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La fiabilité des experts médicaux discutée au Royaume-Uni

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Difficile équilibre entre avis du médecin expert et réalité des faits en justiceL’Angleterre et le Pays de Galles réfléchissent à l’opportunité pour leurs juges de devoir s’assurer de la fiabilité des preuves basées sur l’avis des experts avant qu’une affaire ne passe devant la cour. Selon un article publié dans le British Medical Journal, le 9 avril 2009, intitulé Expert evidence should be reliability tested, says law reform body, plusieurs affaires récentes montreraient qu’il existe un problème qu’il est urgent de régler à ce sujet. Les expertises seraient admises trop facilement ce qui pourrait être à l’origine d’acquittements ou de condamnations injustifiés.

Afin d’actualiser la loi, une commission a été mise en place pour faire des propositions au gouvernement. Les juges pourraient recevoir des recommandations sur la façon d’évaluer la fiabilité des expertises. La preuve devra être fondée sur des principes, des techniques et des hypothèses solides et les experts devront pouvoir les justifier. Pour cette commission, les juges et les jeunes avocats devraient être formés pour réagir si les experts sortent de leur domaine de compétences, émettent des avis basés sur des hypothèses non fondées ou présentent des preuves d’une façon inappropriée. Des expertises d’une fiabilité douteuse font foi devant les tribunaux sans que les avocats de la défense s’y opposent avec virulence et les jurys en tiennent malheureusement compte pour l’issue du procès.

Les exemples d’expertises douteuses ayant entraîné une condamnation ne manquent pas : Sally Clarke et Angela Cannings — toutes deux condamnées en première instance pour avoir tué leur bébé et qui ont été innocenté en appel — ou des affaires dans lesquelles des parents ont été condamnés pour avoir « secoué » leur bébé. Dans l’affaire Clarke, un pédiatre a pu témoigner sur un sujet qui ne relevait pas de son domaine de compétences et donner une appréciation dénuée de fondement et mensongère sur la probabilité de décès multiples d’enfants au sein d’une même famille. Ses propos n’ont fait l’objet d’aucune vérification afin de s’assurer que ce témoignage était suffisamment fiable pour être entendu par le jury.
Quatre affaires de bébé secoué, plaidées en appel, ont remis en cause la façon dont le corps médical déduisait qu’une blessure à la tête était non-accidentelle. La cour a prouvé que dans de rares cas les blessures pouvaient résulter d’une chute sans gravité ou de gestes non violents, contrairement à ce qu’avaient affirmé les experts.

Pour le responsable de la commission en charge des propositions visant à faire évoluer la loi, les expertises, en particulier les preuves scientifiques, peuvent avoir une grande influence sur un jury. Il est donc indispensable que ces témoignages ne lui soient livrés que s’ils reposent sur une base solide permettant d’apprécier l’innocence ou la culpabilité d’un accusé. Les tribunaux doivent pouvoir s’assurer de la crédibilité d’une expertise avant d’en user.
La commission a fait des propositions dans ce sens et souhaite recueillir l’avis des experts et des scientifiques à ce sujet. Un forum de discussion sur Internet, traitant de la recevabilité des expertises dans les procédures criminelles en Angleterre et au Pays de Galles, a été ouvert à cet effet : www.lawcom.gov.uk/expert_evidence.htm.

La France n’est donc pas la seule à s’interroger sur le rôle des experts médicaux au sein des procédures judiciaires. L’article du British Medical Journal, écrit par Clare Dyer, montre que même un pays ayant un système juridique différent de celui de l’Hexagone peine à apprécier la valeur probante d’une expertise basée sur une science inexacte comme l’est la médecine et sur la subjectivité consciente ou non de l’avis d’un expert. Deux experts en arrivent rarement à des conclusions strictement identiques. Il est peut-être temps de réfléchir à une nouvelle approche de l’expertise médicale judiciaire avec, pourquoi pas, un avis obtenu dans certains cas avec des outils basés sur le Web 2.0 ?

Tatouage et piercing : nouvelles règles de bonnes pratiques

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Bonnes pratiques du tatouage et du piercingFini le temps des tatouages et des piercings dans des arrières boutiques sombres et insalubres si l’on en croit la loi. Il faut dire que les problèmes infectieux liés à ces pratiques ont conduit de nombreux jeunes (et moins jeunes) aux urgences, avec parfois des conséquences gravissimes. Dans un grand hôpital parisien, il existe même un service spécialisé dans ce type de problèmes.
Deux arrêtés viennent ainsi d’être publiés au Journal officiel du 20 mars 2009. L’arrêté du 11 mars 2009 relatif aux bonnes pratiques d’hygiène et de salubrité pour la mise en oeuvre des techniques de tatouage par effraction cutanée, y compris de maquillage permanent et de perçage corporel, à l’exception de la technique du pistolet perce-oreille et l’arrêté du 11 mars 2009 relatif aux bonnes pratiques d’hygiène et de salubrité pour la mise en oeuvre du perçage du pavillon de l’oreille et de l’aile du nez par la technique du pistolet perce-oreille.

Le code de la santé publique définit maintenant les règles générales d’hygiène et de salubrité applicables à la mise en oeuvre des techniques de tatouage par effraction cutanée, y compris de maquillage permanent et de perçage corporel avec ou avec ou sans pistolet. Même le cas des locaux provisoires tels que ceux aménagés lors de manifestations et de rassemblements est pris en compte par ces textes.

Les locaux du tatoueur doivent impérativement comporter au minimum trois pièces : l’une servant de salle technique où sont uniquement réalisés les tatouages, une autre servant à la stérilisation des instruments et une dernière pour l’entreposage des déchets et du linge sale. Les matériaux utilisés pour le sol, les plans de travail, ainsi que le mobilier doivent être lessivables. Les produits de désinfection ne sont pas laissés au libre choix du tatoueur, mais sont définis par les textes, la procédure d’hygiène des mains y est même détaillée. Gants à usage unique et protocole de désinfection de la peau ou des muqueuses à tatouer sont indiqués.
Si le tatoueur fait aussi les piercings, il devra disposer d’une quatrième pièce, servant de salle technique dédiée uniquement à cette pratique. Les conditions de réalisation de ces gestes sont définies par la loi, tout comme les conditions relatives à l’hygiène et à la désinfection. Les conditions d’utilisation du pistolet perce-oreille (qui sert aussi à percer les ailes du nez) sont elles aussi réglementées.

Il peut être intéressant de rappeler que des dispositions de vigilance existent pour les produits de tatouage. Ces deux dernières années ont vu plusieurs textes réglementer la profession comme le décret n° 2008-149 du 19 février 2008 fixant les conditions d’hygiène et de salubrité relatives aux pratiques du tatouage avec effraction cutanée et du perçage, et modifiant le code de la santé publique (dispositions réglementaires) et l’arrêté du 12 décembre 2008 pris pour l’application de l’article R 1311-3 du code de la santé publique et relatif à la formation des personnes qui mettent en œuvre les techniques de tatouage par effraction cutanée et de perçage corporel.

Ces textes devraient permettre de lutter plus efficacement contre les échoppes douteuses et les tatoueurs à la sauvette qui font courir des risques à leurs clients. Les professionnels sérieux sont sensibilisés à l’hygiène depuis déjà bien longtemps.

 

L’information continue

Circulaire n° DGS/RI3/2009/197 du 6 juillet 2009 concernant la réglementation relative à la mise en œuvre des techniques de tatouage par effraction cutanée y compris de maquillage permanent et de perçage corporel

Désaccord entre les avocats et les assureurs sur l’indemnisation des dommages corporels

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

AvocatL’association française de l’assurance représente les assureurs et regroupe la Fédération française des sociétés d’assurances (FFSA) et le Groupement des entreprises mutuelles d’assurances (GEMA). Elle a proposé récemment un Livre blanc qu’elle considère être une clarification de l’indemnisation du dommage corporel et des mesures d’accompagnement des victimes.

Le Conseil national des barreaux (CNB) représente, quant à lui, la profession d’avocat. Réuni en Assemblée générale le 8 novembre 2008 et ayant pris connaissance du Livre blanc sur l’indemnisation du dommage corporel, le CNB juge inacceptables les propositions faites par les assureurs. Les avocats rejettent toute idée de recours à des barèmes, même indicatifs.

Une motion, adoptée à l’unanimité, explique quelles sont les raisons de ce désaccord. Le CNB :
– s’inquiète de l’initiative de ceux-ci qui tend à s’approprier la maîtrise de l’évaluation des dommages des victimes sous couvert de la garantie d’un équilibre prime/sinistre/bénéfice ;
– s’oppose à une logique de grille et de codage qui serait l’outil d’une barémisation de l’indemnisation ;
– considère qu’une réglementation des postes de préjudice corporel, même indicative, ferait perdre à la nomenclature Dintilhac l’une de ses qualités essentielles : son évolutivité ;
– s’oppose à des missions d’expertise type contraires au principe d’individualisation de la réparation et invite à la mise en place d’un groupe de travail sur l’expertise médicale en présence de tous les acteurs pour poser les conditions d’une expertise équilibrée ;
– rejette l’idée de recourir à des référentiels ou barèmes, fussent-ils indicatifs pour évaluer les préjudices ;
– constate que toute expérience de cette nature a conduit à figer l’indemnisation au seul préjudice des victimes ;
– demande aux pouvoirs publics d’élaborer chaque année une table de capitalisation prenant en compte l’évolution du taux de placement de l’argent et la table de mortalité ;
– s’oppose formellement à toute réforme qui mettrait en péril les acquis de l’article 25 de la loi du 21 décembre 2006 ;
– déplore que les assureurs puissent envisager de s’ingérer dans le projet de vie des victimes, rappelant qu’elles doivent pouvoir librement choisir leurs conditions de vie sous le seul contrôle du juge.

Pour le Conseil national des barreaux, la réparation du dommage corporel doit être personnalisée, adaptée à chaque situation pour répondre aux principes de réparation intégrale et d’individualisation, qu’en aucun cas la maîtrise de l’indemnisation ne peut être laissée aux assureurs que ce soit au travers de barèmes ou de méthodes de calcul même prétendument indicatives. Seul le juge peut garantir l’adaptation de la réparation à chaque situation et la nécessaire évolutivité de ce droit.

Le CNB diffuse donc un communiqué de presse répondant point par point aux propositions des assureurs.

Il est intéressant de faire un parallèle entre ces référentiels assurantiels et ceux proposés aux médecins par la Haute Autorité de santé (HAS). Il serait tout à fait possible de reprendre les arguments des avocats à l’encontre des référentiels de l’HAS. Si chaque situation est différente pour l’indemnisation, pourquoi ne pas estimer que chaque patient est différent. Même si les deux professions ont parfois du mal à s’entendre, les médecins pourraient puiser quelques inspiration et éléments de réflexion dans la motion des avocats. L’avocat défend la victime, pourquoi le médecin ne défend-t-il pas le patient ?