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Affaire Mediator : de plus en plus de médecins entendus par la police

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Justice et menottes« Depuis quelques jours certains médecins sont convoqués devant les services de police à Amiens, Montpellier, dans le Berry, le Cantal … pour interrogatoire au sujet de leurs prescriptions hors AMM de Benfluorex (Mediator®). » C’est ainsi que commence la lettre d’information de la cellule juridique de la Fédération des médecins de France (FMF) du 29 octobre 2011. Selon cette dernière, c’est le juge en charge du dossier mettant en cause le laboratoire Servier suite à l’affaire du Mediator qui, depuis son bureau de Nanterre, serait à l’origine de ces convocations.

Les praticiens entendus par la police n’ont, semble-t-il, pas été choisis au hasard. Ils auraient tous subi ces dernières années un contrôle du service médical des caisses d’assurance-maladie traitant leurs prescriptions de Benfluorex hors AMM (autorisation de mise sur le marché) au motif qu’ils n’avaient pas inscrit « NR » sur celles-ci. En effet, la mention « NR », abréviation de « Non remboursable », permet d’indiquer aux services de la Sécurité sociale que le produit délivré n’a pas à être pris en charge puisque prescrit pour un usage sortant du cadre de son autorisation de mise sur le marché et hors de tout accord préalable ou disposition particulière en prévoyant malgré tout le remboursement. Pouvant identifier assez facilement les patients souffrant de diabète grâce à leur prise en charge liée à l’affection de longue durée (ALD), il n’est pas très difficile pour la Sécurité sociale de suspecter la prescription hors AMM et non remboursable d’un antidiabétique, connu pour être utilisé comme coupe-faim, en étudiant les dossiers des assurés. Une fois les indus mis en évidence et après avoir entendu le praticien, l’assurance-maladie a la possibilité d’engager des poursuites à l’encontre du médecin au regard des griefs initialement notifiés si elle estime qu’il y a abus. C’est alors à la section de la chambre disciplinaire de première instance de l’Ordre, dite section des affaires sociales, qu’est confiée l’affaire (art. L 145-1 du code de la Sécurité sociale).
Selon la FMF, tous les médecins actuellement entendus par la police au sujet du Mediator dans les régions précédemment citées avaient fait l’objet ces dernières années d’une procédure devant la section des affaires sociales de leur conseil régional de l’Ordre suite à l’absence de mention « NR » sur des prescriptions de Benfluorex hors AMM. Ce serait par le biais d’une commission rogatoire lui permettant d’obtenir du conseil national de l’ordre des médecins (CNOM) la liste des médecins ainsi poursuivis que le juge de Nanterre a pu remonter jusqu’à eux.

D’après la Fédération des médecins de France, aucun des médecins entendus n’a, pour l’instant, été mis mis en examen. Rien ne dit qu’ils le seront, même s’il leur est conseillé d’être prudent. Ces médecins savaient-ils qu’ils mettaient en danger la vie des patients alors que les effets délétères du Benfluorex ne figuraient pas sur sa notice jusqu’à son retrait du marché en 2009 ? Ont-ils fait preuve de négligence ? Ont-ils vraiment omis d’informer les malades des risques à utiliser un médicament hors AMM ? Ou ont-ils plutôt été trompés par le discours du laboratoire et de sa force de vente ? On peut penser que c’est cette dernière hypothèse que le juge cherche à confirmer étant donné les circonstances. Faut-il s’en étonner ? Pas vraiment. La justice est censée travailler en toute indépendance et peut demander à entendre les personnes susceptibles de l’éclairer.

Pour la FMF, « l’avenir des prescriptions hors AMM en France en sera à jamais affecté. » Il est vrai que, jusqu’à cette affaire, les médecins n’avaient pas pris conscience à quel point leur responsabilité est engagée lorsqu’ils prescrivent une spécialité hors AMM. Si beaucoup le font bien souvent sans le savoir, de nombreux médicaments étant utilisés depuis des dizaines d’années, sans aucun souci, pour le traitement ou le diagnostic de pathologies pour lequel ils n’ont pas l’AMM, il est possible que certains abusent de ce type de prescription par complaisance ou par intérêt. Si les premiers n’ont pas à être condamnés, les seconds ne doivent pas s’étonner d’être inquiétés.

L’utilisation hors AMM est une pratique que l’on trouve choquante quand une affaire comme celle du Mediator survient, mais qui est pourtant couramment utilisée par les Français quand il est question d’automédication. C’est aussi une pratique qui fait évoluer l’AMM de certains produits lorsqu’à l’usage, l’expérience montre qu’ils peuvent soigner un problème de santé pour lequel ils n’avaient pas été initialement prévus.

Qui est responsable dans l’affaire du Mediator ? Le laboratoire ? Les autorités de santé et leurs tutelles ? Les médecins ? Les patients ? Si la réponse à cette question est évidente pour chacun, elle n’est pas prête de faire l’unanimité. Il faut juste espérer que la justice triomphera avant que ce scandale ne soit oublié…

Pharmacovigilance : l’IGAS enfonce le clou

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

PharmacovigilanceAprès un premier rapport accablant et sans concessions en janvier 2011 sur l’affaire du Mediator, l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) a poursuivi la mission que lui avait confiée Xavier Bertrand : comprendre les dysfonctionnements de la pharmacovigilance française révélés ces derniers mois et faire des propositions pour l’avenir. Le moins que l’on puisse dire, c’est que ce second rapport de l’IGAS, publié le 21 juin 2011, adopte un ton tout aussi critique à l’égard de l’industrie, des agences de santé gouvernementales et des politiques que le premier et que les propositions sont audacieuses. Y a-t-il de quoi se réjouir pour autant ? Pas nécessairement lorsque l’on connaît le sort réservé par les pouvoirs publics à bon nombre de rapports une fois que les effets d’annonce se sont estompés…

Concernant l’affaire du Mediator, l’IGAS persiste et signe. Quelques mois de recul n’y changent rien, l’IGAS réitère les conclusions de son rapport précédent : le benfluorex (Mediator) est bien un anorexigène (coupe-faim) ; le laboratoire Servier a, dès l’origine, « déployé une stratégie de positionnement du Mediator en décalage avec la réalité pharmacologique de ce médicament, utilisant tous les moyens à sa disposition pour faire prévaloir sa position » ; l’Agence chargée du médicament a été « incompréhensiblement tolérante à l’égard du Mediator et a fait preuve d’une grave défaillance dans les méthodes et l’organisation de son système de pharmacovigilance » ; les pouvoirs publics ont été trop lents à dérembourser ce médicament et globalement trop faibles dans leur pilotage de la « chaîne du médicament ». Pour l’IGAS, il ne faut pas se voiler la face : « Au-delà des anomalies particulières qu’elle a relevées, la mission tient à souligner que de graves défaillances globales des politiques et autorités publiques du médicament au général, du système français de pharmacovigilance au particulier […] existent et qu’elles résultent à la fois d’un affaiblissement du rôle de l’État depuis la fin des années 90, et d’un retard pris par rapport aux pays comparables. »

Les propositions pour faire évoluer ou pour réformer le système sont nombreuses. Simplifier les déclarations et apporter un retour concret aux déclarants sont au nombre de celles-ci. Déconnecter celui qui déclare, qu’il soit professionnel de santé ou patient, de l’industrie semble aussi important aux rapporteurs : « Au Royaume-Uni, un courrier d’accompagnement précise à la personne qui notifie qu’elle ne sera pas inquiétée. L’anonymat du notificateur et du patient doit être respecté ». Mais il faut aussi donner une véritable indépendance à l’Afssaps vis-à-vis de l’industrie en lui permettant de ne plus tenir compter de l’avis des fabricants quant à l’imputabilité de leurs produits dans la survenue d’un effet indésirable et en donnant les moyens à l’Agence de réaliser des méta-analyses indépendantes afin qu’elle « n’accorde plus aux analyses fournies par les laboratoires pharmaceutiques un poids prépondérant dans la prise des décisions ».
Développer des signaux d’alerte automatisés et repenser la doctrine du risque individuel, c’est aussi ce que propose l’Igas. « L’Afssaps pour l’heure conduit plutôt un raisonnement sur le risque individuel. Elle s’est comportée comme une agence des produits de santé qui va, à tous les temps, juger si un médicament mérite ou pas de demeurer sur le marché. C’est probablement cette logique qui aboutit à l’inversion de la charge de la preuve avec un doute qui profite souvent au médicament. Il lui faut désormais développer une culture d’analyse populationnelle du risque. » Procéder ainsi, c’est ternir compte du fait que « les données de sécurité d’emploi disponibles lors des autorisations de mise sur le marché [AMM, NDLR] sont par essence limitées du fait notamment du nombre de personnes concernées par les essais cliniques et de la sous-représentation de certains groupes de population (personnes âgées, enfants, etc.). Les effets indésirables observés lors des essais cliniques ne représentent donc pas réellement les réactions dans la population une fois l’AMM obtenue. Dès lors, il est indispensable de disposer de données de sécurité d’emploi post AMM. »
D’autres propositions sont faites par l’Igas comme, par exemple, de renforcer le niveau d’expertise interne de l’Afssaps en lui permettant de se constituer un noyau d’experts. Ce dernier comprendrait des spécialistes de pharmacovigilance, des cliniciens et des spécialistes de santé publique. Ces experts cesseraient tous liens d’intérêt avec l’industrie pharmaceutique dès qu’ils prennent leur fonction.

Pour l’Igas, il faut une politique du médicament globale, car il n’existe pas de véritable chaîne organisée du médicament actuellement. « L’Afssaps, chargée par la loi de l’évaluation et de la sécurité sanitaires, applique les indulgentes règles européennes d’autorisation de mise sur le marché et a progressivement relâché sa vigilance, faisant donc la part trop belle à l’offre industrielle, participant d’une politique d’encombrement thérapeutique, devenant au fil du temps une « agence enregistreuse » sur le modèle de l’agence européenne, l’EMA ; la Commission de la transparence, ne disposant ni des règles précises, ni des moyens de pratiquer une véritable évaluation médico-économique s’est trop longtemps contentée de reprendre les données issues de la commission d’AMM pour accorder de façon trop peu sélective les autorisations de remboursement ; le CEPS [Comité économique des produits de santé, NDLR] agit de façon isolée, sans contact réel et formalisé avec la Commission de la transparence, et fixe les prix des médicaments et sur des fondements discutables. »
Le constat est dur quant à la dérive qu’a connue le système de pharmacovigilance ces dernières années : « Dans le cas particulier du médicament, le projet d’éloigner la décision relative au médicament vers des agences autonomes, dotées de fortes compétences et que l’on concevait comme incorruptibles, afin de créer des lieux de résistance aux firmes plus forts que l’État, ce projet a échoué. La coupure entre le sanitaire et l’économique n’a pas diminué l’emprise des firmes, bien au contraire. La « dépolitisation » voulue de la décision n’a pas donné entière satisfaction, loin de là.
Le risque de « capture » du régulateur par les entreprises régulées s’est réalisé et, progressivement, une banalisation de l’Afssaps s’est opérée, aboutissant à ce constat dangereux : une agence de sécurité sanitaire non seulement n’inspirant plus la crainte, mais trop souvent entravée elle-même par la peur du recours juridique ; une agence fascinée et dominée par son « modèle », l’agence européenne. »

Il est aussi question de valeur thérapeutique ajoutée pour les nouveaux médicaments afin d’éviter un « encombrement thérapeutique ». « La mission réaffirme la logique d’un nombre suffisant de médicaments, logique s’opposant à l’idée d’une infinité de choix possible en matière de protection sociale, financièrement non accessible, paradoxalement inefficace et inéquitable, potentiellement dangereuse. »

L’Igas propose enfin une meilleure formation des jeunes médecins à ce qu’elle appelle « une médecine sobre », susceptible de privilégier autant les stratégies de santé non médicamenteuses que les médicamenteuses. Elle demande que la mascarade sur l’indépendance de la formation médicale continue vis-à-vis de l’industrie cesse et que de vraies réformes interviennent dans ce domaine.

Cerise sur le gâteau : « La mission estime qu’il n’y pas d’alternative à l’interdiction de la visite médicale comme les tentatives de régulation menées depuis quelques années l’ont montré. » Elle « propose l’affichage de toutes les contributions des firmes pharmaceutiques aux parties prenantes de la politique de santé, quelle qu’en soit la nature, sur le modèle du Sunshine Act américain » et insiste sur « le maintien d’une opposition absolue de notre pays dans le concert européen à toute amodiation des règles actuelles de non-promotion des médicaments vers le public ».

À quelques mois d’une élection présidentielle où la santé publique passe souvent bien après d’autres sujets et disparaît devant les intérêts des uns et des autres, on peut se demander qui pourrait avoir le courage de mener une telle réforme de la pharmacovigilance et de la politique du médicament sur la base de ces propositions qui n’ont rien de consensuel. Ces rapports de l’Igas ont le mérite de poser de vraies questions, mais y aura-t-il quelqu’un pour y répondre ?

Des assises du médicament en 2011

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Une gélule rouge et blanche parmi d'autresLa Mission Mediator et pharmacovigilance de l’Assemblée nationale a entendu Xavier Bertrand, ministre de la santé, le 15 février 2011. C’est ce dernier qui a souhaité être entendu rapidement dans cette affaire dans laquelle il a reconnu, au même titre que de nombreux anciens ministres de la santé, avoir sa part de responsabilité.

En préambule Xavier Bertrand a rappelé que la mission de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) n’avait pas pris fin avec la remise de son premier rapport, mais qu’elle se poursuivait afin de faire le point et des propositions concernant le fonctionnement de l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps). Il a aussi insisté sur le fait que deux missions parlementaires étaient actuellement au travail suite à l’affaire du Mediator et que le travail de la justice suivait son cours.

Pour le ministre de la santé, le système de pharmacovigilance est à reconstruire. Avant l’affaire du sang contaminé toutes les informations sur un problème grave de pharmaco ou de matériovigilance remontaient au ministre ; suite à ce drame et à la mise en place de l’Afssaps, c’est aux experts que l’on a pris soin de déléguer les décisions. Pour Xavier Bertrand, il faut que la refonte du système actuel aboutisse à nouveau à une responsabilité politique, au gouvernement, mais aussi peut-être aux parlementaires. La nomination du nouveau directeur général de l’Afssaps par le ministre, en concertation avec l’Assemblée nationale et le Sénat alors que ce n’est normalement pas prévu par la loi, dans les jours qui viennent va d’ailleurs dans ce sens. C’est le nom de Dominique Maraninchi, professeur de cancérologie à la faculté de médecine de Marseille et actuel président de l’Institut national du cancer (INCa), qui a été soumis aux parlementaires.

Comme il faut des décisions radicales et rapides, des assises du médicament seront organisées cette année, si possible avant la fin du premier semestre, mais après la remise des conclusions des deux missions parlementaires qui se penchent actuellement sur la question. La loi pourrait ainsi être modifiée avant la fin de l’année 2011.

En plus de celles relatives au fonctionnement de l’Afssaps, des questions doivent se poser sur la procédure d’autorisation de mise sur le marché (AMM) des médicaments et de leur éventuel retrait, sur la remontée des alertes et leurs suites. Ce dernier point est important, car dans le cas du Mediator dix-sept alertes sont remontées avant que l’une d’elles soit prise en compte. Ce système pourrait notamment s’accompagner d’une justification du non-suivi ou d’une déclassification d’une alerte.
La prévention des conflits d’intérêts doit aussi être un sujet sur lequel des décisions devront être prises afin d’aboutir à une transparence “totale”. La solution la plus simple permettant de régler cette question serait, selon le ministre, de transposer « directement et complètement » le Sunshine Act, c’est-à-dire la loi américaine en matière de liens d’intérêts qui s’applique dans le secteur de la santé. Dans ce pays, il est obligatoire de déclarer ces liens d’intérêts à partir du moment où ils sont supérieurs à dix dollars et surtout il existe des sanctions pour ceux qui ne déclarent pas ces choses, ce qui n’est pas le cas actuellement en France.
Xavier Bertrand a précisé qu’il avait lui-même, alors qu’il n’y est pas obligé, rempli une déclaration de liens d’intérêts et qu’il a demandé à son épouse de faire de même. Tous ses collaborateurs ont dû s’exécuter et il a eu à faire des choix en raison des réponses des uns et des autres. Le ministre estime que les personnels travaillant au sein des cabinets ministériels ne devraient avoir aucun lien d’intérêts avec l’industrie pendant qu’ils sont en fonction. Depuis 1995, lorsqu’ils quittent leur poste, la Commission de déontologie, ayant pour rôle de contrôler le départ des agents publics et de certains agents de droit privé envisageant d’exercer une activité dans le secteur privé et dans le secteur public concurrentiel, doit intervenir pour donner son avis et pourrait voir ses compétences renforcées. Reste à savoir si ces mesures seront suffisantes au regard de ce qui s’est passé en début d’année pour le directeur général de l’Agence européenne du médicament (European Medicines Agency ou EMA), comme l’a rappelé Gérard Bapt, président de la mission parlementaire.

 

Santé et directive Bolkestein : du nouveau

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Un palais de la RépubliqueC’est au cours du conseil des ministres du 15 septembre 2010 que le ministre de la santé, Roselyne Bachelot, a présenté un projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne (UE) en matière de santé, de travail et de communications électroniques. La présidence de la République a publié un communiqué à cette occasion précisant que « Ce projet de loi doit permettre d’achever la transposition de quatre directives de l’Union européenne d’importance majeure : la directive 2006/123/CE relative aux services dans le marché intérieur, la directive 2005/36/CE relative à la reconnaissance des qualifications professionnelles et les directives 2009/136/CE et 2009/140/CE dites du nouveau “paquet télécom”. Ces directives doivent être transposées dans les meilleurs délais. »
Le ministère de la santé et des sports a été chargé du pilotage et de la coordination de ce projet de loi, qui comporte 11 articles dont un grand nombre relève de ses compétences : sur les débits de boissons, les dispositifs médicaux, l’évaluation des établissements sociaux et médico-sociaux, les services funéraires et les médicaments traditionnels à base de plantes.

Les acteurs du monde de la santé ne vont pas manquer de suivre avec intérêt l’évolution de ce projet de loi. En effet, la directive 2006/123/CE relative aux services dans le marché intérieur est la fameuse directive Bolkestein, du nom du commissaire européen qui l’a présentée, visant à libéraliser un peu plus le marché intérieur des services au sein de l’UE. Même si les professions de santé sont exclues de son champ, certains dossiers pourraient avoir un impact sur leurs pratiques, comme la vente des dispositifs médicaux par Internet depuis la France, par exemple. Les entrepreneurs de spectacles, les architectes et les agences de mannequins sont aussi concernés, même si c’est bien le ministre de la santé qui est chargé de la coordination du dossier.

Comme le laissait entendre l’état de la transposition de la « directive services » réalisé par la commission des affaires européennes du Sénat en juin 2009, l’échéance relative à la transposition de la directive 2006/123/CE relative aux services dans le marché intérieur n’a pas été tenue. Tout aurait dû être réglé avant le 28 décembre 2009, mais comme quasiment tous les États de l’Union européenne, la France est en retard. Il faut, par exemple, se souvenir que le Parlement n’a pas adopté la disposition du projet de loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires qui prévoyait d’assouplir les règles relatives à la détention du capital des laboratoires de biologie médicale, alors que celle-ci avait été proposée dans le cadre de la transposition de la directive Bolkestein.

Une tâche qui s’annonce difficile car, comme le disait la commission des affaires européennes du Sénat, « le contexte n’est plus porteur », depuis que la crise économique a touché l’Europe.

 

Le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation de la législation au droit de l’Union européenne en matière de santé, de travail et de communications électroniques est disponible sur le site de l’Assemblée nationale.

Grippe A : moins de vaccins pour plus de médecins

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La grippe A à la Une du JTC’est rarement sur les chaînes de télévision du service public que les décisions politiques importantes sont annoncées ces derniers temps et Roselyne Bachelot n’a pas dérogé à la règle, le 4 janvier 2010, en profitant de l’audience du 20 heures de TF1 pour annoncer deux mesures importantes dans la lutte que mène le gouvernement français contre la grippe A(H1N1).

Après avoir lié l’Hexagone à l’industrie pharmaceutique en passant des contrats pour 94 millions de doses de vaccins, soit 10 % des commandes mondiales, pour un montant total de 869 millions d’euros, le ministre de la santé a fait savoir qu’elle avait donné instruction au directeur général de l’Établissement public de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS) de résilier unilatéralement, pour motif d’intérêt général, les commandes de vaccins contre la grippe A(H1N1) à hauteur de 50 millions de doses (32 millions doses pour la société GSK, 11 millions pour Sanofi-Pasteur et 7 millions pour Novartis). Il serait, en théorie, question d’une économie de 350 millions d’euros, mais, dans les faits, c’est oublier un peu vite que, même si les vaccins n’avaient pas été livrés et payés, l’État a bien signé des engagements. Le communiqué de presse du ministère de la santé à ce sujet montre bien que tout ne va pas être aussi simple et qu’il n’y a aucune raison pour que l’industrie fasse des cadeaux aux pouvoirs publics : « En application de cette instruction, l’EPRUS mène actuellement des discussions avec les industriels pour dénouer juridiquement les éléments résiliés des contrats passés sous le régime du code des marchés publics. » Dans le cadre de ces contrats administratifs, il est vraisemblable que le droit aux indemnités des cocontractants s’applique, rendant ainsi les économies bien moins substantielles que ce que l’on nous laisse entendre… Pour toujours plus de transparence et pour la sérénité des intervenants, le montant de ces indemnités ou des modalités des divers arrangements qui ne manqueront pas de survenir ne seront sans doute jamais portés à la connaissance des contribuables français.

Autre annonce d’importance : les cabinets de médecins libéraux qui sont volontaires pour vacciner des patients devraient pouvoir le faire fin janvier 2010. Il en avait été question à la mi novembre, mais une véritable cacophonie gouvernementale avait suivi cette annonce. Ce n’est qu’une fois le pic pandémique passé et au moment où la France revend ses excédents de vaccins à l’Iran et à d’autres pays que cette possibilité va être offerte aux généralistes. Les problèmes de conditionnement semblent ne plus être un obstacle au déploiement des produits.
Les centres de vaccination ne fermeront pas pour autant et les mesures visant à vacciner dans les entreprises et dans les grandes administrations continueront à s’appliquer, car ces offres parallèles évitent à l’assurance-maladie d’avoir à rembourser une consultation.
Restera-t-il encore des Français motivés ? Y aura-t-il encore des généralistes volontaires, si tant est qu’il y en ait eu à l’exception de quelques leaders syndicaux ? Tout cela est-il encore utile ? La campagne de vaccination étant prévue pour durer jusqu’en septembre 2010, d’après Roselyne Bachelot, il y a tout lieu de le croire, surtout si, dans certaines maternités, des mesures, comme celles consistant à interdire l’accès à leur bébé à des pères non vaccinés, perdurent…

 

Vaccin contre la grippe A(H1N1) : la responsabilité des laboratoires atténuée en cas d’effets indésirables

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Responsabilité et vaccin contre la grippe A(H1N1)Il n’y a pas qu’aux États-Unis que les fabricants de vaccins contre la grippe A(H1N1) ont obtenu que leur responsabilité ne soit pas engagée en cas d’effets indésirables graves ou non durant la campagne d’immunisation. Le gouvernement français a pris les mêmes engagements comme le révèlent les contrats passés entre les industriels et l’État rendus publics après que le journal Le Point ait saisi la commission d’accès aux documents administratifs pour réussir à les obtenir. Les autorités de santé semblent ainsi montrer qu’elles ont une confiance dans ces produits qui va au-delà même de celle des laboratoires eux-mêmes…

Dans plusieurs de ces contrats figure une clause de responsabilité qui remet en question la responsabilité des laboratoires signataires du fait de produits défectueux. C’est la solidarité nationale, donc les contribuables, qui devront prendre en charge l’indemnisation des éventuelles victimes d’effets indésirables. La situation de pandémie et l’urgence estimée par les pouvoirs publics de la vaccination seraient à l’origine de cette clause pour chacun des vaccins achetés. Dans le document reproduit ci-après, le “titulaire” correspond au laboratoire ayant signé le contrat :

« […] le titulaire s’engage à demander l’autorisation de mise sur le marché et à accomplir toute démarche de droit en vue de l’obtenir. Une fois l’autorisation de mise sur le marché obtenue, le titulaire s’acquittera de toutes les obligations du titulaire d’une telle autorisation telles que prévues dans le Code de la santé publique, y compris les obligations de pharmacovigilance.
L’administration déclare que l’utilisation des vaccins objet du présent marché ne se fera qu’en cas de situation épidémiologique le nécessitant. Dans ces conditions, les opérations de vaccination de la population seront décidées par la seule administration et seront placées sous la seule responsabilité de l’État.
Dans ce cadre, le titulaire est, en principe, responsable du fait des produits défectueux.
Toutefois, à titre dérogatoire et considérant les circonstances exceptionnelles qui caractérisent l’objet du présent marché, l’État s’engage à garantir le titulaire contre les conséquences de toute réclamation ou action judiciaire qui pourraient être élevées à l’encontre de ce dernier dans le cadre des opérations de vaccination sauf en cas de faute du titulaire ou sauf en cas de livraison d’un produit non conforme aux spécifications décrites dans l’autorisation de mise sur le marché ou, à défaut d’autorisation de mise sur le marché, aux caractéristiques du produit telles qu’elles figurent dans le dossier d’autorisation de mise sur le marché dans l’état où il se trouvait au moment de chaque livraison. »

Pourquoi une telle clause pour des produits que les fabricants disent issus des procédés de fabrication des vaccins contre la grippe saisonnière, des produits présentés comme sans réel danger ? Pourquoi l’État donne-t-il sa garantie aux laboratoires s’ils étaient poursuivis devant la justice pour des vaccins utilisés de façon massive pour une grippe dont le taux de mortalité est inférieur à celui de la grippe saisonnière ? Il y a là des questions que ne manquent pas de se poser de nombreux juristes et professionnels de santé…

 

L’industrie pharmaceutique paye les médecins pour prescrire plus de médicaments

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Les médecins russes achetés par l'industrie pharmaceutique ?Plusieurs milliers de médecins sont, d’une façon ou d’une autre, rémunérés par l’industrie pharmaceutique et certains ont même des formulaires imprimés prêts pour les laboratoires. « Ces revenus devraient être interdits par la loi et des règles de déontologie plus strictes mises en place ». « Il doit être mis fin à cette pratique déplorable ». C’est ce qu’a déclaré le premier ministre Vladimir Poutine à l’occasion d’une réunion sur le développement de l’industrie pharmaceutique, car il est question des professionnels russes et non des praticiens français, bien entendu.

L’ancien président russe va plus loin puisqu’il estime qu’un spécialiste, qui donne son avis en tant qu’expert ou qui participe aux commissions d’évaluation pour un nouveau médicament, ne doit pas être rétribué par les laboratoires. Actuellement, selon lui, les membres de ces conseils d’experts ne se soucient pas de la qualité des produits pharmaceutiques, mais soutiennent simplement le produit de la société qui leur verse une indemnisation.

Ces affirmations ne sont pas gratuites. La vente de médicaments aux particuliers est un marché qui devrait connaître une très forte croissance dans les prochaines années en Russie et Vladimir Poutine ne veut pas que ces dépenses impactent de façon importante le budget de l’État. Pour ne plus avoir à importer 90 % des médicaments utilisés pour répondre aux programmes fédéraux d’achat de médicaments, le premier ministre souhaite que ces derniers et surtout leurs génériques soient produits sur place. Il est prêt à investir 700 millions de roubles pour subventionner des prêts pour le développement technologique et l’amélioration des entreprises pharmaceutiques en Russie. Les usines russes ont besoin d’évoluer, car la plupart des médicaments fabriqués dans le pays ne répondent pas aux normes internationales. Pour voir leurs parts de marché augmenter, les laboratoires pharmaceutiques russes doivent améliorer leurs standards de qualité en s’alignant sur ceux des autres pays développés.

Enfin, la transparence et la concurrence doivent permettre au prix des médicaments de baisser. Dans la région de Chelyabinsk, il a suffi que le service “antimonopole” s’intéresse à la vente d’un important lot de médicaments pour que son prix soit divisé par cent. Une clarification des procédures sur le marché des produits pharmaceutiques est donc indispensable.

Dans un pays où l’alcool fait des ravages, où les discours politiques servent plus souvent à se donner une image qu’à promouvoir de réels changements et où la corruption est connue pour son ampleur, il n’est pas sûr que les paroles de Vladimir Poutine fassent réellement bouger les choses. Il est avant tout question d’exercer des pressions pour redistribuer les richesses du marché des médicaments vers des intérêts nationaux. Est-ce pour autant que de telles mesures profiteront à la population ? Rien n’est certain.
Vladimir Poutine semble vouloir s’inspirer de la politique menée par la France en pointant du doigt les médecins. Mais dans son cas, reprocher aux praticiens russes d’être corrompus, surtout si c’est vrai, aide peut-être à détourner l’attention de l’opinion de compromissions bien plus personnelles…

 

Pour ceux qui lisent le Russe, la source de cet article sur le site de RosBusinessConsulting.

Nouvelle taxe sur les sodas à New York

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

De nouvelles taxes pour remplacer les budgets santé perdusD’après le gouverneur de l’État de New York, David Paterson, c’est parce que Wall Street trinque que les sodas riches en sucre vont être taxés. Le budget de cet État repose en grande partie sur des taxes prélevées sur les transactions financières de Wall Street. Après la vertigineuse chute des marchés, ce manque à gagner sur les taxes représente plus de 12 milliards de dollars. Le gouverneur a donc proposé des solutions pour combler le moins-perçu : 88 nouvelles redevances et une foule d’autres taxes.

La nouvelle taxe de 18 % concerne tous les sodas qui ne sont pas light (allégés en sucre). Elle pourrait rapporter plus de 400 millions de dollars à elle seule. Pourquoi avoir choisi les sodas pour diminuer le déficit ? En luttant contre l’obésité qu’entraîne l’usage abusif de ces boissons, c’est l’argument de santé publique qui est mis en avant. Le diabète est aussi pointé du doigt. Cette maladie tue plus de 200 000 Américains chaque année.
La bière, le vin, les cigares et, de façon plus surprenante, les massages vont également faire l’objet de nouvelles taxes. Le téléchargement de musique va, lui aussi, être touché (iPod tax), si les propositions du gouverneur sont votées.
Dans le même temps, David Paterson annonce des coupes sombres dans les aides versées aux hôpitaux et aux cliniques, à hauteur de 3,5 milliards de dollars.

Un seul secteur sort gagnant : celui du jeu. Les machines à sous vont pouvoir être plus nombreuses et les jeux du type loterie rester ouverts plus tard. Les taxes prélevées sur ces activités ont fait oublier au gouverneur l’addiction qu’elles peuvent engendrer, fragilisant d’autant le réseau social.

Une chose est sûre, les services de l’État de New York et son budget vont être dégraissés.