L’adoption du projet de loi HPST est proche : quelques mesures phares prises par la commission mixte paritaire

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Le rapport nº 463 de MM. Alain Milon, sénateur et Jean-Marie Rolland, député, concernant le projet de loi portant réforme de l’hôpital et relatif aux patients, à la santé et aux territoires (HPST), fait au nom de la commission mixte paritaire a été publié le 20 juin 2009. Droit-medical.com en a sélectionné quelques éléments de ce texte.


Cet article ne peut être exhaustif. Il revient sur les débats ayant eu lieu à l’occasion de la commission mixte paritaire, dernière étape avant l’adoption du projet de loi par les parlementaires.

Modernisation des établissements de santé

La promotion des génériques dans la politique du médicament des établissements de santé n’a pas d’intérêt, car l’administration de génériques n’apporte pas nécessairement d’économies à l’hôpital, en raison des tarifs négociés par les établissements de santé pour les médicaments princeps.Loi HPST et commission mixte paritaire

Les pôles de santé ont été ajoutés aux acteurs et professionnels de santé susceptibles d’assurer une mission de service public.

Un amendement tendant à supprimer la participation de la conférence médicale d’établissement (CME) à l’élaboration de tous les contrats qui ont une incidence sur la pratique médicale de l’établissement a été adopté. Jean-Marie Rolland, rapporteur pour l’Assemblée nationale, estime que cette disposition risquait de porter atteinte à la libre organisation interne des établissements de santé privés et de porter préjudice au secret en matière de droit des contrats.

La liberté d’installation des praticiens hospitaliers qui souhaitent aller exercer dans le privé se voit restreinte par l’adoption d’une clause de non-concurrence. « Dans un délai de deux ans suivant leur démission, il peut être interdit aux praticiens hospitaliers ayant exercé plus de cinq ans à titre permanent dans le même établissement d’ouvrir un cabinet privé ou d’exercer une activité rémunérée dans un établissement de santé privé à but lucratif, un laboratoire privé d’analyses de biologie médicale ou une officine de pharmacie où ils puissent rentrer en concurrence directe avec l’établissement public dont ils sont démissionnaires. »

Statuts et gouvernance des établissements de santé

Le président du conseil de surveillance d’un hôpital ne sera pas nécessairement un élu.

Le rôle du président de la CME est précisé : « il élabore, avec le directeur et en conformité avec le contrat pluriannuel d’objectifs et de moyens, le projet médical de l’établissement. Il coordonne la politique médicale de l’établissement. »

Un amendement ayant pour objet de permettre la reconnaissance de la qualification professionnelle des pharmaciens et des auxiliaires médicaux ressortissants d’un État non membre de la Communauté européenne ou non partie à l’accord sur l’Espace économique européen a été adopté.

Favoriser les coopérations entre les établissements de santé

Des activités peuvent être transférées entre des établissements de santé. « Lorsque de tels transferts ont lieu, l’établissement initialement titulaire de la compétence ou de l’autorisation peut transférer, après information de son comité technique d’établissement, les emplois afférents. L’établissement bénéficiaire devient employeur des agents qui assuraient jusqu’alors les activités considérées et assure la responsabilité afférente aux autorisations. »

Accès de tous à des soins de qualité

La date à laquelle le directeur général de l’Uncam (Union nationale des caisses d’assurance-maladie) devra fixer le montant de la contribution forfaitaire aux frais de gestion due par les professionnels de santé en cas de non-transmission des feuilles de soins est reportée au 1er janvier 2010 pour que les partenaires conventionnels aient le temps de négocier les dérogations à ce dispositif.

Sous la pression des députés, il a été décidé qu’« à défaut de conclusion avant le 15 octobre 2009 d’un avenant conventionnel, pris en application des articles L. 162-5 et L. 162-14-1 du code de la sécurité sociale, autorisant des médecins relevant de certaines spécialités, sous des conditions tenant notamment à leur formation, à leur expérience professionnelle, à la qualité de leur pratique et à l’information des patients sur leurs honoraires, à pratiquer de manière encadrée des dépassements d’honoraires pour une partie de leur activité, un arrêté des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale modifie à cet effet, pendant un délai de quatre mois, les dispositions de la convention nationale des médecins généralistes et spécialistes conclue le 12 janvier 2005.
Afin de faciliter l’accès à des soins à tarifs opposables, cet arrêté modifie également les tarifs et rémunérations des médecins spécialistes autorisés à pratiquer des dépassements, lorsque aucun dépassement n’est facturé, pour les rendre égaux aux tarifs applicables aux médecins qui ne sont pas autorisés à en pratiquer. »

L’idée d’un testing des médecins ou de l’inversion de la charge de la preuve pour des pratiques jugées discriminatoires a été jugée inadaptée. Elle n’est pas retenue. Le conseil de l’ordre des médecins et l’assurance-maladie devront continuer à être vigilants dans ce domaine et à tenir compte des plaintes des patients qui les saisissent à ce sujet.

C’est un décret qui doit fixer les modalités suivant lesquelles une information écrite sur le prix d’un dispositif médical fourni au patient et son certificat de fabrication seront remis aux patients. Tous les dispositifs médicaux sont bien concernés par ce texte.

Le développement professionnel continu (DPC) va remplacer la formation médicale continue (FMC) et l’évaluation des pratiques professionnelles (EPP).

L’encadrement des pratiques à visée esthétique est renforcé. La Haute Autorité de santé voit son pouvoir renforcé dans ce domaine et des règles de bonnes pratiques de sécurité pourront être fixées par arrêté du ministre chargé de la santé pour certains actes.

Pour les médecins, chirurgiens dentistes et les sages-femmes, un décret en Conseil d’État devra préciser les modalités suivant lesquelles les conseils départementaux ordinaux vérifieront qu’ils ne présentent pas d’insuffisance professionnelle, d’infirmité ou d’état pathologique rendant dangereux l’exercice de la profession, au moment de leur inscription au tableau de leur ordre. De telles dispositions n’existaient pas jusque-là. Il est intéressant de noter le contraste qui peut exister entre ces mesures et celles concernant l’inscription au tableau de l’ordre des infirmiers. Le projet de loi prévoit en effet que l’ordre national des infirmiers a un droit d’accès aux listes nominatives des infirmiers employés par les structures publiques et privées et peut en obtenir la communication et que ces listes nominatives sont notamment « utilisées pour procéder dans des conditions fixées par décret à l’inscription automatique des infirmiers au tableau tenu par l’ordre » . Il existe des dispositions similaires pour les masseurs-kinésithérapeutes.

Un amendement visant à ce que la durée de formation des ostéopathes soit au minimum de 3 520 heures, ce qui équivaut à quatre années, a été adopté. En France, elle n’est actuellement que de 2 660 heures, alors qu’elle est de 4 300 à 5 160 heures dans les pays européens. Pour les parlementaires, cette mesure implique que les ostéopathes seront mieux formés ce qui, au final, contribuera à améliorer la qualité des soins prodigués aux patients.

Différents amendements ont été adoptés concernant la sanction de l’exercice illégal et de l’usurpation du titre de préparateur en pharmacie hospitalière, à la faculté pour le directeur général de l’ARS de suspendre le droit d’exercice des orthophonistes et des orthoptistes, à la réforme par voie d’ordonnance du statut des laboratoires de biologie médicale, à l’habilitation du gouvernement à prendre par ordonnances les mesures nécessaires à la transposition de certaines règles communautaires en matière de qualifications professionnelles et de dispositifs médicaux, aux sanctions en cas de distribution de médicaments à usage humain collectés auprès du public et non utilisés, ou au bénéfice du temps partiel thérapeutique pour les internes en médecine. Le lecteur peut se reporter directement au projet de loi pour en connaître les détails.

Il est prévu que le contrat d’assurance en responsabilité civile professionnelle couvre maintenant les salariés du professionnel de santé.

Les diplômes des professionnels de santé québécois sont reconnus, sous certaines conditions, en France.

Le sujet de la télémédecine qui avait disparu à un moment du projet de loi y retrouve sa place. « La télémédecine est une forme de pratique médicale à distance utilisant les technologies de l’information et de la communication. Elle met en rapport, entre eux ou avec un patient, un ou plusieurs professionnels de santé, parmi lesquels figure nécessairement un professionnel médical et, le cas échéant, d’autres professionnels apportant leurs soins au patient.
Elle permet d’établir un diagnostic, d’assurer, pour un patient à risque, un suivi à visée préventive ou un suivi post-thérapeutique, de requérir un avis spécialisé, de préparer une décision thérapeutique, de prescrire des produits, de prescrire ou de réaliser des prestations ou des actes ou d’effectuer une surveillance de l’état des patients. »

L’analyse, faite par le Sénat, du parcours de soins a été adoptée par les députés.

Prévention et santé publique

Les sites informatiques dédiés à la santé ne seront pas obligés d’afficher des hyperliens vers les sites institutionnels français dédiés à la santé et aux médicaments, comme il en avait été question à l’Assemblée nationale.

Pour certains, il existe un paradoxe au sein du projet de loi concernant l’éducation thérapeutique, car si les programmes ou actions dans ce domaine ne peuvent être ni élaborés, ni mis en oeuvre par des entreprises se livrant à l’exploitation d’un médicament, des personnes responsables de la mise sur le marché d’un dispositif médical ou d’un dispositif médical de diagnostic in vitro ou des entreprises proposant des prestations en lien avec la santé, ces entreprises et ces personnes peuvent y prendre part,  notamment pour leur financement, dès lors que des professionnels de santé et des associations de patients élaborent et mettent en oeuvre ces programmes ou actions. La tendance actuelle est d’estimer que tous les médecins qui reçoivent une rémunération de l’industrie perdent tout sens critique et toute objectivité à l’égard de cette dernière. S’il se peut que cela soit, dans la très grande majorité des cas, vrai, cela n’est pas pour autant systématique.

Les sages-femmes acquièrent de nouvelles compétences, comme la réalisation de consultations de contraception et de suivi gynécologique de prévention, sous réserve que la sage-femme adresse la femme à un médecin en cas de situation pathologique. Elles vont aussi, à titre expérimental dans certaines régions, pouvoir pratiquer les interruptions volontaires de grossesse (IVG) médicamenteuses.

Les infirmiers sont autorisés à renouveler les prescriptions, datant de moins d’un an, de médicaments contraceptifs oraux.

La profession de psychothérapeute va se voir enfin réglementée. C’est la solution proposée par l’Assemblée nationale qui a été retenue.

Différents lobbies devraient se réjouir de savoir que la commission mixte paritaire a supprimé la disposition qui interdit de vendre des boissons alcooliques sur les aires de repos et aires de services en bordure des autoroutes et des routes à deux fois deux voies. Maigre consolation pour les accidentés de la route, c’est entre 18 heures et 8 heures qu’il sera interdit de vendre des boissons alcooliques à emporter dans les points de vente de carburant.

La prévention de l’obésité et du surpoids est timidement reconnue comme une priorité de la politique de santé publique. Tous les articles qui donnaient du sens à cette mesure, mais pouvaient être préjudiciables à l’industrie agroalimentaire ont été retirés.

Le niveau sonore des écrans publicitaires à la télévision, qui était jusque-là supérieur au reste des programmes, ne bénéficiera plus de ce privilège pour attirer l’attention du public.

Organisation territoriale du système de santé

La régulation de la démographie médicale est inscrite expressément parmi les missions des Agences régionales de santé (ARS).

La transition entre les Unions régionales des médecins exerçant à titre libéral (URML) et les unions régionales des professionnels de santé (URPS), qui semble poser problème, n’a pas été évoquée.

 

 

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