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Les revues médicales financées par la publicité incitent à prescrire

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Des médicaments en orUne équipe de chercheurs allemands et canadiens a voulu savoir si les sources de financement d’une revue médicale pouvaient avoir une influence sur sa ligne éditoriale et sur les recommandations que l’on pouvait être amené à trouver dans les articles qu’elle publie. Intéressante question quand on sait que nombreuses sont les revues “gratuites”, financées par la publicité et adressées directement au cabinet de nombreux médecins, qui revendiquent jouer un rôle prépondérant dans la formation médicale continue (FMC) des praticiens. Un rôle que personne ne conteste, les médecins reconnaissant en être friands et avoir habituellement recours à cette littérature, plutôt qu’à des revues tirant leurs revenus de leurs seuls abonnements, comme source d’informations pour actualiser leurs connaissances professionnelles.

Annette Becker, de l’université de Marburg en Allemagne, et ses collaborateurs ont donc décidé d’étudier les recommandations de prescription faites au sein des articles publiés en 2007 par onze revues allemandes dédiées à la FMC. Seuls des périodiques parmi les plus lus par des médecins généralistes ont été sélectionnés, en prenant soin néanmoins de prendre en compte des revues “gratuites” totalement financées par la publicité, des revues totalement financées par les abonnements et d’autres ayant un financement mixte.
Neuf médicaments ou classes de médicaments condidérés comme innovants et donc largement présents dans les encarts publicitaires ont été sélectionnés comme échantillon à étudier. Ces produits ont aussi été choisis parce qu’ils étaient encore protégés par des brevets, qu’ils étaient plus chers que d’autres médicaments utilisés pour traiter les mêmes problèmes et parce qu’il existait une certaine controverse soit leur efficacité soit sur l’éventail des indications pour lesquelles ils devaient être prescrits.
Les chercheurs, une fois cette liste établie, ont analysé les liens entre les publicités présentes dans les revues et les recommandations formulées dans le contenu rédactionnel de tous les articles faisant référence à l’un des produits sélectionnés. Chaque article a été évalué à l’aide d’une échelle allant de -2 à +2 : un papier noté +2 conseillait clairement de prescrire le produit ; au contraire, un article évalué à -2 déconseillait l’utilisation du médicament ou de la classe médicamenteuse. Un article neutre quant à savoir s’il fallait ou non prescrire le produit se voyait attribuer la note de 0.

Les résultats de ce travail, publiés dans le Canadian Medical Association Journal (CMAJ) du 28 février 2011, sont éloquents. Les auteurs de cette étude estiment que les recommandations visant à l’utilisation ou non d’un médicament dépendent de la source de financement des revues. Les journaux gratuits recommandent quasi systématiquement l’utilisation des médicaments sélectionnés alors que les revues financées par leurs abonnements sont enclines à déconseiller leur usage. Pour Annette Becker, le biais lié au mode de financement d’une revue devrait être pris en compte par le lecteur. Les revues gratuites vont à l’encontre des efforts faits pour apprendre aux médecins à avoir une lecture critique et à privilégier la médecine basée sur les preuves. L’industrie, par l’intermédiaire de ces journaux, profite du peu de temps qu’ont à consacrer les généralistes à leur FMC, de la complexité sans cesse grandissante de la médecine et du flot incessant d’informations auquel les praticiens doivent faire face pour encourager ces médecins à prescrire.

Pas de dons ou de legs pour les soignants

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Jurisprudences

Prêt à signer son testamentQue l’on soit infirmier, médecin, dentiste, masseur-kinésithérapeute ou orthophoniste, il n’est pas question d’hériter ou de recevoir un don d’une personne à qui l’on a prodigué des soins pendant la maladie dont elle est morte, que ces soins aient eu pour but de la guérir ou de traiter une pathologie secondaire à celle qui l’a emportée.

Il s’agit là de l’application de l’article 909 du code civil qui concerne les membres des professions médicales (médecins, chirurgiens-dentistes, sages-femmes) et de la pharmacie (pharmaciens, préparateurs en pharmacie), ainsi que les auxiliaires médicaux (infirmiers, masseurs-kinésithérapeutes, pédicures-podologues, ergothérapeutes, psychomotriciens, orthophonistes, orthoptistes, manipulateurs d’électroradiologie médicale, techniciens de laboratoire médical, audioprothésistes, opticiens, diététiciens, prothésistes et orthésistes pour l’appareillage des personnes handicapées). Pour les médecins, le code civil prévoit de telles mesures depuis le début du XIXe siècle, reprenant en cela ce qui était déjà communément admis sous l’Ancien Régime, comme l’expliquent les commentaires de l’article 52 du code de déontologie médicale, article inclus au code de la santé publique (nº R 4127-52) qui reprend les mesures prévues par le code civil.

Article 909 du code civil

Les membres des professions médicales et de la pharmacie, ainsi que les auxiliaires médicaux qui ont prodigué des soins à une personne pendant la maladie dont elle meurt ne peuvent profiter des dispositions entre vifs ou testamentaires qu’elle aurait faites en leur faveur pendant le cours de celle-ci.

Les mandataires judiciaires à la protection des majeurs et les personnes morales au nom desquelles ils exercent leurs fonctions ne peuvent pareillement profiter des dispositions entre vifs ou testamentaires que les personnes dont ils assurent la protection auraient faites en leur faveur quelle que soit la date de la libéralité.

Sont exceptées :

1° Les dispositions rémunératoires faites à titre particulier, eu égard aux facultés du disposant et aux services rendus ;

2° Les dispositions universelles, dans le cas de parenté jusqu’au quatrième degré inclusivement, pourvu toutefois que le décédé n’ait pas d’héritiers en ligne directe ; à moins que celui au profit de qui la disposition a été faite ne soit lui-même du nombre de ces héritiers.

Les mêmes règles seront observées à l’égard du ministre du culte.

C’est sur cet article que repose la décision prise par la Cour de cassation, le 4 novembre 2010, alors qu’une psychiatre-psychanalyste avait été désignée comme bénéficiaire du contrat d’assurance-vie de l’une de ses patientes décédée d’un mésothéliome (pourvoi nº 07-21303).

Pour la Cour de cassation, « ayant relevé que la défunte était décédée des suites d’un mésothéliome du poumon révélé en 1995 et constaté que la psychiatre-psychanalyste avait été consultée à plusieurs reprises par la défunte de 1995 à 1997 et qu’ensuite, elle lui avait donné de nombreuses consultations gratuites jusqu’au mois de juillet 1999, la cour d’appel, qui retient que, si, en sa qualité de psychiatre-psychanalyste, cette dernière n’avait pu traiter la défunte pour le cancer dont elle était atteinte, elle avait apporté à sa patiente un soutien accessoire au traitement purement médical mais associé à celui-ci, lui prodiguant, parallèlement au traitement d’oncologie, des soins réguliers et durables afférents à la pathologie secondaire dont elle était affectée en raison même de la première maladie dont elle devait décéder et dont la seconde était la conséquence, en déduit exactement que la psychiatre-psychanalyste avait soigné la défunte, pendant sa dernière maladie, au sens de l’article 909 du code civil, de sorte qu’elle était frappée d’une incapacité de recevoir à titre gratuit ».

Suite à cette décision, la psychiatre-psychanalyste ne peut donc pas garder le capital qui lui a été versé par l’assureur et, ayant aussi été couchée sur le testament de la défunte, mais ayant renoncé à en être bénéficiaire, elle n’aura au final pas un sou. L’affaire ne s’arrête pas là pour autant, car la patiente avait aussi désigné « à défaut » le concubin du médecin. Si la Cour de cassation a estimé que la psychiatre ne pouvait recevoir l’assurance-vie, elle précise que rien ne permet en l’état de dire si la personne décédée n’aurait pas désigné directement le concubin si elle avait eu conscience de ne pouvoir choisir le praticien et renvoie l’affaire à la cour d’appel pour être fait droit. Le concubinage peut avoir du bon…

Pas de faute pour les fabricants de vaccins aux États-Unis

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

L'injection est prêteLes fabricants de vaccins pour les enfants ne peuvent être poursuivis pour des défauts de conception de leurs produits aux États-Unis, ainsi en ont décidé les membres de la Cour suprême de ce pays par 6 voix contre 2.

Cette décision fait suite à la plainte des parents d’une enfant ayant souffert de convulsions après avoir reçu une injection de vaccin contre la diphtérie, la coqueluche et le tétanos (affaire Bruesewitz v Wyeth Inc). Pour la Cour, une loi adoptée par le Congrès des États-Unis en 1986 exclut toutes poursuites contre les fabricants de vaccins dans un tel cas : ce texte prévoit en effet qu’aucune faute ne pourra être reprochée à un laboratoire si un enfant est victime des effets secondaires d’un vaccin.
La loi, appelée The National Childhood Vaccine Injury Act, « écarte toutes réclamations contre les fabricants pour des défauts de conception de vaccins par des plaignants qui demandent une indemnisation pour des blessures ou des décès causés par les effets secondaires du vaccin ».

Russell et Robalee Bruesewitz voulaient voir reconnue la responsabilité du laboratoire Wyeth après que leur fille de 6 mois ait présenté de nombreuses crises convulsives après avoir été vaccinée en 1992. Cette injection n’a rien de particulier et est pratiquée de façon habituelle chez les enfants de cet âge. Malheureusement, chez cette enfant, les médecins ont diagnostiqué en 2003 un trouble épileptique résiduel et une encéphalopathie.
La loi exclut les plaintes pour les effets secondaires “inévitables”, mais pour les avocats de la famille, au moment où a été réalisée l’injection, ce produit était dépassé, mal conçu et ses effets secondaires évitables.
Pour le juge Antonin Scalia, membre de la Cour suprême qui a voté pour cette décision, « à condition que la fabrication soit correcte et qu’il n’y ait pas de mise en garde, les autres effets secondaires, y compris ceux résultant de défauts de conception, sont réputés avoir été inévitables ».

Comment expliquer qu’un tel texte ait pu être adopté ? Tout simplement parce qu’il a été voté à un moment où les États-Unis étaient confrontés à une pénurie de vaccins pour les enfants après que les fabricants aient décidé de se retirer de ce marché face à l’augmentation du nombre de plaintes auxquels ils avaient à faire face justement pour le vaccin tout-en-un diphtérie-coqueluche-tétanos. L’adoption de cette loi s’est accompagnée de la création d’un tribunal dédié à ces produits, appelé Vaccine court et financé par les fabricants par le biais d’une taxe sur chaque dose, qui doit déterminer si les dommages d’un plaignant sont dus à un vaccin ou non. Dans le cas d’Hannah Bruesewitz, ce tribunal a estimé que le produit n’était pas en cause.

Le jugement de la Cour suprême a été salué par l’Académie américaine de pédiatrie, qui s’était jointe à 21 autres associations du monde de la santé, y compris l’American Medical Association, pour déposer un amicus curiae, contribution versée spontanément au débat, exhortant le tribunal à rendre une décision qui sauvegarde l’approvisionnement du pays en vaccins.

« Les vaccins destinés aux enfants font partie des plus grands progrès de la médecine du siècle dernier », a déclaré la présidente de l’Académie de pédiatrie, Marion Burton. « La décision de la Cour suprême protège les enfants par le renforcement de notre système national de vaccination et veille à ce que les vaccins continuent à empêcher la propagation de maladies infectieuses dans ce pays. »

Pour le juge Scalia, les fabricants sont déjà obligés par la loi de financer un programme informel et efficace d’indemnisation des victimes des vaccins. « En échange, il faut leur éviter de coûteux litiges et de se voir de temps en temps condamner de façon disproportionnée par un jury ».

Le laboratoire Wyeth a fait valoir pour sa part que si la décision lui était défavorable, cela pourrait ouvrir la voie à une déferlante de poursuites alléguant un lien de causalité entre les vaccins et l’autisme.

Sonia Sotomayor et Ruth Bader Ginsberg, juges à la Cour suprême elles aussi, ont quant à elles voté contre cette décision. Pour Sonia Sotomayor, ce jugement « laisse un vide réglementaire dans lequel personne ne veille à ce que les fabricants de vaccins tiennent compte de manière adéquate des progrès scientifiques et technologiques lors de la conception ou de la distribution de leurs produits. »

Cette affaire montre bien à quel point il est difficile pour les autorités d’un pays, fût-il aussi puissant que les États-Unis, de ne pas plier face à l’industrie pharmaceutique qui semble ne pas hésiter à arrêter la production de produits indispensables à la santé publique si elle se sent menacée. Un procédé auquel les assureurs ont eux aussi eu recours quand leurs intérêts ont été attaqués. Volià qui pourrait expliquer, sans le justifier, que de nombreuses victimes soient encore sacrifiées pour ne pas nuire à des intérêts qui les dépassent…

[Source : BMJ 2011;342:d1292]

Des assises du médicament en 2011

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Une gélule rouge et blanche parmi d'autresLa Mission Mediator et pharmacovigilance de l’Assemblée nationale a entendu Xavier Bertrand, ministre de la santé, le 15 février 2011. C’est ce dernier qui a souhaité être entendu rapidement dans cette affaire dans laquelle il a reconnu, au même titre que de nombreux anciens ministres de la santé, avoir sa part de responsabilité.

En préambule Xavier Bertrand a rappelé que la mission de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) n’avait pas pris fin avec la remise de son premier rapport, mais qu’elle se poursuivait afin de faire le point et des propositions concernant le fonctionnement de l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps). Il a aussi insisté sur le fait que deux missions parlementaires étaient actuellement au travail suite à l’affaire du Mediator et que le travail de la justice suivait son cours.

Pour le ministre de la santé, le système de pharmacovigilance est à reconstruire. Avant l’affaire du sang contaminé toutes les informations sur un problème grave de pharmaco ou de matériovigilance remontaient au ministre ; suite à ce drame et à la mise en place de l’Afssaps, c’est aux experts que l’on a pris soin de déléguer les décisions. Pour Xavier Bertrand, il faut que la refonte du système actuel aboutisse à nouveau à une responsabilité politique, au gouvernement, mais aussi peut-être aux parlementaires. La nomination du nouveau directeur général de l’Afssaps par le ministre, en concertation avec l’Assemblée nationale et le Sénat alors que ce n’est normalement pas prévu par la loi, dans les jours qui viennent va d’ailleurs dans ce sens. C’est le nom de Dominique Maraninchi, professeur de cancérologie à la faculté de médecine de Marseille et actuel président de l’Institut national du cancer (INCa), qui a été soumis aux parlementaires.

Comme il faut des décisions radicales et rapides, des assises du médicament seront organisées cette année, si possible avant la fin du premier semestre, mais après la remise des conclusions des deux missions parlementaires qui se penchent actuellement sur la question. La loi pourrait ainsi être modifiée avant la fin de l’année 2011.

En plus de celles relatives au fonctionnement de l’Afssaps, des questions doivent se poser sur la procédure d’autorisation de mise sur le marché (AMM) des médicaments et de leur éventuel retrait, sur la remontée des alertes et leurs suites. Ce dernier point est important, car dans le cas du Mediator dix-sept alertes sont remontées avant que l’une d’elles soit prise en compte. Ce système pourrait notamment s’accompagner d’une justification du non-suivi ou d’une déclassification d’une alerte.
La prévention des conflits d’intérêts doit aussi être un sujet sur lequel des décisions devront être prises afin d’aboutir à une transparence “totale”. La solution la plus simple permettant de régler cette question serait, selon le ministre, de transposer « directement et complètement » le Sunshine Act, c’est-à-dire la loi américaine en matière de liens d’intérêts qui s’applique dans le secteur de la santé. Dans ce pays, il est obligatoire de déclarer ces liens d’intérêts à partir du moment où ils sont supérieurs à dix dollars et surtout il existe des sanctions pour ceux qui ne déclarent pas ces choses, ce qui n’est pas le cas actuellement en France.
Xavier Bertrand a précisé qu’il avait lui-même, alors qu’il n’y est pas obligé, rempli une déclaration de liens d’intérêts et qu’il a demandé à son épouse de faire de même. Tous ses collaborateurs ont dû s’exécuter et il a eu à faire des choix en raison des réponses des uns et des autres. Le ministre estime que les personnels travaillant au sein des cabinets ministériels ne devraient avoir aucun lien d’intérêts avec l’industrie pendant qu’ils sont en fonction. Depuis 1995, lorsqu’ils quittent leur poste, la Commission de déontologie, ayant pour rôle de contrôler le départ des agents publics et de certains agents de droit privé envisageant d’exercer une activité dans le secteur privé et dans le secteur public concurrentiel, doit intervenir pour donner son avis et pourrait voir ses compétences renforcées. Reste à savoir si ces mesures seront suffisantes au regard de ce qui s’est passé en début d’année pour le directeur général de l’Agence européenne du médicament (European Medicines Agency ou EMA), comme l’a rappelé Gérard Bapt, président de la mission parlementaire.

 

Risque aggravé de santé et assurance-maladie aux États-Unis

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Affiche de Barack ObamaLa politique de santé de Barack Obama a fait de l’assurance-maladie des personnes présentant un risque aggravé l’une de ses priorités. Lors de sa campagne électorale, le président Obama avait insisté sur le fait qu’il était particulièrement difficile de trouver une couverture santé complète à un tarif raisonnable lorsque l’on était atteint d’un cancer, mais aussi lorsque l’on souffrait de diabète, d’une maladie cardiaque ou de tout autre risque aggravé de santé. Pas question ici de garantie pour un prêt immobilier ou pour un bien, quel qu’il soit, mais d’une simple assurance-maladie, une situation qui surprend souvent de ce côté-ci de l’Atlantique où la Sécurité sociale est considérée comme un droit ou plutôt un dû.

Les Américains étant plus attachés à leurs libertés, ils ont une conception profondément différente de la notion de couverture sociale. C’est ce qui explique que la tâche de Barack Obama n’a pas été simple quand il s’est agi de faire voter des réformes visant, entre autres, à contraindre les assureurs santé à offrir des contrats abordables aux personnes se sachant malades. Bien qu’élu en 2008, il a fallu attendre 2010 pour que la volonté du Président se concrétise et que ce dispositif, appelé Pre-existing Condition Insurance Plan (PCIP), soit enfin proposé aux citoyens.
Malgré l’avancée que semble représenter cette offre aux yeux des habitants du Vieux Continent, l’administration fédérale n’a de cesse de devoir convaincre l’opinion publique de chacun des 50 États américains. C’est pour cette raison que le ministère américain de la santé et des services sociaux (U.S. Department of Health and Human Services ou HHS) met régulièrement en ligne de nouveaux documents à l’attention des médias, des associations de consommateurs, des États et des fournisseurs de soins de santé afin qu’ils puissent sensibiliser le plus grand nombre de personnes au dispositif mis en place. Le 10 février 2011, un communiqué et plusieurs documents ont ainsi été rendus accessibles au public afin que tout le monde puisse continuer à prêcher la bonne parole.

Pour Steve Larsen, directeur du Centre pour l’information des consommateurs et la surveillance de l’assurance (Center for Consumer Information and Insurance Oversight ou CCIIO) qui gère le dispositif, « ce programme a aidé des milliers de personnes qui avaient désespérément besoin d’une couverture [maladie, NDLR] ». Comme cela a été le cas dans les années 90 avec l’assurance-maladie pour les enfants (Children’s Health Insurance ou CHIP), un dispositif destiné aux enfants et aux adolescents mis en place par l’administration Clinton, on assiste actuellement à une montée en puissance du PCIP. « Nous travaillons chaque jour à faire passer le mot au sujet de ce programme et à trouver des gens qui ont été abandonnés par le secteur de l’assurance santé afin de leur redonner la couverture [maladie, NDLR] dont ils ont été privés depuis si longtemps. »

Ce qui est intéressant dans le communiqué officiel, c’est qu’il y est clairement fait mention du côté “temporaire” de ce dispositif, précaution oratoire destinée, là encore, à rassurer une opinion publique qui n’aime pas voir l’État fédéral venir intervenir dans ce qu’elle estime appartenir à la sphère privée et au libre choix de chacun, très loin de la notion d’assistanat et de solidarité, tout sauf temporaire, présente en France. Il est même question d’outils de propagande destinés à convaincre le plus grand nombre.
« Ce programme temporaire couvre un large éventail de prestations de santé et est conçu comme un pont pour les personnes atteintes de maladies pré-existantes qui ne peuvent pas obtenir une couverture d’assurance-maladie dans le marché actuel des assurances privées. En 2014, tous les Américains — quel que soit leur état de santé — auront accès à une couverture abordable, soit par leur employeur, soit par l’intermédiaire d’un nouveau marché concurrentiel de l’assurance et il sera interdit de refuser une couverture à quiconque en fonction de son état de santé.
Le ministère travaille activement avec les États, les associations de consommateurs, les associations de patients souffrant de maladies chroniques, les fournisseurs de soins de santé, les travailleurs sociaux, d’autres organismes fédéraux, et le secteur de l’assurance pour promouvoir le dispositif, y compris à l’aide de réunions avec les représentants de l’État, les groupes de consommateurs et d’autres. De nouvelles ressources sont mises à la disposition des communautés pour aider à informer les Américains admissibles au dispositif, comme une bannière à inclure sur leur site Web pointant vers le site PCIP.gov, ainsi qu’une nouvelle lettre d’information et un site Web rédigé dans un langage que nos partenaires peuvent utiliser dans leurs efforts de sensibilisation. »

Des efforts de sensibilisation qui ne se cantonnent pas qu’au Web puisqu’en partenariat avec les services de l’assurance-maladie américaine (US Social Security Administration ou SSA), le CCIIO prévoit des spots télévisés. Il est aussi question de faire figurer des informations concernant ce dispositif sur plus de 3 millions de formulaires administratifs.
Autre facteur d’espoir pour les autorités fédérales, même si des grands groupes d’assurance privés refusent encore d’assurer certaines personnes, ils se sont portés volontaires pour ajouter à leur lettre de refus des informations sur le dispositif mis en place par le gouvernement Obama.

On comprend mieux les efforts de communication réalisés quand on s’intéresse aux chiffres. Il n’y a pour le moment que 12 000 Américains à avoir souhaité bénéficier de ce dispositif et ceci bien que cet effectif est augmenté de 50 % ces trois derniers mois dans un pays qui compte plus de 308 millions d’habitants et où 47 millions de personnes n’auraient pas d’assurance-maladie.

En Irlande, la crise touche aussi les dons d’organes

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Coupe de reinEn 2010, l’Irlande n’a pas seulement été touchée par une crise économique sans précédent l’ayant obligée à recevoir le soutien de l’Union européenne, elle a aussi connu une crise du don d’organes. Le nombre de donneurs d’organes a chuté de façon spectaculaire. Certains grands hôpitaux universitaires n’ont pas recruté plus d’un ou deux donneurs sur douze mois, alors qu’ils fournissent le service national des greffes. Pour l’Irish Kidney Association, l’association irlandaise du rein, il est préoccupant de voir que personne n’est là pour approcher les familles des donneurs potentiels en raison d’une pénurie de personnel et de la charge de travail dans les services de soins intensifs.

Le National Organ Procurement Service, l’organisme chargé de l’approvisionnement en organes, a estimé qu’en 2010 seules 58 personnes décédées avaient été prélevées pour tous les types de greffe en Irlande, soit un tiers de moins qu’en 2009 où 90 donneurs ont été dénombrés. C’est la plus forte baisse enregistrée dans les annales de ce service et elle a entraîné un effondrement du nombre de transplantations, 92 de moins que l’année précédente.

La mauvaise performance de certains hôpitaux universitaires est un motif de préoccupation. L’hôpital universitaire de Cork, l’un des deux centres de neurochirurgie en Irlande, où les patients avec les blessures à la tête les plus graves sont traités, une seule personne a donné ses organes, l’an dernier. En revanche, l’hôpital Beaumont de Dublin a reçu le consentement de 14 familles de donneurs, un établissement qui fait office de bon élève dans la capitale irlandaise quand on compare ses résultats à ceux d’autres grands hôpitaux de la ville. L’hôpital universitaire St Vincent a, par exemple, une moyenne de seulement 1,5 donneur par an sur plus de 12 ans. Il faut dire que l’hôpital Beaumont est le siège du National Organ Procurement Service

Commentant ces derniers chiffres, Mark Murphy, directeur général de l’Association irlandaise du rein, a déclaré que les hôpitaux semblent avoir besoin d’aide pour inverser la tendance. « Il y a besoin d’au moins 12 coordonnateurs supplémentaires au sein des équipes de soins intensifs à travers le pays », selon lui.
Il y a eu 51 greffes de rein en moins en 2009, soit 50 personnes de plus en dialyse en 2010, ce qui représente un coût non négligeable pour un système de santé comme celui de l’Irlande.

Pourtant, tout a été mis en place aux pays des Celtes pour favoriser le don d’organes et, malgré ces chiffres, l’Irlande a un des taux les plus élevés de dons dans le monde grâce à une législation adaptée. Mais elle ne doit pas se reposer sur ses lauriers, si l’on en croit les propos de M. Murphy. Pour son association, la politique de transplantation en Irlande doit être alignée sur celle des autres pays européens en élargissant les sources potentielles d’organes en incluant les patients décédés d’un problème cardiaque ou ayant une atteinte du tronc cérébral. On estime qu’une telle mesure serait susceptible d’augmenter immédiatement le nombre de donneurs décédés de 150 par an.

En 2009, 261 greffes d’organes ont eu lieu en République d’Irlande. En France, ce chiffre était de 4 580 sur la même période.
Dans l’Hexagone, « un donneur permet de greffer 4 personnes, en moyenne. 32 % des prélèvements possibles sont refusés. Dans près de 4 cas sur 10, c’est parce que le défunt a déclaré son opposition au don d’organes durant sa vie. Dans les 6 autres cas, l’opposition vient de la famille. Le manque d’informations sur la volonté du défunt est l’une des principales causes de refus de la famille », selon l’Agence de la biomédecine.

[Sources : BMJ 2011;342:d982 et National Organ Procurement Service]

Médecine & Droit — Numéro 106

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Médecine & Droit

Sommaire du numéro de janvier — février 2011

CouvertureElsevier — Masson

Actes du colloque « Avancées biomédicales et protection des libertés »
Grand’Chambre de la Cour de cassation
4 juin 2010, Paris

Introductions
Introduction au colloque « Avancées biomédicales et protection des libertés »
Gérard Pluyette

Introduction au colloque « Avancées biomédicales et protection des libertés »
Hélène Gaumont-Prat

Colloque « Avancées biomédicales et protection des libertés ». Allocution de bienvenue
Philippe Biclet

Première table ronde — Évolution de la médecine de la reproduction
L’évolution de la médecine de la reproduction. Introduction
Hélène Gaumont-Prat

Quels principes pour un droit de la procréation assistée ?
Frédérique Dreifuss-Netter

La vie après la mort. De l’incertitude juridique à l’interrogation éthique
Claude Sureau

La levée de l’anonymat, une question complexe
Brigitte Feuillet

La jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme en matière de procréation médicalement assistée
Ayşegül Elveriş

Deuxième table ronde — Recherche médicale, enjeux nationaux et communautaires
Recherche médicale, enjeux nationaux et communautaires. Introduction
Frédérique Lesaulnier

Pourquoi faut-il encore réformer la législation de la recherche biomédicale ?
François Lemaire

Vers un cadre unique de contrôle pour l’ensemble des recherches sur la personne ?
Marie-Thérèse Hermange

Législation, informatique et libertés et recherche médicale
Marie-Hélène Mitjavile

Recherche médicale et indemnisation
Claude Grellier

Recherche médicale et approche européenne
Paul Janiaud

Troisième table ronde — Enjeux éthiques des neurosciences et protection des données personnelles
Enjeux éthiques des neurosciences et régulation. Introduction
Carol Jonas

Cerveau préservé, réparé, amélioré
Hervé Chneiweiss

Quel pouvoir prédictif de la génétique et des neurosciences, et quels problèmes ?
Franck Ramus

Neurosciences et administration de la preuve pénale devant les juridictions des États-Unis
Christian Byk and Association internationale droit éthique et science

Droit, éthique et neurosciences
François Terré

L’ADN et la protection de la vie privée
Willem Debeuckelaere

Quatrième table ronde — Fin de vie et euthanasie
Fin de vie et euthanasie. Introduction
Philippe Biclet

La loi du 22 avril 2005 à l’épreuve de la neuroéthique : le cas du patient cérébrolésé adulte à la phase aiguë
Louis Puybasset

Les principes de la convention d’Oviedo et le processus décisionnel relatif aux traitements médicaux en fin de vie : le regard du comité directeur de bioéthique du Conseil de l’Europe
Isabelle Erny

Questions éthiques et fin de vie
Sadek Beloucif

Pratique dépénalisée de l’euthanasie en Belgique
Roland Kerzmann

Synthèse
Colloque « Avancées biomédicales et protection des libertés ». Synthèse
Georges Kutukdjian

Biographies
Notices biographiques
La rédaction

Droit de décider du moment et de la manière de mourir en Europe

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Jurisprudences

Suicide, pas toujours assistéC’est le 29 décembre 1972 que la Confédération suisse à signé la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, encore appelée « Convention européenne des droits de l’homme », même si elle n’est entrée en vigueur que fin 1974 en Suisse. Ayant ratifié ce texte, la Confédération fait partie des États parties à la Convention et à ce titre reconnaît et garantit les droits fondamentaux, civils et politiques non seulement à ses ressortissants, mais également à toute personne relevant de sa juridiction. Parmi les droits garantis par la Convention figurent le droit à la vie, le droit à un procès équitable, le droit au respect de la vie privée et familiale, la liberté d’expression, la liberté de pensée, de conscience et de religion. Sont interdits notamment la torture et les peines ou traitements inhumains ou dégradants, tout comme les discriminations dans la jouissance des droits et libertés reconnus par la Convention. Les juridictions nationales des pays signataires devant appliquer cette dernière, une personne estimant que ses droits n’ont pas été respectés peut saisir la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) créée à cet effet.

C’est dans ce cadre qu’un ressortissant suisse a saisi la Cour pour se plaindre d’une violation de son droit de décider du moment et de la manière de mourir, selon lui. Ce citoyen a estimé qu’il devait pouvoir choisir le moment où il souhaitait mourir au nom de l’article 8 de la Convention qui prévoit que « Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance » et qu’« Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui. »
Cette personne, souffrant d’un grave trouble affectif bipolaire depuis une vingtaine d’années, a commis deux tentatives de suicide et effectué plusieurs séjours dans des cliniques psychiatriques. « Considérant qu’il ne pouvait plus vivre d’une manière digne en raison de sa maladie, difficile à traiter », cet homme a adhéré à l’association Dignitas afin « de lui apporter de l’aide dans le cadre de son projet de suicide. » Pour mener à bien ce projet, il avait néanmoins besoin d’une prescription médicale lui permettant d’obtenir la substance adaptée. Aucun des psychiatres sollicités n’a accepté de lui donner l’ordonnance correspondant à sa demande.
Pour « obtenir l’autorisation de se procurer ladite substance dans une pharmacie, sans ordonnance, par l’intermédiaire de l’association Dignitas », le plaignant a fait appel aux autorités suisses. Ces dernières, instance après instance, lui ont refusé cette possibilité au motif que la substance en question ne pouvait être obtenue dans une pharmacie sans une prescription médicale. De plus, pour les représentants de la Confédération, « l’article 8 de la Convention n’imposait pas aux États parties une obligation positive de créer des conditions permettant la commission d’un suicide sans risque d’échec et sans douleur. »

« Selon l’intéressé, l’obligation de présenter une ordonnance médicale afin d’obtenir la substance nécessaire à la commission d’un suicide et l’impossibilité de se procurer une telle ordonnance, due selon lui aux menaces de retrait de l’autorisation de pratiquer que les autorités faisaient peser sur les médecins s’ils prescrivaient cette substance à des malades psychiques, constituaient une ingérence dans son droit au respect de sa vie privée. Il ajouta que, si cette ingérence reposait certes sur une base légale et poursuivait un but légitime, elle n’était pas proportionnée dans son cas. »

Afin de pouvoir se prononcer, la CEDH a étudié le droit au suicide assisté dans les États parties à la Convention. « Les recherches effectuées par la Cour lui permettent de conclure que l’on est loin d’un consensus au sein des États membres du Conseil de l’Europe quant au droit d’un individu de choisir quand et de quelle manière il veut mettre fin à ses jours. En Suisse, selon l’article 115 du code pénal, l’incitation et l’assistance au suicide ne sont punissables que lorsque l’auteur de tels actes les commet en étant poussé par un mobile égoïste. À titre de comparaison, les pays du Benelux, notamment, ont décriminalisé l’acte d’assistance au suicide, mais uniquement dans des circonstances bien précises. Certains d’autres pays admettent seulement des actes d’assistance “passive”. Mais la grande majorité des États membres semblent donner plus de poids à la protection de la vie de l’individu qu’à son droit d’y mettre fin. La Cour en conclut que la marge d’appréciation des États est considérable dans ce domaine. »

Dans son appréciation de l’affaire, la Cour ne s’oppose pas au suicide. Pour elle, le droit au suicide est légitime sous conditions. Face à une fin de vie indigne et pénible, une personne a le droit de préférer une mort sans risque d’échec et sans douleur. « […] la Cour estime que le droit d’un individu de décider de quelle manière et à quel moment sa vie doit prendre fin, à condition qu’il soit en mesure de forger librement sa propre volonté à ce propos et d’agir en conséquence, est l’un des aspects du droit au respect de sa vie privée au sens de l’article 8 de la Convention. »
Pour autant, la Cour n’oublie pas de préciser que l’article 2 de la Convention « impose aux autorités le devoir de protéger des personnes vulnérables, même contre des agissements par lesquels ils menacent leur propre vie […]. Selon la Cour, cette dernière disposition oblige les autorités nationales à empêcher un individu de mettre fin à ses jours si sa décision n’intervient pas librement et en toute connaissance de cause » et, selon elle, « l’exigence d’une ordonnance médicale afin de prévenir des abus, a pour objectif légitime de protéger notamment toute personne d’une prise de décision précipitée, ainsi que de prévenir des abus, notamment d’éviter qu’un patient incapable de discernement obtienne une dose mortelle » d’une substance.
« Cela est d’autant plus vrai s’agissant d’un pays comme la Suisse, dont la législation et la pratique permettent assez facilement l’assistance au suicide. Lorsqu’un pays adopte une approche libérale, des mesures appropriées de mise en œuvre d’une telle législation libérale et des mesures de prévention des abus s’imposent. De telles mesures sont également indiquées dans un but d’éviter que ces organisations n’interviennent dans l’illégalité et la clandestinité, avec un risque d’abus considérable. »

Pour ces raisons et pour d’autres exposées dans l’arrêt, la CEDH a donc considéré que la Suisse n’avait pas violé l’article 8 de la Convention. S’il n’est pas question d’interdire à un État d’autoriser l’assistance au suicide, il n’est pas question non plus de lui reprocher de prendre des mesures pour empêcher les abus…

Transmettre le VIH à un partenaire peut être un délit

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Jurisprudences

Derrière les barreauxFinir en prison pour avoir transmis le VIH (virus de l’immunodéficience humaine) dont on se savait porteur n’est plus une utopie. Pour la chambre criminelle de la Cour de cassation, « Justifie sa décision la cour d’appel qui, pour déclarer le prévenu coupable du délit d’administration de substances nuisibles aggravé prévu et puni par les articles 222-15 et 222-9 du code pénal, retient que, connaissant sa contamination déjà ancienne au virus de l’immunodéficience humaine (VIH) pour laquelle il devait suivre un traitement, il a entretenu pendant plusieurs mois des relations sexuelles non protégées avec sa compagne en lui dissimulant volontairement son état de santé et l’a contaminée, la rendant désormais porteuse d’une affection virale constituant une infirmité permanente ».

Dans cette affaire (pourvoi nº 09-86209), un homme a été condamné à trois ans d’emprisonnement après avoir été reconnu coupable du délit d’administration de substances nuisibles ayant entraîné une mutilation ou une infirmité permanente par une cour d’appel. Arguant qu’il n’avait pas l’intention de transmettre le virus à sa compagne et qu’il n’avait pas contaminé volontairement sa partenaire, l’homme mis en cause pensait obtenir sa relaxe auprès de la Cour de cassation au motif qu’« il n’y a point de délit sans intention de le commettre ».

La Cour de cassation a suivi la cour d’appel en ce que « le virus VIH contenu dans le sperme est une substance nuisible à la santé et que cette substance a bien été administrée par le prévenu lors de relations sexuelles consenties ». Pour la Cour, cet homme, ayant connaissance de sa contamination déjà ancienne pour laquelle il avait consulté et devait suivre un traitement, était parfaitement informé au moment de sa relation avec sa compagne des modes de transmission du VIH ainsi que de la nécessité d’une protection durant les relations sexuelles. C’est en toute connaissance de cause, taisant sa séropositivité en omettant d’informer sa compagne, que le prévenu a volontairement fait courir à son amie un risque gravissime pour sa santé et sa vie en acceptant ou sollicitant dans ces conditions des rapports sexuels non protégés.

S’il n’est pas question d’interdire à une personne d’avoir des relations sexuelles alors qu’elle est porteuse du VIH, on pourrait être tenté de retrouver dans cet arrêt deux notions omniprésentes dans le doit de la santé actuel : celle du devoir d’information et celle du consentement éclairé. La personne infectée doit informer sa ou son partenaire qui est alors en mesure d’apporter son consentement à des relations sexuelles, puis s’ils sont acceptés de décider si ceux-ci doivent être protégées ou non.

Suffit-il de se protéger pour ne pas avoir à informer ? Même si le préservatif est un excellent moyen d’éviter la contamination, il ne s’agit pas pour autant d’une méthode infaillible. De plus, contrairement à une idée reçue, les pénétrations vaginales et anales ne sont pas les seules à devoir être prises en compte. Le risque de contamination, même lorsqu’il n’y a qu’une pénétration buccale, doit lui aussi conduire à informer son ou sa partenaire. Bien qu’exceptionnel, le risque n’est pas pour autant nul lors d’un simple contact bouche-sexe sans pénétration. Le déni ne peut être un argument pour celui qui fait courir le risque à l’autre dans de telles situations.

Plus de cas de narcolepsie chez les enfants vaccinés contre la grippe A(H1N1)

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Un vaccin à la mainLe Comité consultatif mondial sur la sécurité des vaccins qui dépend de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) a reconnu le 8 février 2011 que l’apparition de cas de narcolepsie chez des enfants et des adolescents vaccinés contre la grippe A(H1N1) dans 12 pays différents méritait que des études complémentaires soient menées à ce propos. La narcolepsie est une affection neurologique grave se caractérisant par des envies de dormir irrépressibles et des épisodes de perte brusque du tonus musculaire sans altération de la conscience et survenant à un moment quelconque de la journée chez la plupart des patients. Cette pathologie, encore appelée maladie de Gélineau, est habituellement rare qui a tendance à toucher plus les adolescents et les quadragénaires.

Suite aux campagnes de vaccinations contre la grippe A(H1N1) en 2009, plusieurs pays, comme la Suède, la Finlande ou l’Islande, ont rapporté des taux plus élevés que d’habitude de jeunes patients souffrant de narcolepsie. En Finlande, après avoir étudié les cas recensés sur son territoire, l’Institut national de la santé et du bien-être de ce pays a même décidé de publier une déclaration préliminaire, le 1er février 2011. En effet, en 2009-2010, les équipes de cet institut ont mis en évidence un risque plus élevé de narcolepsie chez les 4—19 ans qui avaient reçu la vaccination contre la grippe A(H1N1) 2009 par rapport à ceux qui n’avaient pas été vaccinés. Il faut savoir que le seul vaccin utilisé en Finlande au cours de la pandémie a été le Pandemrix, un vaccin monovalent avec adjuvant fabriqué par les le laboratoire GlaxoSmithKline, utilisé dans 47 pays à travers le monde à la même période.

Dans son communiqué, l’OMS reconnaît que « l’Institut national finlandais (sur les conseils de la Finnish National Narcolepsy Task Force) a conclu que le risque de développement de la narcolepsie chez les personnes vaccinées âgées de 4 à 19 ans est environ neuf fois plus élevé que ceux non vaccinés pour une même tranche d’âge, ce qui correspond à un risque d’environ 1 cas de narcolepsie par 12 000 vaccinés. » Cette augmentation n’a pas été retrouvée pour les autres tranches d’âge.
Une prédisposition génétique a été retrouvée chez les patients atteints, cette maladie étant presque exclusivement observées chez des personnes qui ont un génotype (HLA) DQB1 * 0602, comme c’est le cas pour tous les jeunes Finlandais diagnostiqués. Au 24 janvier 2011, la Finlande comptait 56 cas de narcolepsie associée au Pandemrix, dont 54 dans la tranche d’âge 4—19 ans. Dans la plupart des cas les symptômes sont apparus dans les deux mois ayant suivi cette vaccination.
L’Institut national estime qu’il est possible que le vaccin Pandemrix soit un facteur contribuant à l’augmentation observée et a appelé à une enquête plus poussée sur les autres cofacteurs qui peuvent être associés à ce risque accru. Les chercheurs considèrent qu’il est probable que le vaccin Pandemrix augmente le risque de narcolepsie chez des patients prédisposés génétiquement et qui seraient aussi soumis à d’autres facteurs environnementaux ou génétiques qu’il reste à découvrir. Le rapport final du groupe de travail finlandais est prévu d’ici le 31 août 2011.

L’OMS considère que, bien que ce phénomène n’a pas été constaté dans tous les pays ayant utilisé ce vaccin, il est nécessaire de mener à bien des travaux à ce sujet. Il convient de rester prudent, car en Islande à la même période, l’apparition d’un plus grand nombre de cas de narcolepsie semble aussi avoir été constaté chez les enfants non vaccinés.

En France, 50 millions de doses de vaccins Pandemrix ont été commandées pour une valeur totale de 350 millions d’euros. Une partie de cette commande a été annulée et seules 18 millions de doses de ce vaccin avec adjuvant ont été livrées. Normalement, dans l’Hexagone, les enfants de moins de 10 ans n’ont pas été vaccinés avec ce vaccin, puisque les indications vaccinales à propos de la vaccination contre la grippe A(H1N1) imposaient d’utiliser pour eux le vaccin Panenza. Par contre, pour les enfants de 10 ans et plus, c’est le vaccin Pandemrix qui était recommandé. En pratique, on sait que ces indications n’ont pas toujours été respectées et il est possible que des enfants de moins de 10 ans aient reçu une injection de Pandemrix. En raison des dysfonctionnements dans l’organisation de la campagne de vaccination sur le territoire national, il risque malheureusement d’être difficile dans certains cas de savoir quel vaccin a été utilisé chez tel ou tel enfant en raison d’une traçabilité incorrecte rendant la pharmacovigilance difficile. Voilà une nouvelle affaire qui risque d’être embarrassante pour les pouvoirs publics…