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Des recommandations de bonnes pratiques médicales contradictoires

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Les recommandations de bonne pratique médicale sont très critiquables.Tout être censé pourrait croire que des recommandations de bonnes pratiques médicales, devenues opposables en justice et validées par la plus haute autorité en santé du pays, font l’unanimité. Quoi de plus simple pour les médecins que de suivre benoitement ces recommandations sans avoir besoin de réfléchir et sans avoir l’impression d’être manipulés pour réaliser des économies de santé. Sans compter la facilité qu’accordent ces textes à tous ceux à qui l’on décide de déléguer des tâches, ils n’ont qu’à appliquer des protocoles pour générer encore plus d’économies de santé, puisque le médecin n’intervient plus. La médecine économique rend les choses simples. Soigner un patient semble l’être beaucoup moins puisqu’il peut exister des recommandations contradictoires d’un pays à l’autre, voire même au sein d’une même nation…

Le British medical journal (BMJ) a publié un article intitulé What should clinicians do when faced with conflicting recommendations? qui liste différentes études montrant à quel point les recommandations peuvent être différentes d’un pays à l’autre et ce pour de bonnes et de mauvaises raisons, selon l’éditorial du BMJ. Au nombre des bonnes figurent des avis différents sur les éléments qui sont à la base des recommandations, en toute bonne foi (appréciation des biais, choix des sources, potentiels effets secondaires, etc.). Parmi les mauvaises, on peut compter la mauvaise évaluation ou l’omission des études disponibles, l’absence d’analyse critique, le poids donné à l’aspect économique, etc. L’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, comme le BMJ, insiste aussi sur les conflits d’intérêt qui peuvent influencer les experts travaillant à ces textes. Devenues opposables, le médecin ne peut pas se contenter d’ignorer ces recommandations, il doit les subir tout en étant persuadé de ne pas apporter au patient la qualité de soins qu’il s’engage à lui fournir.

Que les médecins acceptent de suivre des recommandations de bonnes pratiques établies par d’autres praticiens, habitués à la clinque et ayant l’expérience du terrain, paraît logique. Les médecins sont favorables et même demandeurs de ce type de guide, tout en étant conscients que chaque patient est unique et qu’il convient de les adapter en fonction des antécédents, de l’examen clinique et des résultats des examens complémentaires qui forment une combinaison propre à chaque cas. Nier cette évidence en condamnant des professionnels de santé pour ne pas avoir respecté des « recommandations » relève d’une politique économique irréfléchie, très loin d’une bonne pratique puisque les recommandations sont critiquables à bien des égards.

Le prix des bonnes pratiques médicales

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Menue monnaie pour les experts de l'HASC’est le 9 novembre 2008 qu’a été publiée au Journal officiel la décision no 2008-09-070/MJ du 24 septembre 2008 relative à l’indemnisation des membres du comité de validation des recommandations de bonnes pratiques professionnelles. Son effet est rétroactif au 4 juin 2008 et elle prévoit que « les membres titulaires et suppléants du comité de validation des recommandations de bonnes pratiques professionnelles sont indemnisés à hauteur de trois vacations par journée de présence effective aux réunions plénières.
Les membres convoqués à la Haute Autorité de santé en sus des réunions plénières perçoivent trois vacations par journée, auxquelles peuvent s’ajouter deux vacations supplémentaires en fonction du travail demandé. Le nombre de vacations peut être fractionné par demi-journée ».

Il a aussi été décidé que « les membres du comité de validation des recommandations de bonnes pratiques professionnelles qui subissent une perte de revenu du fait de l’interruption de leur activité libérale exercée à titre principal perçoivent, en sus de l’indemnisation prévue à l’article 1er, une indemnité compensatoire pour perte de revenu qui s’élève à quatre vacations par journée. Le nombre de vacations peut être fractionné par demi-journée ».

C’est dans le Journal officiel du 13 mai 2005 que la décision no 2005.02.027/SG du 24 mars 2005 relative au montant de la vacation allouée aux collaborateurs non permanents a fixé le montant de la vacation allouée aux collaborateurs non permanents, appelés également experts de la Haute Autorité de santé (HAS), à 76 euros bruts.

Un calcul rapide permet de se rendre compte que ce n’est pas pour s’enrichir que l’on devient expert de la Haute Autorité de santé lorsque l’on est médecin libéral. Il est rare qu’un travail administratif soit très rémunérateur, il faut donc que le praticien qui se prête au jeu de l’HAS y trouve d’autres intérêts…

Comment dégouter les médecins de la FMC ?

Écrit par Charles Duchemin le . Dans la rubrique Humeur

Jeu de quillesAprès le fiasco du dossier médical personnel (DMP), où chacun a voulu imposer son point de vue aux principaux utilisateurs qu’en seront les médecins, la leçon ne semble pas avoir porté ses fruits et l’histoire va se répéter pour la formation médicale continue (FMC) et l’évaluation des pratiques professionnelles (EPP).

Les vrais chiffres de la responsabilité médicale ?

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Presse

De l'argentIl est toujours gênant de se dire que les seuls chiffres qui filtrent chaque année sur les sinistres en responsabilité civile professionnelle médicale proviennent des assureurs. C’est d’autant plus ennuyeux qu’après avoir dit pendant des années que l’augmentation des primes était due à une explosion du nombre des sinistres, les assureurs ont fini par reconnaître, face à des études comme celle du Conseil de la concurrence 1, qu’il y avait eu un malentendu et que ce n’était pas le nombre de sinistres qui avait augmenté, mais le coût des indemnisations. Ces chiffres étant encore plus difficiles à recouper pour le grand public que le nombre des sinistres, il n’y a aucun moyen pour le commun des assurés de vérifier ces affirmations. Ces derniers doivent se contenter de voir le montant de leurs primes augmenter chaque année un peu plus, sans pouvoir répercuter ces surprimes sur le prix de leurs consultations…

Et si l’on en croit les chiffres qu’annonce la SHAM cette année dans son « Panorama du risque médical » 2007, repris le 24 octobre 2008 sur le site du journal « Les Echos », les primes devraient continuer à s’envoler, tout du moins pour les hôpitaux. La SHAM est le premier assureur en responsabilité civile médicale (RCM) en France des établissements de santé et elle « a recensé 12.752 réclamations en 2007 dans les 955 établissements qu’elle assure en RCM. Les 40 % de préjudices corporels représentent, sans surprise, 98 % du coût, évalué au global à quelque 198,5 millions d’euros. L’obstétrique est à l’origine de 4 % des 4.503 réclamations liées à des accidents corporels ayant une cause médicale. Mais cette discipline représente 10 % des 427 décisions administratives et judiciaires ayant retenu une responsabilité et surtout 36 % des 71,6 millions d’euros que cela a coûté à la SHAM ».

L’image associée à l’article est intéressante. Elle montre la courbe de l’indice de fréquence des réclamations qui confirme que ce chiffre a diminué entre juin 2004 et décembre 2006. Selon l’assureur, le coût total des réclamations serait passé de 100 millions d’euros en 2004 aux 198,5 millions de 2008. Il convient néanmoins d’attendre la mise en ligne du « Panorama du risque médical », car rien ne vaut une analyse directe de ce type de documents.

 


1Décision n° 06-D-34 du 9 novembre 2006 relative à des saisines concernant le domaine de l’assurance de la responsabilité civile médicale.

 

Santé et valorisation des actes : conceptions cliniques ou économiques ?

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Congrès

SffemC’est le thème retenu pour la 8e journée scientifique de la Société française et francophone d’éthique médicale. Cet évènement est prévu le jeudi 2 octobre 2008 et se déroulera dans le grand amphithéatre de l’Université Paris Descartes, 12 rue de l’école de médecine, dans le 6e arrondissement de la capitale.

C’est le professeur Alain Grimfeld, président du Comité consultatif national d’éthique, qui est chargé de la conférence d’ouverture en revenant sur l’avis de son institution intitulé « Santé, éthique et argent : les enjeux éthiques de la contrainte budgétaire sur les dépenses de santé en milieu hospitalier » de juin 2008.
Plusieurs sujets seront abordés sous forme de tables rondes parmi lesquels on peut noter « Les prescriptions et actes les plus appropriés en la circonstance », « De la gestion des patients à la promotion de la santé » ou « Vers quelles nouvelles prises en charge et participation : Enjeux éthiques ? »

A cette occasion seront remis les prix senior Yves Pélicier et junior Jean Bernard de la Société française et francophone d’éthique médicale.

Réforme de la biologie médicale

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Le Conseiller général des établissements de santé Michel Ballereau a remis, le 23 septembre 2008, son rapport sur la réforme de la biologie médicale à la ministre de la santé. Selon la synthèse de ce travail, « Un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) a montré, en 2006, que la qualité moyenne des laboratoires de biologie médicale était bonne mais avec quelques insuffisances, plus particulièrement sur des laboratoires à faible activité. Par ailleurs, la structure des laboratoires français de biologie médicale n’a pas progressé aussi vite que l’évolution des connaissances scientifiques et des technologies l’aurait exigé et certains ont une activité trop faible pour être solides et capables de s’adapter aux techniques d’analyses les plus modernes, tout en dégageant le temps nécessaire à la prestation intellectuelle toujours plus importante, partie intégrante de l’examen de biologie médicale ».Laboratoire

Ce rapport met en avant l’aspect médical de cette spécialité qui ne doit pas se contenter de remettre quelques feuilles de résultats sans explication en échange d’une prescription qui ne s’accompagne quasiment jamais d’informations. Elle doit rapprocher cliniciens et biologistes afin qu’ils travaillent de concert. Une analyse biologique hors de son contexte clinique n’a que peu de valeur. Il en va de même de tout examen pratiqué sans une connaissance parfaite des circonstances qui amènent à sa réalisation. Les médecins spécialistes ne sont pas de simples techniciens, mais des praticiens à part entière qui doivent participer activement à l’amélioration des soins.
Belle déclaration d’intentions qui devrait s’adresser à tous les confrères des médecins biologistes qui ne seraient sans doute pas mécontents de voir arriver tous les patients avec un courrier leur expliquant la raison des prescriptions. Le code de déontologie impose ce type de correspondance, mais tout un chacun sait qu’il n’est quasiment jamais respecté, dans un sens comme dans l’autre…

Ce qui est assez surprenant, c’est qu’après avoir réaffirmé l’aspect médical de cette spécialité, la synthèse du rapport propose une réforme marquant « le passage d’obligations de moyens à des obligations de résultats tournées vers le patient ». Une nouvelle fois, un haut fonctionnaire, pourtant médecin à l’origine, veut obliger une science qui n’est pas exacte à des résultats… Heureusement, ce fantasme semble ne pas concerner les résultats médicaux en eux même, mais plutôt le cabinet médical qui passerait d’un régime de normes à une accréditation du type de celles qui ont été mises en place pour les établissements de santé. Un système de certification ISO, du type de celui mis spontanément en place par les ophtalmologistes dans un souci d’amélioration de la qualité de la prise en charge du patient, n’a pas été retenu en raison de l’importante part technique de la biologie médicale. Cette accréditation serait obligatoire. La synthèse du rapport n’aborde ni le coût d’une telle accréditation pour les professionnels, ni le temps consacré par ces derniers à répondre à de nouvelles obligations administratives et qui sera perdu pour la prise en charge des patients.
Toute aussi surprenante l’idée de diminuer le prix des actes de biologie au regard de l’automatisation des analyses et de la standardisation de l’interprétation si on estime que le médecin est là pour apporter son expérience et faire appel à ses longues années de formation.

« La définition du laboratoire de biologie médicale, qu’il soit hospitalier ou libéral, change dans la réforme proposée. Cette définition impose au laboratoire de biologie médicale de participer à l’offre de soins et elle permet l’existence de laboratoires multisites sur un territoire de santé. Il en résulte une plus grande liberté d’organisation du biologiste et la fin de règles telles que le rattachement du biologiste à un site (ex laboratoire) ». Il ne fait pas de doute que c’est un pur hasard si ce rapport va exactement dans le sens du projet de loi « Hôpital, patients, santé et territoires »… C’est aussi en toute indépendance que ce travail alloue aux directeurs généraux des futures agences régionales de santé (ARS) des pouvoirs importants dans le secteur de la biologie médicale. Les investissements seraient sous leur surveillance et les délocalisations pourraient être interdites. Il s’agit là de mesures administratives tendant vraisemblablement à s’opposer à la volonté des instances européennes de voir le capital des sociétés médicales s’ouvrir à tous les investisseurs. En 2006, la Commission européenne avait déjà rappelé à l’ordre l’Hexagone « en raison de l’incompatibilité avec la liberté d’établissement établie par l’article 43 du traité CE de restrictions en matière de détention du capital d’une société exploitant des laboratoires d’analyse de biologie médicale par un non-biologiste (limitation à un quart au maximum des parts sociales pouvant être détenues par un non-biologiste) et de l’interdiction faite à une personne physique ou morale de détenir des participations dans plus de deux sociétés constituées en vue d’exploiter en commun un ou plusieurs laboratoires d’analyses de biologie médicale. La Commission considère que ces restrictions limitent les possibilités de partenariat, notamment avec des personnes morales d’autres États membres et la liberté d’établissement en France de laboratoires établis dans d’autres États membres et ne satisfaisant pas aux critères posés par la législation française ». Le conseil national de l’ordre des médecins sera-t-il satisfait par ces mesures ? Il est lui aussi très hostile aux idées européennes d’un capital ouvert, mais de là à souhaiter le renforcement du rôle de l’Administration…

La réforme proposée tient compte de l’arrêté du 21 juillet 2008 fixant les critères permettant de vérifier les conditions d’autorisation ou d’agrément des laboratoires établis hors de France dans un État membre de la Communauté européenne ou partie à l’accord sur l’Espace économique européen puisque ces derniers vont pouvoir réaliser des analyses sur des prélèvements effectués en France, pour le compte de patients français.

Enfin, Michel Ballereau insiste sur un point sur lequel Droit-medical.com revient fréquemment : « en l’absence de cadre européen spécifique, la santé est considérée le plus souvent sous l’égide de règles économiques pures, qui sont inadaptées à certaines situations ». Sur un plan national, qui lui ne manque pas de cadre, l’auteur du rapport propose un montant d’économies dans le domaine de la biologie médicale d’environ 100 millions d’euros net, sur trois années consécutives.

Qu’est-ce qu’une urgence médicale ?

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

AmbulanceImportante notion que celle de l’urgence médicale qu’il n’est pas toujours simple de définir. Le Conseil national de l’ordre des médecins (CNOM) tente de répondre à cette question dans son Bulletin du mois de juillet 2008.

Selon le docteur André Deseur, conseiller national, délégué général à la communication, président de la commission nationale garde et urgence du CNOM, « Dans la tradition française, l’urgence se définit par la mise en danger à brève échéance – l’heure ou la demi-journée – de l’intégrité physique, voire de la vie d’une personne. Dans d’autres pays, notamment en Amérique du Nord, on lui accorde un périmètre beaucoup plus large, puisqu’on l’étend à tout ce qui est ressenti comme une urgence par le patient ». Malheureusement pour les services d’urgence, les Français commencent à s’identifier aux Américains et à prendre les centres 15 pour un secrétariat spécialisé susceptible de répondre à tous les maux grâce au recours au médecin de garde.

Or, en cette période d’économies de santé, il conviendrait d’expliquer aux patients que la médecine d’urgence a un coût bien plus élevé que celui de la médecine « classique ». Il est aussi important de faire comprendre à la population que mobiliser une équipe du SAMU ou du SMUR pour un problème bénin, en ayant volontairement brossé un tableau dramatique d’une situation sans réelle gravité, peut coûter la vie à une personne réellement en danger. Mais comment raisonner des gens qui appellent les pompiers dans le seul but d’être transportés gratuitement à l’hôpital ?

Il conviendrait aussi de faire cesser les dissensions au sein des services de secours. Praticiens du SAMU, de SOS médecins, généralistes, pompiers ne parlent pas d’une seule voix. Philosophie, objectifs et moyens diffèrent.

Résultat, des voix s’élèvent pour que ce ne soit plus des médecins que l’on envoie en première intention, mais des infirmiers spécialisés. C’est le système américain, avec ses Paramedics. Situation paradoxale lorsque l’on sait que les SAMU ont été contraints de par la loi, il y a une quinzaine d’années, de ne faire appel qu’à des médecins thèsés pour assurer leurs interventions, alors même que certains centres avaient recours à des externes et des internes en médecine, spécialement formés, qui réussissaient à remplir ces tâches avec sérieux, aux côtés de pompiers professionnels…

Un site dédié à l’installation des professionnels de santé

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

esanté Inst@lsanté est un service de l’assurance-maladie dédié à l’installation des professionnels de santé.

Ce site s’adresse aux professionnels qui cherchent à s’installer, à ceux qui le sont déjà, mais aussi aux élus comme support pour améliorer l’offre de soins dans leur région.

En plus, des démarches administratives à effectuer, la Sécurité sociale offre le service C@rtosanté, « la cartographie des zones déficitaires en offre de soins (permettant de bénéficier d’aides), l’organisation hospitalière, les structures de soins, et l’organisation de la permanence des soins ambulatoires ». Ce site donne aussi accès à des « liens présentant les territoires d’accueil d’un point de vue culturel, touristique, économique (connaissance des territoires) et également les besoins de soins de la population ». Des renseignements sur les  aides de l’État, de l’assurance-maladie et des collectivités territoriales sont disponibles : aides à l’installation en médecine générale, aides au regroupement, aides relatives aux contrats de bonnes pratiques, exonérations fiscales.

Pour les médecins déjà installés, le service Inst@lsanté « propose de l’information et des conseils pour faciliter votre exercice au quotidien : faut-il exercer seuls ou à plusieurs, comment évoluent les idées du collaborateur libéral, du portage de médicaments et du transfert de compétences ? Quelles sont les solutions pour se faire remplacer et pour gérer son cabinet ? Comment se tenir à jour dans sa formation (Formation Professionnelle Continue et Évaluation des Pratiques Professionnelles) ? »

Les élus sont censés y trouver des « solutions pour palier les difficultés de démographie médicale que rencontre leur collectivité locale ou territoriale ».

Au moment de la visite du site Inst@lsanté qui a permis d’écrire cet article, la rubrique « Quoi de neuf ? » mettait en avant « la régulation des soins infirmiers ». Voilà qui donne le ton.

Mise à jour 17 novembre 2012 — Depuis que le site des URCAM est devenu celui des agences régionales de santé (ARS), Inst@lsanté et C@rtosanté sont muets.

Le médecin peut « se plaindre » de la CMU-C

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

S’il est normal d’attacher de l’importance aux plaintes des patients qui estiment être victimes d’une discrimination par certains médecins en raison de leur statut de bénéficiaires de la couverture médicale universelle complémentaire (CMU-C), il est logique d’écouter les praticiens qui s’estiment, eux aussi, victimes du comportement discourtois ou préjudiciable au système de soins de ces mêmes patients. Ce discours choquera sans doute les adeptes du « politiquement correct », mais une vision manichéenne est la preuve d’un manque d’objectivité. 

EnquêteIl est vrai que l’approche fallacieuse du rapport du Fonds CMU a réussi à faire passer dans les médias, et donc dans l’opinion publique, l’idée que les médecins, tout particulièrement les spécialistes dits à honoraires libres, refusaient de soigner des patients au prétexte qu’ils étaient bénéficiaires de la CMU-C. Le rapport de mai 2006, intitulé « Analyse des attitudes de médecins et de dentistes à l’égard des patients bénéficiant de la Couverture Maladie Universelle », a étonné bon nombre de médecins par son manque de rigueur et d’objectivité et par sa partialité. Sept à huit soi-disant témoignages de praticiens, recueillis sur la base d’informations erronées, servent à condamner toute une profession. Plutôt que de discréditer le Fonds couverture médicale universelle et la caisse primaire d’assurance-maladie du Val-de-Marne qui a apporté son concours à sa réalisation, le battage médiatique a déclenché de virulentes réactions de parlementaires de tous bords contre ce manque d’humanisme des médecins nantis. Xavier Bertrand, alors ministre de la santé, ému par ce tintamarre, a sollicité la toute nouvelle HALDE (haute autorité pour la lutte contre les discriminations et pour l’égalité) qui s’est hâtée de rendre un avis basé sur l’enquête biaisée et disant qu’il était discriminatoire de refuser de voir un patient CMU-C. La HALDE a donné des conseils au conseil de l’ordre des médecins qui s’est empressé de les suivre pour ne pas être soupçonné de couvrir ces pratiques. Personne pour relever les incohérences de l’enquête, juste quelques remarques timides quant à des difficultés rencontrées par les médecins concernant les CMU-C.
Le ministre a aussi commandé un rapport à Jean-François Chadelat, inspecteur général des affaires sociales et directeur du Fonds CMU sur le sujet. Bien entendu, le directeur de l’organisme à l’origine de l’enquête de départ a cautionné les conclusions erronées et a proposé des sanctions et un contrôle renforcé des médecins… Xavier Bertrand a immédiatement validé ces conclusions. Il n’aurait pas été politiquement correct de donner l’impression de soutenir les praticiens dans une affaire médiatique liée à une possible discrimination.

Des décisions bien hâtives

Est-il objectif de dire que le rapport du Fonds CMU était biaisé et partial ? Il suffit pour s’en convaincre de lire la synthèse officielle de ce document. Les méthodes statistiques utilisées le prouvent : « En appliquant ces méthodes de surreprésentation, on était en mesure d’obtenir, un nombre de testing avec refus supérieur à celui d’un sondage aléatoire simple, ce qui permettait d’enrichir l’analyse » 1. C’est en effet un testing par téléphone, faisant appel à un comédien, qui a été utilisé pour obtenir les statistiques sur lesquelles sont basés les résultats.
« D’autre part, des entretiens avec quelques médecins et dentistes des 6 villes en questions, ont complété la méthodologie de manière à comprendre les logiques à l’œuvre, expliquant les attitudes différenciées des professionnels » 1. Sur les 230 médecins qui ont été testés, seuls 15 ont été interrogés. Parmi ces quinze, seuls 50 % d’entre eux avaient « refusé » de voir un patient, soit 7 ou 8 praticiens pour expliquer le comportement de l’ensemble des médecins français fautifs de refuser un patient… Suivant les conditions, ce n’est d’ailleurs pas une faute de refuser de voir un patient 2, mais le rapport se garde bien de le rappeler, si tant est que ses auteurs l’aient su…
OphtalmologisteDes « vérités » sont énoncées dans ce rapport : « Ainsi, les discriminations médicales, sociales et raciales se renforcent les unes les autres » 3. Ce n’est pourtant pas ce qu’il ressort de la conclusion de ce travail, qui presque à regret, n’a pas réussi à mettre en évidence de discrimination raciale dans ce qui a été considéré comme les « refus » des praticiens. Car lorsque l’on étudie les motifs de ces « refus », certains étonnent.

Pour mieux comprendre, il faut s’intéresser à quelques exemples. Le testing a été fait en demandant à l’acteur d’appeler pour prendre rendez-vous pour une simple conjonctivite lorsqu’il téléphonait à un ophtalmologiste, si l’on en croit le rapport. Est-il étonnant que des cabinets d’ophtalmologie aient pu conseiller au patient d’aller voir son généraliste pour une simple conjonctivite ? La Sécurité sociale, les parlementaires soucieux des économies de santé et le ministre recommandent-ils à tous les patients souffrant d’une conjonctivite d’aller directement consulter un spécialiste ? Il n’était pas question d’une conjonctivite chez un porteur de lentilles, puisqu’il est indiqué dans la synthèse du rapport que « Des restrictions ont été également repérées concernant la prescription de lentilles alors que pour d’autres demandes, les mêmes ophtalmologues acceptent les patients (prescription de lunettes ou conjonctivite) ». Les auteurs du rapport reprochent aussi aux ophtalmologistes d’informer les patients CMU-C sur le fait que les lentilles de contact ne sont pas prises en charge par la Sécurité sociale et assimilent cette information (censée décourager le patient à consulter) à un refus de soins.
Ce n’est pas le corps médical qui fixe la « Liste des produits et prestations remboursables » par l’assurance-maladie. Les lentilles de contact et leurs produits d’entretien sont exclus à de très rares exceptions près, ces exceptions n’étant aucunement basées sur des critères sociaux… N’est-ce pas le devoir du médecin d’informer le patient des conditions de prise en charge des soins ? C’est pourtant ce que la loi prévoit dans le code de la Sécurité sociale et le code de la santé publique, sachant que ces dispositions ont même été renforcées récemment au prétexte que les praticiens n’informaient pas suffisamment les patients sur leurs honoraires et leur prise en charge. Le directeur du Fonds CMU et la caisse d’assurance-maladie du Val-de-Marne ne connaissent-ils pas les conditions de prise en charge des lentilles de contact ?

Une enquête biaisée ?

Dans plusieurs cas, les cabinets n’ont été appelés qu’une fois et, tous médecins confondus, une simple « impression de malaise chez la secrétaire » a pu être considérée comme un refus ! Il serait intéressant d’avoir un sondage représentatif digne de ce nom sur le ressenti des secrétaires des cabinets médicaux concernant certains patients CMU-C pour pouvoir interpréter l’ « impression de malaise » de façon objective. Il est difficile de croire que ce personnel fasse partie des nantis, si ce n’est à considérer que toute personne ayant un emploi est de nos jours un nanti, et cela éviterait de s’en remettre à l’interprétation subjective et partiale qui en a été faite. Il se pourrait d’ailleurs que les résultats d’un tel sondage donnent à réfléchir…

La fiabilité des statistiques peut aussi prêter à discussion. Que penser d’une étude qui reconnaît avoir exclu des médecins après que les tirages au sort ayant servi à la rendre soi-disant fiable aient été effectués ? Comment considérer un travail qui repose sur des hypothèses non vérifiées quant à la fréquence des refus pour utiliser un modèle de surreprésentation ? Que dire d’une enquête qui se veut rigoureuse et qui traite les cabinets de groupe comme s’ils ne correspondaient qu’à un seul individu ?

justiceComment serait-il possible qu’un tel rapport puisse être à la base d’une modification législative comme il en est question dans la version non définitive d’un projet de loi obtenue par l’Agence France-Presse (AFP) ? Il serait question de lutter contre la « discrimination », en renforçant les sanctions à l’égard des praticiens qui refuseraient de soigner un patient sans raison valable. Ces sanctions « pourront faire l’objet d’une publication afin de montrer que le refus de soins est un acte grave » 4. On voit bien que la notion de « raison valable » peut être très subjective…

Il est déjà regrettable de constater que de nombreux travaux découlent de ce document. Preuve en est la circulaire 33/2008 de l’assurance maladie qui commence par cette phrase : « S’appuyant sur l’enquête réalisée au mois de juin 2006 par le Fonds de financement de la CMU, Monsieur Jean-François Chadelat a montré que des bénéficiaires de la CMU complémentaire éprouvent encore beaucoup de difficultés pour obtenir des soins ou des produits médicaux ». Il est tout de même heureux de constater que l’objet de cette circulaire est la « prise en charge des réclamations et plaintes formulées par les bénéficiaires de la CMU complémentaire ou par les professionnels de santé ». Il y est même admis qu’un soignant puisse « se plaindre » d’un bénéficiaire de la CMU-C : « Pour mettre fin aux situations de refus de soins, il convient de prendre également en compte les réclamations portées par les professionnels de santé ou établissements de santé à l’encontre des bénéficiaires de la CMU complémentaire ». Les plaintes peuvent porter, par exemple, sur retard injustifié aux rendez-vous, des rendez-vous manqués et non annulés ou des exigences exorbitantes du patient. Plus étonnants, les traitements non suivis ou interrompus sont des griefs admissibles.

Des droits et des devoirs

La lettre no 29 de l’assurance maladie confirme les informations de la circulaire 33/2008 et vient préciser que le refus de remboursement aux professionnels de santé par l’assurance-maladie de soins prodigués à un patient CMU-C est aussi un motif de réclamation légitime.

Après l’importance prise par l’enquête du Fonds CMU, le dernier épisode concernant ce sujet montre bien que la peur du ridicule n’est pas à l’ordre du jour. Un collectif de médecins, estimant que les bénéficiaires de la CMU-C ont bien raison de se plaindre de leurs confrères, vient de saisir la HALDE au motif que cette circulaire et cette lettre seraient discriminatoires à l’encontre des patients CMU-C, en rappelant à ces derniers, qu’en plus de droits, ils ont aussi des devoirs… L’assurance-maladie, qui a collaboré activement à l’enquête du Fonds CMU, va-t-elle être l’arroseur arrosé ? Ne sommes-nous pas là dans une dérive extrémiste ? Il est probable que la pression médiatique fasse à nouveau son oeuvre et que les devoirs de ceux qui bénéficient de soins gratuits du fait de l’effort de la Nation et des droits de ceux qui les soignent passent aux oubliettes. Roselyne Bachelot, ministre de la santé et des sports, dans une interview en direct des Jeux olympiques de Pékin, a déjà indiqué que cette circulaire n’avait pour but que de préciser le rôle des conciliateurs mis en place avant tout pour recueillir les plaintes des patients et n’a évoqué la « responsabilisation » de toutes les parties que du bout des lèvres.

On peut penser qu’un rapport du type de celui du Fonds CMU et la pression politico-médiatique qui s’en est suivie ne peuvent que créer un sentiment de malaise entre les professionnels de santé et les patients CMU-C. Cela ne veut pas dire pour autant qu’il faille exonérer tous les acteurs de la santé d’une tentation discriminatoire. La profession en est consciente et il faut saluer des initiatives comme celle que l’Union régionale des médecins libéraux d’Aquitaine a présenté, le 19 janvier 2008, lors de la journée des Associations de patients organisée à la Maison des Associations de Mérignac-Bordeaux un document intitulé « CMU : pour des soins sans dysfonctionnement Droits et Devoirs ».
Pour cet organisme, il s’agirait de la première charte de « bonne conduite » concernant la couverture médicale universelle (CMU). Elle rappelle les droits et les devoirs de chacun, sans esprit polémique et sans arrière-pensée politique.
Il s’agit d’un travail mené avec des patients, des professionnels de santé et l’assurance-maladie afin que ces trois parties respectent leurs engagements concernant la CMU.
Bel exemple de concertation, sans aucune intervention politique…

 


1 – page 3, de la synthèse officielle du rapport du Fonds CMU.
2 – Lire l’article « Un médecin libéral peut-il refuser de voir un patient ? »
3 – page 6, de la synthèse officielle du rapport du Fonds CMU.
4 – « Santé: plus de pouvoir aux agences régionales et directeurs d’hôpitaux »