Articles tagués ‘rapport’

L’AP—HP mise en examen pour des décès liés à la légionellose

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Mise en examen et décès liés à la légionelloseSuite au décès d’un patient de la légionellose en février 2001 à l’hôpital européen Georges Pompidou (HEGP) et à la plainte de sa famille, l’Assistance publique — Hôpitaux de Paris (AP-HP) a été mise en examen en tant que personne morale, le 1er septembre 2009. C’est pour « homicides involontaires », « blessures involontaires » et « mise en danger de la vie d’autrui » que le juge d’instruction Marie-Odile Bertella-Geffroy aurait mis en examen l’AP-HP. Un rapport d’expertise l’aurait conduite à prendre cette décision.

Entre novembre 2000 et février 2001, quatre patients étaient décédés de légionellose à l’hôpital européen George Pompidou ouvert depuis seulement quelques mois. Deux autres patients, eux aussi contaminés par la légionellose, étaient morts à la mi 2009 dans ce centre hospitalier. D’autres malades avaient heureusement eu la chance de guérir. Les matériaux de la tuyauterie des installations hospitalières ont été mis en cause après que l’hôpital ait connu des difficultés dans la mise en route, l’assainissement et l’équilibrage du réseau d’eau.

En 2000, en France, sur les 630 cas de légionellose recensés, seulement 20 % avaient une origine hospitalière.

Archivage des dossiers d’un médecin décédé : le conseil de l’ordre moins solidaire ?

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

En dix ans, le conseil national de l’ordre des médecins (CNOM) semble avoir revu à la baisse la notion de « solidarité confraternelle » au sujet de l’archivage des dossiers d’un médecin décédé. En décembre 1999 dans un rapport intitulé Devenir des dossiers médicaux d’un médecin cessant ou ayant cessé toute activité du docteur Jean Pouillard adopté lors d’une session du conseil national de l’ordre des médecins, c’est sur ce principe que l’ordre se basait pour venir en aide à la famille de l’un de ses confrères tragiquement disparus.

Extrait du rapport Devenir des dossiers médicaux d’un médecin cessant ou ayant cessé toute activité de décembre 1999

Le médecin est décédé ou devient brutalement indisponible (maladie, hospitalisation) :

a) la famille du médecin décédé présente la clientèle à un médecin qui s’installe au lieu du cabinet médical existant ou dans la proximité ;

b) la famille du médecin décédé présente la clientèle à un médecin déjà installé dans la commune, lequel devient par contrat le médecin successeur.

Dans les deux cas, il est souhaitable que la famille du médecin décédé informe la clientèle — lettre personnalisée si possible et information sous forme d’annonce publique dans la presse locale — des conditions de continuité d’activité du cabinet médical en précisant (conformément aux termes prévus dans le contrat de cession) que les dossiers des patients sont mis à la disposition du médecin qui en prend possession, lequel s’engage également à transmettre le cas échéant et sans délai, tout dossier d’un patient qui en ferait la demande, au médecin désigné par ce patient, conformément à l’article 6 du code de déontologie : “Le médecin doit respecter le droit que possède toute personne de choisir librement son médecin. Il doit lui faciliter l’exercice de ce droit”.

c) il n’y a pas de présentation à clientèle : la famille a quitté les lieux ou refuse de se charger de la garde des dossiers, le médecin décédé n’a pas d’héritiers, ou est hospitalisé (psychiatrie) sans héritiers.

Il n’en demeure pas moins que les dossiers médicaux doivent être protégés contre toute indiscrétion à l’égard de tiers non-médecins, y compris la famille, qu’ils ne sauraient être transmis à qui que ce soit sans le consentement des patients, et que s’il est difficile de les confier au Conseil départemental auprès duquel le médecin décédé était inscrit, il est également impossible de les confier à un service public départemental d’archives, lequel n’est pas tenu de recevoir des archives médicales.

Dans ces conditions, qui au demeurant sont relativement exceptionnelles, le Conseil départemental reste l’intermédiaire obligé, dans le souci de l’intérêt public et du respect de la confidentialité des données nominatives, pour gérer toute demande de transmission d’un dossier au médecin désigné par un patient. En effet, c’est au Conseil départemental de l’Ordre des médecins, garant de la déontologie et de la solidarité confraternelle, qu’incombe la responsabilité d’assurer le relais et d’épauler les médecins et leurs familles.

En 2009, le discours est plus tranché. Il n’est plus vraiment question de « solidarité confraternelle » et la famille n’a d’autres choix que prendre à sa charge l’archivage des dossiers si l’on en croit le document Dossiers médicaux : conservation et archivage mis en ligne par le CNOM le 19 mai 2009.

Extrait du document Dossiers médicaux : conservation et archivage de mai 2009

En cas d’interruption brutale d’exercice.

Le Conseil départemental apportera son aide à la famille du médecin dans l’incapacité d’organiser lui-même la transmission des dossiers aux médecins désignés par les patients.

Une annonce dans la presse locale informera la patientèle de la fermeture du cabinet, invitant les patients à adresser leur demande au Conseil départemental.

Cependant, l’archivage du reliquat des dossiers restera de la responsabilité de la famille.

Voilà qui n’est pas sans poser de nombreuses questions alors qu’il est souvent plus difficile en 2009 qu’en 1999 de trouver un successeur à un médecin décédé. Selon ce document, un conseil départemental est dans l’incapacité d’organiser lui-même la transmission des dossiers : il n’est donc plus « l’intermédiaire obligé dans le souci de l’intérêt public et du respect de la confidentialité des données nominatives, pour gérer toute demande de transmission d’un dossier au médecin désigné par un patient ». On peut s’en étonner, car les données contenues dans ces dossiers relèvent en 2009, comme en 1999, du secret médical. La loi ne prévoit pas que les membres de la famille d’un médecin (vivant ou mort) puissent connaître l’identité de ses patients et encore moins avoir accès à leurs secrets de santé. Il n’y a pas de dérogation au secret médical pour les ayants droit du praticien et c’est heureux. Dans ces conditions, comment envisager qu’une famille puisse assurer elle-même l’archivage et la transmission des dossiers ?Archivage des dossiers d'un médecin décédé et secret médicalLe recours par la famille à un hébergeur ne résoud pas ces problèmes. Si un patient demande, comme la loi du 4 mars 2002 l’y autorise, à avoir accès à son dossier médical, qui va s’assurer que ce dossier ne contient pas des informations données par un tiers qui ne doivent pas être communiquées ? Même en transmettant les demandes à l’hébergeur et en communiquant les dossiers en l’état, qu’en est-il de la responsabilité de la famille ? Pour certains patients psychiatriques ou pour les cas où le médecin a jugé préférable, comme la loi le prévoit, de ne pas révéler un diagnostic dans l’intérêt du patient, on imagine aisément les risques pris par la famille. Seul l’oeil avisé d’un praticien est susceptible à la relecture du dossier, de faire la part des choses.
Rien d’étonnant dans ces conditions que les ayants droit du médecin soient tentés de détruire les dossiers, d’autant qu’ils n’ont souvent pas conscience des risques encourus et passant à l’acte et en signalant un tel sinistre.

On peut comprendre que les secrétariats des conseils départementaux ne veuillent pas avoir à gérer les demandes des patients, travail ingrat et chronophage. On peut aussi voir l’intérêt des mêmes conseils à ne pas vouloir prendre en charge l’archivage de dossiers en raison des coûts élevés de ces procédures et des responsabilités que cela implique. Le choix semble donc avoir été fait de les reporter sur les familles au détriment de l’intérêt public, du respect du droit et de la confidentialité. La notion de « solidarité confraternelle » semble atteindre ses limites lorsque les intérêts de l’institution ordinale sont en jeu. Il serait bon que le législateur s’empare de cette question montrant ainsi aux médecins que la solidarité n’est pas une notion qui n’est utilisée que pour leur infliger sans cesse de nouvelles contraintes…

Autre raison d’espérer une intervention du législateur, le problème de la durée de l’archivage des dossiers médicaux au cabinet n’est toujours pas réglé. Le CNOM le reconnaît et recommande néanmoins un délai de vingt ans, identique à celui imposé aux établissements de santé, mais qui peut paraître bien court à la lecture de l’article intitulé L’archivage du dossier médical au cabinet.

Psychothérapeutes : réglementation de la profession

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

psychothérapeutes et réglementationIl est difficile de comprendre pourquoi il faut tant de temps au législateur pour réglementer la profession de psychothérapeute à la lecture du rapport 2008 de la Mission interministérielle de vigilance et de lutte contre les dérives sectaires (Miviludes). Les dispositions d’application de l’article 52 de la loi du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique n’ayant jamais été prises jusque-là, la Miviludes a constaté un « dévoiement des pratiques psychothérapeutiques à des fins sectaires ».

La psychothérapie n’a que peu de recul comme l’explique le rapport : « Avec la fin du XIXe siècle, la pratique de l’hypnose puis l’introduction avec Freud de l’inconscient dans le soin psychique, font apparaître deux professionnels, le médecin ou psychiatre et le psychanalyste. Cette dichotomie dans le champ psychologique sera au cours du XXe siècle et de manière très marquée à partir des années 1970, suivie par l’apparition d’un nouveau venu, le psychothérapeute.
Le rapide succès de ce dernier s’explique par la demande de personnes désirant un suivi non médical et non institutionnel dans le traitement de leur mal-être, la recherche de la performance individuelle et professionnelle ou encore la quête de nouvelles valeurs. » Si les techniques utilisées par les psychothérapeutes peuvent néanmoins être bénéfiques à de nombreuses personnes, elles peuvent aussi être utilisées à des fins de manipulation mentale en utilisant un état de sujétion. Cela n’a rien d’anodin lorsque l’on peut estimer que 12 millions de Français sont soumis à l’impact d’une psychothérapie ou à celle de l’un de leurs proches. Ce nombre est en constante augmentation, car la souffrance morale au travail ou à l’école est devenue des sujets très médiatisés, ce qui implique un regain de la demande et de l’offre psychothérapeutiques dans ces domaines, comme le ticket psy l’a bien mis en évidence.
Il n’est pas question de condamner une profession dans son ensemble puisque la Miviludes reconnaît que 70 à 75 % des psychothérapeutes bénéficient d’une formation ou d’un encadrement de qualité (dont 10 à 15 % de médecins), mais de s’intéresser au 25 à 30 % dont le parcours avant de se déclarer psychothérapeute reste de qualité très inégale.

La loi portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (HPST), adoptée en juin 2009, a fini par prendre en compte ces considérations dans son article 91.

 

Article 91 de la loi nº 2009-879 du 21 juillet 2009

Les deux derniers alinéas de l’article 52 de la loi nº 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique sont remplacés par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Un décret en Conseil d’État précise les modalités d’application du présent article et les conditions de formation théorique et pratique en psychopathologie clinique que doivent remplir les professionnels souhaitant s’inscrire au registre national des psychothérapeutes. Il définit les conditions dans lesquelles les ministres chargés de la santé et de l’enseignement supérieur agréent les établissements autorisés à délivrer cette formation.

« L’accès à cette formation est réservé aux titulaires d’un diplôme de niveau doctorat donnant le droit d’exercer la médecine en France ou d’un diplôme de niveau master dont la spécialité ou la mention est la psychologie ou la psychanalyse.

« Le décret en Conseil d’État définit les conditions dans lesquelles les titulaires d’un diplôme de docteur en médecine, les personnes autorisées à faire usage du titre de psychologue dans les conditions définies par l’article 44 de la loi nº 85-772 du 25 juillet 1985 portant diverses dispositions d’ordre social et les psychanalystes régulièrement enregistrés dans les annuaires de leurs associations peuvent bénéficier d’une dispense totale ou partielle pour la formation en psychopathologie clinique.

« Le décret en Conseil d’État précise également les dispositions transitoires dont peuvent bénéficier les professionnels justifiant d’au moins cinq ans de pratique de la psychothérapie à la date de publication du décret. »

 

Reste à savoir combien de temps le Conseil d’État va mettre pour prendre le décret nécessaire à l’application de cette nouvelle avancée législative. En attendant, les dérives sectaires vont malheureusement continuer à faire des victimes…

Cet article sera remis à jour lorsque le décret du Conseil d’État paraîtra.

 

La fiabilité des experts médicaux discutée au Royaume-Uni

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Difficile équilibre entre avis du médecin expert et réalité des faits en justiceL’Angleterre et le Pays de Galles réfléchissent à l’opportunité pour leurs juges de devoir s’assurer de la fiabilité des preuves basées sur l’avis des experts avant qu’une affaire ne passe devant la cour. Selon un article publié dans le British Medical Journal, le 9 avril 2009, intitulé Expert evidence should be reliability tested, says law reform body, plusieurs affaires récentes montreraient qu’il existe un problème qu’il est urgent de régler à ce sujet. Les expertises seraient admises trop facilement ce qui pourrait être à l’origine d’acquittements ou de condamnations injustifiés.

Afin d’actualiser la loi, une commission a été mise en place pour faire des propositions au gouvernement. Les juges pourraient recevoir des recommandations sur la façon d’évaluer la fiabilité des expertises. La preuve devra être fondée sur des principes, des techniques et des hypothèses solides et les experts devront pouvoir les justifier. Pour cette commission, les juges et les jeunes avocats devraient être formés pour réagir si les experts sortent de leur domaine de compétences, émettent des avis basés sur des hypothèses non fondées ou présentent des preuves d’une façon inappropriée. Des expertises d’une fiabilité douteuse font foi devant les tribunaux sans que les avocats de la défense s’y opposent avec virulence et les jurys en tiennent malheureusement compte pour l’issue du procès.

Les exemples d’expertises douteuses ayant entraîné une condamnation ne manquent pas : Sally Clarke et Angela Cannings — toutes deux condamnées en première instance pour avoir tué leur bébé et qui ont été innocenté en appel — ou des affaires dans lesquelles des parents ont été condamnés pour avoir « secoué » leur bébé. Dans l’affaire Clarke, un pédiatre a pu témoigner sur un sujet qui ne relevait pas de son domaine de compétences et donner une appréciation dénuée de fondement et mensongère sur la probabilité de décès multiples d’enfants au sein d’une même famille. Ses propos n’ont fait l’objet d’aucune vérification afin de s’assurer que ce témoignage était suffisamment fiable pour être entendu par le jury.
Quatre affaires de bébé secoué, plaidées en appel, ont remis en cause la façon dont le corps médical déduisait qu’une blessure à la tête était non-accidentelle. La cour a prouvé que dans de rares cas les blessures pouvaient résulter d’une chute sans gravité ou de gestes non violents, contrairement à ce qu’avaient affirmé les experts.

Pour le responsable de la commission en charge des propositions visant à faire évoluer la loi, les expertises, en particulier les preuves scientifiques, peuvent avoir une grande influence sur un jury. Il est donc indispensable que ces témoignages ne lui soient livrés que s’ils reposent sur une base solide permettant d’apprécier l’innocence ou la culpabilité d’un accusé. Les tribunaux doivent pouvoir s’assurer de la crédibilité d’une expertise avant d’en user.
La commission a fait des propositions dans ce sens et souhaite recueillir l’avis des experts et des scientifiques à ce sujet. Un forum de discussion sur Internet, traitant de la recevabilité des expertises dans les procédures criminelles en Angleterre et au Pays de Galles, a été ouvert à cet effet : www.lawcom.gov.uk/expert_evidence.htm.

La France n’est donc pas la seule à s’interroger sur le rôle des experts médicaux au sein des procédures judiciaires. L’article du British Medical Journal, écrit par Clare Dyer, montre que même un pays ayant un système juridique différent de celui de l’Hexagone peine à apprécier la valeur probante d’une expertise basée sur une science inexacte comme l’est la médecine et sur la subjectivité consciente ou non de l’avis d’un expert. Deux experts en arrivent rarement à des conclusions strictement identiques. Il est peut-être temps de réfléchir à une nouvelle approche de l’expertise médicale judiciaire avec, pourquoi pas, un avis obtenu dans certains cas avec des outils basés sur le Web 2.0 ?

Rapport confidentiel sur les salaires des médecins

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Presse

Réduire la rémunération des médecinsQue voilà un rapport confidentiel sur le salaire des médecins qui tombe à pic ! Réalisé à la demande du gouvernement, ce rapport rédigé par l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) pourrait aider à mettre la pression sur les syndicats de médecins libéraux qui ne veulent pas plier dans l’affaire de la nouvelle taxe sur la démographie médicale. Il est d’autant plus facile à utiliser qu’il est confidentiel, ce qui veut dire que seuls les médias proches des milieux politiques pourront y avoir accès. Les fuites dans la presse écrite remplissent déjà plusieurs colonnes, mais deux interprétations différentes circulent.

La version qui devrait faire bientôt la une des journaux télévisés est consultable sur le site Doctissimo.fr, récemment racheté par le groupe Lagardère, réinterprétant l’article des Echos. Premier objectif : jouer sur la division des médecins, en mettant en parallèle les rémunérations des libéraux et des hospitaliers, mais aussi en cherchant à susciter de la jalousie au sein même de l’hôpital en insistant sur les revenus des praticiens ayant un secteur privé. Deuxième objectif : convaincre l’opinion publique grâce à une subtile comparaison avec le salaire moyen des Français et des interrogations sur l’accès aux soins. Dernier objectif : la régulation des dépassements d’honoraires, destinée à faire disparaître le secteur 2 est enfin mise en avant.

Autre réinterprétation de l’article des Echos qui devrait faire moins de bruit, celle du Figaro qui commence en reprenant l’information selon laquelle « S’il met l’accent sur les disparités et les incohérences des rémunérations, le rapport ne critique pas le niveau moyen des honoraires des spécialistes. Sur ce point, la France se situe « dans une situation intermédiaire » parmi 13 pays de l’OCDE étudiés [Organisation de coopération et de développement économiques, NDLR], note-t-il. » Cette version évoque aussi les activités annexes vers lesquelles se tournent les praticiens pour augmenter leurs revenus (expertises pour la justice, pour les assurances ou pour les laboratoires pharmaceutiques). On y apprend enfin que le paiement à la performance ne serait pas la solution idéale…

L’article des Echos brosse quant à lui le portrait d’un rapport très loin d’être accablant pour les médecins qui ne sont pas responsables des disparités qui touchent les rémunérations au sein de leur profession. Des solutions sont même proposées pour tirer vers le haut les revenus des praticiens les moins rémunérés afin de rétablir une certaine équité chez des professionnels qui ne comptent pas leurs heures, qui ont de lourdes responsabilités et qui investissent pour venir en aide aux patients qui continuent à leur accorder leur confiance.

Aucun de ces articles ne fait remarquer qu’en plus d’avoir une rémunération qui se situe dans une « situation intermédiaire » parmi 13 pays de l’OCDE, voire « parmi les revenus les plus bas des pays de l’OCDE » pour les généralistes selon Le Monde, les médecins français vivent dans un pays où le taux d’imposition est quasiment le plus élevé, toujours selon les chiffres de l’OCDE. Comparer le bénéfice non commercial (BNC) d’un médecin libéral au salaire d’un hospitalier est ridicule. Les chiffres fournis tiennent-ils compte des charges des uns et des autres ? Les différents articles manquent cruellement de précision à ce sujet. Ces données sont pourtant capitales, car elles modifient aussi complètement les comparaisons possibles entre les spécialités. Les radiologues ont une rémunération plus élevée que les dermatologues peut on lire. Est-ce la comparaison des BNC ? Est-ce après impôts ? Les investissements en matériel et en personnel pour ouvrir un cabinet de radiologie ne sont pas vraiment les mêmes. Les coûts d’entretien et de gestion ne sont pas non plus comparables. Les responsabilités qui en découlent ne sont pas les mêmes… Le chirurgien gagne plus que le gériatre. Est-ce choquant ? Les responsabilités de l’un et de l’autre sont importantes, mais il est bien plus rare qu’un gériatre se retrouve devant un tribunal. Le rapport de l’IGAS ne dit pas qu’il faut sanctionner les chirurgiens, il dit qu’il faut mieux considérer les médecins s’occupant des malades chroniques, ce qui est totalement différent de ce que semble souhaiter faire le gouvernement.

Y avait-il vraiment besoin d’un rapport pour remettre en cause la rémunération des médecins ? Le chef de l’État en a fait l’une de ses priorités. Une des raisons à cela pourrait être celle que développe Mathias Matallah dans son article « Qui veut la peau des médecins secteur 2 ? ». D’autres pistes sont possibles… Permettre aux complémentaires santé de faire de confortables économies, par exemple, puisque ce n’est pas l’assurance-maladie qui supporte le coût des dépassements d’honoraires, contrairement à ce que l’on tente de faire croire aux Français. Masquer les carences de l’État qui n’a plus les moyens d’offrir un service public sur l’ensemble du territoire et qui souhaite transférer cette charge sur les libéraux sans peser sur le budget des mutuelles et des complémentaires santé, adossées aux grands groupes financiers.

 

Mise à jour du 5 février 2009

Le rapport de l’IGAS n’est plus confidentiel et peut être téléchargé sur le site de La documentation française.

La responsabilité du médecin et la télémédecine de demain

Écrit par Bertrand Hue le . Dans la rubrique Evolution

La loi « Hôpital, patients, santé et territoires » devrait établir les bases législatives de la télémédecine. Ministère de la santé et conseil national de l’ordre des médecins (CNOM) se doivent donc d’avancer leurs pièces sur l’échiquier dès maintenant. D’un côté, le rapport final sur la place de la télémédecine dans l’organisation des soins, établi par Pierre Simon et Dominique Acker, conseillers généraux des établissements de santé, remis à Roselyne Bachelot, le 20 janvier 2009. De l’autre, le livre blanc sur la télémédecine du CNOM qui a été mis en ligne le 21 janvier.

Télémédecine, responsabilité et droitLe rapport final sur la place de la télémédecine dans l’organisation des soins précise le cadre déontologique et juridique des responsabilités engagées au cours des actes médicaux par télémédecine. En plus de tenir compte des recommandations de l’ordre des médecins, il s’appuie sur les analyses juridiques les plus récentes. « Trois actes principaux sont retenus : la téléconsultation lorsque le patient est présent, la télé-expertise lorsqu’il s’agit de la consultation du dossier médical à plusieurs médecins en l’absence du patient, la télésurveillance lorsque des indicateurs de maladie chronique sont recueillis à domicile et transmis pour interprétation à un médecin. Le quatrième acte, la téléassistance, peut être un acte médical ou un acte de soins. Les responsabilités engagées dans l’acte de télémédecine ont un fondement différent selon que l’acte est réalisé entre des établissements publics de santé ou entre des établissements de santé privés, voire entre médecins libéraux et établissements de santé. Une situation juridique nouvelle en droit médical résulte de l’exercice collectif de la médecine entre des professionnels de santé de statuts différents, la télémédecine favorisant cet exercice collectif au plan du diagnostic et des décisions thérapeutiques partagés. La situation juridique du médecin requis en matière de responsabilité dans l’exercice collectif doit être clarifiée. »

Les rapporteurs insistent sur la nécessité de développer en parallèle le dossier électronique et sa consultation sécurisée. Ils évoquent enfin la responsabilité des acteurs technologiques de ce secteur. L’incertitude juridique actuelle dans tous ces domaines est, selon eux, un frein au développement de la télémédecine.

Des rapports éloignés du quotidien

Dans ce rapport remis au gouvernement, la solution n’est pas donnée au problème le plus fréquemment rencontré : un patient posant une question ou demandant un conseil à un médecin par l’intermédiaire d’un courrier électronique, par le biais d’un tchat, d’un forum ou depuis de nombreuses années par téléphone. Les praticiens libéraux, comme hospitaliers, sont confrontés à cette situation tous les jours, circonstance à la croisée de la téléconsultation et de la télé-expertise. Même si la loi du 13 août 2004 a mis fin à l’interdiction de la médecine à distance et a donné aux praticiens la possibilité d’utiliser une « méthode épistolaire » pour répondre à des demandes, ces intentions ne se traduisent pas dans les faits. Il n’existe pas de cotation pour ces « actes médicaux intellectuels » qui n’ont pas encore réussi à être reconnus comme un acte à part entière. Poutant ce rapport concède que « La télémédecine ne modifie pas fondamentalement l’acte médical intellectuel traditionnel. Elle permet de le réaliser dans des conditions et des situations qui améliorent l’accès aux soins, leur qualité et leur sécurité. Le médecin agit « sous le contrôle de sa conscience et dans le respect des règles professionnelles” ».

Le document du CNOM s’est, quant à lui, appliqué à définir la télémédecine. Le livre blanc sur la télémédecine est présenté comme un complément à celui sur l’informatisation de la santé déjà publié. Pour cette instance « La télémédecine est une des formes de coopération dans l’exercice médical, mettant en rapport à distance, grâce aux technologies de l’information et de la communication, un patient (et/ou les données médicales nécessaires) et un ou plusieurs médecins et professionnels de santé, à des fins médicales de diagnostic, de décision, de prise en charge et de traitement dans le respect des règles de la déontologie médicale. » Cette approche est intéressante et plus vaste que celle proposée par le rapport des conseillers généraux des établissements de santé. La dématérialisation de la rencontre entre le patient et le médecin est prise en compte. Mais très vite, le CNOM reprend la classification proposée par le rapport remis au ministre de la santé évoqué plus haut (téléconsultation, télé-expertise, télésurveillance).

Quid des courriers électroniques et du téléphone en libéral ?

La téléconsultation par téléphone est reconnue pour les centres de régulation. Pourquoi ne laisse-t-on pas cette notion s’appliquer à l’exercice en cabinet privé ? Le gouvernement vient de lancer l’idée de généraliser les plateformes Internet pour désengorger les centres 15, alors même que l’acte effectué par un praticien libéral consistant à répondre à une question ou à examiner un dossier sur le Web n’est pas reconnu, contrairement à ce qui se pratique dans d’autres pays européens ou aux États Unis.
Le CNOM s’accorde à dire que la télémédecine « est freinée dans son développement en raison des interrogations qu’elle continue à susciter sur le plan juridique » alors même que l’obligation de moyens du praticien s’étend du fait des nouvelles technologies. Il considère aussi que le développement de la télémédecine s’accompagnera d’une évolution vers la délégation de missions. Il faut dire que le CNOM est très engagé, souvent volontairement et parfois sous la pression des autorités et de l’assurance-maladie, dans tout ce qui permettra à terme de « se passer » des médecins. La démarche visant à établir des protocoles, sous couvert de donner un cadre à l’exercice de la télémédecine, favorisera le transfert des compétences. Les référentiels de bonnes pratiques sont déjà vus par certains comme de futurs manuels à l’usage des paramédicaux.
L’ordre conclut son livre blanc par douze propositions tendant à faire peser de nouvelles contraintes sur les praticiens, de peur sans doute que l’intelligentsia puisse lui reprocher un manque de zèle en ce domaine.

Toujours plus de contraintes

Le livre blanc du CNOM et le rapport remis au gouvernement s’accordant sur la quasi-totalité des points, il serait étonnant que la plus grande partie des propositions ne soit pas retenue pour la loi « Hôpital, patients, santé et territoires ». Il va sans dire que députés et sénateurs ne manqueront pas d’ajouter à ce texte d’autres obligations…

La télémédecine, développée pour favoriser la prise en charge des patients dans des zones difficiles, est devenue un outil servant à pallier la démographie médicale dans certaines régions et comme un nouvel instrument d’économies. C’est dans cet esprit qu’une nouvelle législation est proposée. Le but de cette dernière n’est pas d’inciter au progrès et d’encourager les initiatives qui font la preuve de leur efficacité. Il semble être de ralentir un peu plus l’acceptation de solutions innovantes, l’intégration des outils existants et de donner de nouvelles responsabilités aux médecins pour mieux pouvoir les prendre en défaut par la suite.
La pratique médicale quotidienne s’éloigne une fois de plus des idéaux institutionnels. La loi ne sert plus à aider et à défendre le citoyen (patient ou médecin). Elle n’est plus là pour garantir à chacun la sécurité au sein du plus grand espace de liberté possible. Elle est vue comme un instrument de pouvoir servant à mettre en oeuvre une idéologie.

Mauvaise journée pour les médecins « experts » de la psychiatrie ou de la fin de vie

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

La voie de la guérison en psychiatrie ne conduira plus obligatoirement vers la sortieLe 2 décembre 2008 n’aura pas été un jour faste pour les médecins experts, non pas au sens médico-légal du terme, mais au sens de la personne qui a acquis de grandes connaissances dans un domaine. Deux raisons à cela : la volonté du chef de l’État, Nicolas Sarkozy, de réformer l’hospitalisation psychiatrique et la remise du rapport du député Leonetti sur la fin de vie. Dans les deux cas, l’ombre du procès d’Outreau et la volonté de ne laisser aucun pouvoir aux médecins flottent sur les propos tenus par ces deux hommes politiques.

Suite au drame de Grenoble, il y a quelques semaines, où un étudiant de 26 ans a été poignardé par un patient ayant quitté l’hôpital psychiatrique à l’insu du personnel soignant, le président de la République française s’est officiellement déplacé pour la première fois dans l’Histoire dans un centre hospitalier psychiatrique. Le chef de l’État a visité le centre de soins spécialisé Érasme d’Antony, non loin de l’aéroport d’Orly, en région parisienne. Il a prononcé un discours à cette occasion au cours duquel il a rappelé que la place des malades était à l’hôpital. Pour lui, l’équilibre n’a pas été trouvé entre le besoin de réinsertion des malades psychiatriques et la protection de la société. Si protéger les soignants est prévu grâce à un plan de sécurisation des hôpitaux spécialisés, pour lequel 30 millions d’euros devraient être débloqués, la protection de la société reposera sur des systèmes de géolocalisation des patients. Le bracelet électronique va donc poursuivre son déploiement à l’hôpital après son utilisation pour des patients souffrant de maladie d’Alzheimer. 40 millions d’euros sont prévus pour des unités pour malades difficiles.
Une réforme sanitaire de l’hospitalisation d’office est prévue avec des soins ambulatoires sans consentement. Le Président veut instaurer une obligation de soins, même si la famille ne donne pas d’accord. « Nul ne peut être soigné sans son consentement » ne doit s’appliquer que si le patient est assez lucide pour être apte à consentir.
Pour les patients hospitalisés d’office, une décision de sortie pour un essai ou définitive devrait être prise par un collège de trois soignants, selon le chef de l’État. Le psychiatre qui suit le patient, le cadre infirmier et un psychiatre qui n’est pas impliqué dans le suivi du malade devront donner un avis collégial. Par contre, la décision échappe à ces « experts » pour être prise par le préfet ou la justice. Nicolas Sarkozy n’est pas favorable aux experts et, pour lui, la spécialisation en médecine comporte un risque de ghettoïsation. Il respecte leurs avis, mais il estime qu’ils doivent être confrontés à l’ordre public. Le médecin ne doit pas oublier à qui appartient le pouvoir. Ce n’est plus le médecin qui décidera de la sortie du patient, c’est l’administration représentée par le préfet, tout comme il a été rappelé aux psychiatres hospitaliers qu’il ne devait y avoir qu’un seul patron à l’hôpital : son directeur.

Autre temps fort de ce 2 décembre, la remise du rapport Leonetti sur la fin de vie. L’affaire Chantal Sébire a mis en évidence une carence dans le droit français face aux demandes des patients qui se savent condamnés et veulent mourir dignement.
Pas question pour le député UMP de « reconnaître un droit à la mort » et surtout de laisser patient et médecins en décider ensemble. Jean Leonetti est contre un comité d’experts, composé de personnels soignants d’après la loi, qui décide si oui ou non un patient peut choisir de mourir dignement. Ne sachant pas comment sont choisis ces experts, il ne peut concevoir qu’on donne à ce collège de soignants un pouvoir supérieur à celui des juges, de la loi et, surtout, du président de la République, selon ses propres termes, comme il l’explique dans une interview au journal télévisé de France 3. Tout est dit ! Il faudra se contenter de la loi de 2005 qui est mal connue et mal appliquée… Dans le même temps est annoncée une mesure démagogique consistant en un congé d’accompagnement d’une durée de 15 jours pour un membre de la famille. Est-ce le médecin qui devra dire à la famille quand prendre ce congé ? Est-ce un administratif, pour surtout ne laisser aucun « pouvoir » aux soignants, qui décidera de la date du décès afin que ces congés, payés par l’entreprise, coïncident avec l’inéluctable ? Est-il prévu de poursuivre un patient ou sa maladie devant un tribunal pour avoir bouleversé le calendrier fixé par ces dispositions ?
On oublie qu’il existe déjà un congé de solidarité familiale qui permet à tout salarié de s’absenter pour assister un proche souffrant d’une pathologie mettant en jeu le pronostic vital. Ce congé n’est pas rémunéré, mais il peut durer 6 mois et il peut se cumuler avec le congé pour événement familial prévu en cas de décès ou tout autre congé pour convenance personnelle (congé sans solde, congé sabbatique, etc.).

Les politiciens n’ont plus aucune confiance en les experts. On peut penser qu’une très grande partie de la population les rejoint sur ce point… lorsqu’il est question d’experts en politique. 

Suivi des dépenses hospitalières de l’assurance maladie

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

1+1=2La documentation française met à la disposition du public le rapport de l’Inspection générale des affaires sociales et de l’Inspection générale de l’Institut national de la statistique et des études économiques intitulé « Le suivi des dépenses hospitalières de l’assurance maladie ». Ce travail aide à prendre conscience que personne ne sait vraiment qu’elle est la dépense des régimes d’assurance-maladie au titre des soins hospitaliers (objectif national des dépenses d’assurance-maladie [ONDAM] hospitalier). Il en va de même des dépenses pour les cliniques.
Si une incertitude dans l’évaluation de ces dépenses est inéductable, elle se doit d’être la plus faible possible. Lorsque ce n’est pas le cas, elle peut conduire à une situation conflictuelle comme celle qui a amené le Conseil d’État à annuler l’arrêté du 27 septembre 2006 qui avait fait l’objet d’un recours en excès de pouvoir. En effet, ce texte instituait une baisse des tarifs médecine-chirurgie-obstétrique (MCO) des cliniques d’en moyenne 2,6 % pour les trois derniers mois de l’année 2006 en raison d’un dépassement estimé de l’objectif des dépenses MCO. Ces dernières ne pouvant être identifiées de façon exacte en raison de l’inadéquation de la nomenclature comptable en vigueur, le Coseil d’État a reconnu l’excès de pouvoir.

Le rapport ne remet pas en cause le principe de régulation infra annuelle, mais il insiste sur la nécessité de prévisions les plus précises possible. Il propose d’en revoir certaines modalités en faisant de multiples recommandations, tant au niveau de l’hôpital public qu’au niveau des cliniques, pour en consolider l’assise juridique. Certains de ces changements nécessitent un aménagement législatif.

Accessoirement, il est intéressant de noter que le rapport est aussi disponible sous la forme de fichiers compatibles avec le matériel de synthèse vocale utilisé par le public malvoyant. il suffit aux personnes intéressées d’adresser une simple demande à la section des rapports de l’IGAS ( igas-section-rapports@sante.gouv.fr ) pour que leur soient adressés ces fichiers.

Le rapport sur la santé dans le monde 2008 de l’OMS fustige les spécialistes

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

UrssLe communiqué de presse de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) concernant son rapport annuel sur la santé dans le monde est on ne peut plus clair : « Il arrive bien trop souvent que ce soient les gens riches et en meilleure santé qui aient le meilleur accès aux meilleurs soins, alors que les pauvres sont livrés à eux-mêmes. Les soins de santé sont souvent dispensés selon un modèle qui se concentre sur les maladies, sur les technologies de pointe et sur les soins spécialisés, la santé étant considérée comme le résultat d’interventions biomédicales et le pouvoir de la prévention largement ignoré.
Les spécialistes accomplissent parfois des tâches qui conviendraient mieux à des généralistes, des médecins de famille ou du personnel infirmier. Cela contribue à l’inefficacité, limite l’accès et prive les patients des possibilités de recevoir des soins complets. Lorsque la santé est laissée de manière disproportionnée aux mains des spécialistes, toute une série de mesures protectrices et préventives tend à se perdre ».

Les spécialistes ne sont pas les seuls à être fustigés, le système libéral de soins est lui aussi cloué au pilori : « Les inégalités en matière d’accès aux soins et de résultats sanitaires sont généralement plus marquées lorsque la santé est traitée comme une marchandise et les soins sont animés par la recherche du profit. Les résultats sont prévisibles : investigations et procédures superflues, hospitalisations plus fréquentes et plus longues, coûts globaux plus élevés et exclusion des personnes incapables de payer ».

Ces propos ne rappellent-ils pas ceux des dirigeants d’une nation à l’Est de l’Europe où le système de santé n’était pas réputé pour la qualité de la prise en charge des plus démunis alors qu’ils pronaient les bienfaits du collectivisme ? Pour que tous les maux disparaissent, faut-il fonctionnariser tous les médecins ? En ces temps de crise, la tentation est forte…

Pertinence et faisabilité d’une taxe sur les « mauvais » aliments

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Le rapport sur la pertinence et la faisabilité d’une taxation nutritionnelle a été mis à la disposition du public sur le site de la documentation française. Sous la direction de Véronique Hespel, inspectrice générale des finances, et de Marianne Berthod-Wurmser, membre de l’Inspection générale des affaires sociales, ce travail a été réalisé à la demande des ministères de la santé et de l’économie afin de savoir si une contribution assise sur les produits trop gras, trop sucrés ou trop salés pourrait avoir un intérêt.

HamburgerL’objectif fixé consistait à : « évaluer précisément les coûts pour l’assurance-maladie liés à la consommation excessive de produits trop gras, trop sucrés, trop salés ; étudier l’efficacité que pourrait avoir la mise en place d’une contribution sur ces produits, en particulier sa capacité à favoriser une modification des comportements et un meilleur équilibre alimentaire ; présenter les options sur le contour et les modalités de mise en oeuvre de cette contribution éventuelle ».

Terminé en juillet 2008, il précédait de quelques mois le rapport parlementaire de la députée Valérie Boyer rendu, quant à lui, public le 30 septembre 2008 et intitulé « Faire de la lutte contre l’épidémie d’obésité et de surpoids une grande cause nationale ». En plus de faire passer le taux de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) de 5,5 % à 19,6 % sur les produits dits de « snacking », ce travail propose une série de mesures, comme d’améliorer la qualité nutritionnelle des aliments et de favoriser l’accès des personnes défavorisées aux produits non transformés dont les fruits et légumes ou comme de garantir une information nutritionnelle de qualité et de promouvoir l’activité physique.

Pourquoi envisager de telles taxes ?

Il est évident que les économies de santé sont la priorité des pouvoirs publics. Plutôt que d’instaurer des taxes « aveugles » comme le sont la contribution sociale généralisée (CSG) ou la contribution au remboursement de la dette sociale (RDS), il paraît plus logique, dans une optique de prévention, de pénaliser la consommation d’aliments favorisant des pathologies graves, comme le cancer ou le diabète. Cela fait presque dix ans que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) et le World cancer research fund ont mis de tels liens en évidence. Ils ont établi, par exemple, des liens « certains » entre le diabète maternel,le poisson salé « à la chinoise, les aflatoxines et le cancer, au même titre que l’alcool ou le tabac. L’apport énergétique excessif par rapport à la dépense, l’excès d’alcool, l’excès de sel, les acides gras saturés et les acides gras trans sont impliqués dans l’obésité, le diabète de type 2, les maladies cardiovasculaires ou le cancer.

De plus, des facteurs économiques jouent un rôle important sur les déséquilibres alimentaires dans les pays développés comme la France. « La baisse du prix de la calorie grasse et sucrée, ainsi que l’accroissement de la restauration hors domicile et du grignotage contribuent au développement du surpoids ».

De la volonté au manque de courage politique…

Les rapports cités montrent qu’il existe une prise de conscience politique du problème de santé publique que représentent ces aliments. Une évolution législative dans ce domaine permettrait de réaliser plusieurs milliards d’économies en évitant à la Sécurité sociale de rembourser des soins ayant pour origine un défaut de prévention dans ce domaine. La volonté politique existe donc. Malheureusement, vouloir ne suffit pas et le courage politique, consistant à faire accepter les réformes qui s’imposent, n’est pas au rendez-vous. Plusieurs raisons sont invoquées. La valeur symbolique de la tradition culinaire française en est une. Peut-on considérer que les chips et les sodas font partie de notre terroir ? Non, mais la charcuterie et le vin… Peu importe qu’il s’agisse de produits industriels surchargés en sel ou d’une boisson d’origine mal contrôlée, consommée en excès pour oublier des problèmes sociaux, la France doit respecter sa gastronomie. Le rapport sur la pertinence et la faisabilité d’une taxation nutritionnelle insiste aussi sur le frein que représente la médiatisation de ces produits à d’éventuelles mesures pour en freiner leur consommation. « Les industries et commerces alimentaires ont un poids économique majeur ». Comment mordre la main qui vous nourrit (mal) ? Le budget publicitaire en jeu est énorme pour les médias et l’aide apportée par des « chevaliers » de ce secteur de l’industrie aux décideurs politiques fait régulièrement la une de nombreux quotidiens.

Techniquement, créer une taxe spécifique « rencontrerait de nombreuses difficultés : coûts de gestion et de contrôle très lourds pour les entreprises et les administrations, obstacles juridiques, techniques, économiques et sociaux concernant la définition et la justification de l’assiette, notamment ». Par contre, l’utilisation des outils fiscaux déjà existants est possible. Droits d’accises sur les boissons majorés ou suppresion du taux de TVA réduit pour les aliments incriminés pourraient être des solutions. Malheureusement, ces produits à bas prix font maintenant partie de l’alimentation de base des français « défavorisés » et, une nouvelle fois, le courage politique fait défaut. Mieux vaut des populations « défavorisées » obèses et heureuses, dont les dépenses de santé seront prises en charge par la société et dont le montant sera reproché aux professionnels de santé, plutôt que d’imposer des contraintes nutritionnelles difficiles à avaler dans un système où l’assistanat a pris plus de poids que la responsabilisation.