil des enfants nés dans des pays où la gestation et la procréation pour autrui sont légales ou tolérées. « L’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 25 octobre 2007 qui avait validé la transcription sur les registres de l’état civil français des actes de naissance américains de jumelles nées en Californie en application d’une convention de gestation pour autrui a été récemment cassé par un arrêt de la Cour de cassation du 17 décembre 2008 [pourvoi n° 07-20468, NDLR]. Cet arrêt énonce que le ministère public justifiait d’un intérêt à agir en nullité des transcriptions des actes de naissance californiens qui ne pouvaient résulter que d’une convention portant sur la gestation pour autrui. » Le sort des enfants nés en violation de la loi française étant particulièrement préoccupant, les sénateurs ont décidé d’agir sans attendre la réforme de la loi de bioéthique prévue en 2010.

En plus d’offrir une définition claire de la gestation pour autrui (fait, pour une femme, de porter en elle un ou plusieurs enfants conçus dans le cadre d’une assistance médicale à la procréation en vue de les remettre, à leur naissance, à un couple demandeur), le texte prévoit d’autoriser, sous des conditions strictes énoncées dans la proposition de loi, la gestation pour autrui.

Mais comment financer les éventuelles conséquences pécuniaires résultant pour l’État de l’application de cette loi ? Grâce à des dons en nature ? Pas du tout… Une nouvelle taxe est tout simplement prévue.

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Commentaires (1)

  • Clara

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    On se souvient avec émotion que c’était le groupe de travail du Sénat qui avait le premier osé écouter des couples infertiles et se rendre à l’étranger pour voir ce qu’il en était sur le terrain dans un pays qui légalise et encadre la gestation pour autrui. Et en juin 2008, ils étaient 13 sur 16 à approuver un rapport qui recommandait de légaliser la gestation pour autrui dans un cadre altruiste strict pour d’une part éviter l’insécurité juridique de la filiation des enfants, et d’autre part éviter la marchandisation.

    Depuis cette date, alors que l’opinion publique et les professionnels de la santé exprimaient le même sentiment, certains agitaient des peurs ou mettaient en avant le cas anecdotique de l’Inde dont il faut rappeler que la pratique n’y est encadrée par aucun dispositif législatif. Le point culminant a été atteint par la mission Léonetti qui a dans son rapport de plus d’un millier de pages n’a pas consacré une seule ligne aux dispositifs législatifs mis en place par les nombreux pays qui ont légalisés la gestation pour autrui. A la place, une succession de déclarations fantaisistes se contredisant mutuellement mais dont le point commun est de critiquer violemment la GPA. Sans aucun élément factuel bien sûr.

    C’est pourquoi cette proposition de loi est une nouvelle très positive pour qui suit ce sujet. Nos sénateurs ne se sont pas laissés agités par ce tumulte superficiel et ont continué de travailler à approfondir et à débattre. Les spécialistes du sujet auront croisé ces sénatrices et sénateurs dans de nombreux colloques ou débats. Ce travail de fond se ressent à la lecture du texte de loi : limpide, cohérent et sans faille, il s’intègre parfaitement dans le dispositif légal actuel de l’AMP et de la filiation.

    Le texte est à la hauteur, ceux qui l’ont signé le sont. Les débats peuvent commencer. Espérons qu’ils seront eux aussi à la hauteur.

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