Les dentistes et les médecins peuvent diffuser de la musique gratuitement dans leur salle d’attente

Écrit par Jean-Pierre Sellem le . Dans la rubrique Jurisprudences

Alors que, pendant plusieurs années, le Conseil de l’ordre des chirurgiens-dentistes conseillait à ses membres de ne pas payer le forfait réclamé par la Sacem (Société des auteurs compositeurs et éditeurs de musique) pour diffuser de la musique dans leur salle d’attente, au motif que cet espace est un lieu privé, il a changé d’avis en 2011. D’autres organisations professionnelles, comme le syndicat MG France, invitent elles aussi leurs adhérents à contracter avec la Sacem.

Salle d'attente zenL’argument juridique n’était pas le bon, mais ce sont bien les chirurgiens-dentistes qui étaient dans le vrai avant 2011 : un professionnel libéral n’a pas à rémunérer les producteurs de phonogrammes pour la musique qu’il diffuse dans sa salle d’attente, sachant que par phonogramme on entend tout enregistrement sonore. Pour preuve, l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne en date du 15 mars 2012 (affaire C‑135/10) qui a reconnu que « la notion de “communication au public”, au sens de l’article 8, paragraphe 2, de la directive 92/100, doit être interprétée en ce sens qu’elle ne couvre pas la diffusion gratuite de phonogrammes dans un cabinet dentaire, […] dans le cadre de l’exercice d’une profession libérale, au bénéfice de la clientèle qui en jouit indépendamment de sa volonté. Partant, une telle diffusion ne donne pas droit à la perception d’une rémunération en faveur des producteurs de phonogrammes. »

Pour la Cour, les patients ne choisissent pas les locaux où exerce un professionnel libéral (chirurgien-dentiste, médecin, sage-femme, infirmier, kinésithérapeute, etc.) pour la musique qu’ils diffusent. « C’est fortuitement et indépendamment de leurs souhaits qu’ils bénéficient d’un accès à certains phonogrammes, en fonction du moment de leur arrivée au cabinet et de la durée de leur attente ainsi que de la nature du traitement qui leur est prodigué ». Ils ne sont jamais très nombreux à écouter la musique en même temps et ne restent pas suffisamment longtemps pour profiter, tous autant qu’ils sont, des mêmes rengaines, « notamment pour les phonogrammes radiodiffusés ».
Le professionnel, quant à lui, ne diffuse pas de la musique pour en tirer un bénéfice. Le fond sonore, même s’il est choisi par le professionnel, n’a pas d’incidence sur la fréquentation de son cabinet et, par voie de conséquence, sur ses recettes.
Dans ces conditions, la Cour estime qu’il n’y a pas, au sens juridique du terme, « communication au public » des œuvres diffusées et qu’une rémunération en faveur des producteurs de phonogrammes n’est donc pas due à ce titre.

Attention, cet arrêt ne dispense pas le professionnel libéral de payer cette rémunération à la Sacem et de verser des droits à la Société civile des producteurs associés (SCPA) en fonction du support utilisé, pour les morceaux qu’il diffuse comme musique d’attente sur sa ligne téléphonique. Si le paiement à la Sacem fait l’objet d’un contrat à reconduction tacite, il convient de s’assurer que celui-ci ne concerne plus que cette musique d’attente.

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Commentaires (1)

  • Mathieu Jean Michel

    |

    Pourtant la sacem continue de réclamer les redevances et envoie via « intractiv » des mises en demeure

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