Articles tagués ‘famille’

En Irlande, la crise touche aussi les dons d’organes

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Coupe de reinEn 2010, l’Irlande n’a pas seulement été touchée par une crise économique sans précédent l’ayant obligée à recevoir le soutien de l’Union européenne, elle a aussi connu une crise du don d’organes. Le nombre de donneurs d’organes a chuté de façon spectaculaire. Certains grands hôpitaux universitaires n’ont pas recruté plus d’un ou deux donneurs sur douze mois, alors qu’ils fournissent le service national des greffes. Pour l’Irish Kidney Association, l’association irlandaise du rein, il est préoccupant de voir que personne n’est là pour approcher les familles des donneurs potentiels en raison d’une pénurie de personnel et de la charge de travail dans les services de soins intensifs.

Le National Organ Procurement Service, l’organisme chargé de l’approvisionnement en organes, a estimé qu’en 2010 seules 58 personnes décédées avaient été prélevées pour tous les types de greffe en Irlande, soit un tiers de moins qu’en 2009 où 90 donneurs ont été dénombrés. C’est la plus forte baisse enregistrée dans les annales de ce service et elle a entraîné un effondrement du nombre de transplantations, 92 de moins que l’année précédente.

La mauvaise performance de certains hôpitaux universitaires est un motif de préoccupation. L’hôpital universitaire de Cork, l’un des deux centres de neurochirurgie en Irlande, où les patients avec les blessures à la tête les plus graves sont traités, une seule personne a donné ses organes, l’an dernier. En revanche, l’hôpital Beaumont de Dublin a reçu le consentement de 14 familles de donneurs, un établissement qui fait office de bon élève dans la capitale irlandaise quand on compare ses résultats à ceux d’autres grands hôpitaux de la ville. L’hôpital universitaire St Vincent a, par exemple, une moyenne de seulement 1,5 donneur par an sur plus de 12 ans. Il faut dire que l’hôpital Beaumont est le siège du National Organ Procurement Service

Commentant ces derniers chiffres, Mark Murphy, directeur général de l’Association irlandaise du rein, a déclaré que les hôpitaux semblent avoir besoin d’aide pour inverser la tendance. « Il y a besoin d’au moins 12 coordonnateurs supplémentaires au sein des équipes de soins intensifs à travers le pays », selon lui.
Il y a eu 51 greffes de rein en moins en 2009, soit 50 personnes de plus en dialyse en 2010, ce qui représente un coût non négligeable pour un système de santé comme celui de l’Irlande.

Pourtant, tout a été mis en place aux pays des Celtes pour favoriser le don d’organes et, malgré ces chiffres, l’Irlande a un des taux les plus élevés de dons dans le monde grâce à une législation adaptée. Mais elle ne doit pas se reposer sur ses lauriers, si l’on en croit les propos de M. Murphy. Pour son association, la politique de transplantation en Irlande doit être alignée sur celle des autres pays européens en élargissant les sources potentielles d’organes en incluant les patients décédés d’un problème cardiaque ou ayant une atteinte du tronc cérébral. On estime qu’une telle mesure serait susceptible d’augmenter immédiatement le nombre de donneurs décédés de 150 par an.

En 2009, 261 greffes d’organes ont eu lieu en République d’Irlande. En France, ce chiffre était de 4 580 sur la même période.
Dans l’Hexagone, « un donneur permet de greffer 4 personnes, en moyenne. 32 % des prélèvements possibles sont refusés. Dans près de 4 cas sur 10, c’est parce que le défunt a déclaré son opposition au don d’organes durant sa vie. Dans les 6 autres cas, l’opposition vient de la famille. Le manque d’informations sur la volonté du défunt est l’une des principales causes de refus de la famille », selon l’Agence de la biomédecine.

[Sources : BMJ 2011;342:d982 et National Organ Procurement Service]

La médecine de proximité du futur

Écrit par Charles Duchemin le . Dans la rubrique Humeur

Chercher sur une carteComme prévu, le président de la République, quelques jours après la remise du rapport d’Élisabeth Hubert sur la médecine de proximité, est allé participer à une table ronde dans le Calvados à ce sujet. Animée par le député Claude Leteurtre, ces échanges ont permis au chef de l’État de répondre aux questions d’un jeune médecin généraliste tout juste diplômé, d’une infirmière libérale ayant occupé des fonctions syndicales, d’un médecin de famille plein d’esprit et d’une mère de famille, usager du système de santé comme il en existe des millions. Parfaitement mise en scène, cette réunion qui n’avait rien de spontané a permis de dresser la feuille de route des mesures que le Président entend demander à son gouvernement de prendre dans les semaines qui viennent.

C’est très clairement le rapport d’Élisabeth Hubert qui va servir de base à l’évolution de la médecine de proximité et tout doit aller très vite. Une loi devrait être votée avant la fin du premier trimestre 2011 dans ce domaine. Même si le temps de la concertation n’est pas terminé, il touche à sa fin. Pour que le calendrier soit tenu, les premières décisions vont être prises dans les semaines qui viennent.
À écouter le chef de l’État, la médecine de proximité semble se résumer à deux acteurs : le médecin généraliste et l’hôpital. L’un et l’autre se raréfiant dans les campagnes ou des les banlieues, pour des raisons souvent très différentes, on comprend facilement qu’il faille réagir, mais pourquoi ce silence sur les autres spécialistes de proximité ? Alors que l’ordre des médecins et la justice tendent à relativiser la notion d’omnipraticien pour optimiser la qualité des soins offerts aux patients, le pouvoir politique semble au contraire accorder toutes les vertus au généraliste omniscient. Il est vrai qu’après le couac de la campagne de vaccination contre la grippe A(H1N1), mieux vaut brosser les spécialistes en médecine générale dans le sens du poil et ce n’est sans doute pas un hasard si la question de leur rémunération a été au centre des débats.

Si le président de la République a insisté sur le fait que le paiement à l’acte ne serait pas abandonné, il a montré sa volonté de voir les choses évoluer en matière de rémunération des professionnels de santé et tout particulièrement des praticiens. En plus de l’apparition de forfaits, il est question d’indemniser le travail qui est considéré comme une mission de service public. Pour Nicolas Sarkozy, une consultation de diagnostic ne devrait pas être payée de la même façon qu’une consultation visant à renouveler un traitement. Autre exemple : le temps consacré à des actes de prévention devrait être pris en compte dans la rémunération. Pour le président, les tarifs ne devraient plus être négociés tous les cinq ans à l’occasion de la reconduction de la convention entre les praticiens et l’assurance-maladie, mais évoluer au fil du temps. Les modalités d’une telle évolution restent néanmoins très floues, ce qui a de quoi inquiéter les médecins, d’autant que le chef de l’État reconnaît qu’ils sont habitués à entendre de belles paroles venant des politiques.

Le sujet de la formation des étudiants en médecine a aussi été abordé. Elle va être réformée pour faire une place plus grande aux stages chez le généraliste libéral. À cette occasion, les externes et les internes devraient avoir la possibilité de retrouver un peu d’humanité, selon le président de la République. Cela devrait aussi leur offrir la possibilité de se familiariser avec les nombreux formulaires et tâches administratives qui prennent près de 30 % du temps de travail des médecins de proximité et de beaucoup d’autres. À ce propos, le Président a annoncé qu’il avait chargé le ministre de la santé, Xavier Bertrand, de mettre en place avant la fin de l’année une « instance permanente de simplification » entre les représentants des médecins libéraux, l’assurance-maladie et l’État. Pour Nicolas Sarkozy, cette “paperasserie” est due à la solvabilisation de la clientèle des praticiens par l’assurance-maladie, à l’image de celle dont souffrent les agriculteurs depuis que des systèmes de subventions leur ont été proposés. Malgré tout, les premiers formulaires “inutiles” devraient disparaître début 2011.

Dernier point abordé ici : la délégation des actes de soins qui devrait être encouragée dans les semaines qui viennent pour répondre à la forte demande des professionnels paramédicaux. La notion de décret de compétences va vraisemblablement disparaître à l’occasion de la loi qui devrait être votée début 2011. Il est aussi question d’envisager qu’un professionnel libéral puisse travailler sous la responsabilité d’un autre libéral et de mettre en place une nouvelle entité juridique pour favoriser l’éclosion des maisons pluridisciplinaires. La volonté de faire réaliser des consultations par du personnel paramédical est nette. Que les paramédicaux libéraux n’aient pas plus envie que les médecins de s’installer dans des zones où règnent l’insécurité ou qui sont désertées par les services publics importe peu ; que des pans entiers de leur formation soient à revoir pour répondre aux nouvelles missions qu’on souhaite leur confier, pas plus. Que la qualité des soins puisse en pâtir, toujours aucune importance. Il est juste question d’utiliser le problème de la démographie médicale pour réaliser des économies de santé sur le tarif des actes remboursés… Et n’y a-t-il pas un petit côté démagogique à entendre le chef de l’État dire qu’il souhaite un pays où tout le monde est tiré vers le haut, où les aides-soignantes peuvent devenir infirmières, où les infirmières peuvent devenir médecins, où les médecins généralistes sont devenus des spécialistes en médecine générale ? Un discours similaire a celui de la directrice générale de l’organisation des soins à l’occasion d’une journée sur les protocoles de coopération entre professionnels de santé. Une remarque s’impose : s’il est question de tirer vers le haut les paramédicaux et les généralistes, il n’est jamais fait état d’offrir des possibilités de progression aux médecins des autres spécialités. Il est plus souvent envisagé des mesures visant à restreindre leurs prérogatives ou à leur imposer de nouvelles contraintes…

Plus qu’une médecine de proximité, c’est une santé de proximité qui semble se profiler. Si médecin est encore le métier qui a le plus de prestige aux yeux des Français, comme l’a rappelé Nicolas Sarkozy, il n’est pas évident qu’avec les réformes qui s’enchaînent, il le reste dans les années à venir. Certains préféreraient sans doute d’ailleurs lui voir se substituer le métier d’avocat…

 

Extrait de la table ronde organisée à Orbec (14) sur la médecine de proximité
à l’occasion de la visite du chef de l’État, le 1er décembre 2010

Intervention du Dr Stephanie, spécialiste en médecine générale, médecin de famille

L’intégralité de la vidéo peut être visualisée sur le site de l’Élysée.

Vaccination contre l’hépatite B, sclérose en plaques, responsabilité du laboratoire et nouvelle jurisprudence

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Jurisprudences

Vaccin et lien de causalitéSerait-ce le début d’une nouvelle ère dans la jurisprudence concernant le vaccin contre l’hépatite B et la sclérose en plaques ? La première chambre civile de la Cour de cassation dans une décision du 25 novembre 2010 (pourvoi nº 09-16556) a estimé qu’une cour d’appel pouvait souverainement considérer qu’en l’absence de consensus scientifique en faveur d’un lien de causalité entre la vaccination et les affections démyélinisantes, le fait qu’une patiente ne présente aucun antécédent personnel ou familial et le fait que les premiers symptômes apparaissent quinze jours après la dernière injection ne constituent pas des présomptions graves, précises et concordantes en sorte que n’est pas établie une corrélation entre l’affection de la patiente et la vaccination. Très clairement, même si l’injection immunisante ne date que de quelques semaines quand le patient développe une sclérose en plaques (SEP) et même s’il n’a eu aucun signe avant d’être vacciné ou qu’aucun membre de sa famille n’a eu cette maladie, le vaccin contre l’hépatite B n’est plus systématiquement mis en cause : la seule présomption d’un lien de causalité ne suffit plus à faire pencher la balance de la justice du côté du malade.
La jurisprudence du 25 novembre 2010 rappelle aussi que si le lien de causalité n’est pas établi, le patient ne peut se prévaloir du droit relatif à un produit défectueux.

Il s’agit bien là d’un changement dans l’approche que peuvent avoir les juges de ce problème. Dans une affaire récente, la première chambre civile de la Cour de cassation avait suivi le jugement d’une cour d’appel estimant que l’absence de certitude scientifique, des études concluant à l’absence de lien de causalité, et le fait qu’un patient ne présente pas d’antécédent personnel ou familial de SEP, en plus d’un défaut d’information sur la notice du produit, suffisaient à faire reconnaître la responsabilité du fabricant de vaccins. Quelques mois plus tard, dans une affaire concernant un militaire, le Conseil d’État, quant à lui, estimait qu’une cour d’appel avait eu raison de juger que « le délai qui s’était ainsi écoulé entre la dernière injection et les premiers symptômes constituait un bref délai [4 mois, NDLR] de nature à établir le lien de causalité entre la vaccination et l’apparition de la sclérose en plaques ».

Faut-il y voir là une victoire de la puissante industrie pharmaceutique ? Est-ce une décision qui arrive à point nommé pour protéger l’État d’éventuelles indemnisations en raison de graves effets secondaires liés à un vaccin, qu’il soit destiné à immuniser contre l’hépatite B ou la grippe, par exemple ? Ou est-ce tout simplement le triomphe de la raison et la reconnaissance d’études scientifiques concordantes sur un sujet polémique ? Face à la détresse de ceux qui cherchent à trouver une raison aux malheurs qui les frappent, la question est aussi de savoir s’il faut à tout prix indemniser cette souffrance quand la responsabilité des uns ou des autres est discutable.
Face à des scandales sanitaires comme ceux de l’amiante, du sang contaminé, de l’hormone de croissance ou plus récemment du Mediator, montrant à quel point les enjeux économiques sont puissants face à la santé publique, il est facile de comprendre les doutes des patients et de leur famille. Justice et vérité ne vont pas forcément de pair…

Le retard d’hospitalisation en cas de grippe est une perte de chance

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Jurisprudences

Trouver le bon équilibreHors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d’un défaut d’un produit de santé, les professionnels de santé mentionnés au code de la santé publique, ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d’actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu’en cas de faute. C’est ce que prévoit l’article L 1142-1 de ce même code. Un tribunal va donc s’évertuer à rechercher la faute d’un praticien lorsque la responsabilité de ce dernier est mise en cause par un patient ou sa famille, mais il ne doit pas pour autant négliger les autres éléments du dossier…

Si la grippe est une affection le plus souvent bénigne, malgré la présentation qui en a pu être faite à l’occasion de la pandémie survenue en 2009, il arrive parfois qu’un patient soit atteint d’une forme maligne de cette maladie. C’est ce qui est arrivé à une femme en décembre 2003, sans que rien ne laisse présager pour autant que son état de santé allait se dégrader brutalement et qu’elle décéderait d’un syndrome de détresse respiratoire aiguë. La famille a porté plainte contre le médecin qui n’a pas hospitalisé la malade pensant que tout allait rentrer dans l’ordre rapidement.

Dans un premier temps, la cour d’appel a débouté la famille de sa demande en responsabilité du médecin. Certes si le praticien avait délivré à la patiente des soins consciencieux, attentifs et diligents, son hospitalisation serait intervenue plus tôt, mais que rien ne dit pour autant que l’évolution de la pathologie eût été différente ; l’administration de l’antibiothérapie aurait été avancée mais aucun élément médical ne permettait de dire que cela aurait évité la dégradation brutale de l’état de santé de la malade et son décès, dans la mesure où la cause du syndrome de détresse respiratoire aiguë dont elle était décédée n’avait pu être déterminée, de sorte qu’il n’était pas établi que la faute du médecin eût fait perdre à la patiente une chance de survie.

Mais la Cour de cassation, dans un arrêt du 14 octobre 2010 (pourvoi nº 09-69195), ne l’a pas entendu de cette façon. Pour cette dernière, la perte de chance présente un caractère direct et certain chaque fois qu’est constatée la disparition d’une éventualité favorable, de sorte que ni l’incertitude relative à l’évolution de la pathologie, ni l’indétermination de la cause du syndrome de détresse respiratoire aiguë ayant entraîné le décès n’étaient de nature à faire écarter le lien de causalité entre la faute commise par le médecin, laquelle avait eu pour effet de retarder la prise en charge de la patiente, et la perte d’une chance de survie pour cette dernière. En hospitalisant plus tôt la patiente pour sa grippe, le praticien ne lui aurait pas fait perdre une chance de survivre, peu importe que ce soit ou non cette maladie qui soit à l’origine de son décès…

La réalité juridique est parfois très éloignée du discours de terrain. D’un côté, les médecins sont de plus en plus encouragés, pour ne pas dire contraints, économies de santé obligent, à ne pas hospitaliser des patients pour des maladies qui sont, chez la très grande majorité des patients, peu sévères, surtout si ces maladies sont virales ou infectieuses afin d’éviter de contaminer inutilement les services de soins. De l’autre, les praticiens se retrouvent avec une véritable épée de Damoclès au dessus de la tête, le plus petit retard d’hospitalisation en cas d’aggravation brutale et imprévisible de la maladie chez un patient ne présentant pas de facteur de risque particulier suffisant à les faire condamner pour faute. Pas facile de travailler sereinement, chaque jour, à l’aplomb d’un précipice…

2011, année des patients et de leurs droits

Écrit par Charles Duchemin le . Dans la rubrique Humeur

Informer les patientsTambours et trompettes pour une nouvelle opération gouvernementale, « 2011, année des patients et de leurs droits », lancée le 5 octobre depuis les hautes sphères ministérielles de l’avenue de Ségur. « Défendre les droits des patients, leur garantir une prise en charge respectueuse de leur singularité, mieux prendre en considération les nouvelles attentes des citoyens vis-à-vis de leur santé », tel est le programme de cette année, centrée sur tous ceux qui auront besoin de soins un jour ou l’autre… Un discours très éloigné des recommandations de bonne pratique qui laissent penser qu’une approche unique est la meilleure solution au respect de la singularité des patients.

Une présidente de charme est chargée de mener les travaux de cette année : Marina Carrère d’Encausse, médecin échographiste, mais aussi journaliste et co-présentatrice de l’émission Le Magazine de la santé sur France 5, chaîne du service public. Habituée des médias et ancienne animatrice du Disney club, Marina Carrère d’Encausse n’a eu aucun mal à exposer à ses confrères de la presse les trois principales orientations retenues pour cette année des patients et de leurs droits. Il est question de réflexion et d’action pour prendre en considération « les nouvelles attentes du citoyen, acteur de santé », pour promouvoir « la bientraitance à l’hôpital » et pour « faire vivre les droits des patients ».
Aux côtés de Marina Carrère d’Encausse, on retrouve Christian Saout, président du collectif interassociatif sur la santé (CISS) et Christine d’Autume, inspectrice générale des affaires sociales. Le choix ministériel de Christian Saout n’est pas vraiment étonnant puisque c’est un habitué de l’émission Bonjour, docteur, cette désignation ne laissant, par ailleurs, aucun doute sur l’orientation que souhaite donner le gouvernement à cette initiative.

Il est donc question de « faire vivre les droits des patients », car ils sont actuellement insuffisamment connus si l’on en croit le ministère. Malgré la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, malgré le CISS, le pôle santé du Médiateur de la République, le pôle démocratie des agences régionales de santé, les campagnes de l’assurance-maladie ou les émissions télévisées consacrées à ce sujet, les patients manquent d’informations sur leurs droits. Cette année sera donc l’occasion de porter à la connaissance du public, cette fois de façon efficace, un maximum d’indications sur ses droits en tant que patient. Une nouvelle fois, il n’est question que de droits : pas un mot sur les devoirs que peut avoir le patient vis-à-vis du système de santé et rien sur le respect des acteurs du soin…

Concernant « la bientraitance à l’hôpital », une mission a deux mois pour établir des propositions qui seront soumises à discussion lors de six débats en région, partout en France, au premier semestre 2011, suivis d’un colloque de restitution en mai. L’accueil du patient et de ses proches, l’assistance dans certains besoins fondamentaux tels que la toilette ou repas, l’annonce d’une mauvaise nouvelle, le soin invasif et bien d’autres sujets devront être au coeur de réflexions, car il semble que nombre d’équipes hospitalières ne sont pas au point dans ces domaines…

Une autre mission, tout aussi courte, sera menée sur « les nouvelles attentes du citoyen, acteur de santé ». Il est question d’éducation thérapeutique du patient (ETP) et d’évolution de la relation médecin-patient liée à Internet, par exemple, mais « là aussi, la ministre a souhaité que soit traitée la question des inégalités devant la capacité à s’informer et à agir vis-à-vis de sa santé. »

Enfin, un colloque d’ouverture de « 2011, année des patients et de leurs droits » est prévu à la fin du mois de janvier, tout comme la deuxième édition du Prix des droits des patients, dans le cadre de la Journée européenne des droits des patients qui se tient chaque 16 avril, et un site Internet dédié et participatif sera créé en début d’année.

L’information étant un droit pour le patient et le citoyen, il sera sans doute aisé de connaître le coût de cette année des patients et de leurs droits, de son site Internet, de son rapport et des différentes missions. Après les déboires connus par Christine Boutin quant à sa rémunération pour une mission tout aussi capitale pour le pays et à un moment où la recherche médicale indépendante peine à trouver des fonds, il paraît fondamental que de telles données soient facilement accessibles. Sur le site dédié, peut-être ?

Prendre des décisions pour les patients déments

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Prendre en charge une personne âgéeLes patients souffrant d’une démence débutante, voire modérée, ont très souvent besoin d’aide. La confiance est importante, car la personne qui va les accompagner au quotidien va être régulièrement amenée à prendre des décisions à la place du patient et à les lui faire accepter.
Contrairement à ce qui se passe de ce côté-ci de la Manche, au Royaume-Uni il existe un statut particulier pour ces personnes qui aident ces malades : on les appelle les family carers. Même si ce terme d’ “aidant” ou de “soignant” familial évoque la famille, car c’est le plus souvent un parent qui assume ce rôle, il peut très bien s’agir d’un voisin ou d’un ami. Des services sociaux sont à la disposition de ces accompagnants prêts à prendre en charge des patients en fin de vie ou des malades touchés par une démence plus ou moins prononcée ; divers avantages leur sont même concédés.
Ces personnes ne sont pas à confondre avec les aides à domicile que l’on connaît en France ou les aides familiales en Belgique. Le family carer n’est pas un employé, sa démarche est volontaire et il s’agit, bien souvent, d’un “travail” de tous les instants.

Une équipe de gériatres britanniques a voulu se faire une idée du type de décisions prises par les family carers. Elle a aussi souhaité identifier les éléments facilitant ces prises de décisions ou, au contraire, les compliquant. Le but de ce travail était d’apporter des informations à ces aidants familiaux sur les obstacles qu’ils auront à surmonter. Son enquête a été publiée le 25 août 2010 sous le titre Making decisions for people with dementia who lack capacity: qualitative study of family carers in UK dans le BMJ.
Basée sur des groupes de parole associés à des entretiens individuels, cette étude qualitative a été menée à Londres. 43 family carers intervenant auprès de personnes démentes ont participé aux réunions de groupe et 46 autres ayant eu à prendre de telles décisions ont été entendues individuellement.

Dans la vie de tous les jours, les principaux domaines dans lesquels les accompagnants interrogés ont eu à prendre des décisions sont les suivants : recours aux services sociaux ou de santé dédiés aux patients déments ; entretien du domicile ; affaires juridico-financières ; soins sans rapport avec la démence ; prise en charge du patient quand le family carer tombe malade et ne peut plus assurer son travail.
Ils ont souligné combien il était difficile de choisir pour quelqu’un d’autre, surtout lorsque cette personne ne coopère pas, voire même oppose une certaine résistance. Il est tout aussi délicat d’imposer son rôle décisionnaire, que ce soit vis-à-vis du patient ou des autres parents. Les familles élaborent souvent des stratégies pour s’assurer que le patient conserve néanmoins sa dignité.

Au terme de cette étude, l’équipe de gériatres propose des solutions pour faire accepter au patient dément une telle situation : présenter ce changement de façon progressive et faire appel à un professionnel afin de faire accepter la présence du family carer, insister sur les avantages de recourir à une telle solution, qui n’est pas une contrainte, mais un moyen de garder son indépendance. Pour faciliter l’accès du patient dément aux services de santé ou sociaux, l’accompagnant doit se charger de prendre les rendez-vous, d’accompagner le malade en consultation ou lorsqu’il doit se faire opérer. Il doit aussi être là pour expliquer les symptômes dont peut être amené à souffrir le patient et pour recueillir les informations données par les soignants. Il aide ces derniers à obtenir le consentement de la personne démente et c’est à lui de demander le recours à un spécialiste si nécessaire.
Les décisions en fin de vie sont particulièrement délicates. Le fait que le family carer ait connu le patient à un moment où ses facultés intellectuelles permettaient encore d’aborder de tels sujets avec lui peut aider à ces prises de décisions. C’est une façon pour les équipes soignantes de connaître les souhaits du patient qui n’est plus réellement en mesure de les exprimer.

Chaque situation est particulière, mais une telle étude permet de faire prendre conscience à ceux qui n’y ont jamais été confrontés à quel point la prise en charge d’une personne atteinte de démence peut être délicate. La dépendance est l’un des enjeux majeurs des futures politiques de santé, car peu nombreux sont ceux qui ne seront pas un jour confronter pour l’un de leurs proches ou pour eux-mêmes à de telles circonstances.

Facultés intellectuelles et droit de vote

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

vote et personne protégéePersonne n’ignore que l’âge moyen de la population française, comme celui dans de très nombreux autres pays industrialisés, dont l’Angleterre, ne cesse d’augmenter. Accès aux soins facilité, campagne de prévention, progrès de la médecine, les raisons à ce vieillissement de la population sont multiples. Malheureusement, elle s’accompagne aussi de nouveaux maux pour lesquels les réponses thérapeutiques ne sont pas encore totalement satisfaisantes. Si une maladie comme la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) peut être réellement handicapante pour la personne qui en est atteinte, elle n’altère pas pour autant les facultés intellectuelles du patient. Il n’en est pas de même pour toutes les pathologies en rapport avec l’usure du temps et la maladie d’Alzheimer en est un bel exemple.

Même si beaucoup de nos aînés gardent toute leur lucidité jusqu’à leur dernier souffle et que des traitements commencent à améliorer des situations cliniques jusque-là désespérées, le grand âge s’accompagne souvent d’une diminution des facultés intellectuelles. D’autres maladies peuvent, quant à elles, altérer les facultés mentales d’individus bien plus jeunes. Un article intitulé Voting and mental capacity, publié le 25 août 2010 dans le BMJ, s’intéresse tout particulièrement à la question du droit de vote chez les patients qui « n’ont plus toute leur tête » Outre-Manche. Les auteurs de ce travail s’interrogent sur la capacité à participer aux élections des 700 000 Anglais atteints de démence et des 1,2 millions présentant des troubles de l’apprentissage. Lors des dernières grandes élections au Royaume-Uni en 2010, Marcus Redley pense qu’un certain nombre de patients qui présentent de tels problèmes de santé n’ont pas eu l’opportunité de voter alors qu’ils avaient encore les capacités pour ce faire. Il estime qu’aux vues des travaux de Gill Livingston, le médecin finira par être consulté pour savoir si un patient est en mesure d’exprimer son suffrage ou non quand il souffre de troubles intellectuels. Selon lui, si les gens se voient refuser la possibilité de voter (car ils ne sont pas encouragés à s’inscrire ou parce que le vote n’est pas facilitée) leurs droits de citoyens s’en trouvent restreints. Par contre, parce que les façons de voter (et par conséquent de voter frauduleusement) se diversifient, la démocratie risque d’être compromise si cela permet de faire voter quelqu’un qui n’en a pas ou plus la capacité intellectuelle.
Au Royaume-Uni, la loi électorale a récemment aboli la notion de droit commun qui voulait que l’on soit considéré comme incapable de voter en cas de désordre mental diagnostiqué. Le Mental Capacity Act 2005, qui s’applique à l’Angleterre et au Pays de Galles, interdit explicitement qu’une personne décide pour une autre en matière de vote. La Commission électorale précise que, si une probable incapacité mentale n’est pas un obstacle à l’inscription sur les listes électorales ou au vote, les agents le vote par procuration est interdit à ceux qui n’en sont plus mentalement capables. C’est dans ce cadre que les médecins pourraient être invités à évaluer les capacités mentales d’une personne.

Une étude au Royaume-Uni a confirmé que les personnes ayant des troubles de l’apprentissage sont sous-représentés dans les sondages. Ce travail a également révélé que les adultes souffrant de ces mêmes troubles étaient six fois plus susceptibles de voter s’ils vivaient avec au moins un autre adulte participant au vote, confirmant les conclusions d’une équipe norvégienne sur le même sujet.
Aux États-Unis, des recherches ont montré que, bien que beaucoup de gens atteints d’une démence légère à modérée votent, ils tendent plus facilement à le faire si leur accompagnateur est leur conjoint plutôt que qu’un fils ou une fille. Dans une enquête menée auprès de 100 patients ambulatoires souffrant de démence, 60 % d’entre eux participent aux élections. Plus grave est la démence, moins les patients ont tendance à voter. Dans les maisons de repos et de logements-services, environ 29 % des résidents votent, avec d’importantes variations entre les résidences, d’après une autre étude rapportée par Marcus Redley.

La probabilité d’aller voter semble donc dépendre en partie du soutien social dont bénéficie le patient, d’où d’importantes variations. Les données indiquent également que ce sont les accompagnants qui décident si quelqu’un doit voter ou non. Savoir qui évalue la capacité d’un patient à voter a donc toute son importance. En Australie, où le vote est obligatoire, un électeur peut être retiré des listes électorales si un médecin certifie qu’il ou elle est « aliéné », incapable de comprendre la nature et l’importance du vote. Dans la pratique, il est difficile de savoir qui est exclu et les droits de recours dont ces personnes disposent.

Aux États-Unis, certains états refusent systématiquement le droit de vote aux citoyens sous tutelle pour démence, mais ceci fait débat. Un outil d’évaluation pour juger de la compétence fonctionnelle d’une personne à voter a été développé. Un tel test, s’il est utilisé au Royaume-Uni et s’adressent uniquement aux personnes ayant un diagnostic de démence, de troubles d’apprentissage, ou d’une autre déficience mentale, serait probablement contraire à la loi interdisant toute discrimination envers les personnes handicapées (Disability Discrimination Act 2005), selon l’auteur de l’article.

Tout cela est étonnant quand on sait que, depuis 2006, la Convention relative aux droits des personnes handicapées de l’Organisation des nations unies (ONU) garantit aux citoyens avec ou sans handicap les mêmes droits civiques, « estimant que les personnes handicapées devraient avoir la possibilité de participer activement aux processus de prise de décisions concernant les politiques et programmes, en particulier ceux qui les concernent directement ». Néanmoins, une enquête récente n’a recensé que quatre Etats démocratiques (Canada, Irlande, Italie et Suède) n’ayant pas de restrictions juridiques au droit de vote des adultes mentalement handicapés, d’après l’article du BMJ. Le Kenya s’est aussi mis en conformité avec l’article 29 de la Convention de l’ONU offrant plusieurs garanties aux personnes handicapées quant à leur participation à la vie politique et à la vie publique. Il convient de rappeler que « par personnes handicapées on entend des personnes qui présentent des incapacités physiques, mentales, intellectuelles ou sensorielles durables dont l’interaction avec diverses barrières peut faire obstacle à leur pleine et effective participation à la société sur la base de l’égalité avec les autres. » La démence, qu’elle soit sénile ou autre, entre tout à fait dans ce cadre, par exemple.

En France, le code électoral en son article L5 précise que « Lorsqu’il ouvre ou renouvelle une mesure de tutelle, le juge statue sur le maintien ou la suppression du droit de vote de la personne protégée. » C’est le juge qui décide de laisser ou non le droit de vote à une personne dont les facultés mentales sont altérées, le médecin n’intervenant que pour ce qui est des constatations prévues pour la mise en place de la protection juridique. L’article 425 du code civil est clair : « Toute personne dans l’impossibilité de pourvoir seule à ses intérêts en raison d’une altération, médicalement constatée, soit de ses facultés mentales, soit de ses facultés corporelles de nature à empêcher l’expression de sa volonté peut bénéficier d’une mesure de protection juridique […] ». L’article 440 du code civil précise pour sa part que « La tutelle n’est prononcée que s’il est établi que ni la sauvegarde de justice, ni la curatelle ne peuvent assurer une protection suffisante. »

Pouvoir voter librement est l’un des fondements de la démocratie. Défendre cette valeur est le devoir de chaque citoyen, c’est ce qui fait toute la difficulté des rapports entre facultés mentales altérées et droit de vote.

Informations concernant une personne décédée à l’hôpital

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Information après un décès à l'hôpitalIl arrive parfois qu’une famille, lors du décès de l’un de ses membres dans un établissement hospitalier, ait l’impression que l’on cherche à lui cacher quelque chose. Cette situation intervient souvent lorsque les choses se sont précipitées alors que rien ne laissait présager l’issue fatale ou lorsque la communication et l’information n’ont pas été à la hauteur d’une famille en souffrance. Contrairement à ce que croient souvent les familles, la communication des informations relatives à un patient à l’hôpital ou dans un établissement privé chargé d’une mission de service public n’est pas libre. Dans certaines conditions, le secret médical peut lui être opposé, un fait que la famille a bien souvent du mal à accepter.

Même si les circulaires n’ont pas force de loi, elles participent à la compréhension des décisions prises par les administrations. La circulaire de la Direction de l’hospitalisation et de l’organisation des soins nº DHOS/E1/2009/271 du 21 aout 2009 relative à la communicabilité des informations de santé concernant une personne décédée ayant été hospitalisée dans un établissement public de santé ou un établissement de santé privé chargé d’une mission de service public fait le point sur ce sujet.

Plusieurs textes servent de références à l’attitude que se doit d’adopter l’équipe soignante et l’administration de l’établissement face à la demande de la famille. Le code de la santé publique, bien entendu, notamment ses articles L 1110-4 et R 1112-7, mais aussi le code du patrimoine, tout particulièrement les articles L 211-1, L 211-4, L 213-1 et L 213-2, et l’arrêté du 5 mars 2004 (modifié par arrêté du 3 janvier 2007) portant homologation des recommandations de bonnes pratiques relatives à l’accès aux informations concernant la santé d’une personne.

Le défunt ne doit pas s’être opposé à la communication des informations le concernant. S’il a interdit que l’on donne les informations à ses proches, le personnel de l’établissement, même après la mort du patient, n’a d’autre choix que de se taire. L’ayant droit doit aussi motiver sa demande et la loi ne retient que trois motifs pour lesquels la communication des informations est autorisée : pour connaître les causes de la mort ; pour défendre la mémoire du défunt ou pour faire valoir les droits de l’ayant droit demandeur. Il n’accèdera pas pour autant à l’intégralité du dossier, mais aux seules pièces du dossier médical relatives au motif invoqué.
Si les principales tensions interviennent souvent très peu de temps après le décès du malade, il faut savoir que les « informations de santé à caractère personnel produites au sein des établissements de santé publics et des établissements de santé privés chargés d’une mission de service public bénéficient du statut d’archives publiques et, à ce titre, sont soumises à la réglementation applicable à ces archives ». À ce titre et suite à un avis de la commission d’accès aux documents administratifs (20091205-MFL), émis le 16 avril 2009, le dossier médical est librement accessible à toute personne qui en fait la demande à l’expiration d’un délai de vingt-cinq ans à compter de la date du décès de l’intéressé, pour les documents dont la communication porte atteinte au secret médical. Si la date du décès n’est pas connue, le délai est de cent vingt ans à compter de la date de naissance de la personne en cause. Les dispositions de l’article L 1110-4 ne sont alors plus applicables.

Une réflexion complète les recommandations données par la circulaire : « la divulgation des informations de santé ouverte à tout demandeur à l’issue du délai de vingt-cinq ans à compter du décès du défunt peut paraître peu protectrice du secret médical et particulièrement préjudiciable dans la mesure où elle peut se produire alors que certains membres de la famille et des proches sont encore en vie ». Il est donc conseillé aux chefs d’établissement d’être particulièrement vigilant quant à la durée de conservation et à la destruction des dossiers médicaux dont ils ont la charge.

Archivage des dossiers d’un médecin décédé : le conseil de l’ordre moins solidaire ?

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

En dix ans, le conseil national de l’ordre des médecins (CNOM) semble avoir revu à la baisse la notion de « solidarité confraternelle » au sujet de l’archivage des dossiers d’un médecin décédé. En décembre 1999 dans un rapport intitulé Devenir des dossiers médicaux d’un médecin cessant ou ayant cessé toute activité du docteur Jean Pouillard adopté lors d’une session du conseil national de l’ordre des médecins, c’est sur ce principe que l’ordre se basait pour venir en aide à la famille de l’un de ses confrères tragiquement disparus.

Extrait du rapport Devenir des dossiers médicaux d’un médecin cessant ou ayant cessé toute activité de décembre 1999

Le médecin est décédé ou devient brutalement indisponible (maladie, hospitalisation) :

a) la famille du médecin décédé présente la clientèle à un médecin qui s’installe au lieu du cabinet médical existant ou dans la proximité ;

b) la famille du médecin décédé présente la clientèle à un médecin déjà installé dans la commune, lequel devient par contrat le médecin successeur.

Dans les deux cas, il est souhaitable que la famille du médecin décédé informe la clientèle — lettre personnalisée si possible et information sous forme d’annonce publique dans la presse locale — des conditions de continuité d’activité du cabinet médical en précisant (conformément aux termes prévus dans le contrat de cession) que les dossiers des patients sont mis à la disposition du médecin qui en prend possession, lequel s’engage également à transmettre le cas échéant et sans délai, tout dossier d’un patient qui en ferait la demande, au médecin désigné par ce patient, conformément à l’article 6 du code de déontologie : “Le médecin doit respecter le droit que possède toute personne de choisir librement son médecin. Il doit lui faciliter l’exercice de ce droit”.

c) il n’y a pas de présentation à clientèle : la famille a quitté les lieux ou refuse de se charger de la garde des dossiers, le médecin décédé n’a pas d’héritiers, ou est hospitalisé (psychiatrie) sans héritiers.

Il n’en demeure pas moins que les dossiers médicaux doivent être protégés contre toute indiscrétion à l’égard de tiers non-médecins, y compris la famille, qu’ils ne sauraient être transmis à qui que ce soit sans le consentement des patients, et que s’il est difficile de les confier au Conseil départemental auprès duquel le médecin décédé était inscrit, il est également impossible de les confier à un service public départemental d’archives, lequel n’est pas tenu de recevoir des archives médicales.

Dans ces conditions, qui au demeurant sont relativement exceptionnelles, le Conseil départemental reste l’intermédiaire obligé, dans le souci de l’intérêt public et du respect de la confidentialité des données nominatives, pour gérer toute demande de transmission d’un dossier au médecin désigné par un patient. En effet, c’est au Conseil départemental de l’Ordre des médecins, garant de la déontologie et de la solidarité confraternelle, qu’incombe la responsabilité d’assurer le relais et d’épauler les médecins et leurs familles.

En 2009, le discours est plus tranché. Il n’est plus vraiment question de « solidarité confraternelle » et la famille n’a d’autres choix que prendre à sa charge l’archivage des dossiers si l’on en croit le document Dossiers médicaux : conservation et archivage mis en ligne par le CNOM le 19 mai 2009.

Extrait du document Dossiers médicaux : conservation et archivage de mai 2009

En cas d’interruption brutale d’exercice.

Le Conseil départemental apportera son aide à la famille du médecin dans l’incapacité d’organiser lui-même la transmission des dossiers aux médecins désignés par les patients.

Une annonce dans la presse locale informera la patientèle de la fermeture du cabinet, invitant les patients à adresser leur demande au Conseil départemental.

Cependant, l’archivage du reliquat des dossiers restera de la responsabilité de la famille.

Voilà qui n’est pas sans poser de nombreuses questions alors qu’il est souvent plus difficile en 2009 qu’en 1999 de trouver un successeur à un médecin décédé. Selon ce document, un conseil départemental est dans l’incapacité d’organiser lui-même la transmission des dossiers : il n’est donc plus « l’intermédiaire obligé dans le souci de l’intérêt public et du respect de la confidentialité des données nominatives, pour gérer toute demande de transmission d’un dossier au médecin désigné par un patient ». On peut s’en étonner, car les données contenues dans ces dossiers relèvent en 2009, comme en 1999, du secret médical. La loi ne prévoit pas que les membres de la famille d’un médecin (vivant ou mort) puissent connaître l’identité de ses patients et encore moins avoir accès à leurs secrets de santé. Il n’y a pas de dérogation au secret médical pour les ayants droit du praticien et c’est heureux. Dans ces conditions, comment envisager qu’une famille puisse assurer elle-même l’archivage et la transmission des dossiers ?Archivage des dossiers d'un médecin décédé et secret médicalLe recours par la famille à un hébergeur ne résoud pas ces problèmes. Si un patient demande, comme la loi du 4 mars 2002 l’y autorise, à avoir accès à son dossier médical, qui va s’assurer que ce dossier ne contient pas des informations données par un tiers qui ne doivent pas être communiquées ? Même en transmettant les demandes à l’hébergeur et en communiquant les dossiers en l’état, qu’en est-il de la responsabilité de la famille ? Pour certains patients psychiatriques ou pour les cas où le médecin a jugé préférable, comme la loi le prévoit, de ne pas révéler un diagnostic dans l’intérêt du patient, on imagine aisément les risques pris par la famille. Seul l’oeil avisé d’un praticien est susceptible à la relecture du dossier, de faire la part des choses.
Rien d’étonnant dans ces conditions que les ayants droit du médecin soient tentés de détruire les dossiers, d’autant qu’ils n’ont souvent pas conscience des risques encourus et passant à l’acte et en signalant un tel sinistre.

On peut comprendre que les secrétariats des conseils départementaux ne veuillent pas avoir à gérer les demandes des patients, travail ingrat et chronophage. On peut aussi voir l’intérêt des mêmes conseils à ne pas vouloir prendre en charge l’archivage de dossiers en raison des coûts élevés de ces procédures et des responsabilités que cela implique. Le choix semble donc avoir été fait de les reporter sur les familles au détriment de l’intérêt public, du respect du droit et de la confidentialité. La notion de « solidarité confraternelle » semble atteindre ses limites lorsque les intérêts de l’institution ordinale sont en jeu. Il serait bon que le législateur s’empare de cette question montrant ainsi aux médecins que la solidarité n’est pas une notion qui n’est utilisée que pour leur infliger sans cesse de nouvelles contraintes…

Autre raison d’espérer une intervention du législateur, le problème de la durée de l’archivage des dossiers médicaux au cabinet n’est toujours pas réglé. Le CNOM le reconnaît et recommande néanmoins un délai de vingt ans, identique à celui imposé aux établissements de santé, mais qui peut paraître bien court à la lecture de l’article intitulé L’archivage du dossier médical au cabinet.

Accès du patient et des ses ayants droit aux enregistrements du Samu

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Presse

Dossier médical et communications avec le SamuLa cour administrative d’appel de Marseille a condamné, le 25 juin 2009, un centre hospitalier universitaire (CHU) du sud de la France pour avoir fait obstacle à la manifestation de la vérité, c’est ce qu’a révélé le journal Le Figaro dans son édition du 22 juillet. C’est pour ne pas avoir enregistré, conservé et remis à la famille d’un patient les conversations relatives à une intervention de son Samu (service d’aide médicale urgente) que cet établissement a été condamné.

C’est pour protéger un médecin généraliste, ayant commis une erreur de diagnostic conduisant au décès d’un patient, que le Samu, à qui ce praticien avait fait appel, a refusé de communiquer les enregistrements relatifs à cette affaire à la famille du défunt qui cherchait à établir la responsabilité du médecin de ville. Les conversations entre le généraliste et le régulateur du Samu auraient vraisemblablement mis en évidence que le praticien libéral avait paniqué après s’être rendu compte que le coup de chaleur qu’il avait diagnostiqué était en fait les prémices d’un infarctus du myocarde… Malgré un avis favorable de la commission d’accès aux documents administratifs (CADA), le CHU n’a pas voulu remettre ces « pièces à conviction » aux ayants droit de la victime. C’est pour cette raison que la famille a porté plainte pour entrave à la manifestation de la vérité. Bien lui en a pris puisque, au moment de la perquisition menée dans les locaux du Samu suite à cette plainte, la bande sur laquelle les enregistrements auraient dus se trouver avait été détruite et remplacée par une cassette de nettoyage.

En première instance, le tribunal administratif de Nice avait donné raison à l’hôpital pour n’avoir pas communiqué ces enregistrements au motif qu’ils ne constituaient pas des pièces du dossier médical du patient. La cour d’appel de Marseille a infirmé ce jugement. Le CHU a jusqu’au 25 août pour se pourvoir en cassation…