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Le projet de directive relative aux soins de santé transfrontaliers avance

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Union européenneIl aura fallu une proposition de compromis faite par l’Espagne, qui assure actuellement la présidence de l’Union européenne, pour que les ministres de la santé des États membres finissent par se mettre d’accord sur le projet de directive relative aux soins de santé transfrontaliers qui sera soumis en deuxième lecture au Parlement européen. Lancé en 2008, ce projet n’a eu de cesse d’être repoussé pour de multiples raisons. Les précédentes négociations sous la présidence suédoise avaient principalement achoppé sur le problème du remboursement des soins prodigués par les professionnels de santé non conventionnés et sur celui des soins des retraités résidant à l’étranger. Deux autres points ne faisaient pas non plus l’unanimité : l’interopérabilité des systèmes de technologies de l’information et de la communication dans le domaine des soins de santé et la part de la compétence exclusive des États dans le domaine de la santé que le traité leur reconnaît, compétence mise à mal par la jurisprudence de la Cour de justice européenne au nom du principe du marché intérieur.

Le projet de directive ayant fait l’objet du compromis reprend pour commencer quelques fondamentaux : « Dans la présente directive, on entend par soins de santé l’ensemble des services de santé fournis par des professionnels de la santé aux patients pour évaluer, maintenir ou rétablir leur état de santé. Cependant, il est clair que l’obligation de rembourser le coût des soins de santé transfrontaliers doit se limiter aux soins de santé auxquels la personne assurée a droit conformément à la législation de son État membre d’affiliation. » Le texte ne s’applique pas aux services dont le but est d’aider les personnes qui ont besoin d’aide pour accomplir des tâches quotidiennes courantes, comme les prestations de soins de longue durée dispensées dans des maisons de retraite ou des foyers-logements (« maisons de soins ») par des services de soins à domicile ou dans des résidences offrant des services. Il ne concerne pas non plus à l’attribution et à l’accès aux organes aux fins des transplantations.
« Aux fins du remboursement des soins de santé transfrontaliers, la présente directive devrait couvrir non seulement la situation du patient qui reçoit des soins de santé dispensés dans un État membre autre que l’État membre d’affiliation, mais également la prescription, la préparation et la délivrance de médicaments et de dispositifs médicaux lorsque ceux-ci sont fournis dans le cadre d’un service de santé. La définition des soins de santé transfrontaliers devrait couvrir à la fois la situation du patient qui achète ces médicaments et dispositifs médicaux dans un État membre autre que l’État membre d’affiliation et la situation du patient qui achète ces médicaments et dispositifs médicaux dans un État membre autre que celui où la prescription a été établie.
La présente directive n’affecte pas les dispositions réglementaires des États membres relatives aux ventes de médicaments et dispositifs médicaux par Internet. »

Les professionnels de santé ont tout intérêt à lire ce projet, car certaines propositions risquent de les interpeller.
Les médecins, au même titre que les autres « prestataires de soins de santé », se verraient, par exemple, contraints de remettre une « facture transparente » aux patients et une information sur sa « couverture d’assurance ou tout autre moyen de protection personnelle ou collective au titre de la responsabilité professionnelle », couverture assurantielle qui pourrait connaître une certaine harmonisation européenne. Des mesures visant à faciliter le dépôt de plainte ou la demande de réparation des patients devraient être prises par les différents États.
Une prescription de médicaments, par exemple, aurait une valeur transfrontalière : avec une ordonnance établie dans un pays de l’Union, un patient pourrait se faire délivrer son traitement dans un autre pays membre. Il en serait de même pour les dispositifs médicaux.
Des réseaux européens de référence devraient être mis en place.

Le compromis a pu être trouvé grâce à la possibilité donnée aux États de mettre en place un système d’autorisation préalable relatif au remboursement de certains soins transfrontaliers et de refuser cette autorisation « si ces soins de santé peuvent être dispensés sur son territoire dans un délai acceptable sur le plan médical, compte tenu de l’état de santé du moment de la personne concernée et de l’évolution probable de sa maladie », par exemple. Les États ont aussi obtenu que la directive précise qu’ils peuvent limiter l’application des règles relatives au remboursement des soins de santé transfrontaliers « pour des raisons impérieuses d’intérêt général telles que le risque de porter gravement atteinte à l’équilibre financier du système de sécurité sociale ou pour satisfaire à l’objectif de maintenir un service médical et hospitalier équilibré et accessible à tous ».
Le remboursement des soins transfrontaliers par télémédecine est aussi évoqué dans le compromis.

Enfin, une ébauche de dossier médical européen pourrait voir le jour et il est question qu’il existe « une liste non exhaustive de données à faire figurer dans le dossier des patients et pouvant être partagées par les professionnels de la santé pour permettre la continuité des soins et promouvoir la sécurité des patients par-delà les frontières ». Il faut espérer que ces mesures seront véritablement axées sur la santé et non sur l’aspect économies de santé, facteur qui n’a toujours pas permis au dossier médical personnel (DMP) à la française de prendre de l’essor.

Malgré l’apparente volonté des États de conserver leur compétence exclusive dans le domaine de la santé, c’est une nouvelle fois à l’échelon européen que les futures évolutions du droit de la santé se jouent. Si les industriels l’ont compris depuis bien longtemps, les professionnels de santé doivent en prendre conscience le plus rapidement possible et s’organiser en conséquence s’ils veulent que leur point de vue soit pris en compte au moment de la deuxième lecture du projet de directive au Parlement européen.

 


Pour aller plus loin :
Les Vingt-sept s’accordent sur le compromis espagnol par Sophie Petitjean sur le site Europolitique
UE : Accord pour le remboursement des soins transfrontaliers par Damien Dozol sur le site News-assurances


La fin des “incitations” à prescrire des génériques ?

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Médicaments génériques et droit européenLes pouvoirs publics français et l’assurance-maladie ont, depuis plusieurs années, misé sur les “incitations”, pour ne pas dire les contraintes, à l’utilisation des médicaments génériques, dans l’espoir de réduire le coût des dépenses de santé. Ces mesures, loin de faire l’unanimité chez les professionnels de santé et surtout chez les patients, ont néanmoins réussi à être imposées, en grande partie grâce au rôle actif joué par les pharmaciens et à leur fameux “droit de substitution” et à grand renfort de publicité. Une façon efficace de faire des économies de santé pour les uns, un moyen d’obtenir des avancées très favorables sur les produits vendus en officine sans prescription médicale, des produits souvent beaucoup plus rémunérateurs, pour les autres…

Des “incitations” qui s’imposent aussi au sein des nouveaux contrats d’amélioration des pratiques individuelles (CAPI) signés par la Sécurité sociale avec des médecins libéraux, ces derniers cherchant souvent à pallier, selon eux, l’insuffisante revalorisation de leurs honoraires. Prescrire plus de génériques, c’est respecter le contrat et voir ses revenus augmenter. Une façon efficace de faire des économies de santé pour les uns, un moyen habile d’encadrer ce qui reste de la liberté de prescription pour les autres…

Mais la vision purement économique de la prescription et de la délivrance des médicaments semble en passe de se retourner contre ceux qui l’ont privilégiée, si l’on en croit les conclusions de l’avocat général de la Cour de justice européenne (CJE) dans une affaire concernant l’Association of the British Pharmaceutical Industry et des systèmes d’incitation à la prescription de médicaments qui ont été mis en place par les caisses de soins primaires (Primary Care Trusts) en Grande-Bretagne. C’est en effet pour des raisons économiques liées à l’interdiction de la promotion de médicaments par l’intermédiaire de prime, avantage pécuniaire ou avantage en nature à des personnes habilitées pour les prescrire, à moins que ceux-ci ne soient de valeur négligeable et n’aient trait à l’exercice de la médecine, prévue par le droit européen que la situation pourrait être amenée à évoluer.

« L’article 94, paragraphe 1, de la directive 2001/83/CE fait obstacle à ce qu’un organisme public faisant partie d’un service national de santé public mette en place, afin de réduire ses dépenses en matière de médicaments, un système qui offre des incitations financières à des cabinets médicaux (lesquels peuvent à leur tour conférer un avantage pécuniaire au médecin prescripteur) afin qu’ils prescrivent un médicament spécifiquement désigné, soutenu par le système d’incitation, et qui sera :
a) soit un médicament soumis à ordonnance différent du médicament antérieurement prescrit par le médecin au patient ;
b) soit un médicament différent de celui qui aurait été prescrit au patient si le système d’incitation n’existait pas,
lorsque le médicament différent fait partie de la même classe thérapeutique que ceux utilisés pour le traitement de la pathologie particulière du patient. »

La mission des avocats généraux consiste à proposer à la Cour, en toute indépendance, une solution juridique dans l’affaire dont ils sont chargés, mais leurs conclusions ne lient pas la CJE. Reste donc à savoir ce que décidera la Cour après en avoir délibéré…

Fumer plus pour gagner plus !

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Presse

Danger poison

« Fumer plus pour gagner plus », tel serait le nouveau slogan de la filiale allemande d’une compagnie d’assurance-vie basée au Liechtenstein, Quantum Life. Se basant sur un principe déjà utilisé en Grande-Bretagne, cet assureur propose de servir des rentes viagères plus élevées à ses clients fumeurs sachant que leur espérance de vie est moindre et qu’il n’aura à les indemniser que sur une période plus courte… Seules les personnes fumant plus de 15 cigarettes par jour sont concernées, avec des bonus pour les plus gros fumeurs. Le déclaratif ne suffit pas puisqu’il est prévu que l’assuré fasse appel à son médecin traitant pour évaluer son degré de tabagisme (en dosant la nicotinémie, par exemple).

Des référentiels d’arrêts de travail distribués par l’assurance-maladie

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Une main de fer pour les arrêts de travailReprenant les méthodes éprouvées de l’industrie pharmaceutique, la Sécurité sociale a lancé à l’assaut des cabinets libéraux, dans certaines régions et principalement à l’attention des généralistes, des délégués médicaux censés venir répondre aux questions des professionnels de santé concernant l’assurance-maladie et faciliter le dialogue avec les caisses primaires. Mais ces hommes et ses femmes, formés à la chasse aux gaspis en matière d’économies de santé, semblent ne pas se contenter d’apporter des réponses. En effet, ils distribuent aussi des référentiels servant à aider les médecins dans leurs prescriptions d’arrêts maladie : « Pour vous aider dans votre prescription d’arrêt de travail et faciliter votre dialogue avec votre patient, des durées optimales vous sont proposées. Elles sont indicatives et, bien sûr, à adapter en fonction de la situation de vos patients. À titre d’exemple, pour un emploi “sédentaire”, la durée d’arrêt de travail peut s’étendre de 0 à 3 jours. »

Pour des douleurs dans le bas du dos, appelées lombalgies communes, la durée optimum d’arrêt de travail, « durée à l’issue de laquelle la majorité des patients sont capables de retourner au travail », est d’une journée pour un travailleur sédentaire, par exemple. Elle est de 3 jours pour ceux qui ont un travail physique “léger” (charge ponctuelle < 10 kg ; charge répétée < 5 kg). Elle peut aller jusqu’à 35 jours pour les travailleurs qui portent des charges dont le poids excède 25 kg.

Ayant compris que les praticiens pouvaient faire l’objet d’une pression de la part de certains patients en raison du rôle de gendarme de la santé qu’on leur demande de plus en plus souvent de jouer, l’assurance-maladie leur fournit ainsi un document estampillé Sécurité sociale sur lequel s’appuyer pour réfréner les demandes d’arrêt de travail ou leur durée.

Mais ces référentiels n’ont-ils pas un autre objectif ? Celui de rappeler aux médecins ce que la Sécurité sociale attend d’eux. Ce document devient alors un manuel de bonne conduite qu’il convient de respecter si l’on ne veut pas se voir mis sous surveillance et contrôlé. En plus des durées optimums, de nombreux “conseils” sont, en effet, donnés aux praticiens. Toujours pour les douleurs lombaires communes, il est précisé que « Chez une personne ayant une activité sédentaire non manuelle, une lombalgie légère peut ne pas nécessiter d’arrêt de travail », par exemple. Il est rappelé que « le repos au lit n’est pas recommandé » et il est aussi indiqué que la durée de travail est à adapter en fonction de l’emploi, de l’âge, de la condition physique du patient, des facteurs psychologiques en cas de douleur persistante et des possibilités d’adaptation ou de modification du poste de travail par l’entreprise, notamment pour les postes très physiques.
Ce dernier point est intéressant, sachant que le médecin traitant est tenu au secret professionnel vis-à-vis du médecin du travail et, bien entendu, vis-à-vis de l’employeur du patient. Il ne peut donc qu’encourager le patient à se rapprocher du service de santé au travail dont il dépend, ce qui n’est pas toujours facile étant donné les problèmes qui peuvent naître, dans la pratique, d’une telle démarche.
Dernier point mis en avant par l’assurance-maladie : « L’arrêt de travail doit être réévalué régulièrement pour éviter le passage à la chronicité. »

Tout est prévu par ce référentiel, même une espèce de coaching des médecins et des patients. Le praticien est amené à se poser les “bonnes” questions : « Votre patient a-t-il été encouragé à adopter une attitude positive et active vis-à-vis de sa pathologie ? » ou « Votre patient a-t-il reçu une information rassurante pour lui permettre de reprendre ses activités sans appréhension ? »

Ces dernières années, les contrôles en matière d’arrêt de travail pour maladie sont devenus plus stricts, les employeurs ayant même été autorisés à faire appel à des sociétés privées pour les réaliser. Une nouvelle politique en matière d’arrêts de travail injustifiés a vu le jour : une main de fer dans un gant de velours…

Lancement d’un dossier médical sur clé USB ?

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Dossier  médical sur clé usb sécuriséeC’est le 23 mars 2010 que pourrait voir le jour le dossier médical sur clé USB sécurisée pour les patients atteints d’une affection de longue durée (ALD). En effet, c’est à cette date que sera discutée à l’Assemblée nationale une proposition de loi à ce sujet.
L’article 46 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2009 (LFSS 2009), ainsi que l’article 50 de la loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (HPST), votés par les parlementaires, prévoyaient déjà une telle expérimentation, avant d’être censurés par le Conseil constitutionnel pour des raisons de pure forme. Cette fois devrait donc être la bonne.

Ce dossier médical sur clé USB sécurisée n’est pas à confondre avec le dossier médical personnel (DMP), qui n’en finit pas de prendre du retard même si l’on a appris ces jours derniers que c’est le consortium dont font partie La Poste et Atos Origin qui devrait héberger les données du futur DMP.

La proposition de loi, dont il est question ici, ne comprend qu’un seul article ainsi rédigé :

Après l’article L. 1111-19 du code de la santé publique, il est inséré un article L. 1111-20 ainsi rédigé :

« Art. L. 1111-20. – Avant la date prévue au dernier alinéa de l’article L. 1111-14 et avant le 31 décembre 2010, un dossier médical implanté sur un dispositif portable d’hébergement de données informatiques est remis, à titre expérimental jusqu’au 31 décembre 2012, à un échantillon de bénéficiaires de l’assurance maladie atteints d’une des affections mentionnées aux 3° ou 4° de l’article L. 322-3 du code de la sécurité sociale.

« Le groupement d’intérêt public prévu à l’article L. 1111-24 fixe la liste des régions dans lesquelles est menée cette expérimentation. Avant le 15 septembre de chaque année, il remet au Parlement un rapport qui en présente le bilan.

« Le deuxième alinéa de l’article L. 1111-14 et l’article L. 1111-19 ne sont pas applicables aux dossiers médicaux créés en application du présent article.

« Un décret fixe les modalités d’application du péésent article, garantissant notamment la confidentialité des données contenues dans les dossiers médicaux personnels, après avis consultatif de la CNIL. »

Il est intéressant de noter qu’un amendement demandant que le titre de la proposition de loi soit modifié pour remplacer les termes « clé USB sécurisée » par « tout support portable numérique ». Les quatre députés à l’origine de cet amendement estiment en effet que ce n’est pas au législateur de décider quel support informatique est le mieux adapté pour héberger ce dossier médical.

Le DMP a souffert d’une cacophonie, chaque acteur du système de santé voulant donner son avis sur un dossier pour lequel, dans ces conditions, l’aspect “médical” est relégué au second plan, loin derrière les ambitions économiques qu’on veut lui prêter. Il semble que les leçons n’aient pas été tirées de ces errements puisqu’un autre amendement propose de faire suivre cette expérimentation par un comité de pilotage, composé de représentants de l’État, des professionnels de santé, des organismes d’assurance-maladie, des établissements de santé et des usagers.

Cette proposition de loi devrait aboutir et l’expérimentation finir par avoir lieu, rien ne laisse présager des suites qui seront données à ces essais. Les clés de la réussite seront peut-être au rendez-vous.

 


Mise à jour du 24 juillet 2010

Toujours rien à ce jour, ce qui n’étonnera personne à la lecture de l’article « Mais où est donc passé le Dossier Médical USB ? » rédigé par Jean-Jacques Fraslin sur le site i-med.fr.