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L’Union européenne enquête sur le marché des génériques

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Plus de contrôle pour les soins de santéC’est le 12 janvier 2010 que les autorités de l’Union européenne (UE) ont décidé de s’intéresser de plus près aux rapports existant entre les grands laboratoires pharmaceutiques et leurs “concurrents” spécialisés dans la fabrication des génériques bon marché. Il se pourrait, en effet, qu’une certaine connivence se soit instaurée entre ces acteurs de l’industrie pharmaceutique si l’on en croit les conclusions d’une enquête approfondie menée par la Commission européenne dans ce secteur où la transparence ne semble pas toujours être au rendez-vous. Les grands laboratoires qui mettent au point les molécules princeps, protégées par un brevet durant une période donnée, pourraient avoir tendance à payer les fabricants de génériques pour qu’ils retardent l’arrivée sur le marché de leurs copies lorsqu’ils y sont enfin autorisés. De telles pratiques se feraient, bien entendu, au détriment des consommateurs, privés de médicaments à moindre coût limités durant une période plus longue que celle prévue par la législation relative aux brevets. Réelle volonté de défense de l’accès aux soins et transparence dans le secteur de la santé ou simple rideau de fumée politique, les instances européennes font preuve ces derniers mois d’un esprit fort critique à l’égard de l’industrie pharmaceutique. À une époque où les budgets se resserrent et où Internet aide les citoyens à déjouer bon nombre de tentatives de désinformation, il est possible que les doutes sur des manipulations relatives à la pandémie de grippe A(H1N1) ne soient pas étrangers à ce nouvel état d’esprit

Autre sujet d’intérêt pour les responsables européens, les récents travaux de l’European Healthcare Fraud & Corruption network (EHFCN), réseau européen s’intéressant à la fraude et à la corruption dans les soins de santé, qui ont fait l’objet d’un rapport intitulé The financial cost of Healthcare fraud, ce qui en français peut se traduire par « Le coût financier de la fraude dans les soins de santé ». Selon ces données, la fraude et les erreurs d’organisation dans le domaine des soins de santé représentent un montant de 180 milliards de dollars par an, soit 5,59 % des dépenses mondiales annuelles de santé. Grâce à cet argent, il serait possible en un an d’approvisionner en eau propre et sûre tous ceux qui en ont besoin de par le monde, de contrôler le paludisme en Afrique, de vacciner 23,5 millions d’enfants de moins d’un an contre la diphtérie, le tétanos et la coqueluche (qui tuent chaque année 2,5 millions d’entre eux) et de quadrupler le budget annuel de l’Organisation mondiale e la santé et de l’Unicef…
Ce sont sur des chiffres solides que se sont basés les enquêteurs de l’EHFCN, aidés par du personnel de chez MacIntyre Hudson LLP et du centre de lutte contre la fraude à l’université de Portsmouth, pour calculer cette estimation annuelle des fraudes qui ne sont pas mises au jour par les différents organismes qui en sont victimes. Le montant des fraudes détectées n’a pas été pris en compte, puisqu’elles font, pour la plupart, l’objet de procédures de recouvrement. Il est intéressant de noter qu’il a parfois fallu beaucoup de persévérance aux auteurs du rapport pour arriver à leurs fins, car les dirigeants des organismes spoliés n’ont pas toujours intérêt à ce que l’ampleur des fraudes soit estimée. Il en va de la crédibilité de leurs services de contrôle et de la qualité de leur travail.

Le constat est sans appel : tous les pays sont concernés. Qu’il s’agisse d’arrêts de travail injustifiés, de médecins ou de patients faisant de fausses déclarations à leur assurance-maladie pour être abusivement remboursés, d’opticiens falsifiant les résultats de leurs examens de vue, les fraudes sont polymorphes. En Europe, ce sont 56 milliards de dollars qui disparaissent ainsi chaque année, au détriment de l’assurance-maladie et des autres organismes. De tels chiffres prouvent à quel point il est nécessaire de renforcer les contrôles si l’on veut éviter que plus de 5 % des budgets annuels de santé ne servent à autre chose qu’à améliorer la qualité des soins et des prestations fournies.

Où l’on reparle de l’indemnisation des médecins et des infirmiers réquisitionnés…

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Des sous pour les réquisitionnésCe n’est qu’avec l’arrêté du 29 décembre 2009 fixant les montants d’indemnisation de certains professionnels de santé en exercice, retraités ou en cours de formation réquisitionnés pour assurer la vaccination dans le cadre de la lutte contre la pandémie grippale que le paiement des médecins et des infirmiers réquisitionnés dans le cadre de la campagne de vaccination contre la grippe A(H1N1) va être possible. Sans la parution de ce texte au Journal officiel du 1er janvier 2010, rien n’était possible, même si la plupart des professionnels concernés étaient persuadés que tout était réglé depuis longtemps… Et tout cela a failli bien plus mal finir puisque le gouvernement a dû avoir recours à une procédure inhabituelle afin de faire plier les parlementaires français pour que l’article prévoyant la rémunération des praticiens et des infirmiers puisse être voté.

Un point est surprenant en l’état actuel des textes : les médecins et les infirmiers libéraux installés ou remplaçants sont les seuls à ne pas voir le montant des indemnités versées multiplié par 2, lorsque le professionnel de santé requis assure la vaccination un dimanche ou un jour férié. Les médecins et les infirmiers retraités, salariés ou les internes bénéficient de cette mesure, mais pas les libéraux… Certes, les médecins et les infirmiers libéraux avaient obtenu une rémunération supérieure à celle des retraités ou des salariés, mais travailler un jour férié pour un libéral est habituellement reconnu comme méritant une récompense.
À part cela, les indemnisations des personnels réquisitionnés sont brutes et conformes à ce que les syndicats médicaux et infirmiers avaient annoncé.

Point rarement abordé, les déplacements n’ont pas été oubliés et les professionnels sont indemnisés pour se rendre dans le lieu de vaccination.
Pour les médecins libéraux installés, remplaçants et retraités ainsi que les médecins des centres de santé, leur indemnisation est calculée sur la base des tarifs prévus par la convention nationale des médecins généralistes et des médecins spécialistes approuvée par l’arrêté du 3 février 2005.
Pour les infirmiers libéraux installés, remplaçants et retraités ainsi que les infirmiers de centres de santé, leur indemnisation est calculée sur la base des tarifs prévus par la convention nationale destinée à régir les rapports entre les infirmières et les infirmiers libéraux et les organismes d’assurance-maladie approuvée par l’arrêté du 18 juillet 2007.
Pour les autres médecins et infirmiers, leur indemnisation est calculée sur la base des tarifs prévus par leur statut, contrat de travail ou convention collective. Le cas échéant, leur indemnisation est calculée sur la base des tarifs appliqués aux professionnels de santé libéraux.
Pour les professionnels de santé en formation, leur indemnisation est calculée sur la base des tarifs prévus par leur statut ou, pour les étudiants en soins infirmiers ainsi que les étudiants en médecine, par l’arrêté du 28 septembre 2001 modifiant l’arrêté du 23 mars 1992 modifié relatif au programme des études conduisant au diplôme d’État d’infirmier. Ces professionnels peuvent, lorsque les circonstances le justifient, bénéficier du remboursement des frais de nuitée sur la base du tarif forfaitaire de 48 euros par nuit.

Les modalités de versement de ces indemnités sont différentes en fonction de la situation des professionnels, mais c’est la « caisse primaire d’assurance-maladie centralisatrice désignée » qui tient les cordons de la bourse et les uns et les autres n’en seront donc que plus vigilants quant à leur rémunération, habitués qu’ils sont à quelques tracas quand il est question du remboursement des soins par la Sécurité sociale.

 

Adoption du projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2010

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

PLFSS 2010 adoptéL’Assemblée nationale et le Sénat ont adopté le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2010. La petite loi comprend au final 97 articles, après que le gouvernement a fait voter des amendements après le passage du projet de loi en commission mixte paritaire, procédure suffisamment rare pour qu’elle soit signalée.

Alors que les parlementaires, au prétexte de ne pas créer de précédent, avaient décidé de ne pas écarter le surcoût lié aux dépenses de santé dues à la grippe A(H1N1) du calcul de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM), le gouvernement a déposé un amendement rétablissant le texte du projet de loi dans sa version d’origine : « En 2010, le surcoût induit par les dépenses exceptionnelles liées à la pandémie grippale n’est pas pris en compte par le comité d’alerte sur l’évolution des dépenses de l’assurance maladie pour l’évaluation, en application de l’article L. 114‑4‑1 du code de la sécurité sociale, d’un risque de dépassement de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie. »
La ministre de la santé, Roselyne Bachelot, a justifié cette mesure en expliquant que « Comme le rappelle régulièrement la Cour des comptes, la détermination de l’ONDAM a pour objectif de contribuer à la régulation des dépenses de soins, alors que, par nature, les dépenses liées à une situation pandémique peuvent difficilement faire l’objet d’une politique de régulation.
D’autre part, le déclenchement d’une procédure d’alerte n’est pas un acte purement théorique, n’est pas une simple annonce, mais – on a tendance à l’oublier – conduirait à mettre en œuvre des mesures de redressement qui auraient pour effet de compenser des dépenses inévitables par des restrictions ultérieures et à suspendre toute revalorisation tarifaire alors même que des négociations conventionnelles sont en cours. »

Depuis plusieurs années, l’assurance responsabilité civile des médecins pose problème et le PLFSS 2010 a été marqué par un nouvel épisode dans les tergiversations à ce sujet. Les parlementaires avaient décidé une substitution de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à l’ensemble des praticiens libéraux après l’expiration du délai de validité de leur couverture d’assurance, à savoir au bout de dix années après leur cessation d’activité. Le gouvernement a refusé que cette mesure soit étendue à tous les médecins libéraux et l’a restreinte aux praticiens exerçant, dans un établissement de santé, une spécialité chirurgicale, obstétricale ou d’anesthésie réanimation, condamnés par une juridiction à réparer les dommages subis par la victime à l’occasion d’un acte lié à la naissance. Pour la ministre de la santé, seuls ces professionnels sont concernés. L’amendement voté fait que, si la victime ne peut pas obtenir l’exécution intégrale de la décision de justice, elle pourra obtenir de l’ONIAM le complément d’indemnisation non versé par le professionnel au-delà du plafond de garantie, le professionnel étant ensuite redevable à l’ONIAM de cette créance, sauf s’il est dans l’incapacité financière, constatée par un jugement, de la payer.
Cette décision, si elle règle le problème de l’indemnisation du patient, ne devrait pas pour autant diminuer les inquiétudes des médecins. À moins de se rendre insolvables une fois à la retraite, beaucoup préféreront choisir des spécialités moins risquées plutôt que de faire courir le risque à leur famille d’avoir à payer des indemnités allant jusqu’à la ruiner une fois le maximum garanti par l’assureur atteint.

L’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) a estimé à 4 % le surcoût des charges sociales et fiscales que doivent supporter les établissements privés à but non lucratif résultant d’obligations réglementaires décidées par le gouvernement. Les parlementaires avaient mis en place un coefficient correcteur compensant ce surcoût inéquitable à leurs yeux. Le gouvernement a une autre vision de l’équité et ce coefficient est supprimé.

L’article L 351-4 du code de la Sécurité sociale prévoit que les femmes assurées sociales du régime général bénéficient d’une majoration de leur durée d’assurance vieillesse d’un trimestre pour toute année durant laquelle elles ont élevé un enfant, dans des conditions fixées par décret, dans la limite de huit trimestres par enfant. La Cour de cassation a jugé, dans un arrêt du 19 février 2009, que le dispositif actuel de majoration de durée d’assurance de 2 ans n’était pas compatible avec l’article 14 de la convention européenne des droits de l’homme qui interdit les discriminations fondées sur le sexe. La mesure proposée, qui s’appliquera aux pensions de retraite prenant effet à compter du 1er avril 2010, remplace le dispositif antérieur par deux majorations distinctes : une première majoration de 4 trimestres sera accordée à la mère à raison de l’incidence sur la carrière de la grossesse et de l’accouchement ; une seconde majoration de 4 trimestres sera accordée au couple, à raison de l’incidence sur la carrière de l’éducation de l’enfant pendant les quatre années suivant sa naissance ou son adoption, alors que les parlementaires avaient réduit cette période à trois ans.

En principe, la phase parlementaire de la procédure législative est terminée.

Projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2010 avant adoption : première partie

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Le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) 2010, dans sa version initiale, comprenait cinquante-quatre articles, auxquels se sont ajoutés vingt-neuf articles additionnels introduits par l’Assemblée nationale. Le Sénat en a modifié vingt-huit, supprimé cinq et a introduit vingt-trois nouveaux articles. Ce sont ces cinquante-six articles qui ont fait l’objet d’un examen en commission mixte paritaire. Voici les points intéressants concernant les 50 premiers articles…

Congé maladie de longue durée, Facebook et assurance

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Congé maladie et FacebookMieux vaut faire attention à ce que l’on affiche sur sa page Facebook lorsque l’on est en congé maladie de longue durée et que l’on reçoit des indemnités d’un assureur privé au Québec. C’est ce que semble avoir appris à ses dépens une Canadienne de 29 ans, en arrêt maladie depuis un an et demi pour une grave dépression, après avoir publié des photos d’elle en train de s’amuser à un spectacle de chippendales et durant ses vacances au soleil.

Arguant de ces photos, son assureur a estimé qu’elle n’était plus déprimée, qu’elle était en mesure de reprendre son travail et a cessé de lui verser ses indemnités. L’agent de cette compagnie à qui elle a pu parler lui a expliqué que ses photos sur Facebook étaient à l’origine de ces décisions. Les protestations de la jeune femme, expliquant qu’elle suivait les conseils de son médecin qui lui avait dit d’oublier ses problèmes en sortant avec des amis et en s’offrant une petite escapade au soleil, n’y ont rien changé. Elle avait même informé son assureur de ce voyage.

La jeune Canadienne a mis l’affaire entre les mains de son avocat, car elle estime que les mesures prises par sa compagnie d’assurances ne sont pas justifiées. Elle s’interroge aussi sur la confidentialité des informations, pourtant réservées aux seuls amis qu’elle accepte, sur sa page Facebook. Si l’assureur santé a reconnu se renseigner sur ses clients à l’aide de Facebook, il a affirmé ne prendre aucune décision relative à un dossier d’indemnisation uniquement sur ce qu’elle peut glaner sur les réseaux sociaux en ligne.

À quand les contrôles de la Sécurité sociale sur Facebook ?

 

Sources : AP sur Lankanewspaper ; CBC News

Responsabilité du médecin qui vaccine contre la grippe A(H1N1)

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Responsabilité du médecin et vaccinationTous les médecins ne sont pas égaux quand il s’agit d’engager leur responsabilité civile professionnelle en vaccinant la population ou les professionnels de santé contre la grippe A(H1N1). Un courrier reçu par des médecins volontaires, émanant de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales du Rhône, le confirme. La couverture assurantielle est différente si le médecin agit sur réquisition ou dans un autre cadre.

Dans le cadre d’une prise en charge classique en l’absence d’une menace sanitaire grave et de réquisition par l’État

Si le médecin vaccine dans le cadre de son activité habituelle, sa situation est régie par le droit commun. Il est normalement couvert, sans clause d’exclusion due à la grippe A(H1N1), par ses différentes assurances.
En cas de dommages causés aux patients, il est couvert par son assurance en responsabilité civile professionnelle, sachant qu’elle est obligatoire (RCP), même si les médecins salariés bénéficient d’un régime particulier. Cette assurance obligatoire comprend une couverture pour les fautes commises lors d’actes de prévention, de diagnostic ou de soins ayant des conséquences dommageables pour les patients.
En cas d’aléa thérapeutique (préjudice du patient sans responsabilité engagée par le professionnel), les dommages sont pris en charge par l’office national d’indemnisation des accidents médicaux des affections iatrogènes et des infections nosocomiaies (ONIAM), si ces dommages dépassent un certain seuil de gravite.
Par contre, pour les dommages que le médecin qui vaccine pourrait lui-même subir, il lui est conseillé de souscrire une assurance non obligatoire qui couvrira les pertes de revenus en cas d’accident ou de maladie, ou qui lui assurera un capital en cas d’invalidité ou de décès !

Dans le cadre d’une réquisition par l’État

Lorsqu’il participe “volontairement” à la vaccination de masse prévue par la campagne décidée par le gouvernement, le médecin est réquisitionné afin de le garantir quant à sa responsabilité.
En cas de dommages causés aux patients, le praticien continue à bénéficier de la couverture de son assurance en responsabilité civile professionnelle, qui se retournera contre l’État si la réquisition a provoqué une aggravation du risque.
En cas de dommages subis par le médecin lui-même, l’État prend en charge les dommages subis par le praticien (y compris en cas de décès), sauf en cas de dommage imputable à un fait personnel détachable du service (violence intentionnelle, par exemple).
Lorsque le médecin vaccine dans le cadre de mesures d’urgence, face à des mesures sanitaires graves, pour lutter contre une maladie transmissible, sur réquisition de l’autorité publique, il ne peut être tenu pour responsables des dommages résultant de la prescription ou de l’administration d’un médicament en dehors des indications thérapeutiques ou des conditions normales d’utilisation prévues par son autorisation de mise sur le marché (art. L 3131-3 du code de la santé publique).

Tout n’est pas si simple

Malheureusement, si tout semble clair, c’est loin d’être le cas. Les médecins du travail, par exemple, ne sont couverts par leur employeur que pour les vaccinations obligatoires quand il vaccine les salariés d’un établissement de soins dont il a la charge, puisque seule la réalisation de ces vaccinations fait partie de leurs missions. Mais avec la grippe A(H1N1), il s’agit d’une vaccination non obligatoire, pour laquelle les médecins du travail vont, en plus, devoir vacciner des patients dont ils n’assurent pas obligatoirement le suivi ! Et la complexité ne s’arrête pas là, puisque des praticiens des services interentreprises peuvent intervenir accessoirement dans un établissement de soins relevant de la fonction publique hospitalière. En effet de nombreuses directions d’établissements de soins, qu’ils relèvent du privé ou de la fonction publique hospitalière, ont demandé à leur médecin du travail de vacciner les salariés de l’établissement, mais également les praticiens libéraux qui interviennent au sein de l’établissement. N’étant pas salariés de l’établissement de soins (privé ou public), ces praticiens ne bénéficient pas d’un suivi en santé au travail.
Le ministère de la santé a listé des centres spécifiques pour la vaccination des médecins libéraux et diffuse dans la presse médicale un message à l’intention des praticiens : « la vaccination contre la grippe pandémiqe A(H1N1) vous est proposée pour vous protéger […] si vous travaillez dans un établissement de santé, vous pourrez vous faire vacciner sur votre lieu de travail […] ».

Alors que jusque-là les médecins inspecteurs de travail donnaient comme consignes aux praticiens du travail de ne pas aller au-delà de leurs missions en pratiquant la vaccination contre la saisonnière, immunisation non obligatoire, les voilà bien embarrassés pour ce qui est de la vaccination contre la grippe A(H1N1) et des mesures prises par les pouvoirs publics. Des médecins du travail de services autonomes de santé au travail ont eu la surprise de se voir répondre par leur médecin inspecteur régional du travail qu’une grande société d’assurance en responsabilité civile professionnelle disposait de contrats « qui garantissent bien les vaccinations obligatoires et facultatives pour le médecin du travail comme la grippe prévue par la circulaire du 26-04-1998 » et qu’il fallait qu’ils vérifient bien leurs contrats de responsabilité civile quels qu’ils soient, avec pour précision que « ceci est essentiellement valable à ce jour pour les médecins du travail hospitaliers vaccinateurs( en CHU ou dans les hôpitaux ayant un SAMU) ».

Alors que le droit français a reconnu que les médecins salariés étaient couverts par l’assurance responsabilité civile de leur employeur, les médecins du travail sont mis dans une situation délicate où on leur impose de prévoir un contrat personnel parce qu’on leur demande d’outrepasser leurs missions, preuve qu’il existe bien un risque…
Autre paradoxe : les laboratoires pharmaceutiques, et donc leurs assureurs, ont obtenu la garantie de l’État pour ne pas avoir à indemniser d’éventuelles victimes des effets indésirables du vaccin et il est demandé aux médecins de prendre des garanties au cas où ils subiraient eux-mêmes des dommages en vaccinant les autres…
Qu’ils s’agissent des contrats pour pertes de revenus en cas d’accident (ou de maladie), de capital en cas d’invalidité (ou de décès) ou de garanties pour être couverts en pratiquant un vaccin n’entrant pas dans leurs missions, cela signifie des dépenses supplémentaires pour les praticiens. Et encore, si les assureurs acceptent de prendre le risque. Pourquoi imposer ceci à des médecins alors que l’on réquisitionne les autres ?

Et la responsabilité pénale ?

Dernier élément, la responsabilité pénale des médecins qui vaccinent. Qu’ils soient prescripteurs ou qu’ils injectent, la question se pose. Même si les autorités se veulent rassurantes, nombreux sont les professionnels de santé qui refusent de se faire eux-mêmes vacciner. Obscurantisme et manque d’information, diront les uns ; conscients des risques et échaudés par les “affaires” du sang contaminé et de l’amiante, où les gouvernants « responsables, mais pas coupables » et les experts ont montré à quel point les intérêts économiques primaient sur la santé publique, rétorqueront les autres. Quelle crédibilité accordé à l’ « Ayez confiance » des pouvoirs publics et des experts des autorités de santé quand l’État est obligé d’apporter sa garantie aux fabricants au cas où ils seraient poursuivis pour des effets indésirables plus désastreux que prévu ? Que dire des médecins qui vaccinent leurs confrères et la population, alors qu’ils refusent de se faire eux-mêmes immuniser ?
Les médecins non réquisitionnés seront sans doute bien seuls lorsqu’il sera question de répondre à des mises en examen pour empoisonnement. Délicate défense puisqu’il ne sera pas question de dire « on ne savait pas ». Le juge aura beau jeu de condamner le praticien pour ne pas avoir appliqué un principe de précaution.

Le plus effrayant, c’est qu’alors que les essais servant à déterminer si des effets indésirables graves peuvent survenir avec les vaccins contre la grippe A(H1N1) vont, étant donné la rapidité avec laquelle ils ont été mis au point, consister en la vaccination de la population et en sa surveillance, les premiers “cobayes” sont les professionnels de santé les mieux à même de prendre en charge les patients. Si des effets indésirables graves se dévoilent, ce sont les professionnels censés les prendre en charge qui en seront les premières victimes, fragilisant ainsi le système de santé tout entier.

Ces dernières années près de 2 500 personnes par an sont mortes de la grippe saisonnière, deuxième cause de mortalité par maladie infectieuse en France, dans l’indifférence médiatique la plus totale. Alors que la grippe A(H1N1) a été reconnue comme ayant un taux de mortalité plus faible et même si la vaccination a été considérée comme un devoir déontologique par le conseil national de l’ordre des médecins, est-il vraiment nécessaire pour les professionnels de santé d’engager leur responsabilité à l’heure actuelle ?

 

Secteur optionnel pour les médecins conventionnés

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Un protocole d’accord tripartite entre les syndicats médicaux représentatifs pour la convention médicale, l’union nationale des caisses d’assurance-maladie (UNCAM) et l’union nationale des organismes complémentaires d’assurance-maladie (UNOCAM) a été signé récemment après une longue période de négociations. Il porte sur la création d’un nouveau secteur conventionnel appelé « secteur optionnel ».