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Des changements pour l’affichage des prix en salle d’attente chez les médecins et les kinésithérapeutes

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Affichage en salle d'attente des kinésithérapeutesL’arrêté du 11 juin 1996 relatif à l’information sur les tarifs d’honoraires pratiqués par les médecins libéraux et l’arrêté du 27 novembre 1995 relatif à l’information du consommateur sur les tarifs pratiqués par les masseurs-kinésithérapeutes-rééducateurs ont été abrogés par un arrêté du 25 mars 2009, publié au Journal officiel du 8 avril 2009. Cette abrogation survient après l’adoption de la loi nº 2007-1786 du 19 décembre 2007 de financement de la sécurité sociale pour 2008 et le décret en Conseil d’État no 2009-152 du 10 février 2009 relatif à l’information sur les tarifs d’honoraires pratiqués par les professionnels de santé qui rendaient les deux arrêtés abrogés obsolètes. Le lecteur peut se référer à l’article intitulé « Affichage légal dans la salle d’attente du médecin » pour plus de précisions.

La loi impose, depuis le 1er février 2009 aux professionnels de santé la remise d’une information écrite préalable au patient dès lors que, lorsqu’ils comportent un dépassement, les honoraires totaux des actes et prestations facturés lors de la consultation sont supérieurs ou égaux à 70 euros, sauf si le professionnel prescrit un acte à réaliser lors d’une consultation ultérieure, auquel cas il est tenu de remettre à son patient l’information préalable susmentionnée, y compris si ses honoraires sont inférieurs au seuil fixé des 70 euros. Alors que les textes ont renforcé les obligations à l’égard des médecins, l’arrêté du 25 mars 2009 abroge l’obligation de devis faite jusque-là aux masseurs-kinésithérapeutes, ce qui est un assouplissement majeur des contraintes pesant sur ces professionnels. Certes le devis n’était remis que pour un montant de prestation de service supérieur à 150 euros, mais la remise d’une note d’information écrite sur les honoraires n’implique pas des devoirs aussi forts que ceux relatifs à la délivrance d’un devis.

L’arrêté du 11 juin 1996 relatif à l’information sur les tarifs d’honoraires pratiqués par les médecins libéraux aura été, pendant plus de dix ans, le texte phare de l’affichage en salle d’attente des médecins et aura permis à la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes de rappeler à l’ordre bon nombre de ces professionnels de santé.

Arrêté du 11 juin 1996

Arrêté relatif à l’information sur les tarifs d’honoraires pratiqués par les médecins libéraux

Article 1er

Les médecins libéraux doivent afficher, de manière visible et lisible, dans leur salle d’attente, les indications suivantes :
1. Leur situation vis-à-vis des organismes d’assurance maladie (conventionné ou non), y compris leur secteur d’appartenance conventionnelle et leur droit à dépassement permanent ;
2. Les honoraires ou fourchettes d’honoraires des prestations suivantes, lorsqu’elles sont couramment pratiquées par le praticien :
consultation, visite à domicile, indemnité de nuit et de dimanche ;
3. Pour les praticiens qui n’effectuent pas couramment les prestations visées au deuxième alinéa, les fourchettes d’honoraires d’au moins cinq prestations les plus couramment pratiquées par le praticien ;
4. Dans le cas des praticiens conventionnés dont les honoraires sont réglementés, les phrases : « Pour tous les actes pris en charge par l’assurance maladie sont pratiqués les tarifs d’honoraires fixés par la réglementation. Ces honoraires peuvent être dépassés en cas d’exigence exceptionnelle du patient, de temps et de lieu ; dans ce cas, votre médecin vous donnera toutes les informations sur les honoraires demandés. »
5. Dans le cas des praticiens conventionnés dont les honoraires sont libres, les phrases : « Pour tous les actes sont pratiqués des tarifs d’honoraires déterminés par le praticien. Le remboursement s’effectue sur la base des honoraires conventionnés. Votre médecin vous donnera préalablement toutes les informations sur les honoraires qu’il compte pratiquer. »
6. Pour les praticiens non conventionnés, les phrases : « Pour tous les actes sont pratiqués des tarifs d’honoraires déterminés par le praticien. Le remboursement s’effectue sur la base des tarifs d’autorité. Votre médecin vous donnera préalablement toutes les informations sur les honoraires qu’il compte pratiquer. »

Pour ce qui est de la salle d’attente des masseurs-kinésithérapeutes, c’est l’arrêté du 27 novembre 1995 relatif à l’information du consommateur sur les tarifs pratiqués par les masseurs-kinésithérapeutes-rééducateurs qui s’appliquait jusque-là.

Arrêté du 27 novembre 1995

Arrêté relatif à l’information du consommateur sur les tarifs d’honoraires pratiqués par les masseurs-kinésithérapeutes-rééducateurs

Article 1er

Les masseurs-kinésithérapeutes-rééducateurs doivent afficher, dans leur salle d’attente, les indications suivantes :
– leur situation au regard des organismes d’assurance maladie (conventionné ou non) ;
– pour les praticiens conventionnés, la phrase suivante : « Pour tous les actes pris en charge par l’assurance maladie sont pratiqués les tarifs d’honoraire fixés par la réglementation » ;
– les prix T.T.C. d’au moins six prestations non remboursables les plus couramment pratiquées dans leur cabinet.

La possibilité de consulter la liste des prestations prévues à l’article 2 devra être mentionnée sur ce tableau d’affichage.

Article 2

La liste complète des prix T.T.C. des prestations de services offertes doit être mise à la disposition de la clientèle.

Article 3

Le professionnel remet un devis détaillé, préalablement à l’exécution de la prestation de services, lorsque son montant estimé est supérieur à 150 euros T.T.C.

Tout devis doit comporter les mentions suivantes :
– la date de rédaction ;
– le nom et l’adresse du masseur-kinésithérapeute-rééducateur ;
– le décompte détaillé, en quantité et en prix, de chaque prestation ;
– le cas échéant, les frais de déplacement ;
– la somme globale à payer T.T.C. ;
– la durée de validité de l’offre.

Dans tous les cas, le devis établi en double exemplaire doit également comporter l’indication manuscrite, datée et signée du consommateur : « Devis accepté avant l’exécution de la prestation de services ».

Article 4

Le présent arrêté entrera en vigueur le 1er janvier 1996. […]

Un plaidoyer pour la sécurité des dispositifs médicaux aux États-Unis

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Dispositif médical, médicament et sécurité du patientGregory D. Curfman est executive editor [bras droit du rédacteur en chef, NDLR] du New England Journal of Medicine, l’une des plus prestigieuses revues médicales en langue anglaise, éditée par la Société de médecine du Massachusetts. C’est un spécialiste en médecine interne, ayant fait ses études à Harvard, qui a plus de 35 ans d’expérience.Il se consacre tout particulièrement aux problèmes cardiaques et travaille à Boston, pour le compte du Massachusetts General Hospital. Il connaît parfaitement les problèmes liés aux dispositifs médicaux aux États-Unis et s’est lancé dans un plaidoyer en faveur de plus de sécurité dans ce domaine après qu’une décision de la Cour suprême de ce pays ait remis en question un texte obligeant les fabricants à plus d’information sur les risques potentiels relatifs à leurs produits. C’est dans un article intitulé The Medical Device Safety Act of 2009, publié dans le numéro d’avril 2009 du New England Journal of Medicine qu’il expose ses arguments.

Il semble intéressant d’en proposer une traduction, car l’information dans le secteur des dispositifs médicaux est un sujet sensible dans la plupart des pays développés à travers le monde. En France, le praticien a une obligation d’information et une part de responsabilité pour les dispositifs médicaux qu’il utilise, il est donc capital qu’il reçoive du fabricant une information claire et remise régulièrement à jour des risques liés aux dispositifs qu’il choisit d’utiliser, en plus du simple discours commercial habituel.

 


La loi sur la sécurité des dispositifs médicaux de 2009 (The Medical Device Safety Act of 2009)

Gregory D. Curfman, M.D., Stephen Morrissey, Ph.D., and Jeffrey M. Drazen, M.D.

 

La sécurité des patients est une préoccupation nationale. Les principales parties prenantes, dans notre système de soins de santé, s’accordent à dire que toutes les mesures doivent être prises pour veiller à ce que les actes médicaux, ayant pour but d’améliorer la santé des patients, soient aussi sûrs que possible. Mais chaque acte médical comporte des bénéfices et des risques. La sécurité des patients ne peut être assurée que si les fabricants de médicaments et de dispositifs médicaux divulguent complètement et ouvertement à la fois les avantages et les possibles effets négatifs, liés à un acte. Comme il a été clairement établi par l’Institut de médecine, les risques et les bénéfices des dispositifs médicaux et des médicaments doivent être évalués tout au long de leur cycle de vie.1

Malheureusement, l’industrie des dispositifs médicaux, l’un des principaux acteurs du système de soins, a été mise à l’abri des éventuelles conséquences que peut avoir le fait de ne pas divulguer de manière appropriée ces risques. Il y a un peu plus d’un an, la Cour suprême des États-Unis (Riegel c. Medtronic) 2, a jugé que le fabricant d’un dispositif médical ne peut être poursuivi en vertu de la loi d’un Ètat [en opposition à la loi fédérale, qui a priorité (preemption) sur les lois propres à chaque État américain, NDLR] par des patients invoquant des dommages du fait d’un dispositif ayant reçu une autorisation de commercialisation de la Food and Drug Administration (FDA). Jusqu’à cette décision de la Cour, une possible action pour « défaut de mise en garde » ou pour défaut de conception incitait fortement les entreprises de matériel à être vigilantes quant à la sécurité de leurs produits.

Depuis la décision de la Cour suprême dans l’affaire Riegel, des milliers de poursuites contre les fabricants de dispositifs médicaux ont été abandonnées par les tribunaux, les juges s’appuyant sur la décision de la Cour suprême pour écarter les poursuites judiciaires dans ces procès. Nous soutenons que la préemption se traduira par moins de sécurité pour le peuple américain en matière de dispositifs médicaux.
Le fait que le juge Richard Kyle ait récemment rejeté plus de 1000 plaintes déposées contre Medtronic devant la Cour du district des États-Unis du Minnesota, après la défaillance de sa sonde de défibrillation implantable Sprint Fidelis, qui a été retirée du marché en 2007, en est le plus bel exemple. La sonde avait tendance à se rompre et, parfois, à ne pas délivrer un choc approprié ou, au contraire, à délivrer plusieurs chocs inutiles. Malgré ses déclarations selon lesquelles « Le tribunal reconnaît que certains demandeurs ont subi des blessures dues à l’utilisation du Sprint Fidelis, et le tribunal n’est pas indifférent à leur sort », le juge Kyle a reconnu qu’il était contraint, sur la base de la décision dans l’affaire Riegel, de rejeter les poursuites et de ne pas donner à ces patients blessés la possibilité de demander réparation.3

Et il y aurait beaucoup de patients dans ce cas : plus d’un quart de million de sondes Sprint Fidelis ont été implantées dans le monde, 150.000 aux États-Unis. La FDA a identifié 2200 déclarations de blessures graves concernant ce problème, et la semaine dernière, Medtronic a publié une déclaration mise à jour relative à la mortalité liée à la sonde Sprint Fidelis faisant état de 13 décès.4, 5

La décision de la Cour suprême dans l’affaire Riegel était fondée non pas sur ce qu’il y a de mieux pour la santé publique, mais plutôt sur un point de la législation. Les Medical Device Amendements de 1976 [MDA, amendements concernant le dispositif médical, NDLR] à la Food, Drug, and Cosmetic Act prévoient qu’un État ne peut pas « mettre en place une exigence à l’égard d’un dispositif à usage humain… différente, ou en plus, de toute exigence applicable à un dispositif médical en vertu de lois fédérales » 6. La Cour, dans sa décision rendue à 8 voix contre 1, a interprété cet article comme la preuve de l’intention explicite du Congrès de voir la loi fédérale préempter sur les poursuites basées sur les lois propres aux États. La FDA, qui jusqu’en 2003, s’opposait à la préemption, a fait, cette année-là, de façon inexplicable, volte-face et a pris position sur le fait que l’approbation d’un dispositif devait être pris au pied de la lettre et permettait de dédouaner les sociétés de toute responsabilité légale. En ce qui concerne les médicaments, la FDA a largement pris position en faveur de la préemption en 2006.

Contrastant fortement avec la décision dans l’affaire Riegel et avec la position de la FDA sur la nouvelle place de la préemption, une décision de la Cour suprême, statuant ce mois-ci dans une affaire de préemption et de médicament (Wyeth c. Levine7), a rejeté l’argument du laboratoire Wyeth selon lequel les poursuites pour défaut de mise en garde à l’encontre des compagnies pharmaceutiques sont préemptées en raison de l’approbation de l’étiquette du médicament par la FDA. Le Food, Drug, and Cosmetic Act ne contient pas d’article explicite de préemption en ce qui concerne les médicaments délivrés sur ordonnance. La société pharmaceutique a fait valoir que, même si la préemption n’est pas spécifiquement mentionnée dans la Loi, elle l’est de façon « implicite » en vertu de la suprématie de l’article IV de la Constitution américaine, qui stipule que le droit fédéral l’emporte sur le droit d’un État. Par 6 voix contre 3, la Cour suprême a rejeté cet argument et a aussi estimé que la position prise par la FDA en 2006, « ne mérite pas d’être retenue. »

En l’état actuel de la loi, les poursuites pour défaut de mise en garde et défaut de conception sont préemptées pour les dispositifs médicaux, mais pas pour les médicaments. Cet état de fait laisse perplexe et défie toute logique. Pour remédier à cette incohérence et améliorer la sécurité des produits médicaux, l’élu au Congrès Henry Waxman (D-CA), président du comité de la Chambre sur l’énergie et le commerce, et Frank Pallone (D-NJ), président du sous-comité à la santé, ont récemment présenté le Medical Device Safety Act 8. Ce projet de loi, accompagné de celui présenté par les sénateurs Edward Kennedy (D-MA) et Patrick Leahy (D-VT), aurait pour effet d’annuler la décision de la Cour dans l’affaire Riegel et d’ajouter un texte explicite au Medical Device amendements stipulant que cette loi ne préempte pas les poursuites contre les sociétés fabriquant un dispositif plaçant, par là même, les dispositifs médicaux et les médicaments sur un pied d’égalité en ce qui concerne les suites judiciaires offertes aux patients.

Les patients et les médecins méritent d’être parfaitement informés sur les avantages et les risques des dispositifs médicaux, et les entreprises fabriquant ces dispositifs devraient être tenues pour responsables si elles ne parviennent pas à atteindre cette norme. Nous exhortons le Congrès à adopter rapidement cette législation afin d’autoriser à nouveau les patients meurtris à engager des poursuites, qui ont été un élément important du cadre réglementaire et qui ont fait preuve de leur grande efficacité pour assurer la sécurité quant aux dispositifs médicaux, devant les tribunaux. La question cruciale de la préemption, qui joue un rôle direct sur la divulgation des risques et donc la sécurité de l’offre des dispositifs médicaux et des médicaments au pays, devrait normalement être traitée par des élus du peuple, chez qui la responsabilité à l’égard de la santé publique est vraiment présente.

 

Source

Cet article (10.1056/NEJMe0902377) a été publié sur le site NEJM.org le 18 mars 2009. Il figurera dans le numéro du 9 avril de la revue papier.

Références

 

  1. Challenges for the FDA: the future of drug safety — workshop summary. Washington, DC: National Academies Press, 2007.
  2. Riegel v. Medtronic, 552 U.S. 2 (2008).
  3. Kyle RH. In re Medtronic, Inc. Sprint Fidelis leads products liability litigation. Multidistrict litigation no. 08-1905 (RHK/JSM). Memorandum opinion and order. U.S. District Court of Minnesota. January 5, 2009. (Accessed March 17, 2009, at http://www.mnd.uscourts.gov/MDL-Fidelis/Orders/2009/090105-08md1905ord.pdf.)
  4. Meier B. Medtronic links device for heart to 13 deaths. New York Times. March 13, 2009.
  5. Medtronic letter to physicians: Sprint Fidelis model 6949 lead performance. (Accessed March 17, 2009, at http://www.medtronic.com/product-advisories/physician/sprint-fidelis/PHYSLETTER-2009-03-13.htm.)
  6. Medical Device Amendments of 1976, codified at 21 U.S.C. § 360(k)(a).
  7. Wyeth v. Levine, 555 U.S. 2 (2009).
  8. Committee on Energy and Commerce. Health leaders introduce legislation reversing Supreme Court’s medical device decision. (Accessed March 17, 2009, at http://energycommerce.house.gov/index.php?option=com_content&task=view&id=1518.)

Devoir d’information du médecin et pétition

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Devoir d'information des médecins envers leurs confrèresLe médecin a depuis longtemps un devoir d’information envers le patient. Comme le simple bon sens en matière d’information ne semblait pas suffire à une époque où personne n’aurait songé à remettre en cause l’autorité des mandarins hospitaliers, des dérives ont conduit le législateur à en faire une obligation légale. Depuis, l’étendue du devoir d’information du praticien ne cesse de s’étendre. Il n’est plus seulement médical, au sens de la santé ou au sens de la profession, mais il s’adresse aussi aux honoraires, à leur remboursement et à tous les professionnels de santé. Les pouvoirs exécutif et législatif usent régulièrement de ce moyen pour accroître les contraintes pesant sur les soignants libéraux. À tel point que les derniers textes n’ont plus vraiment de sens pratique et semblent n’exister que pour que les professionnels ne puissent les appliquer, permettant ainsi à n’importe quel patient mécontent de faire condamner celui qui l’a pris en charge.

Si les médecins ont pris à nouveau conscience que le devoir d’information s’appliquait envers le patient, ils ne sont pas nombreux à se souvenir qu’il doit aussi s’exercer entre confrères. Le code de déontologie et la convention ont beau prévoir l’échange de courriers et d’informations entre les professionnels de santé, cette situation, qui a pour but d’améliorer la qualité des soins, est loin d’être évidente pour les patients qui fréquentent quotidiennement le monde de la santé.

Parmi les médecins, certains ont néanmoins fini par comprendre que la communication ne devait pas servir qu’à leurs détracteurs. Depuis peu, quelques-uns ont même décidé de refaire de l’information de leurs confrères un devoir moral. C’est dans cette optique qu’il semble falloir intégrer la « Lettre ouverte aux futurs confrères » qui a fait son apparition sur le site Pétitions du web. Il s’agit en fait d’une pétition rédigée par « des médecins libéraux excédés » et signée par plus d’une centaine de praticiens. Si ce texte peut être pris comme une revendication sectorielle, il est tout de même intéressant de par son contenu. Il montre la perception qu’ont les professionnels de terrain des mesures législatives en matière de droit de la santé. Il est d’autant plus intéressant que les médecins libéraux ne manifestent qu’excessivement rarement leur mécontentement, se contentant depuis de nombreuses années de courber l’échine. Les médecins libéraux signataires invitent, par exemple, leurs jeunes collègues à exercer une activité salariée et à se détourner de la médecine libérale de proximité.

Les gouvernants ont toujours pensé que ces révoltes n’iraient pas bien loin, conforté dans cette idée par le fait que cela a toujours été le cas jusque-là au sein d’une profession où l’individualisme prime souvent l’intérêt collectif. Ce type d’actions tend toutefois à se multiplier. Le pouvoir législatif finira-t-il par en tenir compte ? Rien n’est moins sûr…

Des blogs politiques pour préparer les lois sur la santé… et les autres

Écrit par Charles Duchemin le . Dans la rubrique Humeur

Les projets de loi débattus sur InternetL’Internet prend chaque jour un peu plus de place dans la vie des Français. La ménagère de moins de 50 ans et les autres citoyens sont quotidiennement sollicités pour se rendre sur la toile afin d’y trouver des informations. Formidable outil de communication, tous les ministères et les services publics ont ouvert leur site Internet. Il faut dire que, pour l’usager, ces services virtuels ont bien des avantages : ils ne connaissent ni les grèves, ni les 35 heures ; ils permettent à l’administration de rester au contact des populations rurales qui voient les offres publiques de proximité supprimées ou ils évitent à des fonctionnaires d’être maintenu en poste dans des banlieues où les médecins libéraux seront bientôt les seuls à être contraints par la loi d’y travailler au péril de leur vie.

Mais l’intérêt du net pour les pouvoirs publics et les élus va bien au-delà de la simple information pour une raison simple : cet outil de communication est devenu un lieu d’influence. Lentement ce média tend à prendre le pas sur les autres. La presse et l’audiovisuel l’ont compris eux aussi. Tous les « anciens » médias ont leur site en ligne et les hommes politiques leur blog, surtout depuis que de nombreux observateurs s’accordent à dire que la victoire de Barack Obama s’est en grande partie faite grâce au web. Si l’on en croit l’édition électronique du journal le Figaro du 16 mars 2009, « l’Élysée et Matignon veulent regagner du terrain sur le net ». Il est question d’« influencer sans apparaître », d’acheter des mots-clés pour apparaître en tête des moteurs de recherche et d’utiliser les fonds publics pour faire valoir l’opinion des instances dirigeantes au sein de l’un des rares lieux où il existe encore une certaine liberté d’expression pour ceux qui sont hostiles à des réformes voulues par le chef de l’État.

Rien d’étonnant dans ces conditions que les sénateurs « verts » aient choisi le net pour donner l’impression aux citoyens de participer aux débats relatifs au projet de loi portant réforme de l’hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires (HPST). Ce blog [fermé depuis, NDLR], hébergé par Google, intitulé « Vos témoignages sur la crise de l’hôpital » affirme qu’il a pour but « de recueillir des témoignages de professionnels de la santé, d’usagers du service public hospitaliers, de militants associatifs ou syndicaux, sur la crise que traverse aujourd’hui le système hospitalier en France. Lieu d’expression et débat, il permettra aux Sénatrices et Sénateurs Verts d’éclairer leurs positions dans le débat sur le projet de loi ». Pas de blog de députés ou de sénateurs par contre pour permettre aux professionnels de santé libéraux de s’exprimer sur le même projet de loi concernant les sujets qui les intéressent… Difficile de se départir du politiquement correct pour ces élus apprentis surfeurs.

Différence entre aléa thérapeutique et faute médicale

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Jurisprudences

La responsabilité du chirurgien mise en cause : faute médicale ou aléa thérapeutique ?Il n’est pas toujours aisé de savoir si les complications liées à un acte médical relèvent de l’aléa thérapeutique ou de la faute médicale et cette proximité conduit à de nombreux recours devant les tribunaux. C’est alors la responsabilité contractuelle du praticien qui est mise en cause. Le juge doit faire la part des choses entre le risque inhérent à l’acte, la complication propre à la technique utilisée ou la maladresse, par exemple.  Le bulletin d’information de la Cour de Cassation nº 694 du 15 janvier 2009 revient dans ces résumés 39 et 40 sur deux affaires qui se sont soldées par des arrêts de la première chambre civile le 18 septembre 2008.

La première décision (nº de pourvoi 07-12170) concerne un acte de coloscopie. La Cour précise qu’ « En présence d’une lésion accidentelle, en l’espèce la perforation de l’intestin du patient intervenue lors d’une coloscopie, la cour d’appel a pu retenir la faute du médecin, après avoir relevé que cet acte à visée exploratoire n’impliquait pas une atteinte aux parois des organes examinés, et après avoir déduit, tant de l’absence de prédispositions chez le patient que des modalités de réalisation de la coloscopie, que la perforation dont celui-ci avait été victime était la conséquence d’un geste maladroit du praticien. »

La seconde décision (nº de pourvoi 07-13080) a pour objet une lésion du nerf tibial postérieur au cours d’une intervention chirurgicale visant à suturer la rupture du tendon d’Achille à l’aide du tendon du muscle plantaire grêle. Pour la première chambre civile, « En présence d’une lésion accidentelle d’un nerf, lors d’une intervention chirurgicale sur un organe situé à proximité du nerf lésé, laquelle constituait un risque inhérent à l’intervention chirurgicale pratiquée sur le patient, la cour d’appel a pu retenir, après avoir relevé que la technique utilisée par le praticien était conforme aux données acquises par la science, que le dommage s’analysait en un aléa thérapeutique, des conséquences duquel le chirurgien n’est pas contractuellement responsable. »

Toutes les complications ne sont donc pas des fautes médicales. La médecine et la chirurgie comportent des risques. Que le patient en soit informé ne veut pas dire qu’il en ait conscience. Cela n’arrive pas qu’aux autres…

Conseils de l’ordre infirmier, sites Internet et publicité

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Ordre infirmierL’ordre infirmier français est en pleine création. Son bureau national a été élu pour la première fois le 14 janvier 2009. Sa présidente Dominique Le Boeuf, cadre infirmier et ancien membre de l’Agence nationale d’accréditation et d’évaluation en santé (ANAES, ancêtre de la Haute Autorité de santé), ne devrait pas se sentir perdue dans les allées du pouvoir et ce n’est sans doute pas un hasard si elle a été nommée à ce poste. Elle est d’ailleurs toujours « personne qualifiée » au sein de la commission qualité et diffusion de l’information médicale et fait partie du Haut conseil de santé publique.

Les conseils départementaux et régionaux se mettent quant à eux en place depuis quelques semaines. À l’heure d’Internet et des nouvelles technologies, l’une des premières tâches de ces nouvelles instances a été d’ouvrir un site sur le Web. Informer et communiquer sont des missions majeures pour les ordres.

Erreur de jeunesse, méconnaissance des outils de création ou précipitation, il est surprenant de voir figurer sur plusieurs de ces sites ordinaux de la publicité… Bien qu’il soit possible de filtrer et de cibler les messages publicitaires proposés, ces mesures ne sont pas utilisées et les annonces pour Butagaz côtoient celles pour solutions spéculatives à la Bourse ou des centres de formation privés pour les aides soignantes sur le site du conseil de l’ordre infirmier de l’Ain, par exemple. Si la démarche est réfléchie, il va être intéressant de voir quelle sera la position de l’ordre national face à la publicité sur le Net que pourraient souhaiter faire ses membres libéraux. L’ordre infirmier se laissera-t-il déborder, comme l’est depuis plusieurs années l’ordre des médecins, par les praticiens et les établissements du secteur privé ?
Avec une présidente qualifiée dans la diffusion de l’information médicale, on peut penser que tous ces sites paramédicaux se mettront très vite en conformité avec les recommandations de la commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) concernant les sites Internet. Ils se verront sans doute aussi rappeler les conseils de la HAS et de la fondation Health on the net (HON) dans ce domaine. Le site du conseil national de l’ordre infirmier, qui n’est pas encore en ligne, devrait être un exemple en la matière.

Reste à savoir si ces instances ordinales, confrontées aux nouvelles responsabilités liées à la charge, accorderont plus de temps à la réflexion lorsqu’il s’agira de trancher des questions de probité et d’éthique au sein de leur profession. Il n’y a aucune raison d’en douter.

 

Mise à jour du 29 janvier 2009

Les ordres départementaux des masseurs kinésithérapeutes ne sont pas en reste comme on peut le voir sur le site de celui de la Sarthe.

Responsabilité du médecin, information, conseil et conduite automobile

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Accidents de la route et examen médicalIl n’est pas toujours simple pour le praticien d’aborder le sujet de la conduite automobile avec un patient, surtout lorsqu’il s’agit de lui expliquer qu’il serait préférable qu’il s’abstienne d’utiliser son véhicule. Pour certaines personnes âgées, leur voiture représente l’unique moyen de transport utilisé pour aller faire les courses ou pour se rendre chez le médecin. Elles estiment souvent cette solution plus économique qu’un taxi et se sentent plus en sécurité au sein de leur véhicule que dans les transports en commun.

« Le médecin et son patient conducteur« , brochure de la Prévention routière, peut aider les praticiens à trouver les mots justes pour mieux communiquer avec les patients sur ce sujet.

L’auteur principal de ce document est le docteur Charles Mercier-Guyon, médecin légiste et médecin urgentiste. Ce praticien est secrétaire du conseil médical de La Prévention routière et également membre du conseil international alcool, drogues et sécurité routière (ICADTS). Il est conseiller auprès du Committee on drugs and alcohol du Transportation research board of the national academies des États-Unis d’Amérique et expert auprès de la Commission européenne au sein du groupe d’experts « alcool, drogues médicaments et sécurité routière » de la direction générale TREN (transports et énergie). Il est aussi membre de la commission nationale des stupéfiants et des psychotropes et préside la commission médicale des permis de conduire de Haute-Savoie. Il a participé aux travaux du groupe de travail mis en place en janvier 2003 sous la présidence du professeur Hamard pour définir les critères d’aptitude médicale à la conduite. Il est l’auteur de nombreuses publications, communications et de rapports dans le domaine des facteurs humains dans les accidents de la route. Difficile dans ces conditions de trouver quelqu’un de mieux qualifié pour parler de ce problème.

Ce travail rappelle que « peu d’affections entraînent véritablement une inaptitude temporaire ou définitive à la conduite, mais de nombreuses pathologies nécessitent une prise en charge adaptée et, le cas échéant, un avis de la commission médicale des permis de conduire pour être en règle avec la législation des permis de conduire.
Beaucoup de patients et de médecins ne savent pas que certaines pathologies imposent un avis de la commission médicale des permis de conduire sous peine de faire encourir au patient une responsabilité pénale en cas d’accident, ainsi qu’une perte partielle de sa couverture d’assurance.
Si les candidats au permis de conduire doivent remplir une déclaration sur l’honneur mentionnant certains antécédents (épilepsie, pension d’invalidité, port de lunettes), peu de patients savent qu’ils sont tenus de signaler à leur assureur et au service des permis de conduire la survenue de toute pathologie susceptible d’altérer leur capacité de conduite.
Plusieurs pays ont mis en place un contrôle médical de l’aptitude des conducteurs et la France a envisagé un temps de mettre en place un tel type de contrôle, confié aux médecins généralistes. Ce projet a été remis à une date ultérieure compte tenu de la difficulté de sa mise en place et du manque de formation des médecins à l’évaluation des conducteurs » alors que des études, en particulier en Floride, ont bien monté l’intérêt des contrôles médicaux au-delà d’un certain âge du conducteur.

Interopérabilité des systèmes informatiques de santé européens

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

système d'information de santéLe conseil national de l’ordre des médecins français a organisé, le 5 décembre 2008, une table ronde sur l’interopérabilité médicale dans l’Union européenne. Intéressante question à l’heure où les systèmes de soins et d’information de santé sont différents selon les pays.

Trois heures de discussions consensuelles sur la nécessité de développer l’échange de données entre les différents systèmes de santé, émaillées de plusieurs informations pleines de bon sens. L’interopérabilité des systèmes est au coeur de palabres depuis plus d’une dizaine d’années, mais il n’existe pas d’annuaire fiable pour qu’un médecin urgentiste puisse envoyer par mail le compte-rendu de son intervention à domicile au médecin traitant d’un patient. Malgré de très nombreuses réflexions, l’absence d’un identifiant unique national pour un patient empêche des établissements de santé distants de quelques mètres de partager des résultats de biologie.

De nombreuses promesses ont été faites durant les débats par les différents intervenants. Marthe Wehrung, directrice du GIP-CPS, a rappelé que la carte de professionnel de santé (CPS) devrait être fusionnée à la carte professionnelle remise par l’ordre à ses membres. L’actuelle CPS, délivrée à 630 000 exemplaires (530 000 pour des libéraux ; 100 000 pour des hospitaliers), pourrait être entre les mains d’un million de praticiens à court terme. Prévue au départ pour la télétransmission, la CPS devrait être bientôt une clé de contrôle d’accès à des bases de données de l’assurance-maladie ou d’autres organismes ; un moyen de signer électroniquement des documents ; le moyen d’obtenir des habilitations au sein de systèmes informatisés, d’assurer la traçabilité ou de contrôler les informations relatives aux professionnels de santé. Un système non-contact est à l’étude pour les services hospitaliers afin d’éviter au médecin d’avoir à insérer sa CPS dans un lecteur avant de s’identifier à chaque fois qu’il souhaite enrichir le dossier d’un patient. Toutes ces solutions sont déjà à l’étude et on ne peut qu’être confiant sur la rapidité à laquelle elles seront mises en place quand on sait que la CPS est actuellement ressentie par de nombreux médecins sur le terrain comme une contrainte ou comme un frein au lieu d’être une aide.
L’avenir est dans les cartes. De nombreux projets sont déjà dans les tuyaux : carte ordinale européenne ; protocoles de soins intégrant des référentiels HAS contrôlés grâce à la carte du professionnel ; etc.
Tout cela fait rêver quand on sait que la carte de professionnel en formation, dont on parle depuis plusieurs années, n’est toujours pas au point à l’échelon national.

Le développement de l’interopérabilité se heurte au principe de subsidiarité selon plusieurs intervenants. En théorie, les États restent maître de leur politique de santé au sein de l’Union européenne. Tout le monde accepte que le commerce des dispositifs médicaux bafoue les mesures nationales de santé publique au nom de la libre concurrence, mais les États ont du mal à harmoniser des systèmes d’échange de données… On comprend qu’il soit plus important de privilégier le commerce quand on sait qu’il y a deux fois plus de morts par accidents médicaux en Europe que par accidents de la route ; des accidents médicaux qui pourraient être évités dans un très grand nombre de cas grâce à un système d’information uniformisé. Malheureusement, selon le représentant des entreprises des systèmes d’information sanitaires et sociaux (LESSIS), alors que les solutions techniques sont légion, c’est bien la volonté politique qui semble manquer. Malgré les effets d’annonce, très prisés des gouvernants, pilote et gouvernance ne suivent pas et il existe un cloisonnement entre les différents ministères.

La table ronde avait lieu dans les locaux du conseil national de l’ordre des médecins (CNOM), peut-être est-ce ce qui explique qu’André Loth, chef de la mission pour l’informatisation du système de santé (MISS), ait expliqué que faire de la tarification ne sert pas à soigner les patients et qu’il fallait avoir plus d’ambition pour l’interopérabilité que d’être un simple outil de contrôle des dépenses de la Sécurité sociale. Si lui l’a compris, il reste persuadé qu’il reste à convaincre tous ceux qui n’étaient pas présents ou représentés à cette journée d’échanges de l’intérêt de l’interopérabilité.

Jacques Lucas, vice-président du CNOM, chargé des systèmes d’information en santé, a déploré que des décisions soient prises sans demander l’avis des principaux utilisateurs que sont les praticiens. Il a insisté sur l’indispensable confidentialité, évoquée à plusieurs reprises au cours des discussions.

Enfin, il faut noter l’intervention courageuse de Gérard Comyn, chef d’unité, TIC pour la santé, INFSO Commission Européenne. Il n’a pas hésité à remettre en cause la pertinence du masquage des données par le patient. À quoi bon dépenser des millions d’euros pour revenir à la situation où le patient cache des informations qui vont conduire aux accidents médicaux déjà évoqués ? Le but n’est-il pas d’améliorer la qualité des soins et de sauver des patients ?
Le développement de solutions comme le dossier médical de Google montre que les patients sont bien moins frileux que ne le laisseraient penser les associations censées les représenter. Il suffit pour s’en convaincre de surfer sur des réseaux sociaux en ligne pour voir que de plus en plus d’Européens n’hésitent pas à livrer leur intimité sur la toile.

Il semble que les acteurs du secteur aient enfin pris conscience de la fracture qu’il existe entre les médecins « de base » et les différents acronymes qui gèrent la mise en place des systèmes informatiques de santé. Les praticiens sont demandeurs et sont nombreux à s’être investis dans des réseaux développant chacun leur solution logicielle. Reste à leur donner rapidement, au niveau national, des moyens modernes de soigner et de prendre en charge les patients. Pour les différents intervenants, la nomination de Jean-Yves Robin au poste de directeur du GIP-DMP, ce 5 décembre, va dans ce sens. Il faut espérer qu’il sache créer une interopérabilité entre les membres des différents projets…