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Wikileaks : pots-de-vin et pots à pharmacie

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Reflet sur la vitrine d'une pharmacie slovaqueQui n’a pas entendu parler de l’affaire Wikileaks et de ses centaines de milliers de documents confidentiels de la diplomatie américaine mis à la disposition des médias internationaux, puis du grand public, par Julian Assange ? Les 251 000 câbles diplomatiques révèlent au fil de leur dépouillement bien des secrets. L’un des derniers en date concerne les pharmacies slovaques et vient de l’ambassade des États-Unis à Bratislava, capitale de la Slovaquie, comme l’explique The daily.sk dans son édition en ligne du 5 septembre 2011. Il y est question de l’achat du vote de parlementaires de ce pays par un groupe financier afin que soit adoptée une loi permettant d’ouvrir le capital des officines libérales à des investisseurs ne disposant pas du statut de pharmacien, alors que jusque-là, seule une personne possédant un diplôme d’apothicaire pouvait détenir une pharmacie.

Le groupe financier Penta aurait offert, à partir d’avril 2005, environ 66 000 euros à plusieurs députés indépendants pour les amener à voter pour l’adoption de six textes de loi visant à réformer le système de santé slovaque, selon l’ambassade américaine. Cette dernière s’appuie sur des informations provenant d’une source digne de confiance ayant des liens avec Penta, d’après le câble diplomatique.

Scott Thayer, chargé d’affaires à l’ambassade à cette époque, fait état de conjectures sur ces achats de vote par Penta, société contrôlant indirectement trois des cinq assureurs santé slovaques à cette époque et se tenant prêt à acquérir plus d’une centaine d’officines dans le pays.

Voilà qui arrive à point nommé pour les pharmaciens slovaques qui tentent de s’opposer à cette réforme doit être à nouveau débattue en septembre au parlement. Ils entendent lutter contre la possibilité offerte aux grands groupes financiers de créer des chaînes de pharmacies offrant à leurs clients des primes de fidélité ou des rabais en tout genre. Ils estiment que les exploitants de pharmacie ne doivent être autorisés à n’en posséder qu’une, comme c’est la règle dans la plupart des pays de l’Union européenne. Ils disent craindre pour leur survie et pour la qualité de service offerte aux clients. Un argument que semble confirmer le câble dévoilé par Wikileaks dans lequel il est précisé qu’une telle ouverture du marché des pharmacies viserait à en exclure, à terme, les pharmaciens indépendants.

La société Penta s’est empressée de démentir ces informations. Elle n’a d’intérêts que de 80 pharmacies (sous l’enseigne Dr. Max) sur les 1 800 que compte le pays et dit ne pas vouloir voir disparaître les officines indépendantes.

L’ouverture du capital officinal à des non-pharmaciens est un débat sur lequel la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a déjà eu à se pencher (affaires jointes C-171/07 et C-172/07, 19 mai 2009), estimant que c’étaient aux législations nationales que revenait le choix. Au regard des enjeux financiers, il est évident que les uns et les autres ne vont pas manquer de continuer à exercer diverses pressions sur les instances politiques en fonction des intérêts qui leur sont propres. Reste à espérer que les intérêts de la santé publique et des patients ne soient pas oubliés dans tout ça.