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Combien coûtent les évènements indésirables associés aux soins à l’hôpital ?

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Unité de soins intensifsLes évènements indésirables associés aux soins dans les établissements de santé ne sont plus un sujet tabou depuis quelques années. Si la transparence est encore loin d’être totale en ce domaine, certains indicateurs de sécurité des patients permettent, depuis peu, de se faire tout de même une idée de leur ampleur. Clément Nestrigue et Zeynep Or, chercheurs à l’Institut de recherche et documentation en économie de la santé (Irdes), ont ainsi pu estimer le surcoût de ces évènements indésirables et viennent de publier les résultats de leur étude dans le numéro de décembre 2011 de la revue Questions d’économie de la santé, à l’image de ce qui s’est fait aux États-Unis dès la fin des années 90.

Cette étude, basée sur neuf indicateurs de sécurité des patients développés outre-Atlantique, « fournit de premières estimations nationales du coût de prise en charge d’une partie des événements indésirables associés aux soins qui surviennent à l’hôpital, en exploitant les données hospitalières collectées en routine. » Si la qualité et la sécurité des soins sont mises en avant pour justifier de nouvelles contraintes au sein des établissements hospitaliers, il faudrait être naïf pour croire que le poids des conséquences financières de ces évènements est négligeable dans les décisions qui sont prises par les pouvoirs publics. Ce travail est donc des plus intéressants.

Un évènement indésirable associé aux soins (EIS) « est défini comme un événement défavorable pour le patient, consécutif aux stratégies et actes de diagnostics et de traitements, et qui ne relève pas d’une évolution naturelle de la maladie ». Si certains évènements indésirables associés aux soins sont sans doute liés à l’état du patient et qu’il n’est pas possible de s’y soustraire, d’autres sont considérés comme “évitables”. C’est à ces derniers que sont associés les indicateurs de sécurité des patients. Neuf d’entre eux, au rang desquels figurent les corps étrangers oubliés pendant une procédure de soins, les septicémies postopératoires ou les escarres de décubitus, ont été choisis par les chercheurs de l’Irdes, en collaboration avec la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), pour mener à bien cette étude. Ces indicateurs ont permis d’en arriver à la conclusion qu’en 2007, dans l’Hexagone, 0,5 % des séjours hospitaliers (établissements publics, privés ou participant au service public hospitalier) était associé à l’un des évènements indésirables retenus.
Les désordres physiologiques et métaboliques postopératoires sont les EIS les plus fréquents, le plus rare étant l’oubli d’un corps étranger dans le corps d’un patient à l’occasion des soins.

Toujours pour 2007, c’est un surcoût moyen de près de 700 millions d’euros pour les neuf événements indésirables choisis qui a pu être estimé. Si le coût moyen de prise en charge des traumatismes obstétricaux du vagin lors d’un accouchement par voie naturelle est voisin de 500 euros, il se monte à près de 20 000 euros quand il est question des septicémies. Quatre des évènements indésirables étudiés représentent à eux seuls 90 % du surcoût calculé : les désordres physiologiques et métaboliques postopératoires ; septicémies postopératoires ; les escarres de décubitus et les embolies pulmonaires postopératoires. Il est donc vraisemblable que les efforts à venir porteront plus particulièrement sur ces EIS.

Selon Clément Nestrigue et Zeynep Or, leur étude « montre que les défaillances dans l’organisation et le processus de soins à l’hôpital, qui peuvent se manifester par la survenue d’événements indésirables, représentent un coût économique significatif. Dans le contexte actuel de contrainte budgétaire des établissements de santé, il est essentiel d’explorer comment améliorer la qualité des soins tout en renforçant le rapport coût-efficience des établissements. » 

Sachant que ces chiffres ne portent que sur neuf évènements indésirables associés aux soins, il est probable que les économies susceptibles d’être réalisées puissent être bien plus importantes. Sans compter celles qui pourraient aussi être faites en s’intéressant aux coûts liés aux évènements indésirables liés aux médicaments, EIS qui n’ont pas été pris en compte faute de mesures standardisées, à la perte de productivité ou au nombre de jours non travaillés.

Autre élément à ne pas oublier : les évènements indésirables associés aux soins dans les établissements de santé ont un coût pour la justice et pour les assurances. À l’origine, chaque année, d’un nombre de plaintes non négligeable, les ESI à l’origine de ces affaires chronophages et dispendieuses doivent bénéficier du plus grand intérêt. Certes, ils sont souvent à l’origine de jurisprudences ou de textes faisant progresser le droit de la santé, mais au regard de la souffrance de ceux qui en sont victimes, mieux vaut tout faire pour qu’ils soient encore plus rares au fil des ans.

Si l’approche économique des EIS a tendance à les déshumaniser, elle n’en est pas moins nécessaire pour faire évoluer les pratiques. L’étude de l’Irdes montre que de gros progrès restent à faire.

Médecine & Droit — Numéro 108

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Médecine & Droit

Sommaire du numéro de mai — juin 2011

CouvertureElsevier — Masson

 

Protection de la personne
Perinde ac cadaver
Mathieu Reynier et François Vialla

L’exposition anatomique « Our Body » : une atteinte à la dignité du cadavre ?
Gwénaëlle Claire

Expertise
Critères de qualité pour une expertise civile réussie : le point de vue de l’expert médecin
Bertrand Gachot

Santé publique
La nouvelle architecture sanitaire d’organisation des soins depuis la loi du 21 juillet 2009
Arnaud Le Gall

Exercice professionnel
La solitude du médecin collaborateur libéral
Rémi Bonnefont

Agenda

La médecine de proximité du futur

Écrit par Charles Duchemin le . Dans la rubrique Humeur

Chercher sur une carteComme prévu, le président de la République, quelques jours après la remise du rapport d’Élisabeth Hubert sur la médecine de proximité, est allé participer à une table ronde dans le Calvados à ce sujet. Animée par le député Claude Leteurtre, ces échanges ont permis au chef de l’État de répondre aux questions d’un jeune médecin généraliste tout juste diplômé, d’une infirmière libérale ayant occupé des fonctions syndicales, d’un médecin de famille plein d’esprit et d’une mère de famille, usager du système de santé comme il en existe des millions. Parfaitement mise en scène, cette réunion qui n’avait rien de spontané a permis de dresser la feuille de route des mesures que le Président entend demander à son gouvernement de prendre dans les semaines qui viennent.

C’est très clairement le rapport d’Élisabeth Hubert qui va servir de base à l’évolution de la médecine de proximité et tout doit aller très vite. Une loi devrait être votée avant la fin du premier trimestre 2011 dans ce domaine. Même si le temps de la concertation n’est pas terminé, il touche à sa fin. Pour que le calendrier soit tenu, les premières décisions vont être prises dans les semaines qui viennent.
À écouter le chef de l’État, la médecine de proximité semble se résumer à deux acteurs : le médecin généraliste et l’hôpital. L’un et l’autre se raréfiant dans les campagnes ou des les banlieues, pour des raisons souvent très différentes, on comprend facilement qu’il faille réagir, mais pourquoi ce silence sur les autres spécialistes de proximité ? Alors que l’ordre des médecins et la justice tendent à relativiser la notion d’omnipraticien pour optimiser la qualité des soins offerts aux patients, le pouvoir politique semble au contraire accorder toutes les vertus au généraliste omniscient. Il est vrai qu’après le couac de la campagne de vaccination contre la grippe A(H1N1), mieux vaut brosser les spécialistes en médecine générale dans le sens du poil et ce n’est sans doute pas un hasard si la question de leur rémunération a été au centre des débats.

Si le président de la République a insisté sur le fait que le paiement à l’acte ne serait pas abandonné, il a montré sa volonté de voir les choses évoluer en matière de rémunération des professionnels de santé et tout particulièrement des praticiens. En plus de l’apparition de forfaits, il est question d’indemniser le travail qui est considéré comme une mission de service public. Pour Nicolas Sarkozy, une consultation de diagnostic ne devrait pas être payée de la même façon qu’une consultation visant à renouveler un traitement. Autre exemple : le temps consacré à des actes de prévention devrait être pris en compte dans la rémunération. Pour le président, les tarifs ne devraient plus être négociés tous les cinq ans à l’occasion de la reconduction de la convention entre les praticiens et l’assurance-maladie, mais évoluer au fil du temps. Les modalités d’une telle évolution restent néanmoins très floues, ce qui a de quoi inquiéter les médecins, d’autant que le chef de l’État reconnaît qu’ils sont habitués à entendre de belles paroles venant des politiques.

Le sujet de la formation des étudiants en médecine a aussi été abordé. Elle va être réformée pour faire une place plus grande aux stages chez le généraliste libéral. À cette occasion, les externes et les internes devraient avoir la possibilité de retrouver un peu d’humanité, selon le président de la République. Cela devrait aussi leur offrir la possibilité de se familiariser avec les nombreux formulaires et tâches administratives qui prennent près de 30 % du temps de travail des médecins de proximité et de beaucoup d’autres. À ce propos, le Président a annoncé qu’il avait chargé le ministre de la santé, Xavier Bertrand, de mettre en place avant la fin de l’année une « instance permanente de simplification » entre les représentants des médecins libéraux, l’assurance-maladie et l’État. Pour Nicolas Sarkozy, cette “paperasserie” est due à la solvabilisation de la clientèle des praticiens par l’assurance-maladie, à l’image de celle dont souffrent les agriculteurs depuis que des systèmes de subventions leur ont été proposés. Malgré tout, les premiers formulaires “inutiles” devraient disparaître début 2011.

Dernier point abordé ici : la délégation des actes de soins qui devrait être encouragée dans les semaines qui viennent pour répondre à la forte demande des professionnels paramédicaux. La notion de décret de compétences va vraisemblablement disparaître à l’occasion de la loi qui devrait être votée début 2011. Il est aussi question d’envisager qu’un professionnel libéral puisse travailler sous la responsabilité d’un autre libéral et de mettre en place une nouvelle entité juridique pour favoriser l’éclosion des maisons pluridisciplinaires. La volonté de faire réaliser des consultations par du personnel paramédical est nette. Que les paramédicaux libéraux n’aient pas plus envie que les médecins de s’installer dans des zones où règnent l’insécurité ou qui sont désertées par les services publics importe peu ; que des pans entiers de leur formation soient à revoir pour répondre aux nouvelles missions qu’on souhaite leur confier, pas plus. Que la qualité des soins puisse en pâtir, toujours aucune importance. Il est juste question d’utiliser le problème de la démographie médicale pour réaliser des économies de santé sur le tarif des actes remboursés… Et n’y a-t-il pas un petit côté démagogique à entendre le chef de l’État dire qu’il souhaite un pays où tout le monde est tiré vers le haut, où les aides-soignantes peuvent devenir infirmières, où les infirmières peuvent devenir médecins, où les médecins généralistes sont devenus des spécialistes en médecine générale ? Un discours similaire a celui de la directrice générale de l’organisation des soins à l’occasion d’une journée sur les protocoles de coopération entre professionnels de santé. Une remarque s’impose : s’il est question de tirer vers le haut les paramédicaux et les généralistes, il n’est jamais fait état d’offrir des possibilités de progression aux médecins des autres spécialités. Il est plus souvent envisagé des mesures visant à restreindre leurs prérogatives ou à leur imposer de nouvelles contraintes…

Plus qu’une médecine de proximité, c’est une santé de proximité qui semble se profiler. Si médecin est encore le métier qui a le plus de prestige aux yeux des Français, comme l’a rappelé Nicolas Sarkozy, il n’est pas évident qu’avec les réformes qui s’enchaînent, il le reste dans les années à venir. Certains préféreraient sans doute d’ailleurs lui voir se substituer le métier d’avocat…

 

Extrait de la table ronde organisée à Orbec (14) sur la médecine de proximité
à l’occasion de la visite du chef de l’État, le 1er décembre 2010

Intervention du Dr Stephanie, spécialiste en médecine générale, médecin de famille

L’intégralité de la vidéo peut être visualisée sur le site de l’Élysée.

Enjeux éthiques des progrès dans le champ de la santé et des maladies rares

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Congrès

Progrès médicaux et éthiqueChaque jour, la médecine progresse. Elle permet à tous ceux qui ont accès aux nouvelles connaissances médicales de voir leur espérance de vie augmenter. Il n’est pas question seulement de la lutte contre le vieillissement naturel, mais aussi de celle contre les maladies chroniques ou les maladies rares. Malheureusement cette longévité accrue, grâce aux progrès de la médecine, n’est pas toujours synonyme d’autonomie et de qualité de vie. Il y a là un paradoxe qui mérite réflexion.

C’est dans cet esprit que doit se tenir, le 5 février 2010, le congrès Enjeux éthiques des progrès dans le champ de la santé et des maladies rares, organisé par le Dr Régis Aubry, au pavillon Dauphine à Paris, de 8h à 18h.

De nombreux thèmes sont au programme de cette réunion, parmi lesquels une intervention pour savoir si le sort d’un grand vieillard vulnérable est à envier ou une autre posant la question de savoir jusqu’où doit aller la réanimation en cas d’accident vasculaire grave. À un moment où les économies de santé semblent avoir plus d’importance que la santé publique, la communication sur le conflit de valeurs interne aux soignants entre éthique et rentabilité prend aussi toute sa valeur.
Les thèmes « L’éthique, le citoyen, l’expert et la loi » et « Enjeux éthique, fin de vie et politique » devraient offrir une belle conclusion à cette journée qui ne manquera pas d’être riche en enseignements.

Un médecin doit-il négocier le prix de la consultation avec le patient ?

Écrit par Charles Duchemin le . Dans la rubrique Humeur

En cette période de crise, la presse écrite n’est pas avare de “bons” conseils censés permettre à ses lecteurs d’améliorer leur pouvoir d’achat. Négocier, tel est le leitmotiv de bon nombre de ces articles. Tout y passe. Enfin presque tout, car il faut bien ménager ses annonceurs… Le tarif des actes médicaux n’échappe pas à cette règle. Le médecin doit-il céder à cette pression ? Est-il inhumain de refuser ?

Une démarche qualité opposable aux professionnels de santé ?

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Les médecins piégés par les référentielsLes démarches qualité sont familières aux médecins et aux autres professionnels de santé depuis de nombreuses années. Qu’il s’agisse de la certification ISO 9001 des ophtalmologistes ou de l’implication de nombreuses autres spécialités dans l’évaluation des pratiques professionnelles (EPP), de nombreuses pistes ont été explorées et ont conduit à une meilleure analyse des risques et à un accroissement de la qualité de prise en charge des patients. Les anesthésistes-réanimateurs, conscients des enjeux et confrontés à des affaires exagérément médiatisées, se sont eux aussi très vite intéressés à ces questions, au point d’obtenir une réduction significative de la mortalité dans les blocs opératoires et dans les unités de réanimation.

De toutes ces démarches qualité naissent de très nombreux documents de travail qui aident les uns et les autres à améliorer leurs pratiques. Et voilà que ces pièces sont détournées et utilisées de façon abusive par des organismes ou des tutelles pour en faire des bases de références réglementaires. C’est Marc Dahlet, président du groupe de travail sur le référentiel EPP « Tenue du dossier d’anesthésie » qui tire la sonnette d’alarme et donne l’exemple d’une telle dérive dans Les infos de Collège — Lettre de liaison du Collège français des anesthésistes réanimateurs nº 27 de juillet 2009.

Suite au décès inexpliqué d’un patient, une agence régionale de l’hospitalisation (ARH) « a déclenché une enquête administrative dans laquelle le référentiel EPP “Tenue du dossier d’anesthésie” été utilisé pour émettre des appréciations ». Il a été reproché à l’anesthésiste de ne pas avoir effectué une consultation préopératoire conforme en tous points au référentiel. Un staff et une revue de morbi-mortalité (RMM) insuffisants ont aussi été utilisés pour mettre en cause le praticien. Le référentiel, établi dans le cadre d’une démarche qualité, a donc servi de pièce à charge dans une enquête administrative.

Marc Dahlet explique que ce n’est pas la première fois que la Haute Autorité de santé (HAS) ou une autre institution est tentée d’utiliser les documents de travail relatifs à l’EPP comme des recommandations, voire même des références réglementaires. Il rappelle que, pour lui et les professionnels qui les rédigent, les documents de démarche qualité (référentiels EPP, méthodes d’audit, RMM, etc.) ne sont pas opposables et ne doivent pas être confondus avec des règlements. Des « utilisations à contre-sens » de ces documents pourraient, selon lui, « enrayer très rapidement le système de démarche qualité si elles se multiplient ».

Ce que semble malheureusement oublier ce médecin, c’est que les recommandations de la HAS n’ont pas été présentées à leurs auteurs comme pouvant devenir opposables aux praticiens. Le terme même de “recommandations” laissait penser que cela ne serait jamais le cas, jusqu’à ce que le Conseil d’État en décide autrement. Fort de cette expérience, il est facile de comprendre que les institutions tentent de renouveler l’expérience. D’autant que le fait que les recommandations soient devenues opposables n’a en rien enrayé la volonté de nombreux praticiens de participer à la rédaction de ces nouvelles contraintes. Les auteurs de référentiels, médecins ou autres professionnels de santé, doivent être conscients, lorsqu’ils participent à l’élaboration de référentiels, de manuels, de protocoles ou d’autres documents de ce type, qu’il se pourrait que des juges ou des conseillers d’État ne voient pas ces documents comme de simples aides, mais bien comme des pièces à charge, car tout peut être bon pour indemniser une victime…

Évolution de la pratique des ostéopathes

Écrit par Bertrand Hue le . Dans la rubrique La parole à...

Serge Bamas, ostéopathe, représentant du syndicat national des ostéopathes de France (SNOF / Profession ostéopathe), exerce l’ostéopathie de façon exclusive et se consacre désormais totalement à la reconnaissance de sa profession. Ancien kinésithérapeute, secrétaire général de la Société française des kinésithérapeutes du sport pendant de longues années, il peut ainsi facilement parler de ces deux professions qu’il connaît bien.
Nous remercions Serge Bamas, en collaboration avec Jean Fancello, président du SNOF, d’avoir répondu aux questions de Droit-medical.com.

Rien n’interdit à un pays de l’Union européenne de réserver les officines aux seuls pharmaciens

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Jurisprudences

Le profit n'est pas ce qui prime pour les pharmaciensLa cour de justice des communautés européennes (CJCE) a rendu, le 19 mai 2009, des décisions favorables aux pharmaciens pour ce qui est de savoir si un pays de l’Union pouvait réserver la détention et l’exploitation d’une pharmacie aux seuls pharmaciens.

Il est intéressant de noter que c’est sur la sécurité et la qualité que repose la décision de la cour. « Les législations italienne et allemande prévoyant une telle règle sont justifiées par l’objectif visant à garantir un approvisionnement en médicaments de la population sûr et de qualité ». Plutôt que de céder à la pression commerciale qui avait poussé le Land de la Sarre à autoriser une société anonyme néerlandaise à exploiter une pharmacie à Sarrebruck, la CJCE a choisi de privilégier la santé publique.

Les dispositions du traité européen relatives à la liberté d’établissement ne s’opposent donc pas aux législations nationales réservant les officines aux seuls pharmaciens. Certes, dans les arrêts, la cour relève que l’exclusion des non-pharmaciens de la possibilité d’exploiter une pharmacie ou d’acquérir des participations dans des sociétés d’exploitation de pharmacies constitue une restriction à la liberté d’établissement et à la libre circulation des capitaux, mais la sécurité et la qualité de l’approvisionnement en médicaments de la population priment cette restriction. Le raisonnement de la cour est expliqué dans le communiqué que les services de la CJCE ont fait paraître. « Lorsque des incertitudes subsistent quant à l’existence ou à l’importance de risques pour la santé des personnes, il importe que l’État membre puisse prendre des mesures de protection sans avoir à attendre que la réalité de ces risques soit pleinement démontrée. En outre, l’État membre peut prendre les mesures qui réduisent, autant que possible, un risque pour la santé publique, y compris, plus précisément, un risque pour l’approvisionnement en médicaments de la population sûr et de qualité.
Dans ce contexte, la Cour souligne le caractère très particulier des médicaments, les effets thérapeutiques de ceux-ci les distinguant substantiellement des autres marchandises.
Ces effets thérapeutiques ont pour conséquence que, si les médicaments sont consommés sans nécessité ou de manière incorrecte, ils peuvent gravement nuire à la santé, sans que le patient soit en mesure d’en prendre conscience lors de leur administration.
Une surconsommation ou une utilisation incorrecte de médicaments entraîne, en outre, un gaspillage de ressources financières qui est d’autant plus dommageable que le secteur pharmaceutique engendre des coûts considérables et doit répondre à des besoins croissants, tandis que les ressources financières pouvant être consacrées aux soins de santé ne sont, quel que soit le mode de financement utilisé, pas illimitées.
Compte tenu de la faculté reconnue aux États membres de décider du niveau de protection de la santé publique, ces derniers peuvent exiger que les médicaments soient distribués par des pharmaciens jouissant d’une indépendance professionnelle réelle. »

Que les apothicaires fassent du commerce n’y change rien. La CJCE estime que les pharmaciens ne sont pas des commerçants comme les autres et qu’il n’exerce pas son métier dans le seul but de faire des bénéfices. La cour met en avant la formation, l’expérience professionnelle et la responsabilité de ces professionnels de santé. L’éthique s’invite ainsi dans les réflexions de la CJCE. Pour un pharmacien, la légitime recherche du profit est contrebalancée par les règles légales et déontologiques auxquelles il est soumis. Ces éléments offrent des garanties aux citoyens

De telles décisions contrastent fortement avec certaines politiques nationales, ou avec les discours de complémentaires santé pensant surtout aux profits de leurs actionnaires, fustigeant les médecins, les dentistes ou les pharmaciens. La CJCE fait confiance aux professionnels de santé soumis à un code de déontologie pour prendre conscience des risques qu’ils encourent en privilégiant le lucre à l’éthique. Elle reconnaît la valeur ajoutée liée à la formation et à l’expérience dans le domaine de la santé. La Cour comprend qu’un État puisse estimes que les équivalents dans l’univers du commerce n’offrent pas les mêmes garanties à la population. Elle trouve tout aussi légitime l’idée qu’un professionnel de santé tel que le pharmacien puisse perdre de son indépendance s’il dépend financièrement d’un organisme unique, comme cela peut être le cas d’un salarié.

Pour la cour de justice des communautés européennes, « les libertés d’établissement et de circulation des capitaux ne s’opposent pas à une réglementation nationale qui empêche des personnes n’ayant pas la qualité de pharmaciens de détenir et d’exploiter des pharmacies ». En fonction de l’évolution des législations nationales, les citoyens européens peuvent maintenant savoir si leur pays privilégie la santé publique ou le commerce…

Le site de Rencontres 2008 de la Haute Autorité de santé

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Congrès

Ensemble pour la santéC’est à la Cité des sciences et de l’industrie, porte de la Villette à Paris, que se dérouleront les 2es rencontres de la Haute Autorité de santé (HAS), juste avant les fêtes de fin d’année, les 18 et 19 décembre 2008. Chacun pourra y faire connaissance avec de nouveaux partenaires ou approfondir des liens existants puisque la Haute Autorité de Santé convie les professionnels, les associations du monde de la santé et les institutionnels à participer.

Ces rencontres sont pavées de bonnes intentions. La HAS « souhaite illustrer l’enjeu que représente la qualité pour garantir un système de santé solidaire pour tous, apporter une vision globale de la qualité en santé et impulser des actions concrètes, portées par l’ensemble des acteurs du monde de la santé ». Trois axes principaux doivent servir d’articulation aux débats : faire de la qualité un élément de régulation du système de santé ; améliorer avec les professionnels la qualité des soins ; impliquer les usagers dans la qualité des soins. On peut espérer que des questions comme « la standardisation des soins à des fins économiques est-elle un gage de qualité ? » ou « La délégation des tâches pour compenser une carence démographique programmée permet-elle une meilleure prise en charge du patient ? » seront abordées afin que ces rencontres ne servent pas uniquement à la HAS à imposer son point de vue administratif. Le programme ne semble pas refléter une telle ouverture d’esprit.

L’inscription en ligne est dès à présent possible. Rencontres sans lendemain ou naissance de relations durables, chacun pourra sans doute trouver son bonheur à ces rencontres de la HAS…

Immobilisme hospitalier ?

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Presse

SoinsLes Français ont appris à se méfier des sondages, même s’ils en sont friands. Les périodiques l’ont bien compris et il n’y a pas un week-end sans que « Le Journal du dimanche » ne publie ce type d’enquêtes. Le sondage de ce dimanche 12 octobre 2008 a pour thème « Les Français et l’hôpital ». Il a été réalisé par téléphone auprès d’un échantillon de 957 personnes, représentatif de la population française âgée de 18 ans et plus, du 9 au 10 octobre 2008.

Il est intéressant de noter qu’en cas d’ennuis de santé, 59 % des sondés font plus confiance à l’hôpital public pour les prendre en charge. Avec 38 %, les cliniques privées sont distancées au moment où les différentes réformes tendent à vouloir faire fonctionner les centres hospitaliers publics sur le modèle des établissements privés.
42 % des personnes interrogées pensent quant à elles que la qualité des soins, dans les hôpitaux publics, n’a pas évolué ces cinq dernières années. Plus d’un quart des Français pensent même qu’elle s’est dégradée. Cela veut-il dire que nos compatriotes ont l’impression que les hôpitaux de l’Hexagone sont figés dans un immobilisme qui les rassure ?