Certificat de résidence aux Pays-Bas et coffee-shop

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Jurisprudences

L'empreinte du cannabisUne décision du maire de la commune de Maastricht réservant l’accent des coffee-shops, lieux où la vente et la consommation de cannabis sont tolérées aux Pays-Bas, aux seuls résidants du pays avait mis le feu aux poudres. Arguant de la liberté de circulation au sein de l’Union européenne et peut-être plus soucieux de la bonne santé de ses affaires que de celle de ses clients, l’exploitant du coffee-shop l’Easy Going avait porté l’affaire devant la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) après que son établissement eût été fermé pour avoir enfreint les dispositions en vigueur. L’avocat général avait réduit en cendres les arguments du plaignant en juillet 2010, mais il gardait encore espoir, la Cour n’étant pas tenue de suivre l’avis de l’avocat général.

Cette fois, la messe est dite et ce n’est qu’à la fumée des encensoirs qu’auront droit les touristes visitant Maastricht. Dans un arrêt du 16 décembre 2010 (affaire C‑137/09), la 2e chambre de la CJUE a estimé que l’interdiction d’admettre des non-résidents dans les « coffee-shops » néerlandais est conforme au droit de l’Union. « Cette restriction est justifiée par l’objectif visant à lutter contre le tourisme de la drogue et les nuisances qu’il draine, objectif se rattachant tant au maintien de l’ordre public qu’à la protection de la santé des citoyens, et ceci tant au niveau des États membres qu’à celui de l’Union. »
Le souci de réduire le tourisme de la drogue, voire de l’empêcher, qu’a eu le conseil communal de Maastricht en introduisant un critère de résidence au règlement général de police de la commune dans le but d’interdit à tout tenancier d’un coffee-shop d’admettre dans son établissement des personnes n’ayant pas leur résidence effective aux Pays-Bas est donc légitime.

Contrairement à une idée reçue, conformément à une loi de 1976 sur les stupéfiants (Opiumwet 1976), la possession, le commerce, la culture, le transport, la fabrication, l’importation et l’exportation de stupéfiants, y compris du cannabis et de ses dérivés, sont interdits aux Pays-Bas. Ce n’est qu’en raison d’une politique de tolérance que les coffee-shops peuvent néanmoins vendre de la marijuana.

« La Cour rappelle que la nocivité des stupéfiants, y compris ceux à base de chanvre, tels que le cannabis, est généralement reconnue et que leur commercialisation est interdite dans tous les États membres, exception faite d’un commerce strictement contrôlé en vue d’une utilisation à des fins médicales et scientifiques. Cette situation juridique est conforme à différents instruments internationaux, notamment à plusieurs conventions des Nations unies, auxquels les États membres ont coopéré ou adhéré, ainsi qu’au droit de l’Union. L’introduction de stupéfiants dans le circuit économique et commercial de l’Union étant interdite, un tenancier d’un coffee-shop ne saurait se prévaloir des libertés de circulation ou du principe de non-discrimination, en ce qui concerne l’activité consistant en la commercialisation du cannabis », selon le communiqué de presse qui a accompagné cet arrêt.

Une décision courageuse, à la fois de la part du maire de Maastricht et de la CJUE, quand on sait que les quatorze coffee-shops de cette commune attireraient environ 10 000 visiteurs par jour, soit un peu plus de 3,9 millions par an. Sachant que sur l’ensemble de ces visiteurs 70 % ne résideraient pas aux Pays-Bas, on imagine l’impact de cette décision sur le tourisme local.

Dans le domaine de la santé publique, le juridique semble avoir plus de bon sens que le politique. Dans le même temps, le commerce d’une autre drogue dont la vente est cette fois totalement officielle devrait se libéraliser sous la pression de la Commission européenne. Les sénateurs et le gouvernement ont en effet décidé de supprimer les restrictions à l’achat de tabac à l’étranger, dans le cadre de l’examen du collectif budgétaire pour 2010, selon une information de l’AFP, reprise par le journal Le Monde. Les buralistes, soutenus par les députés, n’ont cette fois pas eu gain de cause. D’autres compensations devraient très vite leur être accordées, l’échéance de 2012 étant proche. La santé publique est une nouvelle fois perdante, car dans le monde politique personne ne semble penser que la protection de la santé des citoyens puisse passer avant la libre circulation des marchandises et le commerce…

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