Mediator : un rapport de l’IGAS accablant et sans concessions

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

L’inspection générale des affaires sociales (IGAS) a rendu au ministre de la santé, Xavier Bertrand, un rapport intitulé « Enquête sur le Mediator® » le 15 janvier 2011. Ce travail a été réalisé en six semaines, à la demande du ministre, suite à ce qu’il convient d’appeler l’affaire Mediator, médicament présenté par son fabricant, les laboratoires Servier, comme un médicament efficace dans le traitement des hypertriglycéridémies et du diabète de type II, dont l’usage a été détourné en coupe-faim pendant de nombreuses années et qui serait à l’origine de plusieurs centaines de décès en France d’après les autorités de santé. La mission d’enquête de l’IGAS a auditionné une centaine de personnes parmi lesquelles ne figure aucun membre du laboratoire mis en cause. Elle s’est aussi appuyée sur « l’exploitation des dossiers scientifiques et administratifs s’échelonnant sur 40 années » qu’elle avait en sa possession.

Les conclusions de ce rapport sont accablantes, tant pour le deuxième groupe pharmaceutique français que pour l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps), anciennement appelée Agence du médicament. Il est rare de lire un rapport administratif qui aille si loin dans les reproches faits à un acteur majeur de l’industrie pharmaceutique hexagonale et à une agence de l’État. Pour s’en convaincre, il suffit de lire la synthèse de ce travail dont un extrait est reproduit en encart.

Extrait de la synthèse du rapport de l’IGAS intitulé Enquête sur le Mediator®

Le rapport est organisé à la fois autour des principaux temps de la vie du médicament et autour de l’analyse des principales responsabilités identifiées par la mission :

  • les laboratoires Servier qui dès l’origine du médicament ont poursuivi un positionnement du MEDIATOR® en décalage avec sa réalité pharmacologique ;
  • l’Agence chargée du médicament, inexplicablement tolérante à l’égard d’un médicament sans efficacité thérapeutique réelle ;
  • le système de pharmacovigilance, incapable d’analyser les graves risques apparus en termes de cardiotoxicité du MEDIATOR® ;
  • enfin, les ministres chargés de la sécurité sociale et de la santé gérant avec lenteur les déremboursements de médicaments à service médical rendu insuffisant, aboutissant dans le cas du MEDIATOR® à des résultats inverses de ceux recherchés.

Bien que contesté par les laboratoires Servier, la lecture de ce rapport est édifiante et permet, entre autres, de comprendre que ce travail n’est sans doute pas étranger à la décision de son directeur général de quitter ses fonctions, même si l’annonce de son départ s’est faite le 12 janvier alors que l’Agence n’a officiellement reçu copie du rapport pour observations que le 13 janvier.

Pour l’IGAS, il ne fait aucun doute au regard des documents étudiés que le benfluorex, nom du principe actif contenu dans le Mediator, est depuis sa genèse un anorexigène. « Le suffixe « -orex » est en effet le segment-clé retenu par l’OMS [Organisation mondiale de la santé, NDLR] pour désigner les agents anorexigènes. […] L’OMS a attribué la DCI « benfluorex » au composé SE780 des laboratoires Servier et a publié cette dénomination dans sa chronique OMS volume 25, n° 3 de mars 1971.
Ce choix s’explique sans doute par la présence dans cette molécule d’un noyau benzène, portant un groupement fluoré et par les propriétés anorexigènes de la molécule. »
Bouton stopPour l’inspection générale, les laboratoires Servier auraient tout fait pour minimiser l’appartenance de ce médicament à cette classe de produits pour le différencier d’autres spécialités pharmaceutiques qu’ils commercialisaient comme anorexigènes et auraient joué la carte de l’originalité thérapeutique, oubliant ses caractéristiques pharmacologiques, pour que ce produit reste en vente alors que les risques liés à l’un des composants apparaissant au moment où ce médicament est métabolisé dans l’organisme sont suspectés depuis plusieurs dizaines d’années. Un document remis à l’Afssaps en 1999 par le laboratoire aurait même été modifié pour faire oublier que le benfluorex était un précurseur de l’un de ces composants. Pour l’IGAS, il s’agit d’un fait grave, car des composants de la même famille, contenu dans les autres anorexigènes des laboratoires Servier (Ponderal et Isomeride), ont été suspecté dès 1981 et 1992 d’être à l’origine d’hypertension artérielle pulmonaire, maladie particulièrement grave déjà rencontrée dans les années 60 chez l’animal lors des recherches ayant abouti à la commercialisation de ces produits…

Dès 1999, le Mediator aurait dû être retiré du marché, mais de nombreuses incohérences administratives et des tergiversations ont empêché cette mise à l’index du produit, selon l’IGAS. Il y a de quoi être effaré à la lecture du document et se poser des questions un système censé protéger les patients…
Mais le rapport va encore plus loin puisque la mission d’enquête dit avoir eu connaissance « de pressions exercées par des personnes appartenant aux laboratoires Servier ou ayant des liens d’intérêt avec eux sur des acteurs ayant participé à l’établissement de la toxicité du MEDIATOR®. La mission ne qualifie pas les pressions ainsi relatées. Elle procédera à un signalement de ces pratiques à l’autorité judiciaire en lui transmettant les pièces justificatives dont elle dispose. »

Personne n’est en mesure de dire quel sort sera réservé au rapport de l’IGAS, mais Xavier Bertrand a déjà annoncé que l’État allait prendre le relais des laboratoires quant au financement de l’Afssaps et qu’une plus grande transparence quant aux conflits d’intérêts devrait être de mise, y compris au sein des ministères, au moment où deux de ses collaborateurs ont été mis en cause dans cette affaire.

Est-ce la fin d’une époque ? Il faut l’espérer, car pour l’IGAS, « La chaîne du médicament fonctionne aujourd’hui de manière à ce que le doute bénéficie non aux patients et à la santé publique mais aux firmes. Il en va ainsi de l’autorisation de mise sur le marché qui est conçue comme une sorte de droit qu’aurait l’industrie pharmaceutique à commercialiser ses produits, quel que soit l’état du marché et quel que soit l’intérêt de santé publique des produits en question. La réévaluation du bénéfice/risque est considérée comme une procédure exceptionnelle. La prise en compte du risque nécessite de fortes certitudes scientifiques, l’existence d’un bénéfice étant, elle, facilement reconnue. Dans ces conditions, le retrait d’une AMM est perçu comme une procédure de dernier recours et comme une sorte de dédit pour la commission qui a accordé l’autorisation. »

La justice a commencé à se pencher sur cette affaire, mais il serait étonnant qu’un tel dossier aboutisse à des condamnations rapides, tant les précédents scandales sanitaires ont montré la lenteur du système dans de tels cas. Pour de nombreuses familles, il est malheureusement déjà trop tard.

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Commentaires (3)

  • IEC60601

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    ou tous les organismes officiels dissimulent les risques liés aux dysfonctionnement d’appareils électronique et la limite de 3V/m a ne pas dépasser selon leurs constructeurs.

    Début 2009 un opérateur a été condamné, immédiatement l’académie de médecine http://www.robindestoits.org/Bouygues-active-ses-relais-pour-sauver-ses-antennes-Le-Canard-Enchaine-11-03-2009_a764.html a publié un document http://www.academie-sciences.fr/actualites/textes/ondes_17_12_2009.pdf
    diffusant au moins deux mensonges grossier en s’attaquant a la décision de justice.

    1°) en prétendant mensongèrement qu’aucun risque ne serait connu autre que thermique en dissimulant les risques de dysfonctionnement d’appareils électroniques et la limite de 3V/m
    preuve du mensonge: http://www.riester.de/uploads/media/EMC_declaration_ri-gital_08.pdf

    autre exemple tensiometre:
    « niveau de test 3V/m de 80Mhz a 2,5GHz » « niveau de conformité 3V/m » ,

    « Les forces de champs d’émetteurs RF fixes, telles que déterminées par une étude électromagnétique du site,a doivent être inférieures au niveau de conformité dans chaque bande de fréquences »

    2°) en prétendant mensongèrement que les TBF (217Hz) ne pourraient agir car non émises par les antennes relais porteuse a 0.9Ghz a 2GHz or un station de base de téléphonie en ville en général 4 transpondeurs dont 3 sont très fortement modulés en amplitude (tout ou rien) avec du 217Hz la théorie de la démodulation d’amplitude est formelle le signal modulant sera reconstitué par une simple non linéarité du milieu comme le prouvent le rapport 3431 de l’opecst pour les appareils électronique http://www.assemblee-nationale.fr/12/rap-off/i3431.asp extrait « par contre, on a de plus en plus de phénomènes de détection d’enveloppe. C’est le petit « tatac tatac » qu’on entend quand on a un téléphone GSM. »

    et une étude de France Télécom http://www.francetelecom.com/sirius/rd/fr/memento/mento6/m6chap5.pdf pour les tissus biologiques. extrait:« Depuis une dizaine d’années, des auteurs ont montré expérimentalement que des résultats pouvaient être obtenus aussi bien à l’aide de champs électriques (et/ou magnétiques) ELF qu’à l’aide de RFmodulées à ces mêmes fréquences. Ainsi, Litovitz a invoqué le rôle de la “cohérence spatiale” : l’activité de l’enzyme ornithine décarboxylase étant augmentée sous exposition à des champs magnétiques ELF, cette équipe pluridisciplinaire a effectué le même type d’expérience à l’aide de microondes modulées en ELF (60 Hz). L’effet étant retrouvé dans ces conditions, et non à l’aide de micro-ondes continues, l’hypothèse formulée était que l’ensemble des cellules “voyaient” le même champ incident alors que l’incohérence subsistaitau niveau du bruit intrinsèque à chaque cellule ou partie de cellule. Cette hypothèse nécessite également l’existence d’un processus de démodulation du signal à l’aide d’un phénomène non linéaire »

    comble du ridicule,l’allégation de l’académie de médecine revient a dire que la radio en modulation d’amplitude (PO GO OC)n’a pas jamais existé puisque dans le même cas!!

    L’académie de médecine n’hésite pas a falsifier la réalité scientifique pour aider un lobby en utilisant l’argument d’autorité c’est une honte mais ce n’était pas suffisant en s’y mettant a plusieurs ca semble plus credible, elle a crée un comité permanent ondes électromagnétique (comme pour l’amiante) avec l’académie des sciences et des technologie (sic) qui a repris exactement les mêmes mensonges fin 2009, un site a été crée par l’INERIS a la même période (printemps 2009) reprenant les mêmes dissimulations, que des coïncidences…

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  • Xavier

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    @IEC60601

    Quand on veut être crédible, on ne triche pas avec la vérité, même si ses adversaires le font.
    Le document cité concernant les ondes n’émane pas de la seule Académie de médecine, mais il est au nom de l’Académie de médecine, de l’Académie des sciences et de l’Académie des technologies

    L’Académie de médecine ne prétend pas qu'[i]aucun risque ne serait connu autre que thermique en dissimulant les risques de dysfonctionnement d’appareils électroniques et la limite de 3V/m[/i]. Les Académies citent le rapport BioInitiative disant qu’ « Au vu de l’analyse détaillée et critique des travaux effectuée par le groupe de travail, et compte tenu par ailleurs de l’état antérieur des connaissances, aucune preuve convaincante d’un effet biologique particulier des radiofréquences n’est apportée pour des niveaux d’exposition non thermiques, dans les conditions expérimentales testées. » Il n’est donc question que des effets biologiques…

    Cela ne veut pas dire que vous ayez tort sur les possibles intérêts de sociétés de téléphonie à exercer des pressions si des risques existent vraiment et les possibles liens d’intérêts entre les experts et ces dernières, mais malheureusement vous vous décrédibilisez dès le début de votre message…

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  • IEC60601

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    Le premier communique de l’académie de médecine seule date du 3 mars 2009 :
    http://www.academie-medecine.fr/detailPublication.cfm?idRub=27&idLigne=1542 et annonce la création d’un comité permanent ondes électromagnétique avec les autres académies.

    ce communique comporte déjà les deux élément de tromperie:
    « On ne connaît aucun mécanisme par lequel les champs électromagnétiques dans cette gamme d’énergie et de fréquence pourraient avoir un effet négatif sur la santé » LOOOL

    et l’argument mensonger de non expositions aux TBF en cas d’onde modulée « En réalité, d’une part les antennes de téléphonie mobile émettent exclusivement en haute fréquence ; » Re LOOOL

    le communique de l’académie de médecine seule dit bien en introduction que c’est suite a la condamnation d’opérateur que ce communiqué a été écrit et en fin de communique entend bien faire pression sur la justice « Une telle utilisation dévoyée du principe de précaution[4] risque de conduire à une quête illusoire du « risque zéro », source d’erreurs, de retards et de dysfonctionnements du système de santé. » ce qui est un scandale quand on dissimule un risque !

    ces deux éléments de tromperie sont repris dans le communiqué de décembre 2009 du comité permanent ondes électromagnétique des trois académies
    http://www.academie-medecine.fr/detailPublication.cfm?idRub=26&idLigne=1752 comportant un conseiller de Bouygues et un ancien conseiller de Bouygues mais aucun physicien ou électronicien de décembre 2009.

    le lien que j’avais mis pointe effectivement sur le deuxième communiqué ou le deuxième point (TBF) est développé de manière ubuesque en ajoutant d’autres allégations complétement farfelues , les bonnes ondes des antennes relais non modulé (ce qui est totalement faux)et les mauvaise ondes des téléphone portable modulée, les auteurs ayant été incapable de comprendre le document de supélec qu’ils citent page 96 du rapport de l’afsset dans leur annexe 1 pour appuyer leurs allégations , puisque une station de base en ville comporte plusieurs transpondeurs fortement modulé en amplitude a 217Hz qui sera démodulée par non linéarité!!!

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