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Sang du cordon : vers une évolution de la législation ?

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Chercheurs au travailUne proposition de loi tendant à promouvoir et à organiser la collecte, la conservation et la recherche relative au cordon ombilical a été déposée au Sénat le 19 février 2010. Ce texte va dans le sens d’un rapport de la commission des affaires sociales de novembre 2008 qui reconnaissait le potentiel thérapeutique des cellules souches extraites du sang de cordon ombilical. Pour Marie-Thérèse Hermange, à l’origine de cette proposition, « la collecte du sang de cordon ombilical et des tissus placentaires est un enjeu de santé publique majeur et présente un intérêt stratégique pour permettre à la recherche française de se maintenir au plus haut niveau, dans un contexte de forte concurrence internationale. »

Les fantasmes du clonage et de l’eugénisme s’éloignant peu à peu, l’utilisation des cellules souches extraites du sang du cordon ombilical se diversifie petit à petit. Elles peuvent être utiles tant à but thérapeutique que pour la recherche médicale. En cas d’absence de donneur de moelle compatible, les cellules souches embryonnaires humaines recueillies dans un cordon ombilical peuvent, par exemple, servir à sauver un patient adulte atteint de leucémie. Il est aussi possible de les utiliser pour restaurer les défenses immunitaires d’un enfant qui a dû subir une chimiothérapie. D’autres études montrent qu’elles sont efficaces dans le traitement de certaines maladies artérielles périphériques et il existe des axes de recherche prometteurs concernant la médecine régénérative visant à réparer des tissus endommagés (os, cartilage, muscle cardiaque, système vasculaire ou peau des grands brûlés).

Pour dynamiser encore un peu plus la recherche française en ce domaine, mais aussi pour faciliter les applications thérapeutiques existantes, cette proposition de loi envisage de ne plus considérer le cordon ombilical comme un déchet de bloc opératoire, mais comme une ressource susceptible d’être utilisée pour traiter des patients, au même titre que la moelle osseuse. Ce texte « vise également à informer systématiquement les femmes enceintes ainsi qu’à développer la collecte et la conservation de sang de cordon dans le respect de la solidarité du don à travers les principes de gratuité et d’anonymat par des banques “publiques” garantissant la qualité et la sécurité des greffons. »
Comme souvent, en France, la crainte de voir des sociétés privées prendre le pas sur un système public est l’un des éléments à l’origine de cette proposition de loi.

Les parlementaires s’intéressent aussi aux « bébés médicament ». L’agence de la biomédecine pourrait ainsi être chargée, sous la responsabilité du ministre en charge de la santé, de veiller à l’organisation de banques publiques à visée intrafamiliales dans le cas de certaines pathologies définies par décret. Actuellement, la législation française n’organise pas la collecte du sang de cordon dans la fratrie d’un enfant malade susceptible d’être traité par greffe de cellules souches.

Si un texte de loi relatif à la santé ne peut plus voir le jour sans une référence à la solidarité nationale, celui-ci pourrait aller encore plus loin puisqu’il est proposé que l’Agence de la biomédecine soit chargée, sous la responsabilité du ministre en charge de la santé, du développement de l’action internationale de la France en matière de greffe de sang de cordon. Cette action comprendrait l’offre de soins en France à destination de personnes ne pouvant en bénéficier dans leur pays de résidence ainsi que l’accompagnement du développement des infrastructures et des pratiques de soin dans les pays le nécessitant.

Dans le même temps, la recherche semble rester le parent pauvre de cette proposition, malgré les voeux pieux exprimés dans l’exposé des motifs de ce texte. Alors que de réels espoirs existent quant à l’utilisation des cellules souches mésenchymateuses (CSM), trouvées en quantité importante dans le cordon et le placenta, et qui, greffées de façon allogénique, seraient tolérées immunologiquement, sans traitement immunosuppresseur, les chercheurs devront se contenter de la remise d’un rapport sur l’intérêt thérapeutique de la conservation du cordon ombilical et les modes de financement susceptibles de le permettre…

Reste à voir à quoi donnera naissance cette proposition de loi.