Articles tagués ‘coût’

La révolution du NHS

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Un vent nouveau sur la santé anglaiseLe mois de juillet est décidément propice aux révolutions, puisque c’est le 12 juillet 2010 que le nouveau secrétaire d’État à la santé britannique, Andrew Lansley, a présenté au Parlement un projet destiné a changé profondément le National Health Service (NHS). Dans un livre blanc, intitulé Equity and excellence: Liberating the NHS [Équité et excellence : pour libérer le NHS, NDLR], ce membre du gouvernement dévoile les grandes lignes de ce que sera la nouvelle politique de santé outre-Manche.

Contrairement à ce qui se faisait jusque-là, ce n’est plus aux tutelles chargées de tout faire pour obtenir des économies de santé qu’est accordée la confiance, mais aux médecins généralistes proches des patients. En faisant réaliser à la “bureaucratie” actuelle du NHS des gains d’efficacité sans précédent (45 % de réduction du coût de gestion en 4 ans), 80 milliards de livres sterling vont être mis à la disposition des généralistes pour qu’une meilleure prise en charge des malades soit assurée. Plutôt que de consacrer cette somme aux services chargés de réfléchir à de nouvelles mesures censées faire faire de nouvelles économies au système ou aux services servant à contrôler que les mesures précédentes ont bien été respectées, le gouvernement britannique a choisi de l’utiliser à la prise en charge des patients, y compris par le secteur privé.

Les hôpitaux vont avoir le droit d’augmenter leurs activités de consultations privées pour accroître leurs recettes, mais ils se verront aussi contraints de faire plus d’enquêtes de satisfaction auprès des patients et de les informer au cas où une erreur dans la prise en charge a été commise.

Les patients, comme les médecins généralistes, retrouvent une place décisionnaire au sein du système, place qu’ils avaient dû céder ces dernières années aux administratifs de tous poils. Plutôt que de se voir imposé des références opposables ou des parcours obligatoires pour que les soins soient pris en charge, les patients vont avoir leur mot à dire, avec pour nouvelle devise : « Pas de décision à mon sujet, sans moi ».
Les malades vont aussi pouvoir reprendre la main sur leur dossier médical et décider qui peut y avoir accès. Ils pourront le télécharger facilement afin de le mettre à la disposition des médecins, des cliniques ou des hôpitaux de leur choix, voire même d’une association de patients. Les médecins et les malades seront également en mesure de communiquer par Internet pour plus d’efficacité et de facilité.
Un plus grand nombre d’organisations sera susceptible de donner des informations à la portée de tous sur les maladies, leurs traitements ou sur l’hygiène de vie ; ces informations devant répondre à des critères minimums de qualité.
Un budget sera alloué aux patients présentant des affections de longue durée pour qu’ils puissent eux-mêmes choisir leurs soins, contrairement au système actuel encadrant très strictement leur parcours de santé.

Le ministère de la santé devra davantage mettre l’accent sur l’amélioration de la santé publique que sur la gestion courante du NHS. Les autorités locales seront impliquées conjointement au système national de santé dans les actions de lutte contre l’obésité, le tabagisme ou l’alcoolisme. Les campagnes de vaccination seront poursuivies et l’accent sera mis sur le dépistage. Les régions dont la population, souvent défavorisée, souffre le plus de problèmes de santé obtiendront des rallonges budgétaires afin de réduire les inégalités.

Enfin, les performances des équipes médicales et des hôpitaux seront étudiées avec soins et leurs résultats en matière d’infections nosocomiales, de décès, de rechutes ayant nécessité une nouvelle hospitalisation ou d’incidents au cours d’un traitement seront mis à la disposition du public.
Il sera demandé aux patients s’ils estiment que le traitement qui leur a été donné a été efficace et s’il a répondu à leurs attentes. Des réponses dont pourront se servir les autres patients pour choisir où ils désirent se faire soigner ou accoucher, n’étant plus obligé de s’adresser à leur médecin référent, au spécialiste ou à la maternité qu’on leur impose.
Plutôt que sur leur potentiel à respecter certains objectifs économiques, c’est sur l’efficacité clinique de leur travail que les médecins seront jugés. Il en sera de même pour le système de santé dans son ensemble dont les progrès seront appréciés sur la diminution du taux de mortalité pour les maladies curables ou sur l’augmentation des taux de survie à un ou cinq ans chez les patients atteints par un cancer.

Les Anglais ont donc décidé d’abandonner un modèle de santé basé sur des économies de santé programmées par des administrations toutes puissantes qui reniaient sans cesse sur la liberté des patients et des professionnels de santé. Il faut dire qu’après avoir placé leurs espoirs en lui pendant plusieurs dizaines d’années, il était très loin d’avoir fait ses preuves.
Voilà qui pourrait donner à réfléchir à tous ceux pour qui l’actuel NHS représentait un idéal. En France, la déclaration du « médecin traitant », le parcours de soins, le renforcement du pouvoir administratif, les référentiels de bonnes pratiques ou les contrats d’amélioration des pratiques individuelles (CAPI) mis en place très récemment sont directement inspirés du modèle britannique…

 

Dans le livre blanc d’Andrew Lansley, il n’est question que du NHS anglais et non des autres systèmes de santé (écossais, gallois et irlandais) présents au sein du Royaume-Uni. Pour plus de précisions, se référer à l’article intitulé Le National Health Service ou NHS.

La fin des “incitations” à prescrire des génériques ?

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Médicaments génériques et droit européenLes pouvoirs publics français et l’assurance-maladie ont, depuis plusieurs années, misé sur les “incitations”, pour ne pas dire les contraintes, à l’utilisation des médicaments génériques, dans l’espoir de réduire le coût des dépenses de santé. Ces mesures, loin de faire l’unanimité chez les professionnels de santé et surtout chez les patients, ont néanmoins réussi à être imposées, en grande partie grâce au rôle actif joué par les pharmaciens et à leur fameux “droit de substitution” et à grand renfort de publicité. Une façon efficace de faire des économies de santé pour les uns, un moyen d’obtenir des avancées très favorables sur les produits vendus en officine sans prescription médicale, des produits souvent beaucoup plus rémunérateurs, pour les autres…

Des “incitations” qui s’imposent aussi au sein des nouveaux contrats d’amélioration des pratiques individuelles (CAPI) signés par la Sécurité sociale avec des médecins libéraux, ces derniers cherchant souvent à pallier, selon eux, l’insuffisante revalorisation de leurs honoraires. Prescrire plus de génériques, c’est respecter le contrat et voir ses revenus augmenter. Une façon efficace de faire des économies de santé pour les uns, un moyen habile d’encadrer ce qui reste de la liberté de prescription pour les autres…

Mais la vision purement économique de la prescription et de la délivrance des médicaments semble en passe de se retourner contre ceux qui l’ont privilégiée, si l’on en croit les conclusions de l’avocat général de la Cour de justice européenne (CJE) dans une affaire concernant l’Association of the British Pharmaceutical Industry et des systèmes d’incitation à la prescription de médicaments qui ont été mis en place par les caisses de soins primaires (Primary Care Trusts) en Grande-Bretagne. C’est en effet pour des raisons économiques liées à l’interdiction de la promotion de médicaments par l’intermédiaire de prime, avantage pécuniaire ou avantage en nature à des personnes habilitées pour les prescrire, à moins que ceux-ci ne soient de valeur négligeable et n’aient trait à l’exercice de la médecine, prévue par le droit européen que la situation pourrait être amenée à évoluer.

« L’article 94, paragraphe 1, de la directive 2001/83/CE fait obstacle à ce qu’un organisme public faisant partie d’un service national de santé public mette en place, afin de réduire ses dépenses en matière de médicaments, un système qui offre des incitations financières à des cabinets médicaux (lesquels peuvent à leur tour conférer un avantage pécuniaire au médecin prescripteur) afin qu’ils prescrivent un médicament spécifiquement désigné, soutenu par le système d’incitation, et qui sera :
a) soit un médicament soumis à ordonnance différent du médicament antérieurement prescrit par le médecin au patient ;
b) soit un médicament différent de celui qui aurait été prescrit au patient si le système d’incitation n’existait pas,
lorsque le médicament différent fait partie de la même classe thérapeutique que ceux utilisés pour le traitement de la pathologie particulière du patient. »

La mission des avocats généraux consiste à proposer à la Cour, en toute indépendance, une solution juridique dans l’affaire dont ils sont chargés, mais leurs conclusions ne lient pas la CJE. Reste donc à savoir ce que décidera la Cour après en avoir délibéré…

La retraite des médecins compromise ?

Écrit par Charles Duchemin le . Dans la rubrique Humeur

Des retraités se promènentAlors qu’il est question de discuter d’une réforme des régimes de retraite à l’automne, Gérard Maudrux, président de la Caisse autonome de retraite des médecins de France (CARMF), organisme imposé aux praticiens conventionnés exerçant en France, a adressé à ses adhérents en ce début d’année un courrier qui donne à réfléchir.

Gérard Maudrux compare dans cette lettre la mafia des Pays baltes à l’État français. Cette idée lui est venue après avoir participé à un repas au cours duquel un entrepreneur se voyait reprocher d’avoir pris un risque en installant sa société dans l’un de ces nouveaux pays de nord de l’Union européenne, sachant que pour y travailler il était indispensable de verser son obole à la mafia locale. Ce chef d’entreprise aurait répondu : « Effectivement, je dois payer la mafia pour pouvoir travailler, mais je vais t’expliquer comment cela fonctionne en pratique. Tous les mois ils viennent me voir pour me demander si tout va bien, pour savoir s’ils peuvent faire quelque chose pour moi, pour me faciliter la tâche, pour m’aider à augmenter ma production. À l’inverse, vous en France, au lieu de la mafia, vous avez un État, qui vous prend deux à trois fois plus, et qui en échange fait tout ce qu’il peut pour vous empêcher de travailler. »

Il est peu probable que Gérard Maudrux ait relaté de tels propos en croyant à l’angélisme d’une quelconque mafia, mais cette réflexion reflète le ressenti qu’ont de nombreux praticiens à l’égard du système actuel, qu’il soit de retraite ou de soins. Et les médecins ne sont pas les seuls à partager ce sentiment, semble-t-il.
Les charges sociales ne cessent d’augmenter, bien plus rapidement que les revenus malgré une explosion du coût de la vie, bien mal dissimulée par les chiffres officiels, et le système de retraite, imposé au nom d’une solidarité nationale en trompe-l’oeil, ne survivra pas à la pénurie d’actifs prévue dans quelques années.

« Le régime de base est pillé par une compensation démesurée qui va dépasser 65 % de nos prestations (+ 26 % prévu pour cette année), au nom d’une solidarité que l’on a du mal à saisir quand les hommes de l’État, politiques, fonctionnaires, services publics en sont pour la presque totalité dispensés », explique le président de la CARMF. Les prestations diminuent et les coûts augmentent…

Un discours très éloigné du « politiquement correct » habituel. Une raison d’espérer ?

Plus de 2 000 Français vont mourir de la grippe en 2009 !

Écrit par Bertrand Hue le . Dans la rubrique Evolution

Plus de morts de la grippe en 2009« En France, la grippe touche chaque année entre 2 et 8 millions de personnes selon le Groupe d’étude et d’information sur la grippe et provoque entre 1500 et 2000 morts, essentiellement chez les personnes de plus de 65 ans » comme l’explique l’Institut Pasteur, alors que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) estime que les épidémies de grippe « entraînent entre 3 et 5 millions de cas graves et 250 000 à 500 000 décès par an dans le monde ». Or, il n’aura échappé à personne qu’à la grippe saisonnière est venue s’ajouter la grippe due au virus H1N1v d’origine porcine.

Même si pour le professeur Jean-Paul Stahl, chef du service maladies infectieuses du centre hospistalier universitaire de Grenoble, explique que « la grippe A n’est pas plus contagieuse que la grippe saisonnière, et sa mortalité est au pis identique, voire bien inférieure ». Avec « 1 décès pour 1000 personnes affectées par la grippe classique » et une mortalité de la grippe A qui oscille de « 1 pour 1000 à 1 pour 10 000 personnes contaminées », le nombre de patients qui vont succomber à la grippe va irrémédiablement augmenter, et ce, malgré une campagne de vaccination complémentaire à celle qui intervient chaque année pour la grippe saisonnière. Une campagne que le président de la République souhaite voir s’intensifier avec une ouverture des centres de vaccination le dimanche.

Il faut dire qu’avec un million de doses écoulées, malgré une campagne médiatique sans précédent allant jusqu’à présenter la mutation de ce virus comme un risque majeur alors que personne ne parle de celles des virus de la grippe saisonnière qui surviennent régulièrement, il devient vraiment urgent de rentabiliser l’achat des vaccins contre la grippe A(H1N1). En effet, si le coût pour la Sécurité sociale pour le vaccin contre la grippe saisonnière est estimé à 38 millions d’euros pour 5,2 millions de personnes, il est beaucoup plus élevé pour l’État et le vaccin contre la grippe A(H1N1). Les pouvoirs publics ont reconnu avoir acheté 94 millions de doses pour une somme estimée à 808 millions d’euros, mais il faut ajouter à cette dépense des « coûts annexes (estimés à 250 millions pour aiguilles et seringues et 450 millions pour la logistique des centres de vaccination) » d’après le docteur Bruno Devaux, anesthésiste-réanimateur à Rouen, élu de l’Union pour un mouvement populaire (UMP).

Des moyens qui peuvent paraître importants au regard d’une épidémie dont on a très vite su qu’elle était du même ordre de grandeur qu’une grippe de forte épidémie saisonnière avec un virus A(H1N1) d’origine porcine présenté comme sensible à l’oseltamivir (Tamiflu), dont le premier cas de résistance à cet antiviral en France ne vient que d’apparaître alors que 98 % des virus A(H1N1) testés lors de l’épidémie de grippe saisonnière 2008 lui étaient résistants sans que cela n’inquiète personne.

Un autre facteur fait que le nombre de décès liés à la grippe va augmenter en 2009-2010, c’est l’importance inhabituelle des moyens mis en oeuvre pour surveiller l’épidémie. Si les certificats de décès mentionnant la grippe sont rares chaque année, la sensibilisation du corps médical et des autorités administratives ne peut aboutir qu’à une augmentation de ces chiffres. La fréquence des tests de typage du virus, bien qu’utilisés uniquement sur les patients hospitalisés faute de moyens techniques pour en réaliser plus, est plus importante que les années précédentes. Et même si dans la semaine du 9 au 16 novembre 2009, sur 4 409 prélèvements effectués seuls 1 679 ont été positifs au virus de la grippe A (non typé ou H1N1), il est évident que les cas liés à ce virus vont donner l’impression d’être plus nombreux, et ce d’autant que le réseau surveillant la grippe a été mis en alerte six semaines plus tôt qu’en 2008.

C’est donc en toute logique que plus de Français vont mourir de la grippe en 2009, avec ou sans campagne de vaccination. Quoi qu’il en soit, ces chiffres n’ont rien d’inquiétant quand on les compare aux méfaits de l’alcool et du tabac, mais tout ça est bien moins médiatique…