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Nouveau calendrier pour le très controversé vaccin contre l’hépatite B

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

calendrier vaccinal contre l'hépatite BAlors que les jurisprudences et les doutes scientifiques donnaient l’impression que le principe de précaution allait s’appliquer pour la vaccination contre l’hépatite B, c’est une tout autre voie qu’a choisi de suivre l’Institut national de veille sanitaire (InVS).

Le bulletin épidémiologique hebdomadaire du 20 avril 2009, publié par l’InVS, comprend le calendrier des vaccinations et recommandations vaccinales 2009
selon l’avis du Haut conseil de la santé publique qui intègre de nouvelles recommandations pour la vaccination contre l’hépatite B. Pour justifier ces nouvelles dispositions, figurent au bulletin les avis du Haut conseil de la santé publique relatif à la vaccination contre l’hépatite B du 2 octobre 2008 et relatif à la vaccination de rattrapage contre l’hépatite B chez l’adolescent utilisant un schéma à deux doses du 13 février 2009. Pour le Haut conseil de la santé publique, les bénéfices de la vaccination sont supérieurs aux risques que présente le virus de l’hépatite B (hépatite chronique ou fulminans, cirrhose, etc.).

Pour le nouveau calendrier, la stratégie doit s’articuler autour de deux axes en France. La vaccination de tous les nourrissons et le rattrapage des enfants et adolescents jusqu’à l’âge de 15 ans révolus au lieu de 13 ans jusque-là sont les premiers objectifs. Ils devraient permettre de contrôler à plus long terme l’hépatite B. L’autre objectif est de vacciner les personnes à risque élevé d’exposition, après les avoir identifiées. Les personnes qui, dans un établissement ou organisme public ou privé de prévention de soins ou hébergeant des personnes âgées, exercent une activité professionnelle les exposant à des risques de contamination doivent être immunisées, comme le stipule l’article L 3111-4 du code de la santé publique. Ce texte prévoit aussi que tous les élèves et tous les étudiants d’un établissement préparant à l’exercice des professions médicales et des autres professions de santé, déterminé par l’arrêté du 15 mars 1991, qui sont soumis à l’obligation d’effectuer une part de leurs études dans un établissement ou organisme public ou privé de prévention ou de soins, doivent être vaccinés.

Même si de telles mesures semblent appuyer l’idée que les autorités sanitaires pensent que la vaccination est sans danger, rien ne dit que les prochaines jurisprudences en matière de sclérose en plaques et de vaccin contre l’hépatite B ne continueront pas à opposer le principe de précaution aux données scientifiques.

Cabinet du médecin et parties communes d’un immeuble

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Jurisprudences

Cabinet médical et parties communes d'un immeubleIntéressante note sous le résumé no 440 du bulletin d’information no 699 de la Cour de cassation du 1er avril 2009 pour celui dont le cabinet médical se situe au sein d’un immeuble, surtout s’il le loue. Il peut, en effet, arriver que des patients ou des personnes accompagnant un malade causent des dégradations ou des nuisances au sein des parties communes de l’immeuble où est situé le lieu d’exercice du praticien et la question de la responsabilité de ce dernier a parfois fait l’objet d’âpres débats entre voisins.

Dans son pourvoi no 07-15508, la Cour de cassation s’est penchée sur le cas d’un médecin dont le bailleur a voulu résilier le bail du cabinet alors qu’il avait autorisé le praticien à exercer son Art dans l’appartement loué suite à des troubles constatés dans les parties communes de l’immeuble. Elle a décidé que « Les patients ne constituant pas des personnes de la maison au sens de l’article 1735 du code civil, un médecin, preneur à bail d’un local dans lequel le bailleur lui a donné l’autorisation d’exercer sa profession, ne peut, en l’absence de toute faute qui lui soit imputable, être personnellement tenu pour responsable du comportement de certains de ses patients dans les parties communes de l’immeuble ». En ce faisant elle ne s’oppose pas au fait que le preneur est tenu d’user de la chose louée en bon père de famille et qu’il est tenu des dégradations et des pertes qui arrivent par le fait des personnes de sa maison, mais elle qualifie les patients comme n’étant pas des gens de la maison au sens juridique du terme.

La note du bulletin d’information de la Cour explique qu’« Aux termes de l’article 1735 du code civil, le preneur est tenu des dégradations et des pertes qui arrivent par le fait des personnes de sa maison ou de ses sous-locataires. Le régime de responsabilité du fait d’autrui qui en découle est particulièrement sévère, puisque le preneur ne peut s’exonérer de sa responsabilité en démontrant qu’il n’a personnellement commis aucune faute et qu’il répond des dégradations, qu’elles aient été commises volontairement ou non par les “personnes de sa maison”.
La notion de “personnes de la maison” a fait l’objet d’une acception large de la part de la Cour de cassation, qui y a inclus, en dehors des membres du strict cercle de famille et des domestiques demeurant sur place, toute personne hébergée par lui ou l’artisan qu’il avait volontairement introduit pour y exécuter une réparation.
Dans un arrêt du 16 juin 2004 (Bull. 2004, III, no 119), la troisième chambre civile a, en revanche, écarté que pût être considéré comme “de la maison” un invité du locataire qui ne résidait pas, fût-ce temporairement, dans les lieux loués et qui n’y était pas venu à titre professionnel à la demande du locataire.
Se posait la question de savoir si les patients d’un médecin, preneur à bail d’un local dans lequel le bailleur lui avait donné l’autorisation d’exercer sa profession, figuraient parmi les “personnes de sa maison”.
En répondant, dans l’arrêt commenté, par la négative, la troisième chambre civile a refusé de retenir que le lien contractuel qui se noue entre le médecin et la personne qui a choisi de venir le consulter fût équivalent à la relation contractuelle qui unit le locataire au professionnel dont il a sollicité l’intervention à son domicile. Elle a ainsi confirmé sa volonté de fixer des limites à la responsabilité du fait d’autrui susceptible de peser sur le preneur, en particulier lorsque, comme en l’espèce, celui-ci, en raison même de la profession libérale qu’il est autorisé à exercer dans les lieux loués, est obligé d’y recevoir sa clientèle. »

De par ses obligations déontologiques, le médecin se doit d’accueillir tous patients. Ses voisins ne peuvent donc pas lui reprocher de recevoir des personnes qui ne correspondraient pas au standing de l’immeuble au sein duquel le cabinet se situe. L’élitisme social doit rester à la porte des immeubles bourgeois où exercent des professionnels de santé.

Le fichier des professionnels de santé

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Les professions médicales et les pharmaciens dans un fichierLes fichiers ont fait couler beaucoup d’encre ces derniers mois. Le plus célèbre est sans conteste celui appelé Edvige (exploitation documentaire et valorisation de l’information générale), destiné aux forces de l’ordre. Les ordres n’avaient, quant à eux, jusque-là que des fichiers distincts. L’arrêté du 6 février 2009 portant création d’un traitement de données à caractère personnel dénommé « Répertoire partagé des professionnels de santé » (RPPS), publié au Journal officiel du 10 février 2009, a permis de créer un fichier commun à certaines professions de santé à partir des données recueillies par l’ordre des médecins, celui des pharmaciens et les autres.

Si le titre de l’arrêté peut laisser penser qu’il s’adresse à tous les professionnels de santé, l’analyse du texte montre qu’il concerne les professions médicales et les pharmaciens, mais pas les ordres des masseurs-kinésithérapeutes ou des infirmiers, par exemple.

Passé un peu inaperçu, ce nouveau fichier, habilement appelé répertoire, va pourtant lui aussi très loin en matière de droit. Très logiquement, ce fichier recense les professionnels de santé exerçant ou ayant exercé, mais il est là aussi pour lister ceux qui sont « susceptibles d’exercer ». L’une des finalités de ce répertoire est aussi de suivre l’exercice de tous ces professionnels, ceux « susceptibles d’exercices inclus ».
S’il est normal qu’un tel fichier contribue aux procédures de délivrance et de mise à jour des cartes de ces professionnels de santé, comme le texte le stipule, son intérêt économique n’a pas échappé aux différents acteurs de ce secteur. Pouvoir traiter ces données est capital et l’arrêté l’a prévu : « Permettre la réalisation d’études et de recherches ainsi que la production de statistiques relatives aux professionnels répertoriés, à partir d’une base de référence anonymisée ». La finalité des études et des recherches n’est pas définie, mais elles pourront être initiées par la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) ou par l’État. Les données recueillies par les ordres, aux frais de leurs membres, vont donc servir à des études pour les conseils de ces ordres, mais aussi pour des institutions qui peuvent avoir des intérêts opposés aux leurs.
Autre volet de ce texte : « Mettre les données librement communicables du RPPS à disposition du public au moyen d’un service de communication sous forme électronique », peut-être comme l’initiative prise par la Sécurité sociale d’associer en ligne les prix des actes médicaux et les médecins ou les chirurgiens dentistes.

Certaines données recueillies peuvent, elles aussi, surprendre : la nationalité actuelle du professionnel ou la date d’obtention de cette nationalité, par exemple. Une partie des données peut être recoupée avec le répertoire national d’identification des personnes physiques (RNIPP).
S’il existe un droit à l’oubli pour n’importe quel justiciable, il ne s’applique pas aux données recueillies puisque vont figurer au fichier les dates de début et de fin des périodes pendant lesquelles le professionnel a fait l’objet d’une mesure de suspension ou d’interdiction d’exercice et même le décès du professionnel n’implique pas la fin de ce fichage. « Les données du RPPS sont conservées pendant une durée déterminée comme suit :
― jusqu’au centième anniversaire du professionnel, si ce délai est compatible avec la condition d’une durée minimale de trente ans à compter de la date de fin de capacité d’exercice ;
― dans le cas contraire, jusqu’au trentième anniversaire de sa fin de capacité d’exercice. »  Il ne semble donc pas que ce ne soit pas les dix années suivant la date de consolidation des dommages qui intéressent ce fichier, mais on peut y voir la réminiscence d’une responsabilité trentenaire.

Il y a des fichiers moins médiatiques que d’autres. Tout dépend de ceux qui y sont répertoriés.

Médecine & Droit – Numéro 94

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Médecine & Droit

Sommaire du numéro de janvier – février 2009

CouvertureElsevier – Masson

Éditorial

Excès d’éthique ?

Jean Michaud

Protection de la personne
Le refus de soins peut-il induire une discrimination ?
La réforme annoncée de l’article L. 1110-3 du Code de la santé publique
François Vialla
Responsabilité
L’immunité indemnitaire du médecin salarié ne profite pas à son assureur.
À propos de Civ. 1, 12 juillet 2007

Nathalie Jousset, Clotilde Rouge-Maillart et Michel Penneau

Santé publique
Droit et autonomie des personnes handicapées
Larbi Benali, Michel Marchand et Sophie Gromb
Droit et médicaments
Le droit du reconditionnement des médicaments au profit des patients : entre Charybde et Scylla
Francis Mergelin, Daniel Vion et Dominique Begue

Exercice professionnel

Le dossier médical personnel (DMP) : « autopsie » d’un projet ambitieux ?

Cécile Manaouil

Agenda

Devoir d’information du médecin et pétition

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Devoir d'information des médecins envers leurs confrèresLe médecin a depuis longtemps un devoir d’information envers le patient. Comme le simple bon sens en matière d’information ne semblait pas suffire à une époque où personne n’aurait songé à remettre en cause l’autorité des mandarins hospitaliers, des dérives ont conduit le législateur à en faire une obligation légale. Depuis, l’étendue du devoir d’information du praticien ne cesse de s’étendre. Il n’est plus seulement médical, au sens de la santé ou au sens de la profession, mais il s’adresse aussi aux honoraires, à leur remboursement et à tous les professionnels de santé. Les pouvoirs exécutif et législatif usent régulièrement de ce moyen pour accroître les contraintes pesant sur les soignants libéraux. À tel point que les derniers textes n’ont plus vraiment de sens pratique et semblent n’exister que pour que les professionnels ne puissent les appliquer, permettant ainsi à n’importe quel patient mécontent de faire condamner celui qui l’a pris en charge.

Si les médecins ont pris à nouveau conscience que le devoir d’information s’appliquait envers le patient, ils ne sont pas nombreux à se souvenir qu’il doit aussi s’exercer entre confrères. Le code de déontologie et la convention ont beau prévoir l’échange de courriers et d’informations entre les professionnels de santé, cette situation, qui a pour but d’améliorer la qualité des soins, est loin d’être évidente pour les patients qui fréquentent quotidiennement le monde de la santé.

Parmi les médecins, certains ont néanmoins fini par comprendre que la communication ne devait pas servir qu’à leurs détracteurs. Depuis peu, quelques-uns ont même décidé de refaire de l’information de leurs confrères un devoir moral. C’est dans cette optique qu’il semble falloir intégrer la « Lettre ouverte aux futurs confrères » qui a fait son apparition sur le site Pétitions du web. Il s’agit en fait d’une pétition rédigée par « des médecins libéraux excédés » et signée par plus d’une centaine de praticiens. Si ce texte peut être pris comme une revendication sectorielle, il est tout de même intéressant de par son contenu. Il montre la perception qu’ont les professionnels de terrain des mesures législatives en matière de droit de la santé. Il est d’autant plus intéressant que les médecins libéraux ne manifestent qu’excessivement rarement leur mécontentement, se contentant depuis de nombreuses années de courber l’échine. Les médecins libéraux signataires invitent, par exemple, leurs jeunes collègues à exercer une activité salariée et à se détourner de la médecine libérale de proximité.

Les gouvernants ont toujours pensé que ces révoltes n’iraient pas bien loin, conforté dans cette idée par le fait que cela a toujours été le cas jusque-là au sein d’une profession où l’individualisme prime souvent l’intérêt collectif. Ce type d’actions tend toutefois à se multiplier. Le pouvoir législatif finira-t-il par en tenir compte ? Rien n’est moins sûr…

Exercice illégal de la médecine et délégation d’actes

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Jurisprudences

Médecin complice d'exercice illégal de la médecineUn médecin qui délègue la réalisation d’un acte médical à un professionnel de santé à qui la loi ne reconnait pas la compétence de l’effectuer est complice d’exercice illégal de la médecine. Beaucoup de praticiens estiment que ce type de sanction n’est que théorique et que personne ne viendra leur reprocher d’avoir demandé oralement ou fait une ordonnance à un auxiliaire médical pour qu’il exécute un acte médical. Ils en sont d’autant plus persuadés qu’ils pensent qu’ils confient cette tâche à une personne dont ils sont convaincus qu’elle est en mesure de le réaliser. Un exemple ? L’ophtalmologiste qui envoie un patient faire adapter ses lentilles de contact chez l’opticien. Ou un stomatologue qui demande à une assistante dentaire qui travaille pour lui de procéder au détartrage des dents d’un patient, comme vient de le décider la chambre criminelle de la Cour de cassation dans un arrêt du 16 décembre 2008 (no de pourvoi : 08-80453).

L’affaire jugée est d’autant plus intéressante que l’assistante dentaire est titulaire d’un diplôme de chirurgien-dentiste, mais d’un pays étranger ne permettant pas d’exercer en France, et d’un certificat de « parodontologie clinique et hygiène bucco-dentaire appliquée » délivré par une université parisienne. Malgré ces éléments qui peuvent laisser penser que l’accusée est capable de réaliser le détartrage des dents d’un patient, ce geste n’en est pas moins un acte médical et il a été réalisé à plusieurs reprises par l’assistante.
Autre point digne d’intérêt, la Cour a estimé qu’en agissant pour un médecin, l’infraction d’exercice illégal de la médecine était caractérisé et qu’il n’était pas question d’exercice illégal de la chirurgie dentaire.

Le médecin stomatologue n’ignorait pas que l’assistante dentaire n’était pas titulaire des diplômes reconnus par le droit français pour pratiquer un acte médical. Lui en ayant néanmoins confié la réalisation, la Cour a confirmé qu’il s’était bien rendu complice d’exercice illégal de la médecine.

C’est l’ordre des médecins qui a porté plainte dans cette affaire. Avait-il une dent contre le praticien ?

Concurrence et collaboration salariée des professionnels de santé

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Le Conseil de la concurrence a été consulté au sujet des dispositions du nouveau code de déontologie des masseurs-kinésithérapeutes concernant les collaborateurs salariés. Ses réponses sont très éloignées des craintes des différents ordres sur les risques d’exercer une profession de santé comme un commerce. Voici des extraits de son avis no 08-A-15 du 29 juillet 2008 relatif au projet de décret portant code de déontologie des masseurs-kinésithérapeutes.

 

 Extraits de l’avis no 08-A-15 du Conseil de la concurrence

 

85. Enfin, le Conseil de l’Ordre invoquait un dernier argument justifiant la limitation du nombre de collaborateurs salariés, fondé sur le risque de voir se développer une «logique purement financière» de la profession, en favorisant l’assistanat salarié. Le rapport précité de l’Inspection Générale des Finances montre au contraire que le développement de différentes formes de collaboration peut présenter des avantages indéniables sur un plan économique et sur celui d’une meilleure qualité des soins. En effet, les formules de rémunération mixtes fondées sur une multiplicité de méthodes de paiement (paiements à l’acte, à la capitation et salariat) permettent un meilleur contrôle de la dépense et sont, lorsqu’elles sont appliquées à un groupe de praticiens, porteuses d’une optimisation des soins.

86. Cela résulte du fait que les modalités de rémunération des praticiens influent sur la manière dont ces derniers peuvent mettre à profit l’avantage informationnel dont ils disposent par rapport à leurs patients. L’existence d’une asymétrie d’information entre le patient et le médecin entraîne un effet de demande induite de soins et le fait que des actes plus nombreux et plus coûteux que nécessaire sont réalisés. Dans un contexte de paiement à l’acte, le praticien peut être incité à réaliser davantage d’actes qu’il ne serait nécessaire ou à pratiquer des actes plus sophistiqués et donc plus chers. En revanche, lorsqu’il est payé à la capitation ou qu’il est salarié, l’incitation est inverse puisqu’il reçoit la même rémunération quel que soit son niveau d’effort et le risque est alors celui d’une sous- production de soins. Des formes de rémunération mixtes permettent donc de contrebalancer ces effets contradictoires.

87. Outre ces considérations financières, il est important de rappeler que le salariat peut constituer un mode d’accession à l’exercice d’une profession libérale. C’est le cas s’agissant des vétérinaires, des experts-comptables et des architectes. Les professionnels libéraux qui ont le projet de s’installer hésitent souvent à le faire d’emblée et éprouvent le
besoin d’acquérir une expérience aux côtés d’un professionnel déjà installé. Dans ce contexte, les modalités juridiques qui encadrent l’exercice de la profession peuvent constituer des barrières non négligeables pour les nouveaux entrants. Or, en ce qui concerne les masseurs-kinésithérapeutes, ces trois modalités d’acquisition d’une expérience pratique de l’exercice d’une profession libérale que sont le salariat, le remplacement et le statut de « collaborateur libéral » font l’objet d’un encadrement strict.

[…]

89. Le Conseil de la concurrence est donc favorable à la suppression dans le texte de l’article R 4321-133 des dispositions relatives à la limitation du nombre de collaborateurs salariés ou non.

Pour le Conseil de la concurrence, il n’est pas question de limiter le nombre de collaborateurs salariés au sein d’un même cabinet. À part pour les chirurgiens-dentistes pour qui l’article R 4127-276 du code de la santé publique prévoit qu’ils ne peuvent travailler qu’avec un seul collaborateur ou assistant, les autres professionnels de santé n’ont pas cette contrainte. Il en est d’ailleurs de même pour les collaborateurs libéraux.

Il est aussi intéressant de relever un autre élément du même avis du Conseil de la concurrence. Rien n’interdit à un professionnel de santé de salarier un autre professionnel de santé, même s’il n’exerce pas la même profession ou la même spécialité que lui.

 91. Il faut noter enfin que la disposition de l’article R 4321-111 du projet de code, bien qu’elle ne limite pas expressément la possibilité de collaboration, dans un cadre de salariat ou de subordination, de membres d’autres professions médicales auprès des masseurs-kinésithérapeutes, subordonne néanmoins cette collaboration à l’accord de la section départementale de l’Ordre. Cette rédaction étant quelque peu différente de celle prévue par la disposition législative susmentionnée et qui prévoit une communication des contrats à l’Ordre afin qu’il puisse veiller au respect des règles de déontologie, le Conseil de la concurrence est d’avis de la modifier en remplaçant la soumission pour accord par une communication.

Le Conseil de la concurrence ne se contente pas de rappeler à l’ordre les instances ordinales, il remet en cause l’État en lui remémorant ses obligations européennes.

 88. Par ailleurs, même si les services de soins de santé sont exclus de la directive européenne Services relative aux libertés d’établissement des prestataires de services et libre circulation des services dans le marché intérieur du 12 novembre 2006, les évolutions en cours au niveau européen montrent que la Commission européenne se satisfait de moins en moins des arguments relatifs à la spécificité du secteur médical français. En effet, il faut rappeler qu’en avril 2006, à la suite d’une plainte d’un groupe financier, la Commission européenne a mis en demeure le Gouvernement français de mettre fin à l’incompatibilité de la loi française relative aux Sociétés d’Exercice Libéral (SEL) avec la liberté d’établissement prévue par les traités européens. En octobre 2007, le même groupe financier a porté plainte contre l’Ordre des pharmaciens et l’Etat français pour violation du droit communautaire de la concurrence dans le domaine de la biologie médicale.

Voilà qui pourrait donner à réfléchir aux ordres qui voudraient faire pression sur leurs membres au nom de principes d’un autre âge…

Pôle santé sécurité soins du Médiateur de la République

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Médiateur et santéIl existait jusque-là une Mission pour le développement de la médiation, de l’information et du dialogue pour la sécurité des soins (MIDISS), mise en place par la Haute Autorité de santé en 2006, d’un côté, et le Médiateur de la République, d’un autre. Ces deux entités se sont réunies, début janvier 2009, pour créer un pôle santé et sécurité des soins « dédié à l’information des usagers et à la médiation entre les patients et les professionnels de la santé ». Cette fusion a pour but de renforcer le droit des patients et la sécurité des soins.

Partie d’un rôle d’information et de développement de la médiation sur les infections nosocomiales, la MIDISS a vu ses compétences élargies progressivement à l’ensemble des questions concernant la sécurité des patients. Les équipes de cette Mission viennent prêter main-forte à celles du Médiateur de la République qui peut maintenant informer et recevoir toutes les réclamations qui mettent en cause le non-respect du droit des malades ; la qualité du système de santé ; la sécurité des soins et l’accès aux soins. Tous les établissements publics et privés de santé, ainsi que la médecine de ville, sont de la compétence de cette nouvelle structure.

Il est intéressant de noter l’approche donnée à ces nouvelles missions sur le site du Médiateur de la République : « Le Médiateur de la République va désormais s’attacher à rétablir la confiance entre le monde médical et les usagers du service de santé, et à participer à l’amélioration de la sécurité des soins. […] Dans un contexte de défiance à l’égard du système de santé, il est apparu essentiel de proposer un dispositif de médiation indépendant de la sphère médicale. » On aurait pu penser qu’un Médiateur ferait preuve d’une impartialité à toute épreuve et écouterait en toute équité les deux parties. Ces remarques semblent, au contraire, pleines d’a priori.

En plus des recommandations de la Haute Autorité de santé, devenues opposables aux médecins, le Médiateur de la République rappelle qu’il a, lui aussi, un pouvoir de contrôle, voire même d’injonction, et qu’il peut formuler des recommandations. Les professionnels de santé du privé se voient donc confronter à une nouvelle formation pseudo administrative à qui ils devront rendre des comptes. Une de plus…

Un numéro vert et un site Internet ont été financés et mis à la disposition du public afin qu’il puisse porter plus facilement réclamation contre les médecins et les autres professionnels de santé. Il ne semble pas avoir été envisagé de numéro gratuit pour que ces derniers puissent exprimer leur insatisfaction quant à leurs conditions d’exercice et quant au harcèlement dont ils font l’objet de la part des instances administratives, politiques ou médiatiques. Il faut dire que le politiquement correct veut que les médecins n’aient pas à se plaindre…

Livre vert de la Commission européenne sur le personnel de santé en Europe

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Les données dont dispose la Commission européenne et la politique qu’elle envisage dans le livre vert sur le personnel de santé en Europe qu’elle a publié en décembre 2008 ne semblent pas correspondre à celles du gouvernement français.

Mobilité des professionnels de santéLes responsables politiques et les autorités compétentes s’accordent à dire qu’en matière de santé il va falloir relever le défi de l’adaptation de leurs systèmes de soins de santé au vieillissement de la population. Selon les chiffres de la Commission européenne, entre 2008 et 2060, la population de l’Union des 27, âgée de 65 ans et plus, devrait augmenter de 66,9 millions et la tranche des personnes « très âgées » (80 ans et plus) sera celle qui connaîtra la croissance la plus rapide.

Pour les instances européennes, l’introduction de nouvelles technologies permettant d’améliorer la qualité des soins de santé, sur les plans du diagnostic, de la prévention et du traitement, ainsi que de nouvelles menaces pour la santé associées à la réapparition d’anciennes vont conduire à des dépenses de santé sans cesse croissantes et cause par conséquent d’importants problèmes pour la viabilité des systèmes de santé à long terme dans certains pays. Les nouvelles technologies ont un coût et le personnel doit être formé à leur utilisation. Il semble utopique d’espérer voir les dépenses de santé diminuer dans les années à venir et rien ne sert de fustiger les professionnels de santé pour ces augmentations.

« Pour relever ces défis de manière adéquate, il faut que les systèmes de santé soient dotés d’un personnel efficace et de la plus haute qualité, car les services de santé utilisent une main-d’oeuvre très abondante. En effet, le secteur des soins de santé représente l’un des plus importants de l’économie de l’Union européenne, employant un travailleur sur dix, et environ 70 % des budgets des soins de santé sont consacrés aux salaires et aux autres charges directement liées à l’emploi du personnel de santé ». C’est en ces termes que la Commission européenne fait le bilan de la situation actuelle.

Elle recommande d’« offrir de meilleures conditions de travail aux professionnels de la santé ». Selon elle, il faut « accroître la motivation et améliorer le moral du personnel ». Tout cela est bien loin des contraintes administratives de plus en plus nombreuses et des mesures prises pour réduire les honoraires des praticiens mises en place par les autorités hexagonales. Au moment où de nombreuses décisions sont prises pour relancer la consommation, est-il logique de stigmatiser des professions qui, grâce à des horaires de travail sans commune mesure avec les 35 heures et à des compétences acquises grâce à de longues études, réussissent, malgré une baisse de leur pouvoir d’achat, à maintenir l’emploi au sein de leur cabinet et à investir dans du matériel bien souvent acheté à des sociétés françaises ? Il n’est pas certain que cette façon de faire aille dans le sens d’un autre conseil de la Commission : « envisager des campagnes de « retour à la profession » afin d’attirer de nouveau les personnes qui ont quitté le secteur ».

Pour la Commission européenne, il faut « organiser le traitement des maladies chroniques et la fourniture des soins de longue durée plus près du domicile ou dans des structures de proximité ». Dans une période où au niveau national, c’est la centralisation vers des pôles d’excellence et la fermeture des hôpitaux de proximité, il y a de quoi s’interroger.

Si les instances européennes semblent analyser avec clairvoyance la situation, elles se heurtent au paradoxe de la migration des professionnels de santé. Selon elles, « certains États membres pourraient ne pas être disposés à oser investir dans la formation d’un nombre plus important de professionnels de la santé si peu d’entre eux restent dans le pays et si le rendement de l’investissement est faible », ce qui ne l’empêche pas de proposer de « promouvoir les mouvements « circulaires » de personnel (à savoir les périodes de formation/d’acquisition d’expérience dans un autre pays de travailleurs qui retournent ensuite dans leur pays d’origine avec un savoir et des compétences supplémentaires) » que ce soit entre les pays de l’Union européenne ou avec les pays en voie de développement. La question est loin d’être simple comme l’a montré le récent travail d’Euromed, la conférence euro-méditerranéenne pour la santé.