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Aides de l’industrie de santé aux associations de patients

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Où vont les aides des industriels de santé ?C’est la première fois depuis le vote de la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (HPST) et de son article 74 que la Haute Autorité de santé rend publique les déclarations des aides versées par les industriels de santé aux associations de patients. En 2009, ces dernières auraient reçu plus de cinq millions de l’industrie.

Conformément à ce qui est devenu l’article L 1114-1 du code de la santé publique et à compter de 2010, les entreprises fabriquant et commercialisant des produits de santé mentionnés au même code (comme les fabricants de médicaments à usage humain, de dispositifs médicaux ou les entreprises produisant aliments diététiques destinés à des fins médicales spéciales, par exemple) devaient déclarer, avant le 30 juin, auprès de la Haute Autorité de santé, la liste des associations de patients qu’elles soutiennent et le montant des aides de toute nature qu’elles leur ont procurées l’année dernière. Cette obligation se répète chaque année et concerne systématiquement l’année précédente, la Haute Autorité de santé devant publier les informations déclarées. Que l’entreprise distribue ou non des aides, la loi prévoit donc qu’elle remplisse une déclaration et la transmette à la HAS.

Après avoir consulté les industriels commercialisant des produits de santé, la HAS a publié un Guide pour la déclaration des aides versées aux associations de patients et d’usagers de la santé. Déclaration par Internet, mais « dans une optique de sécurisation, les déclarants ont également eu la possibilité de confirmer leur déclaration par courrier recommandé ». Malgré l’obligation légale et la chance donnée aux industriels que n’ont pas toujours tous les intervenants du monde de la santé quand il est question d’appliquer une loi, de pouvoir être consultés et de se concerter avec la HAS, seules 81 déclarations ont été reçues sur un minimum de 900 entreprises concernées par la loi… Il est vrai que le texte n’ayant prévu aucune sanction en cas de non-déclaration, c’est la bonne volonté et l’esprit citoyen qui prévalent.
Le montant total des aides déclarées atteint 5,1 millions d’euros versés à 308 associations de patients différentes. Sur les 81 entreprises, 9 disent ne pas avoir versé d’aides. Sur les 72 restantes, 10 % semblent avoir demandé une contrepartie économique au versement de ces subsides, sachant qu’une seule entreprise a pu financer d’une à trente-neuf associations différentes.

Ces résultats posent de nombreuses questions. Les entreprises qui n’ont rien donné ne se sont-elles celles qui n’ont pas pris la peine de déclarer ? Celles qui ont décidé de ne pas respecter la loi sont-elles coutumières du fait ? Quel serait le montant total des aides si les plus de 900 sociétés avaient répondu à leur obligation légale ? Parmi celles qui n’ont rien déclaré, combien d’entre elles demandent une contrepartie économique aux associations ?
Quand on connaît la véhémence de Christian Saout, président du collectif inter associatif sur la santé (CISS), à l’égard des médecins et de leur manque de déontologie, il serait aussi intéressant de savoir quelles sont les associations qui ont accepté de renvoyer l’ascenseur à l’industrie en acceptant une contrepartie économique, d’autant que nombreuses sont les associations appartenant au CISS à avoir reçue des aides.
De la même façon, même si la loi anticadeau s’applique et qu’elle prévoit, quant à elle, des sanctions pénales pour les contrevenants, il est dommage que la publication du montant des aides versées par les industriels aux associations s’adressant à des professionnels de santé (sociétés savantes, recherche, formation professionnelle) ne soit pas prévue. La HAS ne tient pas compte non plus des aides versées aux associations composées de professionnels agissant à destination des patients (réseaux et centres de soins prenant en charge des patients, secteur médico-social avec ou sans hébergement, etc.). Les fondations de recherche, organisations non-gouvernementales et humanitaires, structures institutionnelles et prestataires de services sont aussi exclues du champ législatif.

À l’examen des déclarations pour 2009, il est évident qu’une évolution de la législation pourrait être intéressante. La HAS l’appelle d’ailleurs de ses voeux. Elle aimerait que soit élaborée une définition précise des associations de patients, ainsi qu’une définition positive du périmètre des aides. L’absence de cette dernière pour l’année 2010 a conduit la HAS à distinguer 2 cas de figure qui ont eu pour conséquence d’inclure dans le périmètre de la déclaration les subventions ou dons ; d’exclure les financements issus de contrats commerciaux sauf si leur valeur est sans rapport avec le service rendu. Pour la Haute Autorité, l’appréciation de la qualification des financements est laissée au déclarant, ce qui est conforme au texte, mais pose des difficultés d’application. Elle reconnaît aussi que l’absence de sanction en cas de non-déclaration rend le texte par nature peu contraignant.

Pour 2009, la transparence est encore loin d’être évidente…

Le scandale sanitaire de la banane

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Manger des bananes peut être dangereux pour la santé« Face à la défense de l’industrie bananière française, on peut faire l’hypothèse que l’impact de l’utilisation de produits phytosanitaires sur l’environnement et la santé ait été secondaire dans les préoccupations des autorités politiques. » Cet extrait du rapport intitulé L’autorisation du chlordécone en France 1968-1981, publié le 24 août par l’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail (Afsset1) est caractéristique des conclusions tirées par son auteur, Matthieu Fintz, sur la gestion des pesticides utilisés aux Antilles françaises dans la culture de la banane.

Le même jour est paru un autre rapport : La saga du chlordécone aux Antilles françaises — Reconstruction chronologique 1968-2008. Publié par l’Inra (Institut national de recherche agronomique), son auteur Pierre-Benoit Joly pointe du doigt la responsabilité du ministère de l’Agriculture dans cette crise sanitaire volontairement occultée pour préserver les intérêts économiques dans les DOM des caraïbes, le même ministère qui continue de nos jours à gérer seul l’homologation des pesticides…

Difficile de n’incriminer que les différents gouvernements et leurs “experts” de 1968 à 1989 ainsi que les fabricants de pesticides, quand on sait que le chlordécone a été interdit aux États-Unis dès 1976 et classé parmi les substances potentiellement cancérogènes en 1979 par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Il est évident que toute la filière de production, une partie de la filière de distribution et les autorités locales ont fermé les yeux sur les risques encourus par la population pour ne pas compromettre les bénéfices et nuire à l’emploi. Bien qu’interdit en Métropole depuis 1990, le chlordécone aura été utilisé aux Antilles jusqu’en 1993, alors que l’on savait qu’il s’agissait d’un polluant organique persistant (POP) et d’un perturbateur endocrinien. Après avoir été exposé à ce produit, une étude a montré que le risque de cancer de la prostate pouvait être significativement augmenté.

Le problème lié au chlordécone a dépassé depuis bien longtemps la seule culture de la banane : les sols et les eaux sont contaminés de façon durable. Actuellement, « L’Inra conduit ainsi des recherches sur la faisabilité et les techniques de dépollution, étudie les transferts sol-eau pour en tirer des prévisions sur la dynamique de la pollution, élabore des référentiels pour gérer le risque de transfert sol-plante ou de bioaccumulation dans les animaux, ou encore assurer la conformité de la production piscicole », d’après l’Observatoire des résidus des pesticides (ORS).

Conseiller de manger cinq fruits et légumes frais par jour est une chose, protéger la santé des Français en est une autre. Cette histoire de pesticide est sans doute une nouvelle affaire où les responsables sont nombreux, mais où très peu de coupables, pour ne pas dire aucun, se verront mis en cause. Le primum non nocere ne semble pas avoir sa place quand des intérêts politico-économiques sont en jeu…

 

 


1— L’Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail, Afsset, et l’Agence française de sécurité sanitaire des aliments, Afssa, ont été récemment regroupées au sein de l’Agence nationale de sécurité sanitaire, Anses : ordonnance n° 2010-18 du 7 janvier 2010 portant création d’une agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail

Réflexion sur les rapports, commissions, groupements d’intérêt économique et groupements d’intérêt public en santé et ailleurs…

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

RapportsC’est avec beaucoup d’humour que Dominique Dupagne, médecin maître-toile et webmaster du site Atoute.org, apporte sa vision de l’intérêt des divers rapports, commissions, groupements d’intérêt économique (GIE) ou public (GIP).

L’article intitulé « Comment arrêter le progrès ? » dissèque les mécanismes qui peuvent conduire au blocage de l’innovation, que ce soit dans le domaine de la santé ou dans bien d’autres. Présentée comme un « tutoriel gratuit à l’usage des administratifs, des gouvernements et des directions », cette réflexion caricature le long chemin qui conduit à un Grenelle. A sa lecture, il est facile de comprendre que l’initiative privée a parfois tout intérêt à ne pas se faire remarquer de l’autorité publique.

Le monde de la santé a toujours été riche des ces artifices, permettant de flatter les uns et de calmer l’ardeur des autres. Le droit en a lui aussi sa part. Le nombre croissant de rapports et de commissions laisse rêveur. Que de papier, que d’énergie dépensée…