C’est à l’Assemblée nationale, le 17 novembre 2009, lors de la séance des questions au gouvernement, que Roselyne Bachelot, ministre de la santé, répondant à une interrogation du député Élie Aboud, a annoncé que les praticiens spécialisés en médecine générale pourraient peut-être, s’ils démontrent leur capacité à le faire, vacciner contre la grippe A(H1N1) dans certains cabinets libéraux. Il faudra néanmoins attendre le mois de décembre pour que cette mesure soit effective.
La question de l’élu de l’Union pour un mouvement populaire (UMP) de l’Hérault était ainsi formulée :
« La campagne de vaccination contre la grippe A(H1N1) a débuté dans les établissements de santé le 20 octobre. Puis elle s’est élargie avec l’ouverture le 12 novembre de plus de mille centres qui accueillent en métropole et dans les territoires d’outre-mer les personnes les plus exposées et les plus vulnérables.
Cette campagne de vaccination, d’une ampleur inégalée, est une chance, pour chacun d’entre nous, car elle a débuté avant que l’épidémie ne survienne. Les derniers éléments tendent à montrer que le virus poursuit très rapidement sa progression. Près de deux cents cas graves ont été dénombrés à ce jour. La découverte de nouveaux cas en milieu scolaire oblige à fermer cinquante et un établissements. Seize académies sont d’ores et déjà touchées. L’organisation retenue est celle d’une vaccination non obligatoire, sans avance de frais, et pour la très grande majorité de nos concitoyens en centre de vaccination.
Madame la ministre, depuis quelques jours, dans le milieu médical, surtout chez nos amis et collègues médecins généralistes, nous entendons que cette organisation ne serait pas la bonne, en tout cas ne serait pas la meilleure, et qu’une vaccination en cabinet de ville aurait été plus adaptée.
Madame la ministre, vous le savez comme moi, l’adhésion de l’ensemble du monde soignant est absolument indispensable à la formation d’un bouclier devant ce fléau sanitaire potentiel. Face à la complexité, face à la gravité de ce sujet, comment faire pour mutualiser au mieux nos moyens ? »
La réponse de la ministre de la santé :
« […] D’abord, je veux redire ma confiance dans les capacités professionnelles des médecins généralistes qui sont évidemment tout à fait aptes à faire une vaccination antigrippale dans leur cabinet. Ce n’est pas la compétence des médecins qui est en jeu. Je n’ai aucune méfiance vis-à-vis d’eux. C’est simplement une question de logistique, parce que ce vaccin présente un certain nombre de caractéristiques. D’abord, il sera livré sur une période de quatre mois qui nous impose un ordre de priorité. Ensuite, il est livré en flacons multidoses, destinés à vacciner dix personnes. Il doit être conservé dans des conditions de froid bien précises, comme tous les vaccins, et une fois le flacon entamé, il doit être utilisé dans les vingt-quatre heures. À partir de ces déterminants, vous comprenez pourquoi la vaccination n’est possible que dans des centres dédiés. C’est tout à fait compréhensible. Comment livrer, puisque l’on ne peut pas aller acheter ce flacon chez son pharmacien individuellement ? Comment, évidemment, cinquante mille cabinets de médecins généralistes avec des moyens logistiques que je n’ai pas ? Comment s’assurer des bonnes conditions de conservation ? Une fois un flacon entamé, si le médecin ne s’en sert pas, il devra le jeter, s’il ne travaille pas, par exemple, le lendemain. À partir de là, la seule organisation vaccinale possible était celle d’une organisation collective. Nous en avons discuté avec les médecins. Ils en étaient d’ailleurs tout à fait convaincus. Alors maintenant, et c’est leur rôle, il faut rester mobiliser pour traiter les malades qui sont atteints par la grippe. Ils doivent garder leur capacité de mobilisation, convaincre leurs patients qu’ils doivent se faire vacciner et nous pourrions, dans des conditions ciblées, en décembre, étendre la vaccination à certains cabinets libéraux. Maintenant, la balle est dans leur camp pour nous montrer qu’ils en ont la possibilité. »
Cet échange, entre deux élus du même mouvement politique, devant les caméras de l’Assemblée nationale reflète-t-il réellement le désir d’une majorité de médecins généralistes et une confiance retrouvée des professionnels de santé à l’égard du vaccin contre la grippe A(H1N1) ? Rien n’est moins certain, même si c’est l’impression que l’on cherche à donner.
Alors que ce vaccin est présenté comme une forme un peu différente du produit utilisé contre la grippe saisonnière, on peut s’étonner que sa distribution et son administration posent autant de problèmes logistiques. Entre le moment où le vaccin a été acheté et celui où il est livré, il est étonnant que les pouvoirs publics n’aient pas pu organiser sa distribution auprès des pharmacies, au moins pour qu’ils puissent y être achetés par les médecins libéraux (généralistes, pédiatres, gériatres, etc.) Réquisitionner les professionnels de santé ne pose aucun problème, pourquoi en serait-il autrement des moyens logistiques ?
L’éventualité d’une vaccination en cabinet est soumise à conditions. Tous les cabinets ne pourront pas la proposer. Voilà le meilleur moyen pour diviser un peu plus une profession qui n’a de cesse de se déchirer. À moins que ce ne soit pour se ménager la possibilité de mettre ces conditions en avant si le nombre de cabinets souhaitant diffuser le vaccin s’avérait être aussi faible que le nombre de personnes qui se présentent auprès des centres de vaccination actuels. Cela pourrait être enfin un bon moyen d’éviter au gouvernement de porter seul la responsabilité de l’échec d’une campagne de vaccination auxquels les citoyens n’adhèrent pas, malgré une campagne médiatique sans précédent pour un vaccin.
Une très grande partie des Français n’a pas confiance en ce vaccin, tout comme un nombre important de professionnels de santé. Il n’est pas certain que ces nouvelles manoeuvres suffiront à faire oublier à cette majorité de citoyens les doutes légitimes qui pèsent sur un produit aussi controversé.
Mise à jour, le 18 novembre 2009, 20:40
Interrogée au cours du journal télévisé de 20 heures sur France 2, ce 18 novembre 2009, Roselyne Bachelot, ministre de la santé, a déclaré que ce n’est qu’en 2010 que pourrait intervenir une vaccination dans les cabinets libéraux, si elle intervient…
Mise à jour, le 19 novembre 2009, 18:00
Invitée par Christophe Barbier sur LCI, Roselyne Bachelot déclare « […] quand nous aurons procédé à la vaccination de la population [dans les centres actuels, NDLR], nous étudions la possibilité avec les médecins, dans une deuxième phase, au printemps, qu’ils puissent continuer la vaccination dans leur cabinet. »