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Les médicamenteurs

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Presse

Les dessous de l'industrie pharmaceutiqueC’est à la chaîne de télévision Public Sénat que l’on doit la rediffusion d’un documentaire intitulé Les médicamenteurs. Porté à l’écran pour la première fois par France 5 en juin 2009, ce travail original offre une vision de l’industrie pharmaceutique différente de celle habituellement proposée par les médias.

Ceux qui s’intéressent au droit de la santé ne manqueront pas le discours du patron d’un grand laboratoire français rappelant à l’ordre les députés qui pourraient être tentés d’énoncer quelques critiques à l’égard du secteur du médicament alors qu’il a donné une industrie pharmaceutique « digne de ce nom » en trente-cinq ans. « […] Vous les députés qui adorez venir inaugurer mes centres de recherche et mes usines, j’aimerais que vous vous en souveniez un peu quand vous êtes assis à l’Assemblée nationale et quand vous votez les lois. » Il faut dire qu’être félicité par Nicolas Sarkozy pour le travail effectué « main dans la main » peut donner l’impression à un grand patron que le parlement est là avant tout pour l’aider et n’a pas à le critiquer. Certains journalistes, manquant sans doute de complaisance, ont eux aussi droit à leur part de reproches…

En suivant le documentaire, on aimerait peut-être que les critiques des élus soient plus nombreuses et que les facteurs économiques ne soient pas systématiquement favorisés aux dépens de la santé publique. Les exemples des médicaments Vioxx et Acomplia laissent en effet penser qu’il existe des pratiques fort surprenantes sur le marché des médicaments. Dans sa présentation du documentaire, France 5 n’hésite pas à écrire : « Essais cliniques tronqués, publications médicales biaisées, experts rétribués, marketing forcené, médecins harcelés… Tout est bon pour vendre un médicament. »
Les organismes de contrôle, dont l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps), sont aussi montrés du doigt et leurs défaillances mises en lumière. Comment ne pas trouver gênant que 80 % du budget de la commission des autorisations de mise sur le marché (AMM) des médicaments, dépendante de l’Afssaps, vienne de l’industrie ? Les pouvoirs publics et le monde politique dans sa grande majorité sont sceptiques quant à l’indépendance des médecins quand ils sont rétribués ou même simplement démarchés par les laboratoires, mais ne voient aucun inconvénient à ce que des instances de contrôle officielles soient financées par cette même industrie… D’autres exemples viennent étayer ce qui peut apparaître comme « démonstrations de collusion » entre les laboratoires et les instances de contrôle.

Pour ceux qui n’auraient pas l’occasion de voir ce documentaire lors de ces prochaines rediffusions, il faut espérer que cette coproduction de France 5 — Beau comme une image sera rapidement mise en ligne afin que chacun puisse se faire sa propre opinion.

Psychothérapeutes : réglementation de la profession

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

psychothérapeutes et réglementationIl est difficile de comprendre pourquoi il faut tant de temps au législateur pour réglementer la profession de psychothérapeute à la lecture du rapport 2008 de la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes). Les dispositions d’application de l’article 52 de la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique n’ayant jamais été prises jusque-là, la Miviludes a constaté un « dévoiement des pratiques psychothérapeutiques à des fins sectaires ».

La psychothérapie n’a que peu de recul comme l’explique le rapport : « Avec la fin du XIXe siècle, la pratique de l’hypnose puis l’introduction avec Freud de l’inconscient dans le soin psychique, font apparaître deux professionnels, le médecin ou psychiatre et le psychanalyste. Cette dichotomie dans le champ psychologique sera au cours du XXe siècle et de manière très marquée à partir des années 1970, suivie par l’apparition d’un nouveau venu, le psychothérapeute.
Le rapide succès de ce dernier s’explique par la demande de personnes désirant un suivi non médical et non institutionnel dans le traitement de leur mal-être, la recherche de la performance individuelle et professionnelle ou encore la quête de nouvelles valeurs. » Si les techniques utilisées par les psychothérapeutes peuvent néanmoins être bénéfiques à de nombreuses personnes, elles peuvent aussi être utilisées à des fins de manipulation mentale en utilisant un état de sujétion. Cela n’a rien d’anodin lorsque l’on peut estimer que 12 millions de Français sont soumis à l’impact d’une psychothérapie ou à celle de l’un de leurs proches. Ce nombre est en constante augmentation, car la souffrance morale au travail ou à l’école est devenue des sujets très médiatisés, ce qui implique un regain de la demande et de l’offre psychothérapeutiques dans ces domaines, comme le ticket psy l’a bien mis en évidence.
Il n’est pas question de condamner une profession dans son ensemble puisque la Miviludes reconnaît que 70 à 75 % des psychothérapeutes bénéficient d’une formation ou d’un encadrement de qualité (dont 10 à 15 % de médecins), mais de s’intéresser au 25 à 30 % dont le parcours avant de se déclarer psychothérapeute reste de qualité très inégale.

La loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (HPST), adoptée en juin 2009, a fini par prendre en compte ces considérations dans son article 91.

 

Article 91 de la loi nº 2009-879 du 21 juillet 2009

Les deux derniers alinéas de l’article 52 de la loi nº 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique sont remplacés par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article et les conditions de formation théorique et pratique en psychopathologie clinique que doivent remplir les professionnels souhaitant s’inscrire au registre national des psychothérapeutes. Il définit les conditions dans lesquelles les ministres chargés de la santé et de l’enseignement supérieur agréent les établissements autorisés à délivrer cette formation.

« L’accès à cette formation est réservé aux titulaires d’un diplôme de niveau doctorat donnant le droit d’exercer la médecine en France ou d’un diplôme de niveau master dont la spécialité ou la mention est la psychologie ou la psychanalyse.

« Le décret en Conseil d’État définit les conditions dans lesquelles les titulaires d’un diplôme de docteur en médecine, les personnes autorisées à faire usage du titre de psychologue dans les conditions définies par l’article 44 de la loi nº 85-772 du 25 juillet 1985 portant diverses dispositions d’ordre social et les psychanalystes régulièrement enregistrés dans les annuaires de leurs associations peuvent bénéficier d’une dispense totale ou partielle pour la formation en psychopathologie clinique.

« Le décret en Conseil d’État précise également les dispositions transitoires dont peuvent bénéficier les professionnels justifiant d’au moins cinq ans de pratique de la psychothérapie à la date de publication du décret. »

 

Reste à savoir combien de temps le Conseil d’État va mettre pour prendre le décret nécessaire à l’application de cette nouvelle avancée législative. En attendant, les dérives sectaires vont malheureusement continuer à faire des victimes…

Cet article sera remis à jour lorsque le décret du Conseil d’État paraîtra.