Articles tagués ‘pharmaceutique’

Vaccin contre la grippe A(H1N1) : la responsabilité des laboratoires atténuée en cas d’effets indésirables

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Responsabilité et vaccin contre la grippe A(H1N1)Il n’y a pas qu’aux États-Unis que les fabricants de vaccins contre la grippe A(H1N1) ont obtenu que leur responsabilité ne soit pas engagée en cas d’effets indésirables graves ou non durant la campagne d’immunisation. Le gouvernement français a pris les mêmes engagements comme le révèlent les contrats passés entre les industriels et l’État rendus publics après que le journal Le Point ait saisi la commission d’accès aux documents administratifs pour réussir à les obtenir. Les autorités de santé semblent ainsi montrer qu’elles ont une confiance dans ces produits qui va au-delà même de celle des laboratoires eux-mêmes…

Dans plusieurs de ces contrats figure une clause de responsabilité qui remet en question la responsabilité des laboratoires signataires du fait de produits défectueux. C’est la solidarité nationale, donc les contribuables, qui devront prendre en charge l’indemnisation des éventuelles victimes d’effets indésirables. La situation de pandémie et l’urgence estimée par les pouvoirs publics de la vaccination seraient à l’origine de cette clause pour chacun des vaccins achetés. Dans le document reproduit ci-après, le “titulaire” correspond au laboratoire ayant signé le contrat :

« […] le titulaire s’engage à demander l’autorisation de mise sur le marché et à accomplir toute démarche de droit en vue de l’obtenir. Une fois l’autorisation de mise sur le marché obtenue, le titulaire s’acquittera de toutes les obligations du titulaire d’une telle autorisation telles que prévues dans le Code de la santé publique, y compris les obligations de pharmacovigilance.
L’administration déclare que l’utilisation des vaccins objet du présent marché ne se fera qu’en cas de situation épidémiologique le nécessitant. Dans ces conditions, les opérations de vaccination de la population seront décidées par la seule administration et seront placées sous la seule responsabilité de l’État.
Dans ce cadre, le titulaire est, en principe, responsable du fait des produits défectueux.
Toutefois, à titre dérogatoire et considérant les circonstances exceptionnelles qui caractérisent l’objet du présent marché, l’État s’engage à garantir le titulaire contre les conséquences de toute réclamation ou action judiciaire qui pourraient être élevées à l’encontre de ce dernier dans le cadre des opérations de vaccination sauf en cas de faute du titulaire ou sauf en cas de livraison d’un produit non conforme aux spécifications décrites dans l’autorisation de mise sur le marché ou, à défaut d’autorisation de mise sur le marché, aux caractéristiques du produit telles qu’elles figurent dans le dossier d’autorisation de mise sur le marché dans l’état où il se trouvait au moment de chaque livraison. »

Pourquoi une telle clause pour des produits que les fabricants disent issus des procédés de fabrication des vaccins contre la grippe saisonnière, des produits présentés comme sans réel danger ? Pourquoi l’État donne-t-il sa garantie aux laboratoires s’ils étaient poursuivis devant la justice pour des vaccins utilisés de façon massive pour une grippe dont le taux de mortalité est inférieur à celui de la grippe saisonnière ? Il y a là des questions que ne manquent pas de se poser de nombreux juristes et professionnels de santé…

 

L’industrie pharmaceutique paye les médecins pour prescrire plus de médicaments

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Les médecins russes achetés par l'industrie pharmaceutique ?Plusieurs milliers de médecins sont, d’une façon ou d’une autre, rémunérés par l’industrie pharmaceutique et certains ont même des formulaires imprimés prêts pour les laboratoires. « Ces revenus devraient être interdits par la loi et des règles de déontologie plus strictes mises en place ». « Il doit être mis fin à cette pratique déplorable ». C’est ce qu’a déclaré le premier ministre Vladimir Poutine à l’occasion d’une réunion sur le développement de l’industrie pharmaceutique, car il est question des professionnels russes et non des praticiens français, bien entendu.

L’ancien président russe va plus loin puisqu’il estime qu’un spécialiste, qui donne son avis en tant qu’expert ou qui participe aux commissions d’évaluation pour un nouveau médicament, ne doit pas être rétribué par les laboratoires. Actuellement, selon lui, les membres de ces conseils d’experts ne se soucient pas de la qualité des produits pharmaceutiques, mais soutiennent simplement le produit de la société qui leur verse une indemnisation.

Ces affirmations ne sont pas gratuites. La vente de médicaments aux particuliers est un marché qui devrait connaître une très forte croissance dans les prochaines années en Russie et Vladimir Poutine ne veut pas que ces dépenses impactent de façon importante le budget de l’État. Pour ne plus avoir à importer 90 % des médicaments utilisés pour répondre aux programmes fédéraux d’achat de médicaments, le premier ministre souhaite que ces derniers et surtout leurs génériques soient produits sur place. Il est prêt à investir 700 millions de roubles pour subventionner des prêts pour le développement technologique et l’amélioration des entreprises pharmaceutiques en Russie. Les usines russes ont besoin d’évoluer, car la plupart des médicaments fabriqués dans le pays ne répondent pas aux normes internationales. Pour voir leurs parts de marché augmenter, les laboratoires pharmaceutiques russes doivent améliorer leurs standards de qualité en s’alignant sur ceux des autres pays développés.

Enfin, la transparence et la concurrence doivent permettre au prix des médicaments de baisser. Dans la région de Chelyabinsk, il a suffi que le service “antimonopole” s’intéresse à la vente d’un important lot de médicaments pour que son prix soit divisé par cent. Une clarification des procédures sur le marché des produits pharmaceutiques est donc indispensable.

Dans un pays où l’alcool fait des ravages, où les discours politiques servent plus souvent à se donner une image qu’à promouvoir de réels changements et où la corruption est connue pour son ampleur, il n’est pas sûr que les paroles de Vladimir Poutine fassent réellement bouger les choses. Il est avant tout question d’exercer des pressions pour redistribuer les richesses du marché des médicaments vers des intérêts nationaux. Est-ce pour autant que de telles mesures profiteront à la population ? Rien n’est certain.
Vladimir Poutine semble vouloir s’inspirer de la politique menée par la France en pointant du doigt les médecins. Mais dans son cas, reprocher aux praticiens russes d’être corrompus, surtout si c’est vrai, aide peut-être à détourner l’attention de l’opinion de compromissions bien plus personnelles…

 

Pour ceux qui lisent le Russe, la source de cet article sur le site de RosBusinessConsulting.

Les médicamenteurs

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Presse

Les dessous de l'industrie pharmaceutiqueC’est à la chaîne de télévision Public Sénat que l’on doit la rediffusion d’un documentaire intitulé Les médicamenteurs. Porté à l’écran pour la première fois par France 5 en juin 2009, ce travail original offre une vision de l’industrie pharmaceutique différente de celle habituellement proposée par les médias.

Ceux qui s’intéressent au droit de la santé ne manqueront pas le discours du patron d’un grand laboratoire français rappelant à l’ordre les députés qui pourraient être tentés d’énoncer quelques critiques à l’égard du secteur du médicament alors qu’il a donné une industrie pharmaceutique « digne de ce nom » en trente-cinq ans. « […] Vous les députés qui adorez venir inaugurer mes centres de recherche et mes usines, j’aimerais que vous vous en souveniez un peu quand vous êtes assis à l’Assemblée nationale et quand vous votez les lois. » Il faut dire qu’être félicité par Nicolas Sarkozy pour le travail effectué « main dans la main » peut donner l’impression à un grand patron que le parlement est là avant tout pour l’aider et n’a pas à le critiquer. Certains journalistes, manquant sans doute de complaisance, ont eux aussi droit à leur part de reproches…

En suivant le documentaire, on aimerait peut-être que les critiques des élus soient plus nombreuses et que les facteurs économiques ne soient pas systématiquement favorisés aux dépens de la santé publique. Les exemples des médicaments Vioxx et Acomplia laissent en effet penser qu’il existe des pratiques fort surprenantes sur le marché des médicaments. Dans sa présentation du documentaire, France 5 n’hésite pas à écrire : « Essais cliniques tronqués, publications médicales biaisées, experts rétribués, marketing forcené, médecins harcelés… Tout est bon pour vendre un médicament. »
Les organismes de contrôle, dont l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps), sont aussi montrés du doigt et leurs défaillances mises en lumière. Comment ne pas trouver gênant que 80 % du budget de la commission des autorisations de mise sur le marché (AMM) des médicaments, dépendante de l’Afssaps, vienne de l’industrie ? Les pouvoirs publics et le monde politique dans sa grande majorité sont sceptiques quant à l’indépendance des médecins quand ils sont rétribués ou même simplement démarchés par les laboratoires, mais ne voient aucun inconvénient à ce que des instances de contrôle officielles soient financées par cette même industrie… D’autres exemples viennent étayer ce qui peut apparaître comme « démonstrations de collusion » entre les laboratoires et les instances de contrôle.

Pour ceux qui n’auraient pas l’occasion de voir ce documentaire lors de ces prochaines rediffusions, il faut espérer que cette coproduction de France 5 — Beau comme une image sera rapidement mise en ligne afin que chacun puisse se faire sa propre opinion.

Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2010 à la loupe

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2010 a été rendu public et il est plein de surprises. Ceux qui s’intéressent aux chiffres s’en remettront au texte pour savoir où en sont les déficits, les objectifs de dépenses et les prévisions de recettes. Les autres vont pouvoir découvrir ce que cette première mouture, qui ne fait actuellement que 76 pages, propose. La grippe A, les dépenses de transport sanitaire et les fraudes sont très présentes dans ce PLFSS 2010. Gageons que ce texte comptera bien des articles supplémentaires lorsqu’il sera passé entre les mains des parlementaires.

Indépendance de la formation médicale ?

Écrit par Charles Duchemin le . Dans la rubrique Humeur

Indépendance des médecins vis-à-vis de l'industrie pharmaceutiqueIl est fréquent d’entendre dire au sein des administrations que les médecins sont influencés, quand ce n’est pas “achetés”, par l’industrie pharmaceutique. Cela expliquerait une partie du déficit de la Sécurité sociale et aurait justifié la charte de la visite médicale. Les textes relatifs à feu la formation médicale continue (FMC) avaient été votés au parlement pour qu’elle soit en apparence indépendante et la loi anticadeau interdit d’offrir au médecin un stylo vantant un produit, même accompagné d’une notice détaillée… Hypocrisie que tout cet arsenal législatif ? On pourrait le croire en fréquentant des congrès validant pour la FMC ou plutôt pour le développement professionnel continu (DPC), encore plus indépendant, où les allées menant aux salles d’enseignement sont bordées de stands chamarrés, aux tables chargées de gadgets clignotants et de blocs de post-it offerts par l’industrie…

La crise semble avoir changé cette volonté d’indépendance. Pour s’en convaincre, il suffit d’avoir le courrier électronique non désiré du centre de lobbying (!), d’étude et de formation (CLEF), « centre de formation médicale » annonçant un colloque intitulé « Pandémie grippale — Adaptation du plan aux réalités pandémiques » sous le haut patronage et honoré de la présence du ministre de la santé Roselyne Bachelot-Narquin. Pas de mentions légales sur le site du CLEF, mais une liste impressionnante de prestigieux partenaires de l’industrie pharmaceutique, dont certains sont très impliqués dans les traitements ou les vaccins antigrippaux. Les orateurs, quant à eux, semblent être pour certains des habitués des formations proposées par le centre de lobbying, si l’on en croit la liste de ces dernières pour 2009. Tout cela est tellement étonnant, que l’on pourrait croire à un canular…

Peut-être est-il important de justifier les stocks de Tamiflu constitués et les commandes de vaccins qui devraient permettre à une partie de l’industrie pharmaceutique de ne plus se séparer de membres de sa force de vente risquant de venir grossir le nombre de chômeurs ? Même si la France n’a pas tiré pleinement parti des bénéfices liés à la pandémie, il est raisonnable de penser que ces bénéfices profiteront à la formation médicale des praticiens du pays des Lumières. Le lobbying est là pour nous en convaincre…

Accord entre l’Europe et les États-Unis sur les essais cliniques

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Contrôle commun americano-européen des bonnes pratiques pour les essais cliniquesL’agence européenne du médicament (European Medicines Agency, EMEA) et l’US Food and Drug Administration (FDA) se sont mis d’accord le 31 juillet 2009, dans un document intitulé EMEA-FDA GCP Initiative, pour prendre en considération les informations recueillies chacun de leurs côtés dans le cadre des protocoles permettant de mettre sur le marché un médicament. Il faut dire que dans la plupart des cas, ce sont les mêmes études cliniques qui sont demandées pour obtenir les Marketing Authorisation Applications (MAAs) de l’agence européenne ou les New Drug Applications (NDAs) et les Biologics Licence Applications (BLAs) de l’administration américaine.

En lisant le communiqué commun à ces deux agences, il est intéressant de constater que c’est à cause de la mondialisation et du manque de moyens dont elles disposent pour effecteur des contrôles des essais cliniques, qu’elles ont décidé d’étudier comment s’allier. Seul un petit échantillon de sites et d’essais cliniques peut être contrôlé comme répondant à de bonnes pratiques cliniques ou étant menées de façon éthique. En échangeant des informations, la FDA et l’EMEA pourraient accroître leur synergie et leur efficacité en travaillant en synergie.

À partir du 1er septembre 2009 et dans le cadre d’un accord d’échange d’informations confidentielles signé en 2005 entre la Commission européenne, l’EMEA et la FDA, dix-huit mois vont être consacrés à établir des relations de confiance entre les deux agences concernant les informations recueillies par l’une et l’autre concernant le respect des bonnes pratiques cliniques. Il s’agit d’une phase pilote durant laquelle le planning des contrôles sera mis en commun afin d’éviter des récurrences. Des inspections seront aussi menées en commun afin que chacun puisse apprécier le travail de l’autre, bénéficier de son expérience et tisser des liens de confiance. Une réflexion basée sur ces échanges d’informations sera conduite afin de savoir quels sont les points sur lesquels les convergences sont les plus fortes. Un bilan sera réalisé à la fin de cette première phase.

L’EMEA et la FDA cherchent des partenaires pour mener à bien leurs premières inspections communes. Ce qui peut paraître simple sur le papier peut se révéler délicat à l’usage. La concurrence industrielle peut faire que l’on n’ait pas envie que des informations sur un produit soient à la disposition des autorités d’un autre pays trop rapidement. L’harmonisation de la qualité des contrôles, potentiellement tirée vers le haut par de telles procédures, peut aussi ne pas être appréciée par certains acteurs de la filière. Par contre, le fait de n’avoir à fournir qu’une fois de volumineux dossiers et n’avoir à traiter qu’avec une seule administration pourrait intéresser les laboratoires pharmaceutiques. Une initiative à suivre…

Des doutes sur les revues médicales à comité de lecture

Écrit par Matthew Robinson le . Dans la rubrique Evolution

Manipulation de la presse médicale ?Une enquête du magazine des sciences de la vie The Scientist, reprise par Pharmacritique, remet sérieusement en cause la fiabilité des revues d’un grand éditeur de la presse médicale. C’est la revue Australasian Journal of Bone and Joint Medicine (AJBJM) qui est à l’origine de cette affaire. Présentée comme une revue à comité de lecture, cette publication a, en fait, été créée et financée par un grand laboratoire pharmaceutique. Elle n’est pas la seule puisque d’autres publications dans la série des Australasian Journals of sont basées un principe assez semblable. Les laboratoires pharmaceutiques achètent des annonces publicitaires et obtiennent ainsi un puissant droit de regard sur la ligne éditoriale de la revue qui les intéresse. Pendant cinq ans, ces revues médicales n’auraient quasiment publié que des articles choisis et financés pour servir les intérêts de l’industrie, sous couvert de journaux présentés comme indépendants et impartiaux. Certains numéros ont même été distribués gracieusement à tous les généralistes australiens.

Si les médecins sont habitués à garder un oeil critique vis-à-vis des divers journaux et revues qu’ils reçoivent gracieusement, ils attachent plus de crédit aux revues à comité de lecture publiées par les grands éditeurs médicaux, surtout quand celles-ci bénéficient d’un impact factor. Les experts médicaux du monde entier et les juristes vont aussi régulièrement chercher leurs sources dans cette littérature scientifique pour estimer quelles sont les données acquises de la science. Contrôler le contenu éditorial de revues censées être indépendantes, c’est avoir le pouvoir d’influencer des prescriptions, des recommandations de bonne pratique et, parfois, la décision d’un magistrat ou d’une institution. Que les bureaux d’un grand éditeur médical se prêtent à de tels agissements pour voir augmenter son chiffre d’affaires fait planer un doute sur la crédibilité de ce système.

Les revues à comité de lecture sont l’un des pilliers de la diffusion du savoir auprès des professionnels de santé. Elles ont néanmoins certaines limites. Le phénomène de la littérature grise est l’une d’elles. Spontanément, certaines équipes préfèrent ne pas publier les résultats d’études n’étant pas favorables à un traitement dans ces revues pour ne pas avoir à subir la pression d’un laboratoire. Cette autocensure influence même les recommandations de bonne pratique, comme l’a montré un article du Lancet.
La médecine n’a pas encore son générateur automatique d’articles, comme c’est le cas pour l’informatique, mais elle a aussi son lot d’auteurs publiant de fausses études, acceptées par les comités de lecture. Scott S. Reuben, par exemple, chef de service d’un centre anti-douleur du Massachusetts, a utilisé de fausses informations dans ses recherches, publiées dans plusieurs journaux scientifiques entre 1996 et 2008, permettant à des médicaments contestés de rester en vente plus longtemps.

Face à de telles pratiques, il n’est pas certain que les cours de « lecture critique » mis en place au sein des facultés de médecine soient suffisants. Ils ont néanmoins le mérite de faire prendre conscience aux futurs praticiens qu’il faut toujours savoir remettre en question la parole de ses maîtres.