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Choix du médecin, du dentiste ou d’un autre professionnel de santé et remboursement par une mutuelle

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Jurisprudences

RemboursementUn patient affilié à la Mutuelle générale de l’éducation nationale (MGEN) a demandé la prise en charge de soins dentaires prévue à son contrat. S’étant adressé pour la réalisation des soins à un praticien n’ayant pas adhéré au protocole d’accord conclu entre la mutuelle et la Confédération nationale des syndicats dentaires (CNSD), il a bénéficié d’un remboursement inférieur à celui applicable aux soins délivrés par les praticiens ayant adhéré au protocole. Mécontent que le choix du dentiste lui ait fait perdre un peu plus de neuf cents euros, il a saisi le juge de proximité pour obtenir réparation de ce qu’il a estimé être un préjudice.

Alors que la juridiction de proximité déboute de sa demande le patient le 19 février 2010 après une mise en délibéré, l’avocat de la MGEN a présenté le 9 mars 2010 une question prioritaire de constitutionnalité « au regard du principe d’égalité devant la loi et de l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, de l’article L 122-1, alinéa 3 du code de la mutualité, en ce que ce texte interdirait aux mutuelles d’instaurer des différences dans le niveau des prestations en fonction du choix de l’assuré de recourir ou non à un praticien adhérent à un protocole de fournitures de soins ou membre d’un réseau de soins, dès lors que d’autres organismes complémentaires d’assurance-maladie ne sont pas soumis à une telle prohibition ». Résultat, la Cour de cassation a eu à statuer rapidement sur cette question et en est arrivée à une décision qui a fait le bonheur du patient.

Peu importe que, selon la mutuelle, « la mise en oeuvre de deux systèmes de remboursement par la mutuelle en application du protocole conclu avec la CNSD n’est nullement discriminatoire dès lors que chacun des deux systèmes peut être librement choisi par le patient, et qu’il y a égalité entre tous les adhérents à la mutuelle qui choisissent de s’adresser soit à un dentiste conventionné, soit à un dentiste non conventionné », la Cour de cassation n’a pas suivi cette voie (n° de pourvoi : 09-10241). Si pour cette dernière il n’est pas nécessaire d’ordonner la réouverture des débats pour qu’il soit procédé à l’examen de cette question prioritaire de priorité, « selon l’article L 112-1, alinéa 3, du code de la mutualité, les mutuelles et leurs unions ne peuvent instaurer de différences dans le niveau des prestations qu’elles servent qu’en fonction des cotisations payées ou de la situation de famille des intéressés. » La juridiction de proximité a violé ce texte en appliquant « un protocole d’accord conclu entre une mutuelle et une organisation représentative des chirurgiens-dentistes fixant des tarifs de remboursement distincts pour un même acte, ce dont il résulte une différence dans le niveau des prestations de la mutuelle qui n’est fonction ni des cotisations payées, ni de la situation de famille des adhérents ».

Il s’agit là d’une décision importante à un moment où les réseaux de soins ont le vent en poupe. S’ils peuvent être justifiés par des intérêts de santé publique, il semble que les intérêts économiques de ce système pour les mutuelles viennent de trouver une de leurs limites.

Infection nosocomiale, établissements de santé et responsabilité

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Jurisprudences

Infection nosocomialeÀ qui revient la responsabilité de l’infection nosocomiale qui emporte un patient qui a passé les cent neuf derniers jours de sa vie dans six établissements de santé différents qui lui ont prodigué des soins et où il a subi divers examens ? C’est à cette question que vient de répondre la première chambre civile de la Cour de cassation dans un arrêt du 17 juin 2010 (pourvoi no 09-67011).

Pour la Cour, « lorsque la preuve d’une infection nosocomiale est apportée mais que celle-ci est susceptible d’avoir été contractée dans plusieurs établissements de santé, il appartient à chacun de ceux dont la responsabilité est recherchée d’établir qu’il n’est pas à l’origine de cette infection ».

C’est le 21 mai 1996 (pourvoi no 94-16586) que la Cour de cassation énonce pour la première fois qu’une clinique est présumée responsable d’une infection contractée par un patient lors d’une intervention pratiquée dans une salle d’opération, à moins de prouver l’absence de faute de sa part. Cet arrêt marque un revirement de jurisprudence en la matière puisqu’avant cet énoncé la victime de l’infection nosocomiale contractée dans une salle d’opération devait faire la preuve de son origine. La charge de la preuve de la faute s’est ainsi vue renversée.

Depuis le 29 juin 1999 (pourvois no 97-14254, 97-15818, 97-21903), c’est même une présomption de faute renforcée qui pèse sur les établissements de soins en matière d’infection nosocomiale. « Un établissement de santé […] est tenu vis-à-vis de son patient, en matière d’infection nosocomiale, d’une obligation de sécurité de résultat dont il ne peut se libérer qu’en rapportant la preuve d’une cause étrangère. »

Tout le monde s’accorde à dire qu’établir, pour un établissement de santé, que la contamination provient d’une source qui lui est étrangère est une preuve particulièrement difficile à rapporter pour ce dernier et que la jurisprudence est donc favorable aux patients en ce domaine.

Question prioritaire de constitutionnalité

Écrit par Marie-Thérèse Giorgio le . Dans la rubrique Le fond

Tout justiciable a le droit de soutenir qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la constitution garantit.


La question prioritaire de constitutionnalité est entrée en vigueur le 1er mars 2010, suite à la loi organique 2009-1523 du 10 décembre 2009 relative à l’application du nouvel article 61-1 de la Constitution et sa présentation a été précisée par la circulaire du 24 février 2010, applicable au 1er mars 2010.Une nouvelle voie vers la Constitution

Tout commence au cours d’une instance lorsqu’un justiciable estime qu’une disposition législative porte atteinte aux droits et libertés que la constitution garantit. Il peut alors soulever la question prioritaire de constitutionnalité, et ce, devant l’ensemble des juridictions civiles, pénales (d’instruction ou de jugement) ou administratives, à l’exception d’une cour d’assises. Les juridictions qui traitent des conflits de travail, conseils de prud’hommes, tribunaux des affaires de Sécurité sociale, sont également concernées.

Un nouvel atout pour le justiciable

Le justiciable peut être une personne physique ou morale, comme une organisation syndicale, par exemple. Jusqu’à présent, un syndicat n’était pas habilité par l’article 61 alinéa 2 de la constitution à saisir le conseil constitutionnel d’une loi avant sa promulgation. Cette nouvelle voie de droit va donc augmenter l’emprise des partenaires sociaux sur les textes législatifs.

La question doit être présentée dans un écrit distinct et motivé.

Trois conditions ont été fixées aux juridictions saisies pour que la question prioritaire de constitutionnalité soit transmise au Conseil d’État ou à la Cour de cassation dont elle relève :
— la disposition législative contestée est applicable au litige ou à la procédure, ou constitue le fondement des poursuites ;
— si la disposition législative a déjà été reconnue conforme à la constitution par le Conseil constitutionnel, elle ne pourra pas être contestée sauf changement de circonstances de droit qui affectent la portée de la disposition législative ;
— la question n’est pas dépourvue de caractère sérieux. Les questions fantaisistes ne seront pas retenues, de même les questions dont le seul but serait de retarder la procédure.

La circulaire du 24 février 2010 précise qu’à cette occasion, les juges du fond devront se livrer « à une analyse sommaire de la compatibilité de la disposition contestée avec les droits et libertés que la Constitution garantit ».

Les droits et libertés que la Constitution garantit

La juridiction saisie doit statuer « sans délai » sur la réunion de ces 3 conditions (d’où la qualification de prioritaire donnée à la question de constitutionnalité) et transmettre, si elle l’estime nécessaire, la question à la haute cour dont elle dépend (Conseil d’État ou Cour de cassation) dans les 8 jours. La juridiction attend ensuite la décision du Conseil d’État ou de la Cour de cassation pour statuer.Le plateau de la balance de la justice Son temps d’examen s’impute sur le temps de la procédure et ne la retarde pas. La question doit aussi être examinée avant une éventuelle exception d’inconventionnalité.

Dans un second temps, la question prioritaire de constitutionnalité est filtrée par les deux hautes cours afin de ne pas encombrer inutilement le Conseil constitutionnel. Le Conseil d’État ou la Cour de cassation doivent se livrer à un contrôle approfondi de la question et ne transmettre au Conseil constitutionnel que des questions nouvelles ou qui présentent un caractère sérieux. Elles disposent de 3 mois pour décider de transmettre ou non la question prioritaire au Conseil constitutionnel pour examen.
Le Conseil constitutionnel dispose à son tour de 3 mois pour statuer sur les questions transmises. Sa décision motivée est notifiée aux parties, communiquée au Conseil d’État ou à la Cour de cassation, à la juridiction devant laquelle la question prioritaire de constitutionnalité a été soulevée, au Président de la République, au premier ministre, aux présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat qui peuvent adresser leurs observations à ce sujet au Conseil constitutionnel. La décision est publiée au Journal officiel.

La juridiction informée de la décision du Conseil constitutionnel peut alors poursuivre l’instance en se conformant à cette décision. Le Conseil constitutionnel exerçait jusqu’à présent un contrôle de constitutionnalité des lois a priori ; la question prioritaire de constitutionnalité introduit désormais en France un contrôle de constitutionnalité des lois a posteriori.

Limitation du nombre de Français faisant des études médicales ou paramédicales en Belgique : du nouveau

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Après avoir restreint le nombre de places disponibles en médecine ou dans des cursus paramédicaux pour les étudiants non résidents, la Belgique pourrait se voir contrainte de faire marche arrière. La décision est entre les mains de la Cour constitutionnelle de ce pays, mais sa marge de manoeuvre est étroite suite aux conclusions de la Cour de justice de l’Union européenne.

Les médecins généralistes interdits de Cs

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Jurisprudences

La médecine libérale dans un cul de sacLa Cour de cassation a tranché le 8 avril 2010 : en l’état actuel du droit, même si la médecine générale est devenue une spécialité à part entière depuis 2004 et que de nombreux praticiens ont fait qualifier leur diplôme comme tel auprès de leur conseil de l’ordre, les médecins généralistes n’ont pas le droit d’utiliser la lettre-clé Cs (pour consultation spécialisée) pour coter leurs actes. Ils doivent continuer à utiliser pour le remboursement Sécurité sociale la lettre-clé C et le tarif à 22 euros qui s’y attache. Il en va de même pour les lettres-clé V et Vs (pour les visites à domicile).

Dans son arrêt (pourvoi n° 09-13772), la Cour de cassation a décidé qu’un médecin généraliste n’exerçait pas, à titre exclusif, une spécialité relevant des termes prévus par la convention nationale signée entre les médecins et l’assurance-maladie ou par les nombreux autres textes relatifs à la qualification des praticiens. Que le médecin est fait valider son diplôme comme qualifiant pour la spécialité de médecine générale n’y change rien.

Voilà qui ne devrait pas satisfaire ces praticiens qui espéraient une reconnaissance juridico-financière de leur “nouvelle” spécialité. Ils leur restent à s’en remettre au chef de l’État qui, au lendemain d’élections régionales qui n’ont pas été favorables au parti dont il est issu et sans doute après en avoir analysé les résultats par catégories socioprofessionnelles, a affirmé que la médecine de proximité était l’une des priorités de la politique qu’il entendait mener dans un futur proche.

La médecine générale est actuellement en crise, tout comme les autres composantes de la médecine libérale. Le burn-out des praticiens, le choix du salariat ou de modes d’exercice alternatifs et une démographie savamment orchestrée depuis de nombreuses années pour aboutir à une pénurie de médecins censée générer des économies de santé en réduisant l’offre ou en obligeant au transfert des tâches (plus que des compétences) vers des professionnels paramédicaux ou de la santé commerciale (comme les opticiens ou les audioprothésistes) à moindre coût expliquent en grande partie la frustration qui s’exprime actuellement si l’on en croit nombre de généralistes ou de spécialistes.

Jean-Luc Maupas explique, dans le bulletin d’information de janvier 2010 du conseil départemental de l’ordre des médecins de Seine-Maritime qu’il préside, que depuis 1997 « le nombre de nouveaux inscrits choisissant l’exercice salarié a dépassé celui des jeunes confrères optant pour l’exercice libéral, exercice séculairement dominant en France. » Il contacte aussi qu’en 2009, le tableau départemental, comme le tableau national de l’ordre des médecins, montre que cinq nouveaux inscrits seront rémunérés par un salaire et un seulement par des honoraires. Pour lui, « C’est, à l’évidence, un véritable changement de la pratique médicale qui, sans infléchissement choisi ou imposé, fait penser que le XXIe siècle sera celui du salariat médical dominant et, peut-être, qui sait, un jour exclusif. » À l’opposé des discours des principaux syndicats de médecins qui donnent l’impression de vouloir défendre l’exercice libéral, ce constat d’instances ordinales semble résigné et fataliste. Il s’accompagne d’ailleurs d’un appel aux médecins salariés pour qu’ils s’investissent plus au sein de l’ordre, sans doute pour pallier le désintérêt qu’ont montré les libéraux pour les élections ordinales, à l’image de celui des Français pour les élections régionales. Beaucoup ont l’impression d’être coupés de décisions nationales plus politiciennes qu’en prise directe avec les réalités de leur vie quotidienne. La crise de confiance est réelle.

Dans ces conditions, des praticiens en viennent même à se demander dans quelle mesure le rapport confié par le chef de l’État au président du conseil national de l’ordre des médecins sur une réforme de l’exercice libéral, surtout après avoir imposé la présence au sein du groupe de travail chargé de le rédiger de Christian Saout, n’est pas là pour éloigner un peu plus les futurs médecins du choix de l’exercice libéral. Remplacer des libéraux, souvent dociles, mais parfois frondeurs, par des praticiens salariés au service exclusif d’une politique sociale, est un rêve pour beaucoup. Peu importe que les régimes qui ont choisi cette voie n’aient pas fait leurs preuves, seule compte parfois l’idéologie, la volonté d’affirmer son pouvoir ou la démagogie…

Acheter ses médicaments sur Internet : oui, mais…

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Vers  une vente des médicaments par InternetBien peu de secteurs résistent à la déferlante Internet couplée à une législation européenne profondément tournée vers le commerce… La pharmacie d’officine est en train d’en faire l’expérience. Après avoir donné l’illusion aux pharmaciens que la vente de médicaments sans ordonnance était une aubaine financière, les impliquant ainsi toujours un peu plus dans une politique d’économies de santé basée sur le déremboursement, le transfert de tâches et la substitution, c’est en période postélectorale propice aux décisions s’attaquant aux monopoles ou aux professions médicales, que les pouvoirs publics, en la personne de Roselyne Bachelot, ministre de la santé, viennent de rappeler aux bons souvenirs de tous la jurisprudence “DocMorris” de la Cour de justice des communautés européennes (CJCE) ouvrant la voie à la vente des médicaments non soumis à prescription par Internet.

Comme souvent en matière de transposition des directives ou d’intégration des jurisprudences de la CJCE, la France a pris son temps pour tirer les conséquences des décisions prises au niveau européen. C’est, en effet, le 11 décembre 2003 qu’un arrêt a été rendu en réponse à une question préjudicielle posée par le Landesgericht (tribunal du Land) de Francfort-sur-le-Main dans le cadre d’une procédure engagée par les fédérations et associations de pharmaciens allemands contre la société DocMorris. Cette dernière propose à la vente par Internet des médicaments soumis ou non à prescription médicale, notamment vers le public allemand, alors qu’elle est établie aux Pays-Bas à cinq kilomètres de la frontière germano-néerlandaise. « C’est sur la base de la législation allemande alors en vigueur que cette instance avait été engagée. En effet, cette législation interdisant la vente par correspondance des médicaments dont la délivrance est réservée exclusivement aux pharmacies et qualifiant d’illégale toute publicité tendant à favoriser une telle vente par correspondance, le Deutscher Apothekerverband (DAV) a engagé une procédure contentieuse à l’encontre de DocMorris devant les juridictions allemandes. Le litige s’inscrivant dans un contexte communautaire et transfrontalier, le juge allemand a décidé de surseoir à statuer afin de poser des questions préjudicielles à la CJCE », comme l’expliquait un rapport de l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et techniques de février 2005. Ce document, disponible sur le site du Sénat, aide à comprendre les conséquences et les enjeux de cette jurisprudence qui a autorisé, d’une façon ou d’une autre, la vente des médicaments par Internet.

Après en avoir fait augmenter le nombre ces derniers temps, Roselyne Bachelot s’est, pour l’instant, contentée de restreindre le champ de réflexion aux médicaments qui ne font pas l’objet d’une prescription, comme l’implique l’arrêt DocMorris. Rien d’étonnant à cela quand on se souvient aussi du rapport remis à Nicolas Sarkosy, alors ministre de l’économie, des finances et de l’industrie, par Michel Camdessus intitulé Le sursaut – vers une nouvelle croissance pour la France. Il y était question de la distribution des médicaments : « Le cas des pharmacies est également spécifique à la France. Si partout en Europe l’activité de pharmacie est encadrée, cet encadrement est beaucoup plus strict en France puisqu’il concerne la répartition du capital : un pharmacien ne pouvant être propriétaire de plus d’une officine, la constitution d’une chaîne officinale permettant une diminution des prix est impossible. Dans le même secteur, la France est l’un des rares pays à étendre le monopole de vente des médicaments sur prescription aux médicaments hors prescription, ce qui empêche une distribution plus large accompagnée d’une diminution des prix. »

Face aux pressions économiques, les « oui, mais… » liés à la santé publique, comme pour les dispositifs médicaux tels que les lentilles de contact et leurs produits d’entretien, mettent quelques années à être balayés. Ils finissent toujours par l’être jusqu’à ce que des “incidents” sanitaires, à l’origine du handicap ou de la mort de quelques centaines de citoyens européens, quand ce n’est pas quelques milliers, viennent freiner, pour un temps, les ardeurs des promoteurs d’une toujours plus grande liberté de circulation des produits et des biens visant à favoriser le commerce sans qu’elle aille de pair avec un contrôle sanitaire renforcé de ces nouveaux modèles de distribution.

Internet n’est pas le diable et les pays qui autorisent, depuis de nombreuses années la vente des médicaments sur le Web, y compris ceux nécessitant une prescription, peuvent même avoir un système de santé considéré comme meilleur que celui présent dans l’Hexagone. Les Pays-Bas en sont le parfait exemple, reconnu premier système de santé en Europe pour 2009. La contrefaçon de médicaments n’y fait pas plus de ravages qu’ailleurs et les patients consommateurs ne semblent pas s’en plaindre. Internet n’a d’ailleurs pas le monopole en ce domaine, puisque les réseaux de distribution classiques sont confrontés régulièrement aux produits contrefaits. La vigilance exercée les “vrais” professionnels de santé et par les patients, dans le respect des prescriptions médicales, y joue un rôle de garde-fou qu’on le se plaît parfois à minimiser.
Il semble donc que ce ne soit pas tant la vente des médicaments par Internet qui représente un danger (si ce n’est le risque économique pour les pharmacies de proximité) que l’absence de rigueur dans le contrôle de ceux qui les vendent…

Délai de réflexion avant chirurgie

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Jurisprudences

Délai de réflexion avant chirurgieLe devoir d’information du chirurgien, comme celui des autres professionnels de santé, est inscrit dans la loi. Nul ne peut s’y soustraire hors du contexte de l’urgence engageant le pronostic, mais cette obligation n’est habituellement sanctionnée qu’autant qu’il en est résulté pour le patient une perte de chance de refuser l’acte médical et d’échapper au risque qui s’est réalisé. Le code de la santé publique n’impose pas pour autant de façon explicite un délai de réflexion devant être accordé au patient, après qu’il ait reçu cette information, pour qu’il puisse prendre une décision de façon sereine. La première chambre civile de la Cour de cassation, dans un arrêt du 11 mars 2010 (pourvoi no 09-11270) vient de rappeler qu’en pratique, il incombait pourtant au chirurgien, s’il ne voulait pas voir sa responsabilité engagée, de laisser un temps de réflexion suffisamment long au patient.

Dans une affaire où il est question de paraplégie suite à une intervention pour une hernie discale, la Cour de cassation a repris à son compte une partie des décisions d’une cour d’appel en ces termes : « attendu que la cour d’appel a tout d’abord, pour écarter toute faute diagnostique ou opératoire de M. X… [le chirurgien, NDLR], retenu, adoptant les conclusions de l’expert, que l’intervention chirurgicale était une réponse thérapeutique adaptée, même si la nécessité immédiate n’en était pas justifiée au regard de l’absence d’éléments en faveur d’une rapide aggravation des troubles ; qu’elle a ensuite, sans contradiction, constaté qu’en raison du court laps de temps qui avait séparé la consultation initiale et l’opération, M. Y… [le patient, NDLR], n’ayant reçu aucune information sur les différentes techniques envisagées, les risques de chacune et les raisons du choix de M. X… pour l’une d’entre elles, n’avait pu bénéficier d’un délai de réflexion, pour mûrir sa décision en fonction de la pathologie initiale dont il souffrait, des risques d’évolution ou d’aggravation de celle-ci et pour réunir d’autres avis et d’autres informations nécessaires avant une opération grave à risques, ce dont il résultait qu’en privant M. Y… de la faculté de consentir d’une façon éclairée à l’intervention, M. X… avait manqué à son devoir d’information ; qu’elle en a déduit qu’il avait ainsi privé le patient d’une chance d’échapper à une infirmité, justifiant ainsi légalement sa décision ». En plus d’informer sur les différentes techniques opératoires possibles et à moins qu’il n’y ait un risque réel d’aggravation immédiate pouvant avoir de lourdes conséquences, le chirurgien doit donc laisser un temps de réflexion au patient suffisamment long pour que ce dernier puisse mûrir la décision et recueillir, s’il le désire, d’autres avis chirurgicaux ou d’autres informations.

Les Lucky Luke du bistouri font devoir aller patienter au saloon…

Pesticides, OGM et protection des inventions biotechnologiques

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Des vaches prêtes à résister aux pesticidesLes organismes génétiquement modifiés (OGM) font régulièrement la Une en déclenchant les passions quand il est question de leur innocuité pour la santé. Au moment où l’Europe vient d’autoriser la culture d’une pomme de terre génétiquement modifiée sur ses terres et où le président Sarkozy vient d’expliquer que les contraintes environnementales ne devaient pas primer sur les intérêts économiques de l’agriculture nationale, quelques mois après un Grenelle de l’environnement très médiatisé, il est intéressant de prêter attention aux conclusions de l’avocat général de la Cour de justice européenne sur la portée de la législation de l’Union sur la protection des inventions biotechnologiques dans une affaire opposant Monsanto Technology LLC et Cefetra BV e. a. (C-428/08).

Ces conclusions commencent par un rappel des faits. « La société Monsanto est titulaire depuis 1996 d’un brevet européen relatif à une séquence génétique qui, introduite dans l’ADN d’une plante de soja, la rend résistante au gliphosate, un herbicide produit par cette même société et commercialisé sous le nom de “Roundup”. Les agriculteurs peuvent utiliser cet herbicide contre les mauvaises herbes sans nuire à la culture du soja. Le soja génétiquement modifié (“soja RR”, c’est-à-dire “Roundup ready”) est cultivé dans différents pays dans le monde, mais pas dans l’Union européenne.
En 2005 et en 2006, les sociétés défenderesses au principal ont importé d’Argentine – où le soja RR est cultivé à grande échelle, mais où Monsanto ne dispose pas de brevet relatif à la séquence génétique – de la farine de soja destinée à la production d’aliments pour animaux. Une analyse effectuée à la demande de Monsanto a révélé la présence de traces de l’ADN caractéristique du soja RR, ce qui atteste que la farine importée a été produite avec le soja génétiquement modifié pour lequel Monsanto est titulaire d’un brevet européen. »

La question posée est donc de savoir si le brevet européen couvre ou non les “résidus” d’ADN trouvés dans la farine dont vont se nourrir les animaux. Pour l’avocat général, dont les conclusions ne seront pas obligatoirement suivies par la Cour, « la protection conférée à un brevet relatif à une séquence génétique se limite aux situations dans lesquelles l’information génétique exerce actuellement les fonctions décrites dans le brevet. Cela vaut aussi bien pour la protection de la séquence en tant que telle que pour la protection des matières dans lesquelles elle est contenue. […] La directive constitue une réglementation exhaustive de la protection conférée dans l’Union européenne à une invention biotechnologique, et n’admet pas qu’une législation nationale lui confère une protection plus étendue. »

Le brevet pourrait donc avoir des limites, même si les enjeux économiques sont énormes. Voilà qui pourrait ne pas arranger le fabricant et les utilisateurs européens d’un produit, parfois à l’origine de la pollution des nappes phréatiques ou des sols, offrant ensuite des OGM résistant à ce même produit comme nourriture à des animaux qui finiront dans les assiettes des consommateurs du vieux continent…

La médecine traditionnelle chinoise en accusation

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

La médecine traditionnelle chinoise en questionPourquoi, en France, ne laisse-t-on pas tranquille ceux qui désirent pratiquer la médecine traditionnelle chinoise et pourquoi les règles de la médecine “classique” leur sont-elles imposées ? Il s’agit là de questions que beaucoup d’adeptes de ces pratiques se posent. Un début de réponse se trouve peut-être dans l’affaire qui a été jugée à la mi-février 2010 par la Old Baley, la Haute Cour criminelle anglaise.

En 2003, une femme souffrant d’une affection bénigne de la peau fait appel à Susan Wu, pratiquant la médecine traditionnelle chinoise au « Chinese Herbal Medical Center » de Chelmsford, dans le comté de l’Essex. Elle lui prescrit et lui vend alors un remède traditionnel : des comprimés de Longdan Xie Gan Wan, une décoction de gentiane. La “patiente” prend ce traitement durant cinq ans, persuadée de ses bienfaits, lorsqu’elle est victime d’une crise cardiaque et que l’on découvre qu’elle souffre d’un cancer et d’une insuffisance rénale qui l’oblige à être dialysée trois fois par semaine.
Il ne faudra pas longtemps aux praticiens exerçant la médecine “occidentale” pour mettre en cause le remède, ce qui sera confirmé par la Medicines and Healthcare Products Regulatory Agency (MHRA), l’équivalent de l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps). Ce produit contenait de l’acide aristolochique, venant d’une plante de la famille des aristolochia, connu pour ses propriétés toxiques et cancérigènes, dont l’usage est interdit au Royaume-Uni.

Pour la MHRA, cette affaire prouve les dangers très graves qui peuvent être associés aux produits présumés “naturels” et explique pourquoi Susan Wu a été condamnée à l’équivalent de deux années de prison avec sursis (conditional discharge) après avoir plaidé coupable.
« Ce n’est pas parce qu’un produit est à base de plantes ou qu’il est prétendument naturel qu’il est pour autant inoffensif », a expliqué l’Agence. Elle insiste aussi sur le fait que certains médicaments traditionnels chinois, comme d’autres préparations à base de plantes, peuvent présenter des risques graves pour la santé de ceux qui les utilisent.
La MHRA recommande à ses concitoyens de ne pas acheter ou consommer des produits qui ne sont pas étiquetés en anglais et souligne le fait que, même si un produit est étiqueté dans la langue de Shakespeare, ce n’est pas une garantie de sécurité ou de bonne qualité.

Cet exemple n’affirme en rien la supériorité de la médecine occidentale sur la médecine traditionnelle chinoise, mais il pourrait en partie expliquer pourquoi certains législateurs tiennent à ce que l’exercice de toutes les médecines fasse l’objet de la même réglementation.

Visite médicale, travail et Cour de cassation

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Jurisprudences

Médecin du travailVisite médicale et travail peuvent parfois être source de conflits entre un employé et l’entreprise où il travaille, d’où des décisions rendues régulièrement à ce sujet par la Cour de cassation à l’origine de nombreuses jurisprudences. Deux arrêts de la fin 2009 devraient intéresser ceux qui se penchent sur ces questions.

La première décision vient de la chambre sociale de la Cour de cassation, le 2 décembre 2009 (no pourvoi 08-40156). Elle confirme qu’aucune personne ne peut être sanctionnée en raison de son état de santé et que le fait de quitter son poste en raison de son état de santé afin de consulter un médecin ne constitue pas en soi une faute de nature à justifier le licenciement. Elle s’appuie en cela sur l’une de ses précédentes décisions du 3 juillet 2001 (no pourvoi 99-41738) basée sur l’article L. 122-45 du code du travail.
Si un salarié peut justifier du fait qu’il a quitté son travail pour se rendre chez un médecin pour un problème de santé, il ne peut être renvoyé pour cette raison.

La seconde décision du 28 octobre 2009 (no pourvoi 08-42748) concerne, quant à elle, la responsabilité du salarié qui ne se rend pas à la visite médicale de santé au travail dans le cadre d’une procédure d’inaptitude à un poste au sein d’une entreprise. La chambre sociale de la Cour de cassation a rappelé que « justifie la rupture immédiate du contrat de travail l’acte d’insubordination d’un salarié caractérisé par le non-respect des règles de sécurité, consistant dans le refus persistant de se présenter aux nombreuses convocations de la médecine du travail, en dépit d’une lettre de mise en demeure de son employeur ». Elle a aussi réaffirmé que « constitue une faute grave pour absence injustifiée le fait pour un salarié qui postérieurement à l’expiration de la prolongation de son arrêt de travail, s’abstient pendant près de trois mois et demi après la première visite de reprise, en dépit d’une lettre recommandée de son employeur, de se rendre aux nombreuses convocations de deuxième visite médicale de reprise, sans apporter de nouvelle justification à son absence ».
Comme il a été vu dans l’article Refus ou absence du salarié à la visite médicale du travail, il ne fait pas bon oublier ou refuser de se rendre à une visite médicale de santé au travail…