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Une fête de la bière sans tabac

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Fête de la bièreQui n’a jamais entendu parler de la célèbre Oktoberfest, plus connue sous le nom de « fête de la bière », qui a lieu tous les ans depuis 1810 à Munich, capitale du land de Bavière, en Allemagne ? Chaque année, plusieurs millions de personnes viennent célébrer le début de l’automne sur un grand champ de foire couvert d’immenses tentes décorées dans lesquels la bière coule à flots et où des orchestres jouent le plus souvent de la musique bavaroise seize jours durant. Lieu festif, où les Allemands aiment venir en famille pour faire honneur à leurs traditions, le tabagisme passif y était malheureusement la règle jusque-là. Si, en 2011, chacun pourra continuer à déguster son litre de bière tranquillement, quantité habituellement servie à chacun des convives, au moins sera-t-il possible de le faire sans avoir à subir les nuisances de la cigarette.

61 % des Bavarois viennent, en effet, de décider par référendum d’une interdiction de fumer dans les lieux publics de leur région à partir du 1er août 2010 ; une initiative que les partis politiques traditionniels, censés représenter les citoyens, s’étaient toujours refusés à prendre. Jusqu’à maintenant, les élus opposaient l’argument de la liberté individuelle aux associations anti-tabac, reléguant au second plan les enjeux de santé publique et oubliant qu’il n’est aucunement question de liberté individuelle quand le tabagisme est passif et, le plus souvent, imposé par les fumeurs. Rien d’étonnant à cela quand on sait qu’une partie des congrès des partis politiques étaient financés par l’industrie cigarettière… Il faut dire qu’avec un chiffre d’affaires annuel de près de vingt milliards d’euros, les fabricants ont de quoi faire du lobbying. À tel point que bien peu nombreux étaient les élus de Bavière à s’insurger contre le non-respect des mesures déjà existantes quant à l’interdiction de fumer dans les débits de boisson, un interdit très souvent contourné par les bars et les boîtes de nuit où il arrivait même que des distributions gratuites de cigarettes soient organisées. Des politiciens pas plus pressés d’agir une fois au sommet de l’État puisque les taxes sur le tabac ont rapporté treize milliards d’euros en 2009 et qu’il est toujours plus agréable de regarder la colonne recettes d’un budget que d’ouvrir les yeux sur les dépenses.

Malgré les résultats de ce référendum et la volonté des Européens de lutter contre la cigarette, des voix s’élèvent déjà pour demander une dérogation pour la fête de la bière 2010. Après avoir financé les partisans du non à ce vote, on peut s’attendre à ce que l’industrie du tabac et certains élus unis dans un même combat fassent tout pour minimiser les résultats de ce scrutin et obtenir qu’une nouvelle fois la volonté des citoyens soit ignorée. Mais le vent est peut-être en train de tourner, car il semble que le monde politique ne soit plus aussi uni qu’avant à ce sujet, des parlementaires allant même jusqu’à demander qu’un référendum sur l’interdiction de fumer dans les lieux publics soit organisé dans chacune des régions allemandes. Stratégie électorale, moyen d’obtenir plus des fabricants de cigarettes ou réel désir d’améliorer la santé publique en évitant, par exemple, des problèmes mentaux aux personnes exposées au tabac ? Seules les décisions qui seront prises dans les mois qui viennent permettront de le savoir…

Vers une nouvelle réglementation du suicide assisté en Suisse

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Tourisme, suicide et chalet suisseLe Conseil fédéral suisse, véritable gouvernement de la Confédération suisse, a décidé le 28 octobre 2009 de proposer deux options visant à modifier le droit pénal de ce pays afin de réglementer explicitement l’assistance organisée au suicide. Ces deux options, dont l’une a pour but de fixer clairement « des devoirs de diligence imposés aux collaborateurs des organisations d’assistance au suicide » et dont l’autre consiste à interdire l’activité de ces organisations, ont été envoyées en consultation.

En droit suisse, la procédure de consultation est une étape intervenant en amont de l’adoption d’un texte législatif permettant à toute personne de se prononcer sur le fond des projets fédéraux pouvant avoir un fort retentissement sur la vie des citoyens. Elle ne doit pas être confondue avec la votation, véritable référendum d’initiative populaire.

En matière d’assistance à l’autolyse, la Suisse dispose d’une législation libérale à l’origine d’un « tourisme de la mort », dénoncé par les uns, mais défendu par les autres. Cette assistance est autorisée lorsqu’elle ne se fonde pas sur « un mobile égoïste ». Des organisations ont profité de cette particularité du droit pour réaliser ce que l’on peut considérer comme étant un véritable business du suicide ou une aide à mourir dignement, suivant ses convictions. Les autorités, ayant constaté une dérive dans ces pratiques, ont décidé de réfléchir à la mise en place de restrictions dans ce domaine. « Il s’agit d’empêcher que l’assistance organisée au suicide ne se transforme en une activité orientée vers le profit et de s’assurer qu’elle demeure réservée à des malades en fin de vie » selon le Conseil fédéral. Pour le gouvernement suisse, il n’est pas question que des patients atteints de pathologies chroniques invalidantes ou de troubles psychiques puissent avoir recours à l’assistance au suicide.

La première option proposée se base sur la mise en place de nouveaux devoirs de diligence. Les personnes assistant une personne à mourir ne pourront pas être poursuivies à condition que cette dernière ait émis librement sa volonté de mourir et que sa décision soit mûrement réfléchie. Deux médecins indépendants de l’organisation apportant son assistance au suicide devront « devront attester l’un que le suicidant est capable de discernement, l’autre qu’il est atteint d’une maladie physique incurable dont l’issue sera fatale à brève échéance. » Un devoir d’information sur les autres solutions palliatives devrait aussi être instauré et « le médicament utilisé pour amener la mort sera prescrit par un médecin, ce qui présuppose que ce dernier pose un diagnostic et une indication, en vertu des devoirs et de l’éthique professionnels du corps médical. » La personne prêtant son assistance ne devra pas poursuivre un but lucratif et devra se contenter de couvrir ses frais, ce qui n’était pas toujours le cas, semble-t-il, jusque-là.

La seconde option revient à interdire tout simplement l’assistance au suicide en partant du principe que cette démarche ne peut être basée sur l’altruisme.

Le rapport explicatif accompagnant ces deux options en vue de la procédure de consultation devrait être prochainement disponible en ligne. Des organisations comme Exit Suisse romande ou Dignitas ont immédiatement réagi pour faire part de leur rejet de ces propositions et ont affirmé qu’elles iraient jusqu’à demander un référendum sur le sujet si l’une de ces propositions est acceptée en l’état. Le Conseil fédéral a, quant à lui, fait savoir qu’il était plutôt favorable à un encadrement plus strict du suicide assisté plutôt qu’à son interdiction. Reste à savoir quel écho chaque option dans les magnifiques montagnes helvétiques.