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Indépendance professionnelle, praticien hospitalier et directeur d’établissement

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Jurisprudences

Praticien hospitalier et indépendance professionnelleRares sont les cas où un praticien hospitalier doit faire valider ses indications opératoires par l’un de ses confrères sur décision administrative. Même s’il est bien entendu impossible de généraliser, le relationnel conduisant parfois à des situations injustifiées, ces cas sont souvent le reflet d’un réel problème de compétences. Malgré cela, ce type d’affaires pourrait tout simplement disparaître suite à la décision du Conseil d’État du 2 octobre 2009 (n° 309247).

Un praticien hospitalier, travaillant dans un service d’oto-rhino-laryngologie d’un établissement situé à une centaine de kilomètres au sud-est de Paris, a saisi le Conseil d’État après qu’un tribunal administratif ait refusé d’annuler la décision du directeur du centre hospitalier où il exerce prévoyant la validation de son activité opératoire par le chef du service de cet hôpital. Cette décision « serait intervenue pour mettre un terme à des tensions nées entre différents services ».

Pour le Conseil d’État, « Considérant que si, en vertu de l’article L. 6143-7 du code de la santé publique, le directeur d’un établissement de santé publique assure la gestion et la conduite générale de l’établissement et dispose à cet effet d’un pouvoir hiérarchique sur l’ensemble de son personnel, il résulte du même article que l’autorité du directeur s’exerce dans le respect des règles déontologiques ou professionnelles qui s’imposent aux professions de santé, des responsabilités qui sont les leurs dans l’administration des soins et de l’indépendance professionnelle du praticien dans l’exercice de son art ; que l’article L. 6146-5-1 du même code, relatif aux pouvoirs des praticiens chefs de service, dispose par ailleurs que ceux-ci assurent la mise en oeuvre des missions assignées à la structure dont ils ont la responsabilité et la coordination de l’équipe médicale qui s’y trouve affectée ; qu’il résulte de ces dispositions que les pouvoirs des directeurs d’établissements et des chefs de service à l’égard des praticiens hospitaliers placés sous leur autorité ne peuvent s’exercer que dans le respect du principe de l’indépendance professionnelle des médecins, rappelé à l’article R. 4127-5 du code de la santé publique ».

En obligeant le praticien hospitalier à faire valider les décisions préopératoires relatives notamment à l’indication opératoire, au degré d’urgence et aux moyens nécessaires, prises à l’égard de ses patients par son chef de service, le directeur de l’établissement n’a pas respecté le principe d’indépendance professionnelle du praticien dans l’exercice de son art médical.

Il s’agissait là d’un problème relationnel, mais le Conseil d’État explique que sa décision ne serait pas différente face à un problème de compétences. Le directeur de l’hôpital doit alors en appeler aux autorités administratives compétentes ou à l’ordre des médecins. « Considérant que, s’il incombe au directeur d’un centre hospitalier de prendre les mesures que les impératifs de santé publique exigent dans son établissement, au besoin en saisissant les autorités administratives ou ordinales compétentes pour prononcer des mesures d’interdiction professionnelle, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que le principe de l’indépendance professionnelle des médecins fait obstacle à ce que les décisions prises par un praticien dans l’exercice de son art médical soient soumises à l’approbation d’un autre médecin ».

Cette jurisprudence prend toute sa valeur à un moment où des autorités administratives sont tentées de faire pression sur des médecins salariés pour les contraindre à participer à une campagne de vaccination contre la grippe A(H1N1) à laquelle ces professionnels de santé expérimentés ne croient pas et qu’ils estiment comme faisant courir des risques de santé graves aux patients, principe allant à l’encontre du serment d’Hippocrate qu’ils ont prêté.

Responsabilité du médecin qui vaccine contre la grippe A(H1N1)

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Responsabilité du médecin et vaccinationTous les médecins ne sont pas égaux quand il s’agit d’engager leur responsabilité civile professionnelle en vaccinant la population ou les professionnels de santé contre la grippe A(H1N1). Un courrier reçu par des médecins volontaires, émanant de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales du Rhône, le confirme. La couverture assurantielle est différente si le médecin agit sur réquisition ou dans un autre cadre.

Dans le cadre d’une prise en charge classique en l’absence d’une menace sanitaire grave et de réquisition par l’État

Si le médecin vaccine dans le cadre de son activité habituelle, sa situation est régie par le droit commun. Il est normalement couvert, sans clause d’exclusion due à la grippe A(H1N1), par ses différentes assurances.
En cas de dommages causés aux patients, il est couvert par son assurance en responsabilité civile professionnelle, sachant qu’elle est obligatoire (RCP), même si les médecins salariés bénéficient d’un régime particulier. Cette assurance obligatoire comprend une couverture pour les fautes commises lors d’actes de prévention, de diagnostic ou de soins ayant des conséquences dommageables pour les patients.
En cas d’aléa thérapeutique (préjudice du patient sans responsabilité engagée par le professionnel), les dommages sont pris en charge par l’office national d’indemnisation des accidents médicaux des affections iatrogènes et des infections nosocomiaies (ONIAM), si ces dommages dépassent un certain seuil de gravite.
Par contre, pour les dommages que le médecin qui vaccine pourrait lui-même subir, il lui est conseillé de souscrire une assurance non obligatoire qui couvrira les pertes de revenus en cas d’accident ou de maladie, ou qui lui assurera un capital en cas d’invalidité ou de décès !

Dans le cadre d’une réquisition par l’État

Lorsqu’il participe “volontairement” à la vaccination de masse prévue par la campagne décidée par le gouvernement, le médecin est réquisitionné afin de le garantir quant à sa responsabilité.
En cas de dommages causés aux patients, le praticien continue à bénéficier de la couverture de son assurance en responsabilité civile professionnelle, qui se retournera contre l’État si la réquisition a provoqué une aggravation du risque.
En cas de dommages subis par le médecin lui-même, l’État prend en charge les dommages subis par le praticien (y compris en cas de décès), sauf en cas de dommage imputable à un fait personnel détachable du service (violence intentionnelle, par exemple).
Lorsque le médecin vaccine dans le cadre de mesures d’urgence, face à des mesures sanitaires graves, pour lutter contre une maladie transmissible, sur réquisition de l’autorité publique, il ne peut être tenu pour responsables des dommages résultant de la prescription ou de l’administration d’un médicament en dehors des indications thérapeutiques ou des conditions normales d’utilisation prévues par son autorisation de mise sur le marché (art. L 3131-3 du code de la santé publique).

Tout n’est pas si simple

Malheureusement, si tout semble clair, c’est loin d’être le cas. Les médecins du travail, par exemple, ne sont couverts par leur employeur que pour les vaccinations obligatoires quand il vaccine les salariés d’un établissement de soins dont il a la charge, puisque seule la réalisation de ces vaccinations fait partie de leurs missions. Mais avec la grippe A(H1N1), il s’agit d’une vaccination non obligatoire, pour laquelle les médecins du travail vont, en plus, devoir vacciner des patients dont ils n’assurent pas obligatoirement le suivi ! Et la complexité ne s’arrête pas là, puisque des praticiens des services interentreprises peuvent intervenir accessoirement dans un établissement de soins relevant de la fonction publique hospitalière. En effet de nombreuses directions d’établissements de soins, qu’ils relèvent du privé ou de la fonction publique hospitalière, ont demandé à leur médecin du travail de vacciner les salariés de l’établissement, mais également les praticiens libéraux qui interviennent au sein de l’établissement. N’étant pas salariés de l’établissement de soins (privé ou public), ces praticiens ne bénéficient pas d’un suivi en santé au travail.
Le ministère de la santé a listé des centres spécifiques pour la vaccination des médecins libéraux et diffuse dans la presse médicale un message à l’intention des praticiens : « la vaccination contre la grippe pandémiqe A(H1N1) vous est proposée pour vous protéger […] si vous travaillez dans un établissement de santé, vous pourrez vous faire vacciner sur votre lieu de travail […] ».

Alors que jusque-là les médecins inspecteurs de travail donnaient comme consignes aux praticiens du travail de ne pas aller au-delà de leurs missions en pratiquant la vaccination contre la saisonnière, immunisation non obligatoire, les voilà bien embarrassés pour ce qui est de la vaccination contre la grippe A(H1N1) et des mesures prises par les pouvoirs publics. Des médecins du travail de services autonomes de santé au travail ont eu la surprise de se voir répondre par leur médecin inspecteur régional du travail qu’une grande société d’assurance en responsabilité civile professionnelle disposait de contrats « qui garantissent bien les vaccinations obligatoires et facultatives pour le médecin du travail comme la grippe prévue par la circulaire du 26-04-1998 » et qu’il fallait qu’ils vérifient bien leurs contrats de responsabilité civile quels qu’ils soient, avec pour précision que « ceci est essentiellement valable à ce jour pour les médecins du travail hospitaliers vaccinateurs( en CHU ou dans les hôpitaux ayant un SAMU) ».

Alors que le droit français a reconnu que les médecins salariés étaient couverts par l’assurance responsabilité civile de leur employeur, les médecins du travail sont mis dans une situation délicate où on leur impose de prévoir un contrat personnel parce qu’on leur demande d’outrepasser leurs missions, preuve qu’il existe bien un risque…
Autre paradoxe : les laboratoires pharmaceutiques, et donc leurs assureurs, ont obtenu la garantie de l’État pour ne pas avoir à indemniser d’éventuelles victimes des effets indésirables du vaccin et il est demandé aux médecins de prendre des garanties au cas où ils subiraient eux-mêmes des dommages en vaccinant les autres…
Qu’ils s’agissent des contrats pour pertes de revenus en cas d’accident (ou de maladie), de capital en cas d’invalidité (ou de décès) ou de garanties pour être couverts en pratiquant un vaccin n’entrant pas dans leurs missions, cela signifie des dépenses supplémentaires pour les praticiens. Et encore, si les assureurs acceptent de prendre le risque. Pourquoi imposer ceci à des médecins alors que l’on réquisitionne les autres ?

Et la responsabilité pénale ?

Dernier élément, la responsabilité pénale des médecins qui vaccinent. Qu’ils soient prescripteurs ou qu’ils injectent, la question se pose. Même si les autorités se veulent rassurantes, nombreux sont les professionnels de santé qui refusent de se faire eux-mêmes vacciner. Obscurantisme et manque d’information, diront les uns ; conscients des risques et échaudés par les “affaires” du sang contaminé et de l’amiante, où les gouvernants « responsables, mais pas coupables » et les experts ont montré à quel point les intérêts économiques primaient sur la santé publique, rétorqueront les autres. Quelle crédibilité accordé à l’ « Ayez confiance » des pouvoirs publics et des experts des autorités de santé quand l’État est obligé d’apporter sa garantie aux fabricants au cas où ils seraient poursuivis pour des effets indésirables plus désastreux que prévu ? Que dire des médecins qui vaccinent leurs confrères et la population, alors qu’ils refusent de se faire eux-mêmes immuniser ?
Les médecins non réquisitionnés seront sans doute bien seuls lorsqu’il sera question de répondre à des mises en examen pour empoisonnement. Délicate défense puisqu’il ne sera pas question de dire « on ne savait pas ». Le juge aura beau jeu de condamner le praticien pour ne pas avoir appliqué un principe de précaution.

Le plus effrayant, c’est qu’alors que les essais servant à déterminer si des effets indésirables graves peuvent survenir avec les vaccins contre la grippe A(H1N1) vont, étant donné la rapidité avec laquelle ils ont été mis au point, consister en la vaccination de la population et en sa surveillance, les premiers “cobayes” sont les professionnels de santé les mieux à même de prendre en charge les patients. Si des effets indésirables graves se dévoilent, ce sont les professionnels censés les prendre en charge qui en seront les premières victimes, fragilisant ainsi le système de santé tout entier.

Ces dernières années près de 2 500 personnes par an sont mortes de la grippe saisonnière, deuxième cause de mortalité par maladie infectieuse en France, dans l’indifférence médiatique la plus totale. Alors que la grippe A(H1N1) a été reconnue comme ayant un taux de mortalité plus faible et même si la vaccination a été considérée comme un devoir déontologique par le conseil national de l’ordre des médecins, est-il vraiment nécessaire pour les professionnels de santé d’engager leur responsabilité à l’heure actuelle ?

 

Les déclarations d’intérêts des membres du Haut Conseil de la santé publique

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Médicaments et conflits d'intérêtsIl aura fallu attendre la fin 2009 et de nombreuses critiques dans les médias et le monde professionnel sur le manque de transparence des décisions prises en matière de vaccination contre la grippe A(H1N1) pour que paraisse la mise à jour 2009 des déclarations publiques d’intérêts des membres du collège, des commissions et des comités techniques du Haut Conseil de la santé publique (HCSP).

Ce document n’a rien d’anodin lorsque l’on connaît les missions du HCSP. Instance d’expertise créée par la loi no 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique, ce Haut Conseil doit, par exemple, « fournir aux pouvoirs publics, en liaison avec les agences sanitaires, l’expertise nécessaire à la gestion des risques sanitaires ainsi qu’à la conception et à l’évaluation des politiques et stratégies de prévention et de sécurité sanitaire ». Il est là aussi pour « fournir aux pouvoirs publics des réflexions prospectives et des conseils sur les questions de santé publique ». Le HCSP peut être consulté par les ministres intéressés, par les présidents des commissions compétentes du Parlement et par le président de l’Office parlementaire d’évaluation des politiques de santé sur toute question relative à la prévention, à la sécurité sanitaire ou à la performance du système de santé.

En matière de grippe A et de vaccination, le Haut Conseil de la santé publique est l’un des piliers du dispositif français. Il a émis plusieurs avis à ce sujet ces derniers mois et ces recommandations sur la pertinence de l’utilisation d’un vaccin plutôt qu’un autre sont suivies par les pouvoirs publics. Le choix de la France pour le vaccin avec adjuvant a été pris après que le HCSP ait jugé que cette solution était préférable à l’utilisation de vaccins sans adjuvant comme aux États-Unis. Les éventuels conflits d’intérêts de ses membres sont donc particulièrement importants, même s’il a fallu attendre l’arrêté du 19 octobre 2007 portant approbation du règlement intérieur du Haut Conseil de la santé publique pour que la loi impose la publication des déclarations d’intérêts de ses membres. Ce texte précise aussi que ces derniers « ne peuvent, en outre, recevoir des avantages en nature ou en espèces sous quelque forme que ce soit de la part des entreprises, établissements ou organismes » dont les dossiers pourraient être soumis au HCSP, ainsi qu’avec les organismes de conseil intervenant dans ces secteurs.
Difficile de croire que ces déclarations ne sont actualisées qu’à l’initiative des membres participant au HCSP dès qu’une modification intervient. C’est pourtant ce que prévoit l’arrêté…

L’étude du document mis en ligne est intéressante. Sur les vingt et un membres du comité technique des vaccinations, seuls quatre ont déclaré ne pas avoir de lien d’intérêt avec les entreprises, les établissements ou les organismes soumettant des dossiers au HCSP. Les autres reconnaissent de nombreuses interventions ponctuelles, rémunérées ou non,  pour des laboratoires comme Sanofi-Pasteur ou GlaxoSmithKline, fabricants des vaccins choisis pour la campagne de vaccination. Il faut n’y voir que des obligations professionnelles ou un hasard dans un milieu où les spécialistes ne sont pas légions et où les fonds publics pour mener à bien des études sont bien plus maigres que ce qu’essaient de faire croire les responsables politiques.
Les déclarations des autres membres sont à l’avenant…

Établissement de santé et vaccination contre la grippe A(H1N1)

Écrit par Jérôme Monet le . Dans la rubrique La forme

Depuis la fin du mois d’octobre 2009, si les établissements de santé ont l’obligation de proposer à leur personnel une vaccination contre le virus de la grippe A(H1N1), cela ne veut pas dire que cette dernière soit obligatoire pour les employés de ces établissements.  Le libre choix leur est laissé et cette possible immunisation répond au principe de l’accord de volonté de chaque individu.

Le futur des cadres hospitaliers

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Cadres hospitaliers et managementLa directrice de l’institut du management de l’école des hautes études de la santé publique, Chantal de Singly, voit son rapport de mission cadres hospitaliers publié par la Documentation française. Soutenu par le cabinet du ministre de la santé, ce travail propose une définition fonctionnelle du cadre de santé. Management d’équipes et d’organisations, transversalité et responsabilité de projet, expertise et formation sont les quatre fonctions principales reconnues à ces 45 000 employés 1 des établissements de santé. Allant au-delà des qualifications statutaires, cette définition donne déjà un aperçu de l’évolution que pourrait connaître cette profession dans les années qui viennent si les propositions du rapport étaient mises en application.

L’analyse du travail hospitalier faite par cette mission est intéressante : « On n’exerce pas à l’hôpital par hasard. Compétence, déontologie, respect : ce sont bien là les marques distinctives de toute profession hospitalière quels que soient les qualifications, les origines, les métiers, la place occupée. » Dans ce contexte, le cadre de santé a une place à part et déterminante pour les experts en raison de l’ « exercice à un haut niveau de risques encourus, de visibilité sociale et d’attention médiatique. »

La mission décline pas moins de trente-six propositions, selon six grands axes. Faire du cadre de santé un véritable manager de l’équipe soignante, jugé sur la réalisation d’objectifs, est l’une de ses propositions. Établir une présence des représentants d’un collège cadre à la commission médicale d’établissement (CME) ou inclure dans le référentiel de certification de la Haute Autorité de santé un item sur l’implication des cadres hospitaliers dans les processus de décision en sont d’autres. Le management est vraiment le maître mot de ce rapport et il est suggéré de créer les Instituts supérieurs du management en santé, au niveau régional ou interrégional pour la formation initiale des cadres et le développement des compétences managériales de l’ensemble des managers hospitaliers (cadres, médecins managers et directeurs). Il conviendrait aussi de dédier des programmes hospitaliers de recherche clinique à la recherche en management impliquant des cadres.
La reconnaissance universitaire de la formation pour devenir cadre hospitalier et l’obtention d’un niveau master sont des points importants pour les auteurs du rapport. Une façon de favoriser l’harmonisation européenne des diplômes ? Il est aussi question de revaloriser les statuts et la rémunération des cadres hospitaliers. Atteindre les objectifs fixés devrait permettre de gagner plus.

Maillon indispensable du pouvoir administratif au service du respect des objectifs, les cadres hospitaliers ne devraient pas manquer d’obtenir les faveurs du législateur.

 


1— Chiffre de la Direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins (DHOS) pour les effectifs 2007.

 

 

Une clinique doit s’assurer de la compétence de ses chirurgiens

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Jurisprudences

La clinique doit s'assurer des compétences du chirurgien qu'elle emploieDans un arrêt du 11 juin 2009, la première chambre civile de la Cour de cassation a rendu une décision favorable à une patiente qui reprochait à un établissement de santé privé de ne pas lui avoir fourni du personnel qualifié pour l’opérer lors d’une intervention de chirurgie esthétique (pourvoi nº 08-10642). Il n’est pas question dans cette affaire d’une panseuse ou d’un brancardier, mais bien du chirurgien qui a pratiqué l’opération…

En 2003, la patiente décide de subir une opération de chirurgie esthétique en vue de la mise en place de prothèses mammaires dans une clinique du Pas-de-Calais. Elle s’adresse pour cela à un chirurgien généraliste, spécialiste du cancer du sein et gynécologique, exerçant au sein de cet établissement. Malheureusement, le résultat n’est pas à la hauteur des espérances de la patiente qui décide alors de traîner devant les tribunaux pour rechercher la responsabilité de la clinique et du chirurgien. Elle reproche à l’établissement « un manquement à son obligation générale d’organisation laquelle lui imposait de fournir un personnel qualifié », car le chirurgien n’était inscrit au tableau de l’ordre que comme « chirurgien généraliste » et qu’il n’avait aucune compétence ni spécialité dans le domaine de la chirurgie plastique, reconstructrice et esthétique. Les arguments de l’établissement basés sur l’expérience et la pratique du chirurgien, sur le recours à un cabinet de recrutement ayant vérifié les diplômes du médecin ainsi que sur l’examen du contrat le liant au praticien par le conseil de l’ordre n’ont pas suffi à convaincre la Cour de cassation. Pour cette dernière,  la clinique a manqué à ses obligations à l’égard de la patiente en laissant un chirurgien pratiquer des opérations relevant de la chirurgie esthétique, sans vérifier s’il disposait des compétences requises en ce domaine, nonobstant le fait que l’exercice de la chirurgie esthétique n’ait été restreint à une liste déterminée de spécialistes que postérieurement aux faits litigieux, par décret du 11 juillet 2005.
La Cour relève aussi « qu’en vertu du contrat d’hospitalisation et de soins le liant à son patient, l’établissement de santé privé est tenu d’une obligation de renseignements concernant les prestations qu’il est en mesure d’assurer, de procurer au patient des soins qualifiés, et de mettre à sa disposition un personnel compétent ».

Plus de plaintes dans les hôpitaux depuis la loi du 4 mars 2002 ?

Écrit par Bertrand Hue le . Dans la rubrique Evolution

Augmentation des plaintes contre les établissements de santéUne étude française, puliée le 6 août 2009 dans la revue BMC Health Service Research et intitulée Evolution of patients’ complaints in a French university hospital: is there a contribution of a law regarding patients’ rights? [Évolution des plaintes des patients dans un hôpital universitaire français : une loi relative aux droits des patients y a-t-elle contribué ?, NDLR] n’a pas réussi à mettre en évidence un lien direct entre l’adoption de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé et l’augmentation du nombre de plaintes formulées par écrit par les patients d’un grand centre hospitalier universitaire parisien, mais elle pourrait y avoir joué un rôle.

Ce travail, réalisé par Camila Giugliani du service de santé publique de l’École de médecin de l’université Paris Descartes et basé sur le constat que le nombre de plaintes relatives à des problèmes médicaux au sein d’un grand hôpital universitaire de la région parisienne a augmenté au fil du temps, montre que le sentiment des patients d’avoir été victime d’une erreur médicale aurait lui aussi augmenté. La loi du 4 mars 2002 pourrait avoir joué un rôle dans ce phénomène en faisant évoluer l’attitude des patients à l’égard des procédures permettant de se plaindre. Alors même que l’établissement était engagé dans une démarche de certification et que la durée des séjours tendait à diminuer, ce qui allait dans le sens d’une diminution des incidents graves liés à une hospitalisation, le nombre de courriers d’avocats ou de patients estimant être victime d’une erreur médicale n’a cessé d’augmenter. Le fait d’avoir élargi le débat sur ces évènements indésirables et sur les erreurs liées aux soins à l’occasion des discussions concernant la loi pourrait avoir fait prendre conscience aux patients de leurs droits et les avoir rendus plus exigeants à l’encontre du système de santé. Même si cette étude n’entre pas dans les détails, on peut aussi penser que la médiatisation de quelques erreurs médicales, comme l’affaire Perruche, a donné à réfléchir au plus grand nombre, surtout au regard des éventuelles réparations financières pouvant être obtenues si une faute est bien reconnue.
Les courriers d’avocat sont de plus en plus nombreux. L’accès plus facile à son dossier médical pourrait expliquer cette tendance, la volonté croissante d’engager des poursuites judiciaires aussi.

La plupart des plaintes reçues par cet hôpital ont été formulées par de femmes d’âge moyen, pour des problèmes liés à la chirurgie, à l’obstétrique, à la gynécologie et à la néonatalogie. Une complication survenue à la suite d’un acte chirurgical ou médical est le plus souvent à l’origine de la réclamation. Pour un grand nombre de patients, une plainte est le meilleur moyen d’exprimer leur frustration et leur déception concernant leur prise en charge. Elle peut aussi représenter un espoir de voir la qualité des soins s’améliorer afin de réduire le risque de voir se reproduire le même type d’événement indésirable que celui auquel ils ont été confrontés. C’est aussi une façon d’obtenir une sanction financière ou non à l’encontre de l’établissement ou d’un praticien considéré comme responsable.

Une telle étude semble être une première en France et devrait permettre de mieux répondre aux attentes des patients. De quoi se plaint-on ?

Infection nosocomiale et personnel soignant

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Jurisprudences

Personnel hospitalier et infection nosocomialeLa cour administrative d’appel de Nancy a rendu une décision (no 07NC01065) particulièrement intéressante concernant le décès d’une aide soignante dans un service de chirurgie viscérale de province. La malheureuse est morte d’une septicémie à staphylocoque doré sensible à la méticilline, compliquée d’un infarctus mésentérique. Pour sa famille, il ne faisait aucun doute que cette infection, due à un germe présent dans le service où travaillait cette femme, devait être reconnue comme une maladie professionnelle obligeant l’employeur à une réparation intégrale. Selon eux, cette infection devait aussi engagée la responsabilité de l’établissement à l’égard de sa préposée au titre de l’article L 1142-1 du code de la santé publique. Il est utile de rappeler que cet article stipule que « Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d’un défaut d’un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés à la quatrième partie du présent code, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d’actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu’en cas de faute.
Les établissements, services et organismes susmentionnés sont responsables des dommages résultant d’infections nosocomiales, sauf s’ils rapportent la preuve d’une cause étrangère. »
Le même article précise aussi que « Lorsque la responsabilité d’un professionnel, d’un établissement, service ou organisme mentionné au I ou d’un producteur de produits n’est pas engagée, un accident médical, une affection iatrogène ou une infection nosocomiale ouvre droit à la réparation des préjudices du patient, et, en cas de décès, de ses ayants droit au titre de la solidarité nationale, lorsqu’ils sont directement imputables à des actes de prévention, de diagnostic ou de soins et qu’ils ont eu pour le patient des conséquences anormales au regard de son état de santé comme de l’évolution prévisible de celui-ci et présentent un caractère de gravité, fixé par décret, apprécié au regard de la perte de capacités fonctionnelles et des conséquences sur la vie privée et professionnelle mesurées en tenant notamment compte du taux d’incapacité permanente ou de la durée de l’incapacité temporaire de travail. »

La cour en a décidé autrement : « les dispositions de l’article L 1142-1 du code de la santé publique aux termes desquelles les établissements hospitaliers sont responsables des dommages résultant d’infections nosocomiales, sauf s’ils rapportent la preuve d’une cause étrangère, ces dispositions ne sauraient trouver application en l’espèce, dès lors qu’elles ne concernent que la responsabilité des établissements à l’égard de leurs patients et non de leur personnel ».
La présence du germe au sein du service où travaillait cette aide soignante n’a pas non plus suffi à emporter la conviction des juges sur l’origine professionnelle de l’infection. En effet, la patiente souffrait d’une anomalie congénitale la faisant souvent saigner du nez et il s’agit d’un germe porté par une grande partie de la population. L’expert et la commission de réforme n’étaient donc pas favorable à l’hypothèse d’une survenue liée au travail.

Cette jurisprudence a une conclusion qui s’impose : il ne fait pas bon être malade quand on travaille dans un centre hospitalier…

Infection nosocomiale, médecins et correctionnelle

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Jurisprudences

Infections nosocomiales et médecinsTriste histoire que celle de cet ancien interne de l’Assistance publique – Hôpitaux de Paris (AP/HP), responsable du comité de lutte contre les infections nosocomiales de l’établissement où il exerçait, qui n’a pas survécu aux suites d’une intervention de neurochirurgie après avoir rompu un anévrisme cérébral. C’est une gangrène qui a eu raison de lui dans les jours qui ont suivi son opération et les experts judiciaires ont conclu à des fautes et à des négligences. C’est pour cette raison que six de ses confrères sont renvoyés devant le tribunal correctionnel, selon le site Romandie news.

L’affaire pourrait ne pas suivre ce cours, car « Le parquet de Paris a annoncé mercredi qu’il faisait appel de cette ordonnance. La chambre de l’instruction de la cour d’appel de Paris devra ainsi statuer sur cette demande de renvoi en procès. »

Les affaires concernant les infections nosocomiales ont connu de nombreux rebondissements ces dix dernières années. La jurisprudence, elle-même, a été loin d’être constante comme le rappelle Danièle Cristol dans les actualités de la revue de droit sanitaire et social des mois de novembre – décembre 2008. Depuis trois arrêts rendus le 29 juin 1999, la Cour de cassation impose une obligation de résultat au médecin et à la clinique une obligation de résultat dans ce domaine. Puis en 2001, elle a imposé au patient de prouver le caractère nosocomial de l’infection. Pour cet auteur, la jurisprudence a connu une nouvelle évolution le 30 octobre 2008 avec une décision de la 1re chambre civile (pourvoi no 07-13791) en acceptant que le patient puisse se baser sur des « présomptions graves, précises et concordantes » pour démontrer le caractère nosocomial de cette infection. Viennent ensuite d’autres remarques sur la portée de cette jurisprudence dans cet article qu’il est conseillé de lire si on s’intéresse à la question.

Nul n’est à l’abri d’une infection nosocomiale…

Les frais relatifs aux dons de sperme, d’ovocytes ou d’autres produits du corps humain mieux remboursés

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Dons d'ovocytes et de spermeC’est au Journal officiel du 25 février 2009 qu’a été publié le décret no 2009-217 du 24 février 2009 relatif au remboursement des frais engagés à l’occasion du prélèvement d’éléments ou de la collecte de produits du corps humain à des fins thérapeutiques.

Pour ce qui est des prélèvements d’éléments du corps humain, l’indemnisation de la perte de rémunération subie par le donneur, payée par l’établissement qui réalise le prélèvement conformément à l’article R 1211-5 du code de la santé publique, voit sa valeur augmenter du double au quadruple de l’indemnité journalière maximale de l’assurance maladie du régime général prévue à l’article L 323-4 du code de la sécurité sociale, sur présentation des justificatifs.
Les frais engagés pour les déplacements afférents aux examens et soins qui précèdent ou suivent le prélèvement ou la collecte ainsi qu’aux déplacements effectués pour l’expression du consentement du donneur conformément aux articles L 1231-1, L 1231-3 et L 1244-2 et les auditions par le comité d’experts prévu à l’article L 1231-3. La prise en charge des frais de transport est effectuée sur la base du tarif le moins onéreux du moyen de transport en commun le mieux adapté au déplacement ; les frais de transport par voie aérienne peuvent être pris en charge dès lors que les autres moyens de transport requièrent un temps de trajet supérieur à trois heures.
Sous conditions, les frais d’hébergement hors hospitalisation du donneur peuvent aussi être pris en charge.

L’établissement de santé qui réalise le prélèvement ou la collecte prend à sa charge les frais d’examens et de traitement prescrits en vue du prélèvement, la totalité des frais d’hospitalisation, y compris le forfait mentionné à l’article L 174-4 du code de la sécurité sociale ainsi que les frais de suivi et de soins assurés au donneur en raison du prélèvement dont il a fait l’objet.

Il y a néanmoins un élément qui pourrait faire débat : la suppression de l’anonymat du donneur vis-à-vis des organismes de Sécurité sociale. En effet, le deuxième alinéa de l’article R 1211-8 est supprimé : « Pour préserver l’anonymat du donneur, son hospitalisation ne donne lieu à aucune demande de prise en charge, ni aucune transmission d’informations de séjour aux caisses d’assurance maladie, quelle que soit la nationalité du donneur. »
Cette mesure découle de la nouvelle prise en charge par l’assurance-maladie des frais d’hospitalisation liés au prélèvement ou à la collecte. Le I de l’article R 322-9 du code de la sécurité sociale est, en effet, complété par un 3° ainsi rédigé : « 3° Pour les donneurs mentionnés à l’article L 1211-2 du code de la santé publique, pour les frais d’examens et de traitement prescrits en vue du prélèvement d’éléments ou de la collecte de produits du corps humain, y compris des gamètes, les frais d’hospitalisation ainsi que les frais de suivi et de soins dispensés au donneur en raison du prélèvement ou de la collecte dont il a fait l’objet. » Le secret relatif aux données collectées par l’assurance-maladie, et par ricochet aux mutuelles ou aux assurances complémentaires, risque d’être relancé.