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Le médecin blogueur doit faire attention à ce qu’il écrit

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Comment se faire remarquer...Nul n’ignore qu’un laboratoire pharmaceutique qui veut désormais prendre en charge le déplacement d’un praticien afin de lui permettre de participer à un congrès doit au préalable demander son accord au conseil de l’ordre des médecins, conformément à l’article L 4113-6 du code de la santé publique. En effet, si le premier alinéa de ce texte précise qu’il est interdit aux entreprises, assurant des prestations, produisant ou commercialisant des produits pris en charge par les régimes obligatoires de sécurité sociale, de proposer ou de procurer aux membres des professions médicales, des avantages en nature ou en espèces, sous quelque forme que ce soit, d’une façon directe ou indirecte, le troisième alinéa vient modérer ces restrictions. L’hospitalité offerte, de manière directe ou indirecte, lors de manifestations de promotion ou lors de manifestations à caractère exclusivement professionnel et scientifique lorsqu’elle est prévue par convention passée entre l’entreprise et le professionnel de santé et soumise pour avis au conseil départemental de l’ordre compétent avant sa mise en application, et que cette hospitalité est d’un niveau raisonnable et limitée à l’objectif professionnel et scientifique principal de la manifestation et n’est pas étendue à des personnes autres que les professionnels directement concernés, n’est pas interdite.

En août 2010, c’est pour se conformer à ce texte que le directeur d’une entreprise pharmaceutique écrit à l’ordre des médecins. Elle est désireuse de prendre en charge les frais de déplacement de plusieurs médecins afin qu’ils participent à un congrès, organisé par des médecins indépendants en Asie, où les produits de la société, comme ceux d’autres entreprises, vont faire l’objet de plusieurs communications scientifiques. C’est pour cette raison qu’il transmet une demande d’avis relative à cette invitation au conseil national de l’ordre des médecins (CNOM). La plupart du temps, ce type de demandes d’avis n’est qu’une simple formalité, à condition que les frais engagés soient raisonnables, et rien ne laissait donc présager une réponse défavorable du CNOM.
En recevant cette demande, le représentant du conseil de l’ordre chargé de rendre l’avis constate que l’entreprise a oublié de joindre au dossier l’une des pièces habituellement demandées : un formulaire d’inscription au congrès. Plutôt que de le demander au laboratoire, il fait une recherche sur Internet dans l’espoir d’y trouver le formulaire en question, les congrès de ce type mettant habituellement ce type de documents en ligne. Et là, volontairement ou non, le membre de l’Ordre est amené à surfer sur le blog d’un médecin qui raconte avoir participé à l’édition 2009 de ce congrès. Le blog en question est, comme souvent, anonyme, mais son auteur ne cache pas qu’il est médecin. Rien à voir avec un blog professionnel : le médecin y parle de choses et d’autres, de sa famille, de ses vacances, de ses goûts… Même si plusieurs de ses billets évoquent les congrès où il se rend, c’est le plus souvent pour relater ce qu’il a fait avant ou après les séances de travail et quels amis il a eu l’occasion de revoir à cette occasion. Créé avec un outil grand public et vraisemblablement destiné à ses amis, ce blog n’a rien d’officiel et semble plus relevé de la sphère privée, même s’il est accessible à tous. C’est pourtant en se basant sur la description de l’organisation des journées de travail à ce congrès trouvée sur ce blog que le CNOM va émettre un avis défavorable à la prise en charge par le laboratoire des frais de déplacement des médecins. Les motifs invoqués sont que le temps consacré à des activités non professionnelles est décrit comme étant supérieur à celui réservé aux séances de travail et que le récit du dîner de gala de ce congrès fait qu’il ne peut être considéré « ni raisonnable, ni accessoire au regard de l’article L 4113-6 du code de la santé publique ».

Que l’organisation du congrès ait pu changer, que ce blog anonyme ne soit fondé sur rien de sérieux, qu’il n’ait d’autre but que de faire rêver ses amis et sa famille en enjolivant un peu la réalité, qu’une participation financière ait pu être demandée au médecin pour assister au dîner de gala : peu importe…

Il n’est pas question de reprocher à l’ordre des médecins de vouloir préserver l’indépendance des praticiens vis-à-vis de l’industrie pharmaceutique, surtout s’il met autant de zèle à s’assurer de l’indépendance des “experts” amenés à intervenir auprès des autorités de santé ou des leaders d’opinion s’exprimant dans les médias sur tel ou tel produit. C’est la façon de procéder qui pose question.
À un moment où le CNOM réfléchit à la qualité des sites santé sur Internet, mettant en garde les patients sur ce qui peut être mis en ligne et sur l’influence de ce nouvel outil sur les relations médecin-patient, n’est-il pas surprenant qu’un simple blog anonyme suffise à rendre un avis défavorable ? Alors que la possibilité d’utiliser ou non les informations trouvées sur des réseaux sociaux comme Facebook dans la sphère professionnelle fait débat, est-il raisonnable de s’appuyer sur un blog amateur pour prendre une décision de nature ordinale ?

Si Internet est un formidable outil d’information, il faut néanmoins comprendre que l’usage des données mises en ligne n’est pas toujours celui auquel on peut s’attendre. Faire état de son titre de médecin ou relater des faits relatifs à son activité professionnelle sur la Toîle n’a rien d’anodin, mieux vaut en être conscient…

Le montant de la visite médicale de santé au travail peut-il être déduit du salaire d’un employé ?

Écrit par Marie-Thérèse Giorgio le . Dans la rubrique La forme

Beaucoup de services de santé au travail facturent les visites médicales qui ne sont pas annulées au moins 48 h à l’avance. Certaines entreprises déduisent parfois cette pénalité du salaire de l’employé qui a oublié de se présenter à la visite médicale programmée : cette pratique est-elle légale ?

Sang du cordon : vers une évolution de la législation ?

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Chercheurs au travailUne proposition de loi tendant à promouvoir et à organiser la collecte, la conservation et la recherche relative au cordon ombilical a été déposée au Sénat le 19 février 2010. Ce texte va dans le sens d’un rapport de la commission des affaires sociales de novembre 2008 qui reconnaissait le potentiel thérapeutique des cellules souches extraites du sang de cordon ombilical. Pour Marie-Thérèse Hermange, à l’origine de cette proposition, « la collecte du sang de cordon ombilical et des tissus placentaires est un enjeu de santé publique majeur et présente un intérêt stratégique pour permettre à la recherche française de se maintenir au plus haut niveau, dans un contexte de forte concurrence internationale. »

Les fantasmes du clonage et de l’eugénisme s’éloignant peu à peu, l’utilisation des cellules souches extraites du sang du cordon ombilical se diversifie petit à petit. Elles peuvent être utiles tant à but thérapeutique que pour la recherche médicale. En cas d’absence de donneur de moelle compatible, les cellules souches embryonnaires humaines recueillies dans un cordon ombilical peuvent, par exemple, servir à sauver un patient adulte atteint de leucémie. Il est aussi possible de les utiliser pour restaurer les défenses immunitaires d’un enfant qui a dû subir une chimiothérapie. D’autres études montrent qu’elles sont efficaces dans le traitement de certaines maladies artérielles périphériques et il existe des axes de recherche prometteurs concernant la médecine régénérative visant à réparer des tissus endommagés (os, cartilage, muscle cardiaque, système vasculaire ou peau des grands brûlés).

Pour dynamiser encore un peu plus la recherche française en ce domaine, mais aussi pour faciliter les applications thérapeutiques existantes, cette proposition de loi envisage de ne plus considérer le cordon ombilical comme un déchet de bloc opératoire, mais comme une ressource susceptible d’être utilisée pour traiter des patients, au même titre que la moelle osseuse. Ce texte « vise également à informer systématiquement les femmes enceintes ainsi qu’à développer la collecte et la conservation de sang de cordon dans le respect de la solidarité du don à travers les principes de gratuité et d’anonymat par des banques “publiques” garantissant la qualité et la sécurité des greffons. »
Comme souvent, en France, la crainte de voir des sociétés privées prendre le pas sur un système public est l’un des éléments à l’origine de cette proposition de loi.

Les parlementaires s’intéressent aussi aux « bébés médicament ». L’agence de la biomédecine pourrait ainsi être chargée, sous la responsabilité du ministre en charge de la santé, de veiller à l’organisation de banques publiques à visée intrafamiliales dans le cas de certaines pathologies définies par décret. Actuellement, la législation française n’organise pas la collecte du sang de cordon dans la fratrie d’un enfant malade susceptible d’être traité par greffe de cellules souches.

Si un texte de loi relatif à la santé ne peut plus voir le jour sans une référence à la solidarité nationale, celui-ci pourrait aller encore plus loin puisqu’il est proposé que l’Agence de la biomédecine soit chargée, sous la responsabilité du ministre en charge de la santé, du développement de l’action internationale de la France en matière de greffe de sang de cordon. Cette action comprendrait l’offre de soins en France à destination de personnes ne pouvant en bénéficier dans leur pays de résidence ainsi que l’accompagnement du développement des infrastructures et des pratiques de soin dans les pays le nécessitant.

Dans le même temps, la recherche semble rester le parent pauvre de cette proposition, malgré les voeux pieux exprimés dans l’exposé des motifs de ce texte. Alors que de réels espoirs existent quant à l’utilisation des cellules souches mésenchymateuses (CSM), trouvées en quantité importante dans le cordon et le placenta, et qui, greffées de façon allogénique, seraient tolérées immunologiquement, sans traitement immunosuppresseur, les chercheurs devront se contenter de la remise d’un rapport sur l’intérêt thérapeutique de la conservation du cordon ombilical et les modes de financement susceptibles de le permettre…

Reste à voir à quoi donnera naissance cette proposition de loi.

Guide de l’expertise médicale amiable

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Faire preuve d'objectivitéIl n’est pas compliqué de comprendre que le Médiateur de la République, Jean-Paul Delevoye, ancien ministre de la Fonction publique du gouvernement Raffarin, s’intéresse de près à la réforme de l’expertise médicale lorsqu’on lit l’éditorial qu’il a signé dans le Guide de l’expertise médicale amiable qui vient d’être publié par ses services, en association avec l’Association des paralysés de France (APF). Pour l’ancien sénateur et conseiller régional du Nord-Pas-de-Calais, « L’expertise est à la fois une étape clé et une référence objective dans ce long cheminement vers l’acceptation du handicap. Mal menée, tributaire de la psychologie et de la déontologie du professionnel, elle peut devenir un moment difficile à vivre. L’expert ne questionne pas, il conteste voire suspecte, l’expertise n’évalue plus, elle minore et rapine, dévoyée de son but premier vers un banal marchandage. » Pour lui, l’expert médical « se situe à l’extrémité de cette échelle qui marque une distance entre ceux qui savent, maîtrisent, connaissent et ceux qui ne savent pas, subissent et finissent par douter » et semble pouvoir être à l’origine « de petites humiliations répétées » à l’égard du plaignant.

Il ne faut, bien entendu, pas confondre expertise médicale amiable et expertise médicale judiciaire, même si le Médiateur de la République tend à penser que ces deux formes d’expertise sont intimement liées. Lorsqu’il est question d’accord amiable, les assureurs sont en première ligne et l’expert médical, mandaté et donc payé par la compagnie d’assurances de la personne considérée comme responsable, pourrait en perdre son objectivité. Difficile d’en douter en lisant l’éditorial de Jean-Marie Barbier, président de l’APF, association qui « qui reçoit — trop — régulièrement des témoignages de personnes qui ont vu leurs droits bafoués. En effet, nombre de victimes sont démunies face à la complexité du système d’indemnisation. Confrontées aux professionnels du droit à indemnisation que sont les assureurs, souvent mises sous pression par ces derniers à peine le dommage arrivé, dans un état de grande vulnérabilité, elles ne sont pas en mesure de faire valoir leurs droits. »

Un point ne semble pas avoir été envisagé : que la victime ne soit pas d’une totale bonne foi. Est-ce manquer d’objectivité d’envisager une telle situation ? Si l’on fait un parallèle avec les affaires traitées par les tribunaux, il arrive que les plaignants engagent des procédures abusives. Pourtant en serait-il autrement quand il s’agit d’assurances ? L’expert médical, sans pour autant perdre son indépendance, ne doit-il pas chercher à comprendre et à établir un rapport sincère ? Il n’est pas question ici de prendre la défense des assureurs, tant il peut arriver que leurs façons d’agir soient discutables, mais il n’est pas pour autant souhaitable de faire preuve de manichéisme.

Il n’en reste pas moins que le Guide de l’expertise médicale amiable est un précieux outil d’information pour tous ceux qui vont être confrontés à une procédure amiable. Faire valoir les prérogatives des victimes et les informer sur l’étendue de leur droit à réparation est une noble cause à laquelle il difficile de ne pas s’associer.

Ici le 112… Vous avez demandé les urgences, ne quittez pas…

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

En cas d'urgence, appeler le 112Le numéro d’urgence unique européen 112 a été introduit pour permettre aux citoyens d’appeler les services d’urgence (comme la police, l’aide médicale urgente et les pompiers) en utilisant un seul et même numéro de n’importe où dans l’Union européenne (UE). Depuis la fin 2008, tous les États membres de l’UE ont fait en sorte que n’importe qui puisse appeler les services d’urgence à partir des téléphones fixes et mobiles en composant le 112. Cela simplifie la vie de ceux qui voyagent, qui travaillent ou qui étudient dans un autre pays de l’Union.

Avant sa généralisation, ce numéro était déjà utilisé dans certains pays européens comme, en Allemagne, pour appeler les pompiers ou, en Italie, la police, mais pour de nombreux citoyens des 27, il s’agit d’une nouveauté, dont on ne fait pas assez la promotion pour 62 % des Européens. Il faut dire qu’en ce domaine il n’est pas question de bouleverser de vieux réflexes et plusieurs pays ont, tout de même, décidé de conserver leurs anciens numéros d’accès, comme le 15 pour appeler le Samu (service d’aide médicale urgente) ou le 18, pour les pompiers en France, où seuls 13 % des appels d’urgence concernent le 112 pour le moment.

La Commission européenne vient de publier une enquête sur le 112. Le dernier chapitre de ce travail, réalisé auprès de plus de 40 000 Européens pris au hasard du 7 au 10 janvier 2010, est particulièrement intéressant en ce qu’il étudie les difficultés rencontrées pour réussir à joindre ce numéro d’urgence ou à le garder en ligne ; les obstacles linguistiques quand il s’agissait d’un appel passé par un citoyen dans un pays autre que le sien ; la facilité pour l’appelant à dire d’où il appelle et le suivi donné aux différents contacts.
Ces données sont importantes, car 27 % des Européens reconnaissent avoir eu à appeler un numéro d’urgence ces cinq dernières années.
Seul 0,5 % des personnes a été confronté à un problème lié à l’opérateur au moment d’appeler. Par contre, pour 3 % le numéro était occupé ou personne n’a décroché (plus souvent depuis un mobile ou un téléphone public).
Seuls 10 % des appelants ont eu des difficultés à se faire comprendre dans un pays dans lequel la langue était différente de la leur, même si 69 % des appels se sont faits dans la langue du pays visité.
Plus de 85 % des personnes interrogées ont donné suffisamment de renseignements pour que l’appel soit localisé correctement, ce qui a permis à une équipe d’arriver sur les lieux de l’appel dans plus de 80 % des cas. 3 % des appelants n’ont jamais vu arriver les secours qui leur ont pourtant été envoyés.

Vous avez demandé les urgences, ne quittez pas…

Revue belge du dommage corporel et de médecine légale — numéro 2008/1

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Revue belge dcml

Sommaire du numéro du 1er trimestre 2008

Revue belge du dommage corporel et de médecine légaleAnthemis

 

 

Le dommage moral

Noël Simar et Séverine Simar

La notion de « dommage moral » ne fait l’objet d’aucune définition légale, et les différentes définitions doctrinales et jurisprudentielles données, de même que les barèmes mis en place pour en calculer le coût, ne sont pas (entièrement) satisfaisants, ce qui laisse penser qu’une clarification de la notion de « dommage moral » s’impose.

Mots clés : Dommage moral Définition Loi Jurisprudence Barème

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Le préjudice sexuel

Pierre Lucas et Jean-Luc Fagnart

C’est à partir de la littérature médico-juridique, de la jurisprudence, des barèmes, passés en revue par les auteurs, que ces derniers tentent de donner une définition du préjudice sexuel. La seconde partie de l’étude est, quant à elle, consacrée à la constatation et à l’évaluation médicale du préjudice sexuel. Les auteurs font le constat que si le préjudice sexuel est médicalement constatable ou explicable, il n’est toutefois point quantifiable. Enfin, dans la dernière partie, est étudiée l’indemnisation du préjudice sexuel.

Mots clés : Préjudice sexuel Définition Littérature Jurisprudence Barèmes Constatation Évaluation médicale Indemnisation

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Secteur optionnel pour les médecins conventionnés

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Un protocole d’accord tripartite entre les syndicats médicaux représentatifs pour la convention médicale, l’union nationale des caisses d’assurance-maladie (UNCAM) et l’union nationale des organismes complémentaires d’assurance-maladie (UNOCAM) a été signé récemment après une longue période de négociations. Il porte sur la création d’un nouveau secteur conventionnel appelé « secteur optionnel ».

Indépendance de la formation médicale ?

Écrit par Charles Duchemin le . Dans la rubrique Humeur

Indépendance des médecins vis-à-vis de l'industrie pharmaceutiqueIl est fréquent d’entendre dire au sein des administrations que les médecins sont influencés, quand ce n’est pas “achetés”, par l’industrie pharmaceutique. Cela expliquerait une partie du déficit de la Sécurité sociale et aurait justifié la charte de la visite médicale. Les textes relatifs à feu la formation médicale continue (FMC) avaient été votés au parlement pour qu’elle soit en apparence indépendante et la loi anticadeau interdit d’offrir au médecin un stylo vantant un produit, même accompagné d’une notice détaillée… Hypocrisie que tout cet arsenal législatif ? On pourrait le croire en fréquentant des congrès validant pour la FMC ou plutôt pour le développement professionnel continu (DPC), encore plus indépendant, où les allées menant aux salles d’enseignement sont bordées de stands chamarrés, aux tables chargées de gadgets clignotants et de blocs de post-it offerts par l’industrie…

La crise semble avoir changé cette volonté d’indépendance. Pour s’en convaincre, il suffit d’avoir le courrier électronique non désiré du centre de lobbying (!), d’étude et de formation (CLEF), « centre de formation médicale » annonçant un colloque intitulé « Pandémie grippale — Adaptation du plan aux réalités pandémiques » sous le haut patronage et honoré de la présence du ministre de la santé Roselyne Bachelot-Narquin. Pas de mentions légales sur le site du CLEF, mais une liste impressionnante de prestigieux partenaires de l’industrie pharmaceutique, dont certains sont très impliqués dans les traitements ou les vaccins antigrippaux. Les orateurs, quant à eux, semblent être pour certains des habitués des formations proposées par le centre de lobbying, si l’on en croit la liste de ces dernières pour 2009. Tout cela est tellement étonnant, que l’on pourrait croire à un canular…

Peut-être est-il important de justifier les stocks de Tamiflu constitués et les commandes de vaccins qui devraient permettre à une partie de l’industrie pharmaceutique de ne plus se séparer de membres de sa force de vente risquant de venir grossir le nombre de chômeurs ? Même si la France n’a pas tiré pleinement parti des bénéfices liés à la pandémie, il est raisonnable de penser que ces bénéfices profiteront à la formation médicale des praticiens du pays des Lumières. Le lobbying est là pour nous en convaincre…

Consentement et information du patient : le médecin et l’État responsables en Europe

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Jurisprudences

Responsabilité du médecin et devoir d'information en EuropeLa Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a rendu un arrêt le 2 juin 2009 riche en enseignements. Une citoyenne roumaine, avocate, « alléguait en particulier, sous l’angle des articles 6 et 8 de la Convention, la durée excessive et l’inefficacité de la procédure tendant à engager la responsabilité du médecin qui lui avait fait subir une intervention de chirurgie plastique aux paupières sans demander valablement son consentement et sans l’informer sur les possibles conséquences »1.

En 1996, après avoir subi diverses interventions réalisées par un chirurgien plasticien dans un hôpital municipal en Roumanie, dont une au niveau des paupières appelée blépharoplastie, la patiente se rend compte qu’elle ne peut plus fermer les paupières correctement. Ce problème, appelé lagophtalmie, pouvant mettre en danger l’intégrité oculaire, de nouvelles interventions des paupières sont pratiquées par le même chirurgien. Malheureusement, la patiente finit par présenter une paralysie faciale et d’autres séquelles nécessitant un traitement médical. Après plusieurs expertises aux conclusions différentes, il est admis que des erreurs chirurgicales ont été commises, ce qui aboutit à ce que la patiente porte plainte au pénal avec constitution de partie civile contre le médecin qui l’a opérée. Elle allègue « avoir souffert d’une atteinte à l’intégrité corporelle » dont elle garde « une infirmité permanente. »
En première instance, fin 2000, le médecin obtient un non-lieu en raison d’un nouveau rapport d’expertise et « au motif que la plainte pénale était tardive, compte tenu de ce que les faits dénoncés devraient être qualifiés d’atteinte involontaire à l’intégrité corporelle ». Ce n’est qu’en 2003 que l’appel de la patiente est accepté, mais un nouveau non-lieu intervient en 2004 « au motif que la prescription de la responsabilité pénale du médecin était intervenue ». Cette décision est, bien entendu, contestée par la plaignante, mais rien n’y fait. Le tribunal conseille, néanmoins, à la requérante de poursuivre ses prétentions par la voie d’une action en responsabilité civile délictuelle.
Elle assigne le chirurgien et l’hôpital et demande la réparation du préjudice. Son action est accueillie en 2005. Un appel et une cassation plus tard, le tribunal retient « que la requérante gardait des séquelles des opérations chirurgicales défectueuses réalisées par le docteur B., à savoir une souffrance physique permanente et une apparence inesthétique de nature à entraver ses relations personnelles et professionnelles habituelles, compte tenu aussi du fait qu’elle était avocate ». Le tribunal réaffirme « que le médecin avait commis des erreurs médicales et retint qu’il aurait dû obtenir le consentement par écrit de la requérante pour les opérations de chirurgie plastique qui étaient une pratique nouvelle à l’époque où elles avaient été réalisées et aussi l’informer au sujet des risques encourus ». Le médecin est condamné à réparer le préjudice, mais il va s’avérer qu’il s’est arrangé pour ne plus être solvable à la fin des différents recours en 2007. Il n’en fallait pas plus pour que l’avocate victime saisisse la CEDH.

La Cour, après examen du dossier, a estimé que la durée globale de la procédure était de plus de neuf ans et demi et jugé « que la cause de la requérante n’a pas été entendue dans un délai raisonnable » en violation de l’article 6 § 1 de la Convention. Pour elle, il y a eu aussi violation de l’article 8, car la CEDH rappelle qu’entrent dans le champ de l’article 8 de la Convention les questions liées à l’intégrité morale et physique des individus, à leur participation au choix des actes médicaux qui leur sont prodigués ainsi qu’à leur consentement à cet égard. Les États ont l’obligation d’adopter des mesures réglementaires propres à assurer le respect de l’intégrité physique des patients en les préservant « autant que faire se peut, des conséquences graves que peuvent avoir à cet égard les interventions médicales. » Elle rappelle de plus que « l’imposition d’un traitement médical sans le consentement du patient s’il est adulte et sain d’esprit s’analyserait en une atteinte à l’intégrité physique de l’intéressé pouvant mettre en cause les droits protégés par l’article 8 § 1 » selon l’arrêt Pretty. Si le médecin travaille dans un établissement public et qu’il ne se respecte pas son devoir d’information, l’État « peut être directement responsable sur le terrain de l’article 8 du fait de ce défaut d’information ».
Dans le cas de cette patiente, le fait que le médecin se soit rendu volontairement insolvable pour ne pas indemniser la patiente et que la passivité des autorités judiciaires ait bénéficié à ce dernier n’a pas joué en faveur de la Roumanie.

Cette jurisprudence est donc particulièrement intéressante au moment ou le droit du patient européen est en pleine construction.

 

 


1 – Affaire Codarcea c. Roumanie, nº 31675/04, Strasbourg, 2 juin 2009.