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Surpoids, obésité et évolution législative

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Surpoids et obésité ne pèsent pas lourds face à l'industrie agroalimentaireLes intérêts de l’industrie pharmaceutique ne sont pas toujours les mêmes que ceux de l’industrie agroalimentaire si l’on en croit l’enquête réalisée tous les trois ans depuis 1997 par un grand fabricant de médicaments. Cette « enquête épidémiologique nationale sur le surpoids et l’obésité » a pour intérêt d’utiliser une méthodologie qui n’a pas varié au fil du temps, rendant les résultats aisément comparables d’une enquête à l’autre. L’étude a été menée sur une auprès d’une population de 20 000 foyers représentant des ménages ordinaires français d’un grand institut de sondage et excluant les sujets vivant en institution, en foyer, en résidence en communauté, ou sans domicile fixe. Les 25 286 personnes de plus de 18 ans de ces foyers ayant répondu au questionnaire qui leur a été envoyé par La Poste correspondent à un échantillon représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, vivant en ménage ordinaire, hors institution.

Entre 1997 et 2009, la taille moyenne des Français de plus de 18 ans a augmenté de 0,5 cm (168,5 cm), alors que le poids moyen dans le même temps s’élevait de 3,1 kg (72 kg). Le taux de Français considérés comme obèses est passé de 8,5 % à 13,7 % et la proportion de personnes en surpoids de 61,7 % à 53,6 % dans le même temps. Ces pourcentages équivalent à presque 6,5 millions d’obèses et à plus de 14 millions de Français en surpoids. De génération en génération, on devient obèse de plus en plus tôt, tandis que la région Nord — Pas de Calais est la plus touchée, loin devant la région Provence — Alpes — Côte d’Azur (PACA) dont la population semble être la plus mince du territoire national.
Sachant que l’indice de masse corporelle élevé est pour l’Organisation mondiale de la santé, l’un des huit facteurs responsables à eux seuls de plus de 75 % des cas de cardiopathie coronarienne, principale cause de mortalité dans le monde, on pourrait croire que les pouvoirs publics mettent tout en oeuvre pour faire évoluer la législation afin de lutter contre l’obésité et le surpoids. Cela ne semble pas être le cas à la lecture du communiqué de l’UFC-Que choisir qui dénonce la « mise au pas » de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES) dans le projet de loi de modernisation agricole.

Si cette loi est votée en l’état, l’INPES, qui dépend jusque-là du ministère de la santé, serait aussi placé sous la tutelle de ministère de l’agriculture, obligeant les communications de cet organisme à être validé par le Conseil national de l’alimentation donnant ainsi à l’industrie agroalimentaire « un fort droit de regard institutionnel sur les campagnes de prévention officielles ». Est-ce la proximité des grands dirigeants de cette industrie avec le sommet de l’État qui explique une telle manoeuvre ? Pas seulement si l’on se souvient de l’abandon par la majorité des parlementaires des mesures concernant l’alimentation et l’obésité dans la loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires. Tout comme pour le tabac, des intérêts industriels et commerciaux semblent influencer le choix des élus bien plus que la santé publique…

Complément alimentaire ou médicament ?

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Jurisprudences

Complément alimentaire ou médicament ?Le marché des compléments alimentaires est florissant et tous les acteurs commerciaux du système de santé y ont intérêt. Pharmaciens et laboratoires pharmaceutiques profitent de produits dont le prix n’est pas réglementé par la Sécurité sociale, qui fidélisent souvent des patients âgés prêts à quelques sacrifices pour une prétendue cure de jouvence basée sur des composants dits “naturels”. Quoi de mieux qu’une bonne entente pour se partager les profits d’une mode venue des plages californiennes et qui a mis du temps à s’imposer en France. On imagine mal le conseil national de l’ordre des pharmaciens porter plainte contre un complément alimentaire commercialisé par l’industrie, même si ce produit est discrètement présenté aux professionnels de santé, et par là même aux patients qui leur font confiance, comme présentant des propriétés curatives ou préventives…

Il en va tout autrement quand le complément alimentaire ne vient pas du cercle des initiés et qu’il est, en plus, question de le commercialiser hors des officines. Immédiate levée de boucliers du conseil national de l’ordre des pharmaciens comme le montre la décision reprise au bulletin d’information de la Cour de cassation n° 711 du 15 novembre 2009 (n° de pourvoi 08-83747). Le monopole des pharmaciens est alors en jeu et la dangerosité potentielle du produit mise en avant, à tel point que, même s’il est présenté de la même façon que les produits de l’industrie, il est alors considéré comme un médicament.

« Ne justifie pas sa décision au regard des articles L 4211-1 et L 5111-1 du code de la santé publique la cour d’appel qui écarte la qualification de médicaments par présentation et par fonction appliquée à divers produits composés d’extraits de cartilages ou d’extraits de plantes médicinales inscrites à la pharmacopée, et qui relaxe le dirigeant d’entreprise qui, dépourvu de la qualité de pharmacien, les commercialise, sans, d’une part, rechercher si ces produits ont été présentés comme possédant des propriétés curatives et préventives à l’égard des maladies humaines, d’autre part, vérifier au cas par cas, en tenant compte de l’ensemble des caractéristiques de chaque produit, notamment sa composition, ses propriétés pharmacologiques, immunologiques ou métaboliques, établies en l’état de la connaissance scientifique, ses modalités d’emploi, l’ampleur de sa diffusion, la connaissance qu’en ont les consommateurs et les risques que peut entraîner son utilisation pour la santé.
Lorsque, eu égard à l’ensemble de ces caractéristiques, un produit est susceptible de répondre à la fois à la définition du médicament et à celle de complément alimentaire résultant du décret du 20 mars 2006, il est, en cas de doute considéré comme un médicament. »

Le produit qui n’est pas proposé par l’industrie pharmaceutique devient un médicament par présentation ou par fonction, devant ainsi répondre à des normes strictes et obtenir une autorisation de mise sur le marché, inaccessible à un entrepreneur indépendant ce qui est logique puisque l’on ne badine pas avec la sécurité et la santé publique. Pas question de prendre des risques avec la santé des patients ou avec la santé financière de l’actuel commerce des compléments alimentaires.

Vaccin contre la grippe A(H1N1) : la responsabilité des laboratoires atténuée en cas d’effets indésirables

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Responsabilité et vaccin contre la grippe A(H1N1)Il n’y a pas qu’aux États-Unis que les fabricants de vaccins contre la grippe A(H1N1) ont obtenu que leur responsabilité ne soit pas engagée en cas d’effets indésirables graves ou non durant la campagne d’immunisation. Le gouvernement français a pris les mêmes engagements comme le révèlent les contrats passés entre les industriels et l’État rendus publics après que le journal Le Point ait saisi la commission d’accès aux documents administratifs pour réussir à les obtenir. Les autorités de santé semblent ainsi montrer qu’elles ont une confiance dans ces produits qui va au-delà même de celle des laboratoires eux-mêmes…

Dans plusieurs de ces contrats figure une clause de responsabilité qui remet en question la responsabilité des laboratoires signataires du fait de produits défectueux. C’est la solidarité nationale, donc les contribuables, qui devront prendre en charge l’indemnisation des éventuelles victimes d’effets indésirables. La situation de pandémie et l’urgence estimée par les pouvoirs publics de la vaccination seraient à l’origine de cette clause pour chacun des vaccins achetés. Dans le document reproduit ci-après, le “titulaire” correspond au laboratoire ayant signé le contrat :

« […] le titulaire s’engage à demander l’autorisation de mise sur le marché et à accomplir toute démarche de droit en vue de l’obtenir. Une fois l’autorisation de mise sur le marché obtenue, le titulaire s’acquittera de toutes les obligations du titulaire d’une telle autorisation telles que prévues dans le Code de la santé publique, y compris les obligations de pharmacovigilance.
L’administration déclare que l’utilisation des vaccins objet du présent marché ne se fera qu’en cas de situation épidémiologique le nécessitant. Dans ces conditions, les opérations de vaccination de la population seront décidées par la seule administration et seront placées sous la seule responsabilité de l’État.
Dans ce cadre, le titulaire est, en principe, responsable du fait des produits défectueux.
Toutefois, à titre dérogatoire et considérant les circonstances exceptionnelles qui caractérisent l’objet du présent marché, l’État s’engage à garantir le titulaire contre les conséquences de toute réclamation ou action judiciaire qui pourraient être élevées à l’encontre de ce dernier dans le cadre des opérations de vaccination sauf en cas de faute du titulaire ou sauf en cas de livraison d’un produit non conforme aux spécifications décrites dans l’autorisation de mise sur le marché ou, à défaut d’autorisation de mise sur le marché, aux caractéristiques du produit telles qu’elles figurent dans le dossier d’autorisation de mise sur le marché dans l’état où il se trouvait au moment de chaque livraison. »

Pourquoi une telle clause pour des produits que les fabricants disent issus des procédés de fabrication des vaccins contre la grippe saisonnière, des produits présentés comme sans réel danger ? Pourquoi l’État donne-t-il sa garantie aux laboratoires s’ils étaient poursuivis devant la justice pour des vaccins utilisés de façon massive pour une grippe dont le taux de mortalité est inférieur à celui de la grippe saisonnière ? Il y a là des questions que ne manquent pas de se poser de nombreux juristes et professionnels de santé…

 

Les déclarations d’intérêts des membres du Haut Conseil de la santé publique

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Médicaments et conflits d'intérêtsIl aura fallu attendre la fin 2009 et de nombreuses critiques dans les médias et le monde professionnel sur le manque de transparence des décisions prises en matière de vaccination contre la grippe A(H1N1) pour que paraisse la mise à jour 2009 des déclarations publiques d’intérêts des membres du collège, des commissions et des comités techniques du Haut Conseil de la santé publique (HCSP).

Ce document n’a rien d’anodin lorsque l’on connaît les missions du HCSP. Instance d’expertise créée par la loi no 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique, ce Haut Conseil doit, par exemple, « fournir aux pouvoirs publics, en liaison avec les agences sanitaires, l’expertise nécessaire à la gestion des risques sanitaires ainsi qu’à la conception et à l’évaluation des politiques et stratégies de prévention et de sécurité sanitaire ». Il est là aussi pour « fournir aux pouvoirs publics des réflexions prospectives et des conseils sur les questions de santé publique ». Le HCSP peut être consulté par les ministres intéressés, par les présidents des commissions compétentes du Parlement et par le président de l’Office parlementaire d’évaluation des politiques de santé sur toute question relative à la prévention, à la sécurité sanitaire ou à la performance du système de santé.

En matière de grippe A et de vaccination, le Haut Conseil de la santé publique est l’un des piliers du dispositif français. Il a émis plusieurs avis à ce sujet ces derniers mois et ces recommandations sur la pertinence de l’utilisation d’un vaccin plutôt qu’un autre sont suivies par les pouvoirs publics. Le choix de la France pour le vaccin avec adjuvant a été pris après que le HCSP ait jugé que cette solution était préférable à l’utilisation de vaccins sans adjuvant comme aux États-Unis. Les éventuels conflits d’intérêts de ses membres sont donc particulièrement importants, même s’il a fallu attendre l’arrêté du 19 octobre 2007 portant approbation du règlement intérieur du Haut Conseil de la santé publique pour que la loi impose la publication des déclarations d’intérêts de ses membres. Ce texte précise aussi que ces derniers « ne peuvent, en outre, recevoir des avantages en nature ou en espèces sous quelque forme que ce soit de la part des entreprises, établissements ou organismes » dont les dossiers pourraient être soumis au HCSP, ainsi qu’avec les organismes de conseil intervenant dans ces secteurs.
Difficile de croire que ces déclarations ne sont actualisées qu’à l’initiative des membres participant au HCSP dès qu’une modification intervient. C’est pourtant ce que prévoit l’arrêté…

L’étude du document mis en ligne est intéressante. Sur les vingt et un membres du comité technique des vaccinations, seuls quatre ont déclaré ne pas avoir de lien d’intérêt avec les entreprises, les établissements ou les organismes soumettant des dossiers au HCSP. Les autres reconnaissent de nombreuses interventions ponctuelles, rémunérées ou non,  pour des laboratoires comme Sanofi-Pasteur ou GlaxoSmithKline, fabricants des vaccins choisis pour la campagne de vaccination. Il faut n’y voir que des obligations professionnelles ou un hasard dans un milieu où les spécialistes ne sont pas légions et où les fonds publics pour mener à bien des études sont bien plus maigres que ce qu’essaient de faire croire les responsables politiques.
Les déclarations des autres membres sont à l’avenant…

L’industrie pharmaceutique paye les médecins pour prescrire plus de médicaments

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Les médecins russes achetés par l'industrie pharmaceutique ?Plusieurs milliers de médecins sont, d’une façon ou d’une autre, rémunérés par l’industrie pharmaceutique et certains ont même des formulaires imprimés prêts pour les laboratoires. « Ces revenus devraient être interdits par la loi et des règles de déontologie plus strictes mises en place ». « Il doit être mis fin à cette pratique déplorable ». C’est ce qu’a déclaré le premier ministre Vladimir Poutine à l’occasion d’une réunion sur le développement de l’industrie pharmaceutique, car il est question des professionnels russes et non des praticiens français, bien entendu.

L’ancien président russe va plus loin puisqu’il estime qu’un spécialiste, qui donne son avis en tant qu’expert ou qui participe aux commissions d’évaluation pour un nouveau médicament, ne doit pas être rétribué par les laboratoires. Actuellement, selon lui, les membres de ces conseils d’experts ne se soucient pas de la qualité des produits pharmaceutiques, mais soutiennent simplement le produit de la société qui leur verse une indemnisation.

Ces affirmations ne sont pas gratuites. La vente de médicaments aux particuliers est un marché qui devrait connaître une très forte croissance dans les prochaines années en Russie et Vladimir Poutine ne veut pas que ces dépenses impactent de façon importante le budget de l’État. Pour ne plus avoir à importer 90 % des médicaments utilisés pour répondre aux programmes fédéraux d’achat de médicaments, le premier ministre souhaite que ces derniers et surtout leurs génériques soient produits sur place. Il est prêt à investir 700 millions de roubles pour subventionner des prêts pour le développement technologique et l’amélioration des entreprises pharmaceutiques en Russie. Les usines russes ont besoin d’évoluer, car la plupart des médicaments fabriqués dans le pays ne répondent pas aux normes internationales. Pour voir leurs parts de marché augmenter, les laboratoires pharmaceutiques russes doivent améliorer leurs standards de qualité en s’alignant sur ceux des autres pays développés.

Enfin, la transparence et la concurrence doivent permettre au prix des médicaments de baisser. Dans la région de Chelyabinsk, il a suffi que le service “antimonopole” s’intéresse à la vente d’un important lot de médicaments pour que son prix soit divisé par cent. Une clarification des procédures sur le marché des produits pharmaceutiques est donc indispensable.

Dans un pays où l’alcool fait des ravages, où les discours politiques servent plus souvent à se donner une image qu’à promouvoir de réels changements et où la corruption est connue pour son ampleur, il n’est pas sûr que les paroles de Vladimir Poutine fassent réellement bouger les choses. Il est avant tout question d’exercer des pressions pour redistribuer les richesses du marché des médicaments vers des intérêts nationaux. Est-ce pour autant que de telles mesures profiteront à la population ? Rien n’est certain.
Vladimir Poutine semble vouloir s’inspirer de la politique menée par la France en pointant du doigt les médecins. Mais dans son cas, reprocher aux praticiens russes d’être corrompus, surtout si c’est vrai, aide peut-être à détourner l’attention de l’opinion de compromissions bien plus personnelles…

 

Pour ceux qui lisent le Russe, la source de cet article sur le site de RosBusinessConsulting.

Les médicamenteurs

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Presse

Les dessous de l'industrie pharmaceutiqueC’est à la chaîne de télévision Public Sénat que l’on doit la rediffusion d’un documentaire intitulé Les médicamenteurs. Porté à l’écran pour la première fois par France 5 en juin 2009, ce travail original offre une vision de l’industrie pharmaceutique différente de celle habituellement proposée par les médias.

Ceux qui s’intéressent au droit de la santé ne manqueront pas le discours du patron d’un grand laboratoire français rappelant à l’ordre les députés qui pourraient être tentés d’énoncer quelques critiques à l’égard du secteur du médicament alors qu’il a donné une industrie pharmaceutique « digne de ce nom » en trente-cinq ans. « […] Vous les députés qui adorez venir inaugurer mes centres de recherche et mes usines, j’aimerais que vous vous en souveniez un peu quand vous êtes assis à l’Assemblée nationale et quand vous votez les lois. » Il faut dire qu’être félicité par Nicolas Sarkozy pour le travail effectué « main dans la main » peut donner l’impression à un grand patron que le parlement est là avant tout pour l’aider et n’a pas à le critiquer. Certains journalistes, manquant sans doute de complaisance, ont eux aussi droit à leur part de reproches…

En suivant le documentaire, on aimerait peut-être que les critiques des élus soient plus nombreuses et que les facteurs économiques ne soient pas systématiquement favorisés aux dépens de la santé publique. Les exemples des médicaments Vioxx et Acomplia laissent en effet penser qu’il existe des pratiques fort surprenantes sur le marché des médicaments. Dans sa présentation du documentaire, France 5 n’hésite pas à écrire : « Essais cliniques tronqués, publications médicales biaisées, experts rétribués, marketing forcené, médecins harcelés… Tout est bon pour vendre un médicament. »
Les organismes de contrôle, dont l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps), sont aussi montrés du doigt et leurs défaillances mises en lumière. Comment ne pas trouver gênant que 80 % du budget de la commission des autorisations de mise sur le marché (AMM) des médicaments, dépendante de l’Afssaps, vienne de l’industrie ? Les pouvoirs publics et le monde politique dans sa grande majorité sont sceptiques quant à l’indépendance des médecins quand ils sont rétribués ou même simplement démarchés par les laboratoires, mais ne voient aucun inconvénient à ce que des instances de contrôle officielles soient financées par cette même industrie… D’autres exemples viennent étayer ce qui peut apparaître comme « démonstrations de collusion » entre les laboratoires et les instances de contrôle.

Pour ceux qui n’auraient pas l’occasion de voir ce documentaire lors de ces prochaines rediffusions, il faut espérer que cette coproduction de France 5 — Beau comme une image sera rapidement mise en ligne afin que chacun puisse se faire sa propre opinion.

La médecine : un commerce ou pas ?

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Médecine, commerce et concurrenceL’article R 4127-19 du code de la santé publique a beau prévoir que « La médecine ne doit pas être pratiquée comme un commerce », cela n’empêche pas les médecins d’être de plus en plus souvent soumis aux règles du droit commercial. À la vue de certains sites de chirurgie ou de médecine esthétique, même ceux respectant les recommandations du conseil national de l’ordre des médecins, on pourrait très vite penser avoir compris pourquoi, mais ce n’est pourtant pas dans ces domaines que le droit commercial a le plus tendance à s’imposer. Qu’elle soit le fait des praticiens eux-mêmes, d’autres professionnels de santé, de l’industrie, des assureurs ou des complémentaires santé, de la Sécurité sociale ou des pouvoirs publics le fait d’assimiler la pratique des soins au commerce conduit à des dérives qui font passer les considérations économiques, bien avant les considérations propres à la santé publique.

Pour s’en convaincre, il suffit de lire le plaidoyer du Conseil de la concurrence pour son action dans le domaine de la santé dans les études thématiques de son rapport pour l’année 2008. Il va sans dire que ce travail ne se résume pas aux seuls médecins, mais de nombreuses questions les intéressant y sont traitées. À la lecture de ce document, on comprend rapidement à quel point le Conseil de la concurrence assimile la médecine à un commerce et se plaît à y appliquer le droit de la concurrence. De façon assez paradoxale, si les règles de la concurrence sont appliquées aux médecins, il n’est nulle part suggéré de laisser aux praticiens la possibilité de lutter à armes égales lorsque leurs activités font l’objet de la concurrence d’autres professionnels de santé, qu’ils soient médecins ou non, basés dans l’Hexagone ou ailleurs. Excessivement rares sont les cas où le Conseil de la concurrence semble défendre les médecins, voire même des patients, donnant plutôt l’impression de prendre le parti des intérêts commerciaux de l’industrie, des professions de santé fortement impliquées dans le commerce ou des tenants des économies de santé aux dépens de la santé publique. Peut-être la composition du Conseil de la concurrence, y est-elle pour quelque chose ?

Le Conseil de la concurrence s’amuse à citer Noël Diricq lorsqu’il affirmait dans son introduction au colloque « Concurrence et organisation du système de santé » en 2008 que « Le serment d’Hippocrate, qui est probablement l’un des plus anciens documents anticoncurrentiels de la planète […], organise déjà des marchés, et bien plus, légitime la vocation non économique du secteur ». Lorsqu’il est question d’imposer des règles interdisant la concurrence aux praticiens, il semble exister un certain contentement, mais lorsqu’il est question de restreindre la concurrence à l’encontre des médecins ou de permettre aux praticiens d’utiliser des procédés servant à les rendre concurrentiels se fait jour un consensus pour s’opposer à de telles pratiques. En matière de concurrence, les médecins paraissent avoir bien des devoirs, mais quasiment aucun droit… Il faut reconnaître qu’une partie non négligeable des médecins et des conseils de l’ordre se satisfont de cette situation. Commerce et concurrence leur paraissent des mots grossiers, incompatibles avec l’exercice d’une profession où la jalousie du confrère a plus de poids qu’une évolution nécessaire à la survie d’une profession. Étrangement, lorsqu’il est question de petits arrangements avec l’industrie pharmaceutique, les mêmes sont prêts à quelques concessions. Sans doute est-il moins culpabilisant, ce que l’on s’autorise, mais que l’on interdit aux autres.

Contrairement à d’autres professionnels de santé ou à de grands groupes industriels ou de services, les médecins n’ont pas de formation commerciale. On entretient même chez eux un sentiment de culpabilité lorsqu’il est question de dépenses de santé et d’honoraires. Les aspects de reconnaissance d’un niveau d’études, de valorisation d’une formation continue ou de paiement pour un travail de qualité sont sacrifiés sur l’autel d’une médecine sociale qui se doit d’être gratuite, peu importe son coût. Les patients sont encouragés à négocier les tarifs, y compris pour les actes conventionnés, lorsqu’ils doivent faire l’avance des frais ou quand la possibilité est donnée aux médecins de demander des dépassements d’honoraires ; d’autres voient leurs dépenses remboursées par la Sécurité sociale pour des soins qu’ils ont choisi d’aller faire réaliser dans un pays étranger, séduits par les sites de tourisme médical interdits aux praticiens français, interdiction de la concurrence en France oblige. Ces mêmes praticiens à qui l’on demande aussi maintenant de transférer leurs actes à des professionnels de santé qui n’ont, pour certains, pas de code de déontologie et qui sont rompus aux pratiques commerciales et concurrentielles depuis bien longtemps… À force de dire que la médecine n’est pas un commerce, mais de la traiter comme tel, on affaiblit les médecins et on favorise leurs concurrents. Il va bien falloir que tout le monde finisse par admettre que la médecine est un commerce, certes particulier, mais un commerce, et que les médecins sont de très loin les mieux placés pour l’exercer avec éthique dans l’intérêt de la santé publique. Peut-être est-il temps de favoriser un commerce “éthicable” de la médecine, plutôt que de la laisser aux profits purement marchands ?

Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2010 à la loupe

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2010 a été rendu public et il est plein de surprises. Ceux qui s’intéressent aux chiffres s’en remettront au texte pour savoir où en sont les déficits, les objectifs de dépenses et les prévisions de recettes. Les autres vont pouvoir découvrir ce que cette première mouture, qui ne fait actuellement que 76 pages, propose. La grippe A, les dépenses de transport sanitaire et les fraudes sont très présentes dans ce PLFSS 2010. Gageons que ce texte comptera bien des articles supplémentaires lorsqu’il sera passé entre les mains des parlementaires.

Indépendance de la formation médicale ?

Écrit par Charles Duchemin le . Dans la rubrique Humeur

Indépendance des médecins vis-à-vis de l'industrie pharmaceutiqueIl est fréquent d’entendre dire au sein des administrations que les médecins sont influencés, quand ce n’est pas “achetés”, par l’industrie pharmaceutique. Cela expliquerait une partie du déficit de la Sécurité sociale et aurait justifié la charte de la visite médicale. Les textes relatifs à feu la formation médicale continue (FMC) avaient été votés au parlement pour qu’elle soit en apparence indépendante et la loi anticadeau interdit d’offrir au médecin un stylo vantant un produit, même accompagné d’une notice détaillée… Hypocrisie que tout cet arsenal législatif ? On pourrait le croire en fréquentant des congrès validant pour la FMC ou plutôt pour le développement professionnel continu (DPC), encore plus indépendant, où les allées menant aux salles d’enseignement sont bordées de stands chamarrés, aux tables chargées de gadgets clignotants et de blocs de post-it offerts par l’industrie…

La crise semble avoir changé cette volonté d’indépendance. Pour s’en convaincre, il suffit d’avoir le courrier électronique non désiré du centre de lobbying (!), d’étude et de formation (CLEF), « centre de formation médicale » annonçant un colloque intitulé « Pandémie grippale — Adaptation du plan aux réalités pandémiques » sous le haut patronage et honoré de la présence du ministre de la santé Roselyne Bachelot-Narquin. Pas de mentions légales sur le site du CLEF, mais une liste impressionnante de prestigieux partenaires de l’industrie pharmaceutique, dont certains sont très impliqués dans les traitements ou les vaccins antigrippaux. Les orateurs, quant à eux, semblent être pour certains des habitués des formations proposées par le centre de lobbying, si l’on en croit la liste de ces dernières pour 2009. Tout cela est tellement étonnant, que l’on pourrait croire à un canular…

Peut-être est-il important de justifier les stocks de Tamiflu constitués et les commandes de vaccins qui devraient permettre à une partie de l’industrie pharmaceutique de ne plus se séparer de membres de sa force de vente risquant de venir grossir le nombre de chômeurs ? Même si la France n’a pas tiré pleinement parti des bénéfices liés à la pandémie, il est raisonnable de penser que ces bénéfices profiteront à la formation médicale des praticiens du pays des Lumières. Le lobbying est là pour nous en convaincre…