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Travail et santé des médecins : lutter contre les idées fausses

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Travail et santé du médecinLes a priori et les idées fausses concernant la santé et le travail des médecins libéraux sont légion. C’est pour cette raison que l’enquête réalisée par les conseils départementaux de l’ordre des médecins de Seine-Maritime et de l’Eure est particulièrement intéressante, d’autant qu’elle porte sur un échantillon représentatif des médecins libéraux exerçant en Haute-Normandie. Malgré le charme des falaises d’Étretat, de la cathédrale de Rouen et du jardin de Claude Monet, cette région offre l’une des densités médicales les plus basses de France.

Dans cette analyse, les caractéristiques générales de la population de libéraux étudiée sont classiques : moyenne d’âge un peu au-dessus de 51 ans ; 34 % de femmes et 65 % de généralistes.

C’est une médecine de proximité qui prévaut avec 55 % des praticiens n’exerçant pas dans une « grande » ville (> 50 000 habitants) et le cabinet de groupe est déjà la méthode plébiscitée par ces professionnels (63 %). Ces praticiens voient en moyenne 26,8 patients par jour avec une durée moyenne de travail pour les hommes de 53 heures pour 5 jours de travail par semaine. C’est principalement le soir qu’ils remplissent leurs obligations de formation médicale continue (FMC). À cela viennent s’ajouter près de 8 heures de lectures scientifiques par mois. Sur ces points, il serait néanmoins intéressant de savoir ce qui a été considéré comme de la FMC et comme de la littérature scientifique. Les praticiens sont submergés par des publications gratuites dont la rigueur scientifique cède parfois la place aux intérêts marketing des éditeurs, sachant que ces derniers tirent leur financement des espaces publicitaires vendus à l’industrie pharmaceutique. Les soirées qui ne sont pas organisées par des instances indépendantes peuvent, elles aussi, difficilement être considérées comme une FMC objective. Les médecins ont néanmoins bien intégré la notion de formation continue et il est étonnant que tout ait été remis en question récemment par le gouvernement.
Avec 6,4 semaines de vacances par an, les praticiens libéraux, qui ne bénéficient pas de repos compensateurs, n’ont pas à rougir. Sans compter les gardes, avec un temps de travail moyen par jour de plus de 10 heures, on peut même s’étonner que ces professionnels n’aient pas envie de partir plus souvent en vacances. On leur reproche pourtant souvent de ne pas suffisamment assurer la continuité des soins. Il faut dire que 84 % d’entre eux éprouvent des difficultés à trouver un remplaçant. Cela ne devrait d’ailleurs pas aller en s’améliorant puisque de nouvelles contraintes pourraient bientôt peser sur les remplaçants.
83 % des généralistes assurent des gardes. On peut constater que le vieillissement de la population et sa féminisation ne vont pas dans le sens de la permanence des soins puisque les praticiens de moins de 50 ans prennent, en moyenne, moins de gardes que les autres (ce qui peut se comprendre) et que les femmes ne sont que 56 % à participer à ce service. Les plus de 50 ans sont 34 % à aspirer à la retraite…

Les praticiens haut-normands n’hésitent pas à exprimer leur malaise concernant leurs conditions de travail. 64 % des généralistes se plaignent du retentissement de leurs horaires de travail sur leur vie privée. Ils sont pessimistes sur leur capacité à travailler dans de bonnes conditions à brève échéance et alors que la démographie médicale semble poser problème, 13 % d’entre eux pensent à quitter la profession et 21 % à changer de mode d’exercice. Ils sont près de 60 % à avoir peur de commettre des erreurs et 64 % reconnaissent avoir l’esprit occupé par leur travail au moment du coucher. Il faut dire que 87 % expliquent que les exigences de leur métier interfèrent dans leur vie privée.

Pour ce qui est de leur santé, 45 % estiment que leur état de santé est moins bon qu’il y a 5 ans et la moitié des sondés s’attendent à ce que leur santé se dégrade. 29 % ont des épisodes dépressifs liés au travail et 69 % des praticiens souffrent de périodes d’épuisement pour les mêmes raisons. Au sein de la population étudiée, les problèmes ostéoarticulaires sont les plus fréquents (64 %), juste devant les origines digestives (31 %) et les troubles anxio-dépressifs (27 %). C’est l’automédication qui prime et le retentissement sur le travail est faible puisque le nombre de jours d’absence au travail, par médecin et par an, est en moyenne de 4,1. Bien qu’ils puissent être leur propre médecin traitant, seuls 20 % en ont désigné un.

Alors qu’en moyenne 79 % des praticiens libéraux sont satisfaits de leur formation initiale, on peut s’amuser de l’ « impérieuse nécessité » de réformer les études de médecine prônée par des gens qui n’ont pas l’expérience du terrain.

Enfin, le chiffre le plus marquant : seuls 16 % de ces médecins libéraux s’estiment reconnus par les pouvoirs publics…