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En attendant la loi sur les réseaux de soins…

Écrit par Charles Duchemin le . Dans la rubrique Humeur

Se serrer la ceinture

Intéressante jurisprudence que celle qui vient de voir la MGEN (mutuelle générale de l’Éducation nationale) condamnée pour avoir versé un moindre remboursement à l’un de ses adhérents dont les soins d’orthodontie de sa fille n’avaient pas été effectués par un praticien adhérant au protocole conclu entre les mutuelles de la fonction publique et un syndicat dentaire.

Dépassements d’honoraires des médecins : qu’en pensent le gouvernement et les députés ?

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Médecin refusant un dépassement d'honorairesLe projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour 2012 est en pleine discussion à l’Assemblée nationale. Si le sujet d’une éventuelle réduction des indemnités journalières a fait les gros titres des journaux à cette occasion, le texte comporte une multitude de mesures qui intéressent tant les patients que les médecins. Si, parmi celles-ci, beaucoup font débat, le sort réservé aux dépassements d’honoraires paraît faire l’objet d’un consensus entre le gouvernement et les députés de la majorité. Les élus de l’opposition, quant à eux, dénoncent ce qu’ils estiment souvent être le symbole d’une médecine à deux vitesses.

Les dépassements d’honoraires donnent une certaine liberté tarifaire aux médecins conventionnés du secteur 1 lorsqu’ils sont encore titulaires du droit permanent à dépassement (DP) ou des médecins à honoraires différents (secteur 2). Ils sont mis en cause régulièrement, car ils sont souvent mal compris par les patients et vilipendés par les mutuelles ou les complémentaires santé à qui ils coûtent cher. Ils sont aussi un sujet de dissension entre les praticiens du secteur 1 et du secteur 2. Leur limitation ou leur suppression est donc un argument politique plus ou moins démagogique en fonction des intérêts défendus.

Il est important de rappeler que les dépassements d’honoraires ne sont pas pris en charge par l’Assurance-Maladie et que tous les patients sont libres de choisir un médecin à honoraires opposables (secteur 1) s’ils ne souhaitent pas avoir à régler un dépassement d’honoraires. Les patients disposant d’une mutuelle ou d’une complémentaire santé peuvent, en fonction du contrat souscrit, voir une partie ou la totalité du montant d’un éventuel dépassement d’honoraires remboursée par l’organisme auprès duquel ils ont contracté. Enfin, les patients titulaires de la couverture maladie universelle (CMU) ne font pas l’objet de dépassements d’honoraires pour les actes pris en charge par l’Assurance-maladie quand ils consultent un médecin secteur 1 avec DP ou d’un médecin secteur 2.

Les extraits des séances publiques ayant eu lieu entre le 25 octobre 2011 et le à l’Assemblée nationale présentés ci-dessous permettent de se faire une idée de la teneur des débats et du point de vue des principaux intervenants au sujet des dépassements d’honoraires. Si certains parlementaires évoquent les dépassements excessifs, d’autres semblent condamner le principe même de ces dépassements. Pour les internautes qui souhaitent plus de précisions, il est toujours possible de se référer à l’intégralité des débats disponible sur le site du Palais Bourbon.

1re séance du mardi 25 octobre

 C’est principalement le ministre de la santé, Xavier Bertrand, qui s’est exprimé au sujet des dépassements d’honoraires : « En outre, pour répondre structurellement à la question des dépassements d’honoraires, qui, j’en suis conscient, peuvent entraîner des retards dans les soins, voire des renoncements aux soins, j’ai dit que j’étais très favorable à la prise en charge, dans les meilleurs délais, de ces dépassements pour les trois spécialités de chirurgie, d’anesthésie-réanimation et de gynécologie obstétrique. Plus précisément, sur les bases d’un accord intervenu entre les différentes parties prenantes, au moins 30 % de l’activité devrait se faire à tarif opposable ; les dépassements supérieurs à 50 % du tarif remboursable ne seraient pas pris en compte ; et il s’agit d’avoir un nombre d’actes suffisant pour garantir la qualité des soins.
En l’absence d’un accord avec l’UNOCAM [Union nationale des organismes d’assurance maladie complémentaire, NDLR] – je le déplore profondément, mais il n’est pas trop tard – le Gouvernement prendra ses responsabilités et proposera au Parlement de mettre en place cette prise en charge par la loi, avec une prise en charge obligatoire du secteur optionnel dans les contrats responsables, à hauteur de 150 %.
Je proposerai que ce secteur optionnel soit ouvert au secteur 2, afin de prendre en charge les dépassements et de ne pas ouvrir de nouvelles possibilités de dépassement.
J’aurais préféré un accord, mais il n’est pas trop tard. Pour l’instant, nous nous en tenons à notre proposition. Si un accord intervient, tant mieux. Si tel n’est pas le cas, nous aurons renforcé l’accès aux soins et la prise en charge des dépassements pour nos concitoyens.
Cette mesure sera accompagnée d’autres mesures de lutte contre les dépassements. L’assurance maladie va, à notre demande, lancer de nouveaux contrôles sur les professionnels ne respectant pas le tact et la mesure, en ville comme à l’hôpital. Nous y reviendrons pendant la discussion.
Le Conseil national de l’ordre des médecins que j’ai vu vendredi est prêt à nous suivre dans cette voie. Par ailleurs, le Gouvernement s’est déjà engagé, dans la loi de financement de la sécurité sociale 2011, à élargir la couverture pour les plus modestes, en augmentant le plafond de ressources ouvrant droit à l’aide complémentaire santé – l’ACS – à 30 % du plafond CMU-C [couverture maladie universelle complémentaire, NDLR] au 1er janvier 2012 : cela permettra ainsi de passer de 532 000 bénéficiaires à 760 000 bénéficiaires. C’est encore insuffisant.
Le président de votre commission [des affaires sociales, NDLR], Pierre Méhaignerie, a proposé de relever à nouveau ce plafond, à 35 % du plafond CMU-C cette fois, ce qui devrait porter le nombre de bénéficiaires à quasiment un million. Je salue cette initiative et je la soutiendrai – un amendement sera déposé – parce qu’elle va permettre d’élargir la couverture des plus modestes. Ceux qui ne sont pas assez riches pour se payer une bonne mutuelle, mais trop riches pour être pris en charge par la CMU-C, auront droit à l’aide complémentaire santé que nous avons mise en place depuis 2004. »

2e séance du mardi 25 octobre

Pour Pierre Méhaignerie, membre du groupe Union pour un mouvement populaire (UMP), en plus d’un objectif régional des dépenses de santé (ORDAM) qui responsabilise et laisse de l’autonomie, « il faut également affronter les dépassements d’honoraires excessifs. »

Pour Anny Poursinoff, membre du groupe Gauche démocrate et républicaine et de la commission des affaires sociales, « les dépassements d’honoraires ne cessent d’augmenter » et l’Inspection des affaires sociales (IGAS) les dénonce.

Pour Jean-Luc Préel, membre du groupe Nouveau centre et vice-président de la commission des affaires sociales, « certes, il est possible de contester les prévisions économiques sur lesquelles est bâti ce projet de loi. Il est permis de regretter que cette loi de financement ne soit pas votée en équilibre, mais avec un déficit qui, aujourd’hui, n’est pas financé. Nous pourrions également vouloir régler les problèmes que rencontrent nos concitoyens, comme la répartition des professionnels de santé sur le territoire, la permanence des soins ou les dépassements d’honoraires. Mais c’est en débattant des amendements – avec l’espoir qu’ils soient adoptés –, que nous pouvons peut-être faire bouger le texte. »
« Les dépassements d’honoraires n’existeraient sans doute pas si – Xavier Bertrand le répète souvent – les rémunérations avaient été revues régulièrement en tenant compte des évolutions des charges, si la CCAM clinique avait été mise en place et si la CCAM technique était réactualisée régulièrement, mais aujourd’hui ces dépassements existent et atteignent parfois des sommes importantes.
Le secteur optionnel est prévu depuis 2004 ; il vient d’être confirmé par la nouvelle convention médicale. Mais les assurances complémentaires ne semblent pas vouloir honorer leur signature, perturbées à juste titre par l’augmentation sans concertation de la taxe qui s’applique à elles à hauteur de 1,1 milliard. […]
Ce secteur n’est toutefois pas la panacée. Tout d’abord, il ne concerne que les spécialistes à plateau technique, qui ne sont pas les plus défavorisés, et c’est là un euphémisme. Qu’en sera-t-il pour les autres, notamment les spécialistes cliniques, comme les psychiatres, les pédiatres, les endocrinologues ? Ensuite, il ne concerne que le secteur 2 ; qu’en sera-t-il des professionnels du secteur 1 ? Il demande de soigner 30 % de la clientèle à tarif remboursable ; quels sont ces 30 % ? Il prévoit la prise en charge par les complémentaires des dépassements d’honoraires limités à 50 %. Or, dans certains départements, les dépassements sont inférieurs à 50 % ; n’y aura-t-il pas un effet d’aubaine ?
Dans d’autres départements, à Paris, en PACA, les dépassements peuvent atteindre 400 ou 500 % des tarifs remboursables. » 

Pour Marisol Touraine, membre du groupe Socialiste, radical, citoyen et divers gauche, et de la commission des affaires sociales, le gouvernement a renoncé à protéger nos concitoyens face à l’explosion des dépassements d’honoraires et essaye de forcer la décision sur le secteur optionnel qui ne serait en rien une solution. « Tel que le système est conçu, il va se traduire par des dépassements en plus. Il permettra à des médecins actuellement en secteur 1, donc qui pratiquent des tarifs opposables, de dépasser, alors que ceux qui dépassent beaucoup en secteur 2 ne seront nullement incités à baisser leurs trafics.
Plus préoccupant encore, le système du secteur optionnel fait tout simplement du dépassement d’honoraires la règle, les organismes complémentaires étant appelés à en assurer le paiement. »
Elle affirme enfin que « l’encadrement et le plafonnement des dépassements d’honoraires seront une priorité pour le futur gouvernement de gauche. »

Pour Jean Mallot, membre du groupe Socialiste, radical, citoyen et divers gauche, et secrétaire de la commission des affaires sociales, « entre 2005 et 2010, le reste à charge pour les ménages est passé de 9 % à 9,4 %. Tout cela résulte d’une série de déremboursements et de franchises, ainsi que de la multiplication des dépassements d’honoraires. »

Pour Jacqueline Fraysse, membre du groupe Gauche démocrate et républicaine et secrétaire de la commission des affaires sociales, « en 2010, 29 % de nos concitoyens déclaraient avoir renoncé à se soigner pour des raisons financières. D’autres contractent des microcrédits. Des maladies d’un autre âge resurgissent, que l’on croyait disparues, comme la tuberculose ou la gale.
Ce sont là des conséquences des nombreuses participations forfaitaires, franchises médicales, forfaits hospitaliers, forfaits de 18 euros et autres déremboursements de médicaments, qui visent, selon vous, à responsabiliser les patients, comme s’ils étaient responsables de leur maladie et du coût des traitements qui leur sont prescrits.
C’est également l’effet des dépassements d’honoraires, contre lesquels l’inaction du Gouvernement est patente et qui ont encore augmenté de 6 % par rapport à 2009. Sur dix ans, leur augmentation est de 50 %.
Si cette situation traduit l’abus d’un certain nombre de médecins, elle traduit surtout la déconnexion entre les tarifs opposables remboursés par l’assurance-maladie, qui sont insuffisamment revalorisés, et les tarifs pratiqués par les médecins. Le secteur optionnel que vous appelez de vos vœux n’est pas une solution : il va juste siphonner ce qui reste du secteur 1 et inciter les médecins à considérer le plafond de dépassement comme le nouveau tarif de référence.
L’augmentation conjointe des franchises et des dépassements d’honoraires conduit mécaniquement à une augmentation du reste à charge pour les patients. Je sais que M. Bertrand récuse cette affirmation, allant même jusqu’à indiquer que ce reste à charge baisse, passant de 9,7 % en 2008 à 9,4 % aujourd’hui.
Ce chiffre ne rend pas compte de la réalité, car c’est une moyenne qui inclut les patients en ALD, lesquels concentrent 60 % des dépenses de remboursement : la vérité, c’est que, hors ALD, le reste à charge avoisine les 45 %, et ce chiffre n’intègre pas les complémentaires santé, rendues obligatoires par le désengagement de la sécurité sociale, dont le coût est en augmentation constante.
Cette augmentation, conséquence directe des déremboursements et dépassements d’honoraires que les complémentaires santé doivent prendre en charge, est encore accentuée par la hausse continue des taxes auxquelles elles sont soumises. Ainsi, entre 2005 et 2012, la fiscalité sur les contrats d’assurance santé aura été multipliée par plus de sept. Et il est illusoire de penser, mais vous le savez, bien sûr, que les complémentaires santé ne répercuteront pas la nouvelle hausse de leur taxe. La Mutualité française parle d’ailleurs de 4,7 % d’augmentation. »

Pour Michel Heinrich, membre du groupe Union pour un mouvement populaire et de la commission des affaires sociales, le problème du secteur 2 est « mal compris et très peu accepté par les patients. Je sais bien qu’un nombre important d’actes n’ont pas été revalorisés depuis longtemps, mais certains praticiens, on le voit bien, ne pratiquent pas le dépassement d’honoraires avec tact et mesure, rendant de ce fait difficile l’accès aux soins. J’ai bien entendu l’engagement de Xavier Bertrand de mettre en place le secteur optionnel, et je m’en réjouis, car il y a urgence. Mais il faudra se méfier des effets d’aubaine, notamment pour les médecins demeurés dans le secteur 1, ou pour ceux du secteur 2 qui ne pratiquaient pas des dépassements d’honoraires supérieurs à 50 %. »

Choix du médecin, du dentiste ou d’un autre professionnel de santé et remboursement par une mutuelle

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Jurisprudences

RemboursementUn patient affilié à la Mutuelle générale de l’éducation nationale (MGEN) a demandé la prise en charge de soins dentaires prévue à son contrat. S’étant adressé pour la réalisation des soins à un praticien n’ayant pas adhéré au protocole d’accord conclu entre la mutuelle et la Confédération nationale des syndicats dentaires (CNSD), il a bénéficié d’un remboursement inférieur à celui applicable aux soins délivrés par les praticiens ayant adhéré au protocole. Mécontent que le choix du dentiste lui ait fait perdre un peu plus de neuf cents euros, il a saisi le juge de proximité pour obtenir réparation de ce qu’il a estimé être un préjudice.

Alors que la juridiction de proximité déboute de sa demande le patient le 19 février 2010 après une mise en délibéré, l’avocat de la MGEN a présenté le 9 mars 2010 une question prioritaire de constitutionnalité « au regard du principe d’égalité devant la loi et de l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, de l’article L 122-1, alinéa 3 du code de la mutualité, en ce que ce texte interdirait aux mutuelles d’instaurer des différences dans le niveau des prestations en fonction du choix de l’assuré de recourir ou non à un praticien adhérent à un protocole de fournitures de soins ou membre d’un réseau de soins, dès lors que d’autres organismes complémentaires d’assurance-maladie ne sont pas soumis à une telle prohibition ». Résultat, la Cour de cassation a eu à statuer rapidement sur cette question et en est arrivée à une décision qui a fait le bonheur du patient.

Peu importe que, selon la mutuelle, « la mise en oeuvre de deux systèmes de remboursement par la mutuelle en application du protocole conclu avec la CNSD n’est nullement discriminatoire dès lors que chacun des deux systèmes peut être librement choisi par le patient, et qu’il y a égalité entre tous les adhérents à la mutuelle qui choisissent de s’adresser soit à un dentiste conventionné, soit à un dentiste non conventionné », la Cour de cassation n’a pas suivi cette voie (n° de pourvoi : 09-10241). Si pour cette dernière il n’est pas nécessaire d’ordonner la réouverture des débats pour qu’il soit procédé à l’examen de cette question prioritaire de priorité, « selon l’article L 112-1, alinéa 3, du code de la mutualité, les mutuelles et leurs unions ne peuvent instaurer de différences dans le niveau des prestations qu’elles servent qu’en fonction des cotisations payées ou de la situation de famille des intéressés. » La juridiction de proximité a violé ce texte en appliquant « un protocole d’accord conclu entre une mutuelle et une organisation représentative des chirurgiens-dentistes fixant des tarifs de remboursement distincts pour un même acte, ce dont il résulte une différence dans le niveau des prestations de la mutuelle qui n’est fonction ni des cotisations payées, ni de la situation de famille des adhérents ».

Il s’agit là d’une décision importante à un moment où les réseaux de soins ont le vent en poupe. S’ils peuvent être justifiés par des intérêts de santé publique, il semble que les intérêts économiques de ce système pour les mutuelles viennent de trouver une de leurs limites.

Information médicale, classement des établissements de soins : les mutuelles s’en mêlent

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Information médicale par téléphone par les mutuellesLa Mutualité française a lancé, le 28 mai 2009, « Priorité santé mutualiste ». Il s’agit d’un service téléphonique présenté comme un outil « d’information, d’aide à l’orientation et d’accompagnement sur des questions majeures de santé ». Ouvert à tous dans un premier temps, puis uniquement accessible aux adhérents d’une mutuelle de la Mutualité française et à leur entourage, à partir du 1er octobre 2009, à l’aide d’un code d’accès qui leur aura été fourni, cette offre a plusieurs objectifs et le site Internet de la Mutualité donnent plusieurs exemples pour les illustrer. « Un adhérent d’une mutuelle a un rendez-vous pour une première chimiothérapie et se demande en quoi cela consiste ? Il souhaite en savoir plus sur les risques cardio-vasculaires ? Il recherche un établissement de qualité proche de son domicile qui prenne en charge son cancer ? Il s’interroge suite à l’annonce d’une maladie ? Il rencontre des difficultés sociales ou administratives liées à sa pathologie ? Ou encore il souhaite arrêter de fumer, adopter un bon équilibre alimentaire ? » Axé initialement sur quatre thèmes de santé (le cancer, les maladies cardio-vasculaires, les addictions et le maintien de l’autonomie des personnes âgées ou en situation de handicap), ce système d’information comptera une nouvelle thématique fin 2009 : la santé visuelle.

Cette initiative semble séduisante, mais ne soulève-t-elle pas des questions de droit et de santé ?

Censée être gage de qualité, c’est vers un “conseiller” que sont dirigés les appels… Le contenu des réponses de ce préposé est validé par un comité d’experts. Face à des patients fragilisés par une maladie comme le cancer, que peuvent valoir des réponses stéréotypées ? Ont-ils besoin que le colloque singulier avec leur médecin ou avec d’autres professionnels de santé, adapté à leur propre cas, soit complété par des informations standardisées ? Il est vrai que la tendance actuelle est à la délégation des tâches, dont les mutuelles sont très demandeuses. Elle est aussi à la médecine en fiches, laissant penser que tous les patients sont identiques et qu’une démarche uniformisée, moins coûteuse, est susceptible de répondre à tous les cas. Les nombreuses jurisprudences en droit de la santé semblent indiquer que tel n’est pas le cas et que tout est loin d’être aussi simple.
Pour les mutuelles, il n’est pas question pour ce numéro d’être un simple service d’écoute, même si ces malades ont souvent besoin d’être écoutés et rassurés avec de simples paroles compréhensives. C’est bien d’information médicale dont il s’agit.

Dans quelle mesure le secret médical sera-t-il respecté ? La Mutualité française assure que l’anonymat et la confidentialité seront respectés. Comment est-il possible de donner une information médicale à un patient, en lui proposant si besoin de transmettre des documents par boîte postale ou sous forme électronique, sans recueillir des informations propres à l’identifier ? Si une erreur dans l’information délivrée au malade se fait jour, dans quelle mesure la responsabilité du conseiller sera-t-elle engagée, d’autant qu’il ne sera pas en mesure d’identifier l’appelant ? Les conversations téléphoniques seront-elles enregistrées et les numéros d’où appellent les clients de la mutuelle répertoriés pour qu’une traçabilité soit possible ? Que deviendront les documents transmis par les patients ? Il est même proposé à la personne qui appelle de lui adresser des brochures ou de lui envoyer une réponse à une question à laquelle le conseiller ne pourrait pas répondre : difficile dans ces conditions de respecter l’anonymat.
Si les différentes mutuelles disposent d’un service médical autorisé à collecter ce type d’informations, sous la responsabilité d’un médecin qui doit veiller au respect du cloisonnement entre les données de santé personnelles des clients et les services chargés de l’administratif et du remboursement, que penser du fonctionnement d’un organisme comme « Priorité santé mutualiste » ?
Même si le patient, client d’une mutuelle, exerce son libre choix en appelant le numéro mis à sa disposition, qui l’informera du risque encouru de voir être réalisé un éventuel recoupement entre son dossier et son identité ? Il peut être intéressant de savoir qu’un client est fumeur ou qu’il présente des risques cardio-vasculaires.  Certes, les mutuelles ne sont pas des assureurs privés, mais les diverses offres disponibles dans ce domaine laissent parfois penser que les frontières entre ces deux mondes tendent à s’estomper…
Que penser du code d’accès « permettant d’identifier l’appelant comme un adhérent d’une mutuelle de la Mutualité française » ? Individuel, il permet d’identifier chaque client, unique pour une mutuelle donnée ou pour tous les clients de la Mutualité française, il sera vite connu du grand public, diffusé et utilisé par n’importe qui, se substituant ainsi à des initiatives publiques offrant pourtant des garanties de sérieux et d’impartialité, comme Cancer ou Tabac info service.

La Mutualité française propose que son conseiller oriente les patients vers un établissement plutôt que vers un autre à l’aide d’un classement établi grâce à une évaluation de la qualité, basée sur des critères objectifs recommandés par des sociétés savantes indépendantes. Il est intéressant de constater, qu’alors que le médecin du patient n’a pas le droit de lui conseiller un professionnel de santé, un groupement de mutuelles, en se basant directement sur les données de santé d’un patient, peut orienter un malade vers ses centres mutualistes… Dans ces conditions, on comprend que la santé visuelle soit le prochain thème traité par cet organisme. Le marché de l’optique est très concurrentiel et il existe un grand nombre d’opticiens mutualistes sur le territoire français. Il est préférable de s’assurer que les adhérents disposent bien de cette information, même si elle est fournie avec d’autres propositions.

Autre élément qui peut surprendre : des médecins tabacologues disponibles par téléphone pour mettre en place un programme d’accompagnement personnalisé et assurer un suivi. Voilà qui est louable, les médecins tabacologues libéraux seront ainsi déchargés de leur travail… Il en est de même pour le programme d’accompagnement personnalisé par téléphone « équilibre alimentaire » et les diététiciens.
D’autant qu’une grande campagne de publicité est prévue à partir du 4 juin 2009, les mutuelles, contrairement aux médecins, ayant le droit d’user de ce moyen pour promouvoir leur information médicale. Elle est « construite autour d’une question clef : “En matière de santé, êtes-vous sûr d’être bien informé ?”. La finalité est de créer un réflexe dans l’esprit du public : je me pose une question sur ma santé ou celle d’un proche, j’appelle Priorité santé mutualiste ».

Avant, quand on avait un problème de santé, on appelait son médecin. Maintenant, on appellera le conseiller de sa mutuelle… Véritable gain de qualité pour le système de santé français ?

Assurance vieillesse : l’état de santé de l’assuré relève bien du secret professionnel

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Secret professionnel et données de santéUne nouvelle circulaire vient rappeler, aux agents des caisses régionales d’assurance-maladie, les informations relevant du secret professionnel en matière d’assurance vieillesse. Cette circulaire no 2008/65 du 18 novembre 2008 redonne les principes de base et les règles relatives au secret professionnel applicable aux renseignements détenus par les caisses du régime général de la sécurité sociale en matière d’assurance vieillesse.

L’état de santé de l’assuré, comme son état civil, son adresse, ses ressources, son patrimoine ou les renseignements relatifs à son compte bancaire font partie des informations couvertes par le secret. Cela n’empêche pas une liste impressionnante d’organismes de pouvoir y avoir accès. Des cas particuliers sont abordés comme, par exemple, que faire si un député demande des informations relatives à un assuré. Un médecin ne peut pas accéder à ces informations. Il faut dire que le préfet non plus. Le descendant de l’assuré doit attendre que ce dernier soit mort pour pouvoir obtenir des informations et, encore, sous conditions.

On imagine facilement l’intérêt qu’ont ces données, même anonymisées et agrégées, quand on sait que les complémentaires santé ont souhaité en obtenir l’accès aux données de remboursement de la Sécurité sociale, par exemple. C’est grâce à un arrêté dont l’intitulé et le contenu ne laissent pas deviner à quel point cette décision est importante que cela leur est devenu possible. L’arrêté du 16 octobre 2008 relatif à la mise en œuvre du système national d’information interrégimes de l’assurance maladie (rectificatif), paru au Journal officiel du 1er novembre 2008, règle tout en quelques mots :

Rectificatif au Journal officiel du 28 octobre 2008, édition électronique, texte no 11, dernière ligne de l’article 3 :
Au lieu de : « – les membres de l’institut des données de santé (IDS)… »,
Lire : « – les membres des membres de l’institut des données de santé (IDS)… ».

Ces informations intéressent les mutuelles, car elles vont en tirer des études afin de « contribuer à l’amélioration de la qualité des soins, à la gestion du risque et à la maîtrise de la dépense » d’après le chef de l’État. Ces données permettraient surtout aux mutuelles de savoir qui faire payer pour rester bénéficiaires.