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Télémédecine : un petit monde qui ne connaît pas la crise

Écrit par Nathalie Ferraud-Ciandet le . Dans la rubrique Actualités, Evolution

Télémédecin

Alors que la France accuse un retard dans le déploiement de la télémédecine, les autorités nationales et régionales accélèrent le mouvement dans une profusion de financements offerts aux porteurs de projets et d’outils permettant leur mise en œuvre. Après un recensement des initiatives locales, les agences régionales de santé formulent actuellement leurs programmes de télémédecine. Tous devront se conformer aux exigences du décret du 19 octobre 2010, cadre législatif devenu incontournable, avant la fin du mois d’avril 2012, et intégrer le plan national de télémédecine qui est sur le point d’être adopté. Cet accompagnement financier et méthodologique des projets de télémédecine a vocation à enfin pérenniser l’activité des French « E-Doctors ».

Dépassements d’honoraires des médecins : qu’en pensent le gouvernement et les députés ?

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Médecin refusant un dépassement d'honorairesLe projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2012 est en pleine discussion à l’Assemblée nationale. Si le sujet d’une éventuelle réduction des indemnités journalières a fait les gros titres des journaux à cette occasion, le texte comporte une multitude de mesures qui intéressent tant les patients que les médecins. Si, parmi celles-ci, beaucoup font débat, le sort réservé aux dépassements d’honoraires paraît faire l’objet d’un consensus entre le gouvernement et les députés de la majorité. Les élus de l’opposition, quant à eux, dénoncent ce qu’ils estiment souvent être le symbole d’une médecine à deux vitesses.

Les dépassements d’honoraires donnent une certaine liberté tarifaire aux médecins conventionnés du secteur 1 lorsqu’ils sont encore titulaires du droit permanent à dépassement (DP) ou des médecins à honoraires différents (secteur 2). Ils sont mis en cause régulièrement, car ils sont souvent mal compris par les patients et vilipendés par les mutuelles ou les complémentaires santé à qui ils coûtent cher. Ils sont aussi un sujet de dissension entre les praticiens du secteur 1 et du secteur 2. Leur limitation ou leur suppression est donc un argument politique plus ou moins démagogique en fonction des intérêts défendus.

Il est important de rappeler que les dépassements d’honoraires ne sont pas pris en charge par l’Assurance-Maladie et que tous les patients sont libres de choisir un médecin à honoraires opposables (secteur 1) s’ils ne souhaitent pas avoir à régler un dépassement d’honoraires. Les patients disposant d’une mutuelle ou d’une complémentaire santé peuvent, en fonction du contrat souscrit, voir une partie ou la totalité du montant d’un éventuel dépassement d’honoraires remboursée par l’organisme auprès duquel ils ont contracté. Enfin, les patients titulaires de la couverture maladie universelle (CMU) ne font pas l’objet de dépassements d’honoraires pour les actes pris en charge par l’Assurance-maladie quand ils consultent un médecin secteur 1 avec DP ou d’un médecin secteur 2.

Les extraits des séances publiques ayant eu lieu entre le 25 octobre 2011 et le à l’Assemblée nationale présentés ci-dessous permettent de se faire une idée de la teneur des débats et du point de vue des principaux intervenants au sujet des dépassements d’honoraires. Si certains parlementaires évoquent les dépassements excessifs, d’autres semblent condamner le principe même de ces dépassements. Pour les internautes qui souhaitent plus de précisions, il est toujours possible de se référer à l’intégralité des débats disponible sur le site du Palais Bourbon.

1re séance du mardi 25 octobre

 C’est principalement le ministre de la santé, Xavier Bertrand, qui s’est exprimé au sujet des dépassements d’honoraires : « En outre, pour répondre structurellement à la question des dépassements d’honoraires, qui, j’en suis conscient, peuvent entraîner des retards dans les soins, voire des renoncements aux soins, j’ai dit que j’étais très favorable à la prise en charge, dans les meilleurs délais, de ces dépassements pour les trois spécialités de chirurgie, d’anesthésie-réanimation et de gynécologie obstétrique. Plus précisément, sur les bases d’un accord intervenu entre les différentes parties prenantes, au moins 30 % de l’activité devrait se faire à tarif opposable ; les dépassements supérieurs à 50 % du tarif remboursable ne seraient pas pris en compte ; et il s’agit d’avoir un nombre d’actes suffisant pour garantir la qualité des soins.
En l’absence d’un accord avec l’UNOCAM [Union nationale des organismes d’assurance maladie complémentaire, NDLR] – je le déplore profondément, mais il n’est pas trop tard – le Gouvernement prendra ses responsabilités et proposera au Parlement de mettre en place cette prise en charge par la loi, avec une prise en charge obligatoire du secteur optionnel dans les contrats responsables, à hauteur de 150 %.
Je proposerai que ce secteur optionnel soit ouvert au secteur 2, afin de prendre en charge les dépassements et de ne pas ouvrir de nouvelles possibilités de dépassement.
J’aurais préféré un accord, mais il n’est pas trop tard. Pour l’instant, nous nous en tenons à notre proposition. Si un accord intervient, tant mieux. Si tel n’est pas le cas, nous aurons renforcé l’accès aux soins et la prise en charge des dépassements pour nos concitoyens.
Cette mesure sera accompagnée d’autres mesures de lutte contre les dépassements. L’assurance maladie va, à notre demande, lancer de nouveaux contrôles sur les professionnels ne respectant pas le tact et la mesure, en ville comme à l’hôpital. Nous y reviendrons pendant la discussion.
Le Conseil national de l’ordre des médecins que j’ai vu vendredi est prêt à nous suivre dans cette voie. Par ailleurs, le Gouvernement s’est déjà engagé, dans la loi de financement de la sécurité sociale 2011, à élargir la couverture pour les plus modestes, en augmentant le plafond de ressources ouvrant droit à l’aide complémentaire santé – l’ACS – à 30 % du plafond CMU-C [couverture maladie universelle complémentaire, NDLR] au 1er janvier 2012 : cela permettra ainsi de passer de 532 000 bénéficiaires à 760 000 bénéficiaires. C’est encore insuffisant.
Le président de votre commission [des affaires sociales, NDLR], Pierre Méhaignerie, a proposé de relever à nouveau ce plafond, à 35 % du plafond CMU-C cette fois, ce qui devrait porter le nombre de bénéficiaires à quasiment un million. Je salue cette initiative et je la soutiendrai – un amendement sera déposé – parce qu’elle va permettre d’élargir la couverture des plus modestes. Ceux qui ne sont pas assez riches pour se payer une bonne mutuelle, mais trop riches pour être pris en charge par la CMU-C, auront droit à l’aide complémentaire santé que nous avons mise en place depuis 2004. »

2e séance du mardi 25 octobre

Pour Pierre Méhaignerie, membre du groupe Union pour un mouvement populaire (UMP), en plus d’un objectif régional des dépenses de santé (ORDAM) qui responsabilise et laisse de l’autonomie, « il faut également affronter les dépassements d’honoraires excessifs. »

Pour Anny Poursinoff, membre du groupe Gauche démocrate et républicaine et de la commission des affaires sociales, « les dépassements d’honoraires ne cessent d’augmenter » et l’Inspection des affaires sociales (IGAS) les dénonce.

Pour Jean-Luc Préel, membre du groupe Nouveau centre et vice-président de la commission des affaires sociales, « certes, il est possible de contester les prévisions économiques sur lesquelles est bâti ce projet de loi. Il est permis de regretter que cette loi de financement ne soit pas votée en équilibre, mais avec un déficit qui, aujourd’hui, n’est pas financé. Nous pourrions également vouloir régler les problèmes que rencontrent nos concitoyens, comme la répartition des professionnels de santé sur le territoire, la permanence des soins ou les dépassements d’honoraires. Mais c’est en débattant des amendements – avec l’espoir qu’ils soient adoptés –, que nous pouvons peut-être faire bouger le texte. »
« Les dépassements d’honoraires n’existeraient sans doute pas si – Xavier Bertrand le répète souvent – les rémunérations avaient été revues régulièrement en tenant compte des évolutions des charges, si la CCAM clinique avait été mise en place et si la CCAM technique était réactualisée régulièrement, mais aujourd’hui ces dépassements existent et atteignent parfois des sommes importantes.
Le secteur optionnel est prévu depuis 2004 ; il vient d’être confirmé par la nouvelle convention médicale. Mais les assurances complémentaires ne semblent pas vouloir honorer leur signature, perturbées à juste titre par l’augmentation sans concertation de la taxe qui s’applique à elles à hauteur de 1,1 milliard. […]
Ce secteur n’est toutefois pas la panacée. Tout d’abord, il ne concerne que les spécialistes à plateau technique, qui ne sont pas les plus défavorisés, et c’est là un euphémisme. Qu’en sera-t-il pour les autres, notamment les spécialistes cliniques, comme les psychiatres, les pédiatres, les endocrinologues ? Ensuite, il ne concerne que le secteur 2 ; qu’en sera-t-il des professionnels du secteur 1 ? Il demande de soigner 30 % de la clientèle à tarif remboursable ; quels sont ces 30 % ? Il prévoit la prise en charge par les complémentaires des dépassements d’honoraires limités à 50 %. Or, dans certains départements, les dépassements sont inférieurs à 50 % ; n’y aura-t-il pas un effet d’aubaine ?
Dans d’autres départements, à Paris, en PACA, les dépassements peuvent atteindre 400 ou 500 % des tarifs remboursables. » 

Pour Marisol Touraine, membre du groupe Socialiste, radical, citoyen et divers gauche, et de la commission des affaires sociales, le gouvernement a renoncé à protéger nos concitoyens face à l’explosion des dépassements d’honoraires et essaye de forcer la décision sur le secteur optionnel qui ne serait en rien une solution. « Tel que le système est conçu, il va se traduire par des dépassements en plus. Il permettra à des médecins actuellement en secteur 1, donc qui pratiquent des tarifs opposables, de dépasser, alors que ceux qui dépassent beaucoup en secteur 2 ne seront nullement incités à baisser leurs trafics.
Plus préoccupant encore, le système du secteur optionnel fait tout simplement du dépassement d’honoraires la règle, les organismes complémentaires étant appelés à en assurer le paiement. »
Elle affirme enfin que « l’encadrement et le plafonnement des dépassements d’honoraires seront une priorité pour le futur gouvernement de gauche. »

Pour Jean Mallot, membre du groupe Socialiste, radical, citoyen et divers gauche, et secrétaire de la commission des affaires sociales, « entre 2005 et 2010, le reste à charge pour les ménages est passé de 9 % à 9,4 %. Tout cela résulte d’une série de déremboursements et de franchises, ainsi que de la multiplication des dépassements d’honoraires. »

Pour Jacqueline Fraysse, membre du groupe Gauche démocrate et républicaine et secrétaire de la commission des affaires sociales, « en 2010, 29 % de nos concitoyens déclaraient avoir renoncé à se soigner pour des raisons financières. D’autres contractent des microcrédits. Des maladies d’un autre âge resurgissent, que l’on croyait disparues, comme la tuberculose ou la gale.
Ce sont là des conséquences des nombreuses participations forfaitaires, franchises médicales, forfaits hospitaliers, forfaits de 18 euros et autres déremboursements de médicaments, qui visent, selon vous, à responsabiliser les patients, comme s’ils étaient responsables de leur maladie et du coût des traitements qui leur sont prescrits.
C’est également l’effet des dépassements d’honoraires, contre lesquels l’inaction du Gouvernement est patente et qui ont encore augmenté de 6 % par rapport à 2009. Sur dix ans, leur augmentation est de 50 %.
Si cette situation traduit l’abus d’un certain nombre de médecins, elle traduit surtout la déconnexion entre les tarifs opposables remboursés par l’assurance-maladie, qui sont insuffisamment revalorisés, et les tarifs pratiqués par les médecins. Le secteur optionnel que vous appelez de vos vœux n’est pas une solution : il va juste siphonner ce qui reste du secteur 1 et inciter les médecins à considérer le plafond de dépassement comme le nouveau tarif de référence.
L’augmentation conjointe des franchises et des dépassements d’honoraires conduit mécaniquement à une augmentation du reste à charge pour les patients. Je sais que M. Bertrand récuse cette affirmation, allant même jusqu’à indiquer que ce reste à charge baisse, passant de 9,7 % en 2008 à 9,4 % aujourd’hui.
Ce chiffre ne rend pas compte de la réalité, car c’est une moyenne qui inclut les patients en ALD, lesquels concentrent 60 % des dépenses de remboursement : la vérité, c’est que, hors ALD, le reste à charge avoisine les 45 %, et ce chiffre n’intègre pas les complémentaires santé, rendues obligatoires par le désengagement de la sécurité sociale, dont le coût est en augmentation constante.
Cette augmentation, conséquence directe des déremboursements et dépassements d’honoraires que les complémentaires santé doivent prendre en charge, est encore accentuée par la hausse continue des taxes auxquelles elles sont soumises. Ainsi, entre 2005 et 2012, la fiscalité sur les contrats d’assurance santé aura été multipliée par plus de sept. Et il est illusoire de penser, mais vous le savez, bien sûr, que les complémentaires santé ne répercuteront pas la nouvelle hausse de leur taxe. La Mutualité française parle d’ailleurs de 4,7 % d’augmentation. »

Pour Michel Heinrich, membre du groupe Union pour un mouvement populaire et de la commission des affaires sociales, le problème du secteur 2 est « mal compris et très peu accepté par les patients. Je sais bien qu’un nombre important d’actes n’ont pas été revalorisés depuis longtemps, mais certains praticiens, on le voit bien, ne pratiquent pas le dépassement d’honoraires avec tact et mesure, rendant de ce fait difficile l’accès aux soins. J’ai bien entendu l’engagement de Xavier Bertrand de mettre en place le secteur optionnel, et je m’en réjouis, car il y a urgence. Mais il faudra se méfier des effets d’aubaine, notamment pour les médecins demeurés dans le secteur 1, ou pour ceux du secteur 2 qui ne pratiquaient pas des dépassements d’honoraires supérieurs à 50 %. »

Les recommandations de bonne pratique en médecine ne sont pas données

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Il est recommandé d'aller dans la bonne direction.En plus de s’être intéressé à la façon dont les liens d’intérêt peuvent influencer la rédaction des recommandations de bonne pratique en médecine, Roger Collier, journaliste au Canadian Medical Association Journal (CMAJ), a publié dans le numéro du 22 février 2011 de cette revue un article intitulé Clinical practice guidelines as marketing tools (Les recommandations de bonne pratique clinique comme outils marketing) sur lequel il peut être intéressant de se pencher.

Si, en France, la majorité des recommandations de bonne pratique est élaborée sous l’égide de la Haute Autorité de santé et financée par celle-ci, ce n’est pas le cas pour celles qui sont publiées chaque semaine un peu partout dans le monde. Être réalisées à l’aide de fonds publics pourrait donner l’impression que les recommandations hexagonales ne sont pas biaisées par l’industrie pharmaceutique, mais il faut comprendre que les travaux étrangers servent bien souvent de sources aux experts français, faisant ainsi d’eux, consciemment ou non, des relais d’une information sous influence. S’il est admis que les résultats d’essais cliniques tendent à favoriser ceux qui les financent, cet impact est rarement mis en avant lorsqu’il est question de recommandations de bonne pratique alors qu’elles sont largement utilisées par les médecins, quand elles ne leur sont pas tout simplement imposées. Elles jouent donc un rôle particulièrement important dans la prise en charge des patients.

Publier des recommandations de bonne pratique de qualité n’est pas chose aisée. Il s’agit souvent d’un processus long et coûteux, comme l’explique Roger Collier, processus qui oblige les auteurs qui se lancent dans l’aventure à trouver un financement pour mener à bien leurs travaux et y consacrer le temps nécessaire (de 18 mois à 3 ans, habituellement). En fonction du sujet traité, les besoins ne seront pas les mêmes, mais il arrive souvent que les promoteurs des recommandations soient contraints de se tourner vers l’industrie pour obtenir les fonds suffisants, surtout dans le cas de projets ambitieux portant sur la prise en charge globale de pathologies comme le diabète ou l’hypertension artérielle.

À quoi sert cet argent ? Il faut tout d’abord identifier de façon précise ce sur quoi vont porter les recommandations et identifier les priorités en tenant compte de l’avis des personnes concernées qu’il conviendra de cibler (médecins, patients, administratifs, etc.), effectuer un examen approfondi et systématique de la littérature scientifique sur le sujet choisi en remontant parfois sur plusieurs décennies, évaluer et faire la synthèse des preuves scientifiques ainsi recueillies, convoquer un groupe d’experts pour examiner ces preuves et formuler des recommandations cliniques, présenter ce travail à des experts “indépendants”, publier les recommandations et trouver les moyens de les diffuser pour qu’elles soient prises en compte par le plus grand nombre. Tout ceci a un coût.
Quand on est un médecin salarié et que cela ne pose pas de problèmes à l’organisation dans laquelle on travaille, il est aisé de participer à de tels travaux. Quand on travaille en libéral, le temps consacré à participer à des réunions de ce type est un manque à gagner. Si le promoteur des recommandations n’a pas prévu d’indemnisation, cela peut avoir un retentissement sur le recrutement des participants, voire même sur le fait qu’ils soient tentés d’accepter un financement extérieur pour participer tout de même à ces travaux. Doivent aussi être financés les coûts générés par la bibliographie qui peut nécessiter que l’on fasse appel à du personnel qualifié ; les déplacements et l’hospitalité offerts aux experts lors des indispensables réunions ; l’impression et la reliure des recommandations.

Pour le docteur Valerie Palda, directeur médical du comité consultatif relatif aux recommandations d’une organisation médicale indépendante canadienne, interrogée par Roger Collier, « L’édition n’est pas ce qui coûte le plus cher. Ce qui est le plus onéreux, c’est la revue systématique de la littérature et les réunions ». Pour elle, utiliser l’argent de l’industrie pour ça est acceptable si des garanties sont prises pour éviter les biais liés à ce financement. « Ce n’est pas trop de savoir si l’on peut accepter une aide financière de l’industrie qui importe, mais de savoir si on peut en atténuer l’impact ».

Des médecins, en toute bonne foi, pensent qu’il est possible de mettre ces garanties en place. Selon eux, il suffirait pour cela de bien encadrer l’élaboration des recommandations, de poser une question claire à laquelle on doit s’attacher de répondre sans s’écarter de cette problématique, publier la méthodologie afin que d’autres équipes puissent reproduire les travaux réalisés, de soumettre les recommandations cliniques à des experts indépendants de plusieurs spécialités et à de nombreux organismes de santé pour qu’ils les critiquent et les valident et, enfin, les publier dans des revues, comme le CMJA, spécialisées dans l’édition de ce type de travaux.
D’autres reconnaissent que le meilleur moyen d’éviter toute influence des laboratoires pharmaceutiques, c’est de trouver d’autres sources de financement. Mais cela serait plus facile à dire qu’à faire, s’empressent-ils d’ajouter…

Les revues médicales financées par la publicité incitent à prescrire

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Des médicaments en orUne équipe de chercheurs allemands et canadiens a voulu savoir si les sources de financement d’une revue médicale pouvaient avoir une influence sur sa ligne éditoriale et sur les recommandations que l’on pouvait être amené à trouver dans les articles qu’elle publie. Intéressante question quand on sait que nombreuses sont les revues “gratuites”, financées par la publicité et adressées directement au cabinet de nombreux médecins, qui revendiquent jouer un rôle prépondérant dans la formation médicale continue (FMC) des praticiens. Un rôle que personne ne conteste, les médecins reconnaissant en être friands et avoir habituellement recours à cette littérature, plutôt qu’à des revues tirant leurs revenus de leurs seuls abonnements, comme source d’informations pour actualiser leurs connaissances professionnelles.

Annette Becker, de l’université de Marburg en Allemagne, et ses collaborateurs ont donc décidé d’étudier les recommandations de prescription faites au sein des articles publiés en 2007 par onze revues allemandes dédiées à la FMC. Seuls des périodiques parmi les plus lus par des médecins généralistes ont été sélectionnés, en prenant soin néanmoins de prendre en compte des revues “gratuites” totalement financées par la publicité, des revues totalement financées par les abonnements et d’autres ayant un financement mixte.
Neuf médicaments ou classes de médicaments condidérés comme innovants et donc largement présents dans les encarts publicitaires ont été sélectionnés comme échantillon à étudier. Ces produits ont aussi été choisis parce qu’ils étaient encore protégés par des brevets, qu’ils étaient plus chers que d’autres médicaments utilisés pour traiter les mêmes problèmes et parce qu’il existait une certaine controverse soit leur efficacité soit sur l’éventail des indications pour lesquelles ils devaient être prescrits.
Les chercheurs, une fois cette liste établie, ont analysé les liens entre les publicités présentes dans les revues et les recommandations formulées dans le contenu rédactionnel de tous les articles faisant référence à l’un des produits sélectionnés. Chaque article a été évalué à l’aide d’une échelle allant de -2 à +2 : un papier noté +2 conseillait clairement de prescrire le produit ; au contraire, un article évalué à -2 déconseillait l’utilisation du médicament ou de la classe médicamenteuse. Un article neutre quant à savoir s’il fallait ou non prescrire le produit se voyait attribuer la note de 0.

Les résultats de ce travail, publiés dans le Canadian Medical Association Journal (CMAJ) du 28 février 2011, sont éloquents. Les auteurs de cette étude estiment que les recommandations visant à l’utilisation ou non d’un médicament dépendent de la source de financement des revues. Les journaux gratuits recommandent quasi systématiquement l’utilisation des médicaments sélectionnés alors que les revues financées par leurs abonnements sont enclines à déconseiller leur usage. Pour Annette Becker, le biais lié au mode de financement d’une revue devrait être pris en compte par le lecteur. Les revues gratuites vont à l’encontre des efforts faits pour apprendre aux médecins à avoir une lecture critique et à privilégier la médecine basée sur les preuves. L’industrie, par l’intermédiaire de ces journaux, profite du peu de temps qu’ont à consacrer les généralistes à leur FMC, de la complexité sans cesse grandissante de la médecine et du flot incessant d’informations auquel les praticiens doivent faire face pour encourager ces médecins à prescrire.

Le gouvernement de la santé remanié

Écrit par Charles Duchemin le . Dans la rubrique Humeur

Dérouler le tapis rougeTout le monde l’attendait depuis plusieurs semaines… Un nouveau gouvernement Fillon a été annoncé le 14 novembre 2010, en plein débat à l’Assemblée nationale du projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2011.

Tout d’abord, Roselyne Bachelot-Narquin quitte l’avenue de Ségur, dont elle était locataire depuis le 18 mai 2007, pour s’occuper du ministère des solidarités et de la cohésion sociale. Fidèle de François Fillon, sa parfaite gestion de la campagne de vaccination contre la pandémie grippale et son soutien sans faille aux médecins libéraux qui a renforcé la cohésion au sein de la profession, en totale solidarité avec l’industrie pharmaceutique française qui était durement touchée par la crise, lui valent d’être reconduite au sein d’un gouvernement qui devrait gérer les affaires de l’État jusqu’aux prochaines élections présidentielles de 2012. Omnipraticien de la politique, Roselyne Bachelot-Narquin qui, d’après Wikipedia, a été déléguée à l’information médicale au sein du laboratoire ICI Pharma de 1969 à 1976, puis titulaire d’une pharmacie à Angers de 1984 à 1991 et, en parallèle, chargée des relations publiques chez Soguipharm de 1984 à 1989, devrait pouvoir mettre son expérience du contact au service de ses nouvelles fonctions.

La ministre de la santé et des sports tire sa révérence, place au ministère du travail, de l’emploi et de la santé et à un secrétariat d’État à la santé.
À la tête de ce grand ministère, un homme à la hauteur de la tâche, connu pour dormir très peu, qui sait à quoi il s’attaque puisqu’il a déjà été ministre de la santé dans le gouvernement Fillon 1 : Xavier Bertrand. Cet homme du Président a la lourde tâche de reprendre les affaires et le travail d’Éric Woerth, de décharger Christine Lagarde et Laurent Wauquiez de la charge que représentait l’emploi pour eux, tout en assurant le suivi de la santé.
Dans ce dur labeur, Xavier Bertrand sera secondé par Nora Berra qui devrait sans difficulté trouver les mots qui réconfortent la population médicale vieillissante depuis qu’elle a occupé les fonctions de secrétaire d’État aux aînés. Fille d’un tirailleur algérien, nul doute qu’elle mènera un combat acharné pour défendre les intérêts de la santé. Pour Wikipedia, elle a grandi « dans le quartier des RZD et dans la banlieue de Lyon, étudié au lycée Ampère avant de partir faire médecine à Oran. De retour en France, elle travaille à partir de 1991, au service d’immunologie à l’hôpital Édouard Herriot de Lyon, puis dans divers laboratoires pharmaceutiques entre 1999 et 2009. » Dans sa biographie officielle, encore en ligne pour quelques heures sur le site du secrétariat d’État aux aînés, il est facile de trouver les précisions sur son parcours sont un peu différentes : « Après avoir fait son internat en pharmacologie clinique à l’hôpital Édouard Herriot, elle devient à 1992 praticien attaché au service d’exploration fonctionnelle rénale. De 1992 à 1999, elle a enseigné notamment dans deux écoles d’infirmières lyonnaises et a parallèlement encadré des internes et des étudiants.
Elle travaillera pendant 10 ans, de 1999 à 2009, en tant que médecin des affaires médicales au sein de laboratoires pharmaceutiques français et internationaux dans les domaines d’expertise suivants : VIH, Hépatite B et cancer du col de l’utérus.
Par ailleurs, de 1991 à 2009, Nora Berra est également praticien attaché au service d’immunologie clinique à l’hôpital Édouard Herriot, s’occupant principalement des patients atteints du VIH. Elle poursuit son engagement en étant membre du réseau ville-hôpital, réseau entre professionnels de santé, dans le cadre de la formation des médecins libéraux dans la prise en charge de la pathologie du VIH.
Elle poursuit ses travaux de recherche en étant investigatrice des essais de recherche clinique, à travers une dizaine de publications. » Seules trois d’entre elles semblent être reprises par PubMed, dont une lettre publiée dans le Lancet en 1992 relative aux effets bénéfiques des immunoglobulines en intraveineux chez les patients atteints par le sida.

La fin du mois de novembre devrait être chargée pour le ministre et la secrétaire d’État : reprises des débats sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2011, remise du rapport de la mission confiée à Élizabeth Hubert par le chef de l’État sur la médecine de proximité, etc. De quoi se faire rapidement une idée de l’orientation que souhaite donner ce nouveau gouvernement à la politique de santé dans les deux années qui viennent.

Industrie pharmaceutique, journalistes et conflits d’intérêts

Écrit par Charles Duchemin le . Dans la rubrique Evolution

Des journalistes américains sous les feux des projecteursContrairement aux médecins français qui semblent ne pas savoir, pour la plupart, qu’il existe des textes de loi relatifs aux déclarations de conflits d’intérêts, malheur à leurs confrères américains qui négligent d’annoncer les leurs quand leurs interventions sont financées par l’industrie. Quand des praticiens manquent à leur devoir, la presse n’hésite pas à les épingler et à remettre en cause leur intégrité. Sur le Nouveau Continent, personne n’est choqué de savoir qu’un praticien travaille en collaboration avec l’industrie pharmaceutique et combien il touche d’argent pour ce faire à condition que cela soit fait en toute transparence.

Les États-Unis sont aussi un pays où le journalisme d’investigation a montré à de multiples reprises qu’il était un contre-pouvoir puissant, qu’il s’agisse du pouvoir politique ou de celui des lobbies industriels. Il faut dire qu’une réelle liberté d’expression y est garantie à tous, malgré la batterie d’avocats des uns et des autres, et que le politiquement correct, ainsi que les discours convenus, est loin d’être la préoccupation première de la majorité des médias. Les médecins en font aussi les frais, comme le rappelle l’un des derniers prix Pulitzer remis à une journaliste pour son article sur Internet dénonçant une sombre affaire d’euthanasie au lendemain du passage de l’ouragan Katrina sur la Floride.

Dans ces conditions, il est amusant de s’intéresser au blog d’Ed Silverman, journaliste outre-Atlantique, qui pointe du doigt une affaire qui pourrait embarrasser plusieurs de ses confrères spécialisés dans les rubriques santé. La presse américaine dénonce souvent le fait que l’industrie pharmaceutique puisse financer des actions de formation dédiées aux médecins, voyant en cela un déni de l’idée d’indépendance que l’on peur se faire de la fmc (formation médicale continue) ou du dpc (développement professionnel continu). Ed Silverman s’interroge donc sur le fait qu’un grand laboratoire ait subventionné à hauteur de plusieurs dizaines de milliers de dollars, deux années de suite, une grande conférence sur le cancer destinée aux journalistes santé organisée par la National Press Foundation (NPF). Ce n’est pas l’idée même de cette conférence qui l’ennuie, c’est d’avoir constaté que 15 bourses ont été décernées par la NPF à des journalistes pour venir se former et écouter les allocutions d’experts à cette conférence. Même si le président de la NPF réfute tout conflit d’intérêts, comment ne pas s’étonner que ce qui est suspect quand cela concerne la fmc ne le soit pas quand il est question de la formation des journalistes… Un ancien professeur de journalisme de l’Université du Minnesota, Gary Schwitzer, va même plus loin en proposant aux journalistes de se regarder dans un miroir dans cette affaire. Il en va de leur crédibilité. Il leur demande même à ceux qui écrivent des articles sur le cancer et ses traitements et qui ont obtenu une bourse de la NPF d’indiquer au bas de leurs papiers qu’ils ont participé à un voyage tous frais payés pour assister à un séminaire parrainé par une société pharmaceutique. Pour lui, quel que soit le contenu de la conférence ou qui le contrôle, un industriel paie pour que les journalistes viennent découvrir un domaine dans lequel il a d’énormes intérêts.
Pour l’un des principaux responsables du laboratoire pharmaceutique finançant la réunion de la NPF répondant au BMJ, il est normal que son entreprise souhaite mobiliser et éduquer les journalistes pour qu’ils comprennent les enjeux. La vertu des journalistes est sauve…

Conseil constitutionnel et LFSS 2010

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Le stop du Conseil constitutionnel à la LFSS 2010Les agapes de ces fêtes de fin d’année ont presque réussi à faire oublier que le Conseil constitutionnel devait encore rendre un avis sur la loi de financement de la Sécurité sociale (LFSS) 2010. Cette décision était d’autant plus attendue que plus de soixante députés avaient saisi les Sages le 27 novembre 2009 en application de l’article 61, alinéa 2, de la Constitution, afin qu’ils exercent « une vigilance particulière sur les dispositions de la loi qui n’entreraient pas dans le domaine des lois de financement de la sécurité sociale afin qu’elles ne deviennent pas des lois portant diverses dispositions d’ordre social ». Bien leur en a pris puisque, malgré les observations du gouvernement précisant que cette saisine ne soulevait aucun grief tiré d’une absence de conformité de la loi à la Constitution et demandant aux Sages de la rejeter, plusieurs articles de la petite loi ont été reconnus contraires à la Constitution.

Le Conseil constitutionnel a considéré que les paragraphes III à V de l’article 11 modifiant les conditions de vente des médicaments non consommés en France et susceptibles d’être vendus en dehors du territoire national n’avaient pas d’effet ou avaient un effet trop indirect sur les recettes des régimes obligatoires de base ou des organismes concourant à leur financement pour qu’elles trouvent leur place dans une loi de financement de la sécurité sociale.
C’est, par contre, parce qu’elles n’avaient pas d’effet ou avaient un effet trop indirect sur les dépenses de ces mêmes régimes et organismes que d’autres dispositions ont été jugées contraires à la Constitution. Tel est le cas de l’article 36 de la loi déférée limitant les droits du titulaire d’un droit de propriété intellectuelle protégeant l’apparence et la texture des formes orales d’une spécialité pharmaceutique ; de son article 38 supprimant l’attribution systématique au médecin traitant de la surveillance et du suivi biologique de la contraception locale ou hormonale prescrite par une sage-femme ; de son article 50 autorisant la diffusion, sur les sites informatiques des établissements de santé, d’informations relatives aux tarifs et honoraires des professionnels de santé qui y exercent ; de son article 51 procédant à la coordination de la rédaction des articles L. 6111-3 et L. 6323-1 du code de la santé publique et de son article 57 validant les reclassements intervenus en application de la rénovation de la convention collective nationale du 31 octobre 1951 des établissements privés d’hospitalisation, de soins, de cure et de garde à but non lucratif.

L’article 80 de la petite loi précisant le régime d’autorisation des établissements et services gérés par une personne physique ou morale de droit privé accueillant des enfants de moins de six ans ainsi que les conditions d’agrément des assistants maternels et assistants familiaux ; son article 81 prévoyant la possibilité de délivrer, pour ces établissements, des agréments fixant des capacités d’accueil variables dans le temps ; son article 82 élargissant les missions des « relais assistants maternels » et son article 83 fixant, d’une part, à deux le nombre d’enfants susceptibles d’être accueillis par un assistant maternel lors de son premier agrément et modifiant, d’autre part, les conditions de formation initiale et continue des assistants maternels, ont aussi été considérés comme contraires à la Constitution.

La décision n° 2009-596 DC du 22 décembre 2009 du Conseil constitutionnel est parue au Journal officiel du 27 décembre 2009.

Combien va coûter la grippe A(H1N1) ?

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Le coût de la grippeLa loi de finances pour 2010 est l’occasion de se faire une idée sur les sommes engagées dans le cadre de la grippe A(H1N1) grâce à différents documents parlementaires. Le rapport général fait au nom de la commission des finances sur le projet de loi de finances pour 2010 (Tome III, annexe 27) est l’un d’eux et les informations présentées ci-dessous en sont extraites. L’impact de la grippe A(H1N1) pèsera sans contexte sur les finances de l’État, sur celles du système de santé et, enfin, sur celles du système de protection sociale que l’on confond de plus en souvent avec le précédent.

Les dépenses liées à la pandémie de grippe A(H1N1) entrent dans le cadre du programme « Prévention et sécurité sanitaire », qui comprend des actions comme la « Prévention des risques infectieux et des risques liés aux soins » ou la « Réponse aux alertes et gestion des urgences, des situations exceptionnelles et des crises sanitaires ». C’est, bien entendu, cette dernière action qui a été la plus affectée par l’actuelle épidémie de grippe en France, par le biais de la subvention pour charge de service public versée à l’établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS). Cet établissement public de l’État à caractère administratif, placé sous la tutelle du ministère de la santé, est chargé, en vertu du code de la sécurité sociale, de l’acquisition, la fabrication, l’importation, le stockage, la distribution et l’exportation de produits et services nécessaires à la protection de la population face à des menaces sanitaires (pandémie, attaque terroriste, etc.). L’EPRUS gère aussi administrativement et financièrement la réserve sanitaire.Les dépenses liées à la grippe porcine

C’est donc l’EPRUS qui a financé l’achat des masques et des vaccins, en plus d’autres produits de santé, pour un total de plus d’un milliard d’euros. Le tableau ci-contre reprend les dépenses de cet établissement dans le cadre de la pandémie de grippe porcine.

Mais il est important de prendre en compte la façon dont est financé l’EPRUS lui-même. Il faut se reporter pour cela à l’article L 3135-4 du code de la santé publique. Au rang des recettes de cet établissement public figure une contribution à la charge des régimes obligatoires d’assurance maladie dont le montant est fixé chaque année par la loi de financement de la sécurité sociale. Sachant qu’un amendement adopté par le Sénat, à l’initiative de sa commission des affaires sociales, lors de l’examen de la loi n° 2007-294 du 5 mars 2007 relative à la préparation du système de santé à des menaces de grande ampleur, a limité cette contribution à 50 % des dépenses de produits de santé constatées sur trois exercices, c’est plus de 500 millions qui seront ainsi donnés à l’EPRUS par l’assurance-maladie pour participer aux dépenses liées à la grippe A(H1N1) déjà engagées. L’agence centrale de recouvrement des organismes de Sécurité sociale (ACOSS) a d’ailleurs consenti une avance de trésorerie à l’EPRUS à hauteur de 879 millions d’euros pour acheter les vaccins et autres produits.

Si les chiffres donnés précédemment sont des dépenses déjà connues, les prévisions estiment qu’au final la pandémie de grippe porcine pourrait coûter au minimum entre 1,8 et 2,2 milliards d’euros. Il faut dire que la France n’a pas lésiné sur les moyens, puisqu’elle était, en septembre 2009, à l’origine de près de 10 % des commandes de vaccins dans le monde, par exemple. En plus des vaccins, de nombreuses autres dépenses viennent en effet grever ce total.
Les dépenses liées aux consultations de généralistes, à la prescription de médicaments et aux indemnités journalières, supportées par l’assurance maladie font partie du lot. Les premiers chiffres donnés par la Sécurité sociale sont clairs à cet égard : « les dépenses pour consultations de généralistes progressent de +6,3 % pour le seul mois de novembre ».
À cela vont s’ajouter des dépenses pour l’indemnisation des personnels réquisitionnés, qu’ils soient administratifs, médicaux ou paramédicaux, et les frais d’information et de convocation des vaccinés. Autre poste, les dépenses de communication évaluées à elles seules à 6,8 millions d’euros. Enfin, les frais liés à l’organisation territoriale de la campagne de vaccination, dont l’estimation ne tient pas compte des sommes engagées par les collectivités territoriales elles-mêmes.

À la lecture du document du Sénat, il est intéressant de lire à quoi sont alloués certains fonds (à l’acquisition de 92,4 millions de masques pour les agents des différents ministères – hors secteur de la santé – identifiés comme prioritaires pour assurer la continuité de l’État, par exemple) et de noter que la commission des finances relève que les stocks de produits de santé constitués en cas de pandémie sont mal gérés : une grande quantité de masques a été détruite alors qu’ils étaient toujours efficaces et l’outil informatique de gestion est peu performant, ne permettant qu’un suivi difficile des réserves en temps réel.

Ces chiffres sont un minimum. En effet, d’autres coûts imprévus risquent de venir « alourdir la facture ». Le stockage et la péremption des produits pourraient coûter très cher si la pandémie venait à se révéler moindre ou si la population n’adhère pas à la campagne de vaccination. Voilà qui explique peut-être en partie la peine que se donnent les pouvoirs publics pour écouler les stocks de vaccins achetés… La France a acheté 94 millions de doses de vaccins et en a utilisé jusque-là un peu plus de 4 millions. Elle a aussi acheté 399 millions de masques FFP2 (masque de protection respiratoire), venant s’ajouter au stock préexistant, soit un milliard de masques chirurgicaux et 537 millions de masques FFP2. On sait que de tels problèmes se sont déjà posés lors de l’épidémie de grippe aviaire et que le stock d’antiviral constitué à cette époque devrait être en grande partie perdu, même si le gouvernement a trouvé un moyen de l’utiliser pour la grippe porcine en élargissant les indications du Tamiflu et en allongeant sa durée de validité.
Ces problèmes sont réels puisqu’il est question de construire des hangars de stockage sur le site de l’établissement de ravitaillement sanitaire des armées de Vitry-le-François, afin de faciliter la gestion des réserves, et qui est aussi envisagé « l’élaboration d’un statut particulier pour les médicaments relevant du “stock national santé”, statut qui permettrait de ne pas faire figurer de date de péremption sur les produits de santé, mais une date de fabrication, en contrepartie de tests réguliers et encadrés de leur stabilité ».

Les contribuables français n’en ont donc pas fini avec la grippe A(H1N1)…

 

Mise à jour

Un communiqué de presse du ministère de la santé du 4 janvier 2010 fait état d’un montant de 869 millions d’euros pour l’achat des vaccins et non plus de 807 millions, comme il est indiqué dans le rapport du Sénat.

Adoption du projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2010

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PLFSS 2010 adoptéL’Assemblée nationale et le Sénat ont adopté le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2010. La petite loi comprend au final 97 articles, après que le gouvernement a fait voter des amendements après le passage du projet de loi en commission mixte paritaire, procédure suffisamment rare pour qu’elle soit signalée.

Alors que les parlementaires, au prétexte de ne pas créer de précédent, avaient décidé de ne pas écarter le surcoût lié aux dépenses de santé dues à la grippe A(H1N1) du calcul de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie (ONDAM), le gouvernement a déposé un amendement rétablissant le texte du projet de loi dans sa version d’origine : « En 2010, le surcoût induit par les dépenses exceptionnelles liées à la pandémie grippale n’est pas pris en compte par le comité d’alerte sur l’évolution des dépenses de l’assurance maladie pour l’évaluation, en application de l’article L. 114‑4‑1 du code de la sécurité sociale, d’un risque de dépassement de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie. »
La ministre de la santé, Roselyne Bachelot, a justifié cette mesure en expliquant que « Comme le rappelle régulièrement la Cour des comptes, la détermination de l’ONDAM a pour objectif de contribuer à la régulation des dépenses de soins, alors que, par nature, les dépenses liées à une situation pandémique peuvent difficilement faire l’objet d’une politique de régulation.
D’autre part, le déclenchement d’une procédure d’alerte n’est pas un acte purement théorique, n’est pas une simple annonce, mais – on a tendance à l’oublier – conduirait à mettre en œuvre des mesures de redressement qui auraient pour effet de compenser des dépenses inévitables par des restrictions ultérieures et à suspendre toute revalorisation tarifaire alors même que des négociations conventionnelles sont en cours. »

Depuis plusieurs années, l’assurance responsabilité civile des médecins pose problème et le PLFSS 2010 a été marqué par un nouvel épisode dans les tergiversations à ce sujet. Les parlementaires avaient décidé une substitution de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) à l’ensemble des praticiens libéraux après l’expiration du délai de validité de leur couverture d’assurance, à savoir au bout de dix années après leur cessation d’activité. Le gouvernement a refusé que cette mesure soit étendue à tous les médecins libéraux et l’a restreinte aux praticiens exerçant, dans un établissement de santé, une spécialité chirurgicale, obstétricale ou d’anesthésie réanimation, condamnés par une juridiction à réparer les dommages subis par la victime à l’occasion d’un acte lié à la naissance. Pour la ministre de la santé, seuls ces professionnels sont concernés. L’amendement voté fait que, si la victime ne peut pas obtenir l’exécution intégrale de la décision de justice, elle pourra obtenir de l’ONIAM le complément d’indemnisation non versé par le professionnel au-delà du plafond de garantie, le professionnel étant ensuite redevable à l’ONIAM de cette créance, sauf s’il est dans l’incapacité financière, constatée par un jugement, de la payer.
Cette décision, si elle règle le problème de l’indemnisation du patient, ne devrait pas pour autant diminuer les inquiétudes des médecins. À moins de se rendre insolvables une fois à la retraite, beaucoup préféreront choisir des spécialités moins risquées plutôt que de faire courir le risque à leur famille d’avoir à payer des indemnités allant jusqu’à la ruiner une fois le maximum garanti par l’assureur atteint.

L’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) a estimé à 4 % le surcoût des charges sociales et fiscales que doivent supporter les établissements privés à but non lucratif résultant d’obligations réglementaires décidées par le gouvernement. Les parlementaires avaient mis en place un coefficient correcteur compensant ce surcoût inéquitable à leurs yeux. Le gouvernement a une autre vision de l’équité et ce coefficient est supprimé.

L’article L 351-4 du code de la Sécurité sociale prévoit que les femmes assurées sociales du régime général bénéficient d’une majoration de leur durée d’assurance vieillesse d’un trimestre pour toute année durant laquelle elles ont élevé un enfant, dans des conditions fixées par décret, dans la limite de huit trimestres par enfant. La Cour de cassation a jugé, dans un arrêt du 19 février 2009, que le dispositif actuel de majoration de durée d’assurance de 2 ans n’était pas compatible avec l’article 14 de la convention européenne des droits de l’homme qui interdit les discriminations fondées sur le sexe. La mesure proposée, qui s’appliquera aux pensions de retraite prenant effet à compter du 1er avril 2010, remplace le dispositif antérieur par deux majorations distinctes : une première majoration de 4 trimestres sera accordée à la mère à raison de l’incidence sur la carrière de la grossesse et de l’accouchement ; une seconde majoration de 4 trimestres sera accordée au couple, à raison de l’incidence sur la carrière de l’éducation de l’enfant pendant les quatre années suivant sa naissance ou son adoption, alors que les parlementaires avaient réduit cette période à trois ans.

En principe, la phase parlementaire de la procédure législative est terminée.