Au JO cette semaine (du 27 décembre 2009 au 2 janvier 2010)
Chaque semaine, Droit-medical.com vous propose une sélection de textes parus au Journal officiel de la République française dans le domaine du droit médical et du droit de la santé.
Chaque semaine, Droit-medical.com vous propose une sélection de textes parus au Journal officiel de la République française dans le domaine du droit médical et du droit de la santé.
Ce n’est qu’avec l’arrêté du 29 décembre 2009 fixant les montants d’indemnisation de certains professionnels de santé en exercice, retraités ou en cours de formation réquisitionnés pour assurer la vaccination dans le cadre de la lutte contre la pandémie grippale que le paiement des médecins et des infirmiers réquisitionnés dans le cadre de la campagne de vaccination contre la grippe A(H1N1) va être possible. Sans la parution de ce texte au Journal officiel du 1er janvier 2010, rien n’était possible, même si la plupart des professionnels concernés étaient persuadés que tout était réglé depuis longtemps… Et tout cela a failli bien plus mal finir puisque le gouvernement a dû avoir recours à une procédure inhabituelle afin de faire plier les parlementaires français pour que l’article prévoyant la rémunération des praticiens et des infirmiers puisse être voté.
Un point est surprenant en l’état actuel des textes : les médecins et les infirmiers libéraux installés ou remplaçants sont les seuls à ne pas voir le montant des indemnités versées multiplié par 2, lorsque le professionnel de santé requis assure la vaccination un dimanche ou un jour férié. Les médecins et les infirmiers retraités, salariés ou les internes bénéficient de cette mesure, mais pas les libéraux… Certes, les médecins et les infirmiers libéraux avaient obtenu une rémunération supérieure à celle des retraités ou des salariés, mais travailler un jour férié pour un libéral est habituellement reconnu comme méritant une récompense.
À part cela, les indemnisations des personnels réquisitionnés sont brutes et conformes à ce que les syndicats médicaux et infirmiers avaient annoncé.
Point rarement abordé, les déplacements n’ont pas été oubliés et les professionnels sont indemnisés pour se rendre dans le lieu de vaccination.
Pour les médecins libéraux installés, remplaçants et retraités ainsi que les médecins des centres de santé, leur indemnisation est calculée sur la base des tarifs prévus par la convention nationale des médecins généralistes et des médecins spécialistes approuvée par l’arrêté du 3 février 2005.
Pour les infirmiers libéraux installés, remplaçants et retraités ainsi que les infirmiers de centres de santé, leur indemnisation est calculée sur la base des tarifs prévus par la convention nationale destinée à régir les rapports entre les infirmières et les infirmiers libéraux et les organismes d’assurance-maladie approuvée par l’arrêté du 18 juillet 2007.
Pour les autres médecins et infirmiers, leur indemnisation est calculée sur la base des tarifs prévus par leur statut, contrat de travail ou convention collective. Le cas échéant, leur indemnisation est calculée sur la base des tarifs appliqués aux professionnels de santé libéraux.
Pour les professionnels de santé en formation, leur indemnisation est calculée sur la base des tarifs prévus par leur statut ou, pour les étudiants en soins infirmiers ainsi que les étudiants en médecine, par l’arrêté du 28 septembre 2001 modifiant l’arrêté du 23 mars 1992 modifié relatif au programme des études conduisant au diplôme d’État d’infirmier. Ces professionnels peuvent, lorsque les circonstances le justifient, bénéficier du remboursement des frais de nuitée sur la base du tarif forfaitaire de 48 euros par nuit.
Les modalités de versement de ces indemnités sont différentes en fonction de la situation des professionnels, mais c’est la « caisse primaire d’assurance-maladie centralisatrice désignée » qui tient les cordons de la bourse et les uns et les autres n’en seront donc que plus vigilants quant à leur rémunération, habitués qu’ils sont à quelques tracas quand il est question du remboursement des soins par la Sécurité sociale.
Décision a été prise de fermer les centres de vaccination contre la grippe A(H1N1) et ce malgré un virus qui n’a pas prévu de prendre des vacances, comme l’a précisé le ministre de l’intérieur lors du point presse hebdomadaire du 16 décembre 2009 sur l’épidémie. Alors que la ministre de la santé avait expliqué le 9 décembre 2009, qu’en plus du vendredi 25 décembre 2009 et du vendredi 1er janvier 2010, les samedis 26 décembre 2009 et 2 janvier seraient considérés comme des jours fériés et que les professionnels de santé réquisitionnés à ces dates, pour permettre la vaccination d’une population enthousiaste, obtiendraient une rémunération en conséquence, une semaine plus tard, les mêmes ministres annonçaient que les centres de vaccination seraient fermés les 25 et 26 décembre, ainsi que les 1er et 2 janvier. En ce jour de Noël, si les églises sont ouvertes, les centres d’immunisation sont bel et bien fermés.
Au moins, si les bancs des premières sont clairsemés, on ne pourra pas accuser les seconds d’en être la cause. Après avoir connu une polémique sur le possible impact de l’ouverture des magasins le dimanche sur la fréquentation de la messe dominicale, on comprend que le gouvernement n’ait pas voulu affronter le courroux du Vatican en proposant la vaccination en lieu et place de l’eucharistie en ce jour de Noël. Si se faire vacciner est comme prouver sa foi en les ministres de la République, ces derniers savent qu’il faut néanmoins ménager toutes les susceptibilités, même dans un pays attaché à la laïcité.
Nombreux vont être les déçus qui ne pensaient pas trouver portes closes en se rendant au centre de vaccination le plus proche de chez eux. Beaucoup avaient en effet prévu de profiter de ces jours fériés pour faire leur devoir de citoyen à l’occasion des promenades digestives indispensables après les excès des réveillons. D’autres voulaient partager la bûche avec des personnels de santé volontaires pour être réquisitionnés et payés double. Ces scènes de fraternité n’auront malheureusement pas lieu.
Bien des enfants qui voyaient le vaccin sans adjuvant qui ne fait pas mal comme un cadeau supplémentaire vont pleurer et gâcher ce qui promettait d’être en sortie en famille des plus saines…
Déçus aussi tous les professionnels de santé qui avaient mis le champagne au frais pour trinquer avec les gendarmes venus leur apporter leur réquisition ou qui pensaient vacciner tout en fredonnant des chants de Noël.
Qu’en sera-t-il de la responsabilité de l’État lorsque les familles des personnes décédées, faute d’avoir pu être immunisées les 25 et 26 décembre ou les 1er et 2 janvier en l’absence de “continuité” dans la campagne de vaccination, porteront plainte ? Et si un enfant venait à mourir à cause d’un vaccin qui a perdu de son efficacité pour ne pas avoir été utilisé assez rapidement, n’y a-t-il pas là un risque juridique ?
À quelques semaines d’une autre campagne, une chose est évidente : lorsque le président de la République présentera ses voeux aux Français, on peut être certain qu’il n’oubliera pas de leur souhaiter à tous une bonne santé !
Si l’on en croit les propos du ministre de l’intérieur et du ministre de la santé, lors du point presse hebdomadaire sur la pandémie grippale, les préfets négligent les circulaires qui leur sont envoyées. Il arrive qu’ils les mettent « sous la pile », une pile très épaisse, puisqu’au bout de deux mois elles ne sont toujours pas au sommet de celle-ci et qu’une nouvelle circulaire, sur le même sujet, soit nécessaire… C’est exactement ce qui est arrivé, d’après Roselyne Bachelot, à la circulaire du 1er octobre 2009 ayant pour objet la mobilisation des professionnels de santé / virus A(H1N1), qu’elle a cosigné avec le ministre de l’intérieur, Brice Hortefeux, et c’est pour cette raison que des services hospitaliers ont été désorganisés ou des étudiants infirmiers réquisitionnés la veille de leurs examens…
Une nouvelle circulaire a donc été envoyée aux préfets toujours en charge d’atteindre les objectifs gouvernementaux en matière de vaccination, même si le ministre de l’intérieur a rappelé qu’il n’y avait aucune obligation de résultat dans ce domaine, pour leur rappeler les « bonnes pratiques ». Il convient de « respecter l’ordre de priorité des professionnels à mobiliser pour respecter la médecine de ville » et de « s’appuyer sur les listes fournies par les établissements de santé », car les directeurs de ces établissements « sont les mieux à même de savoir quels sont les professionnels que l’on peut mobiliser » à un moment ou à un autre pour perturber le moins possible les services. Pas question de « réquisitionner les professionnels de santé plus de deux fois par semaine », de ne pas respecter les périodes d’examen des étudiants ou de mobiliser les médecins du travail des établissements de santé, car ils sont là pour vacciner les patients hospitalisés, les familles des soignants et les soignants qui ne sont pas encore vaccinés, si l’on est un “bon” préfet.
Rien sur le volontariat des étudiants infirmiers ou des internes en médecine qui est pourtant bien présent dans la circulaire du 1er octobre 2009. Les témoignages de ces jeunes médecins et infirmiers semblent indiquer qu’ils sont présumés “volontaires”… Ils ne sont pas les seuls puisque de nombreux médecins témoignent de leur désignation d’office pour être “volontaires”.
Mieux vaut d’ailleurs être un bon serviteur de l’État en cette période de pandémie si l’on ne veut pas se voir confier de nouvelles fonctions. La grippe A(H1N1) ne se contente de toucher le vulgum pecus, elle a aussi fait une victime chez les hauts fonctionnaires. Le directeur de la Direction départementale des affaires sanitaires et sociales (DDASS) de Paris, Philippe Coste, va être muté au sein du ministère de la santé en raison de “dysfonctionnements” dans des centres de vaccination contre la grippe A(H1N1) à Paris. Les plages horaires n’ont pas été respectées et les Français sont tellement désireux de se faire vacciner que de tels manquements auraient sans doute pu conduire à des émeutes… Pour la ministre de la santé, il ne s’agit là que du simple management de ressources humaines.
La période des fêtes de fin d’année risquant d’être un peu délicate pour ce qui est des réquisitions, le samedi 26 décembre 2009 et le samedi 2 janvier 2010 seront considérés comme des jours fériés. Les agents de l’État seront ainsi mieux payés pour les tâches administratives qu’ils seront amenés à effectuer à ces moments là.
Pour les libéraux, pas question de faire des réservations à la montagne ou à l’étranger pour la fin décembre puisque « les préfets pourront augmenter le nombre de médecins traitants qui assurent la permanence des soins dans les secteurs qui le nécessitent sur la période de fin d’année » ou en « renforçant les centres 15 » dans le secteur de la régulation. Il n’est pas question de volontariat pour ces missions et la ministre insiste sur le fait que cela aura pour les praticiens concernés une implication en terme de rémunération. Veut-elle dire qu’un médecin généraliste en vacances ne gagne pas d’argent et que le réquisitionner équivaut à lui rendre service en l’obligeant ainsi à percevoir des honoraires ?
Roselyne Bachelot, après avoir chaleureusement remercié les médecins libéraux “volontaires” qui ont accepté de participer à la campagne de vaccination, a reconnu qu’un grand nombre d’entre eux refusaient de vacciner. C’est un élément sur lequel la communication se fait peu et il est intéressant de le noter.
Dernière information de cette journée, le quotidien Les Échos parle d’une rémunération des internes doublée le dimanche et en semaine après 18 heures (66 euros bruts de l’heure au lieu de 33 euros), comme celle des élèves infirmiers.
Toujours rien concernant la rémunération des médecins et des infirmiers, le soir et le dimanche ou le reste du temps d’ailleurs, puisque, à notre connaissance, leurs conditions précises de liquidation n’ont toujours pas été fixées par la ministre de la santé. Par contre, contrairement aux heures supplémentaires des agents de l’État, les rémunérations de l’ensemble des personnels de santé des centres de vaccination sont imposables au titre de l’impôt sur le revenu et soumises à cotisation sociale selon le régime de droit commun.
Alors que l’idée de confier aux médecins généralistes la vaccination contre la grippe A(H1N1) semble être remise en question chaque jour un peu plus, le gouvernement cherche de nouvelles solutions permettant d’écouler une partie suffisamment importante des 94 millions de doses de vaccins achetées pour ne pas avoir à gérer ce qui pourrait bien se transformer en un nouveau scandale économico-sanitaire. Tous les éléments de communication sont mis en place pour mettre en avant les décès liés à la grippe A(H1N1), les mutations communes du virus et le faible risque d’effets indésirables que présente cette vaccination. Plus discrètes sont les informations relatives aux choix économiques qui ont guidé et guident encore la façon dont la campagne de vaccination est effectuée en France. Très rares aussi sont les données concernant la grippe saisonnière en 2009, à tel point que l’on aurait l’impression que cette dernière a totalement disparu, qu’elle n’entraîne aucune hospitalisation et qu’elle ne fera aucune victime cette année, alors que cette grippe tue souvent plus de 2 000 Français par an. Quant aux données de pharmacovigilance relatives aux vaccins contre le virus H1N1v, chacun sait que le système déclaratif français en ce domaine est très loin de refléter une réalité de terrain. Même si les médecins ont l’obligation légale de déclarer les incidents liés aux produits, en pratique bien peu le fond en raison, selon eux, d’une lourdeur administrative excessive et de la délégation à l’industrie du processus d’enquête servant à déterminer si l’incident est grave ou non, et s’il est nécessaire de poursuivre des investigations risquant de remettre en cause les investissements de l’industrie. Quand on voit qu’il faut très souvent plusieurs années, surtout s’il est fabriqué par un laboratoire français, pour qu’un médicament soit retiré du marché, alors même que c’est la responsabilité du fabricant qui est en cause, on imagine le temps qu’il risque de falloir pour voir mis en cause un vaccin dont l’État a accepté de se porter garant…
C’est dans ce contexte que Roselyne Bachelot, ministre de la santé, a indiqué sur France Info qu’elle étudiait la possibilité de confier aux médecins du travail des grandes entreprises ou à ceux des sociétés faisant appel à un service inter-entreprises la vaccination contre la grippe A(H1N1) pour compléter l’oeuvre des centres de vaccination. Selon Roselyne Bachelot, des problèmes logistiques se posent, mais proposer l’immunisation dans le cadre de la médecine du travail serait envisageable.
Il convient de rappeler que les médecins responsables de la santé au travail ne sont habituellement pas encouragés à assurer la vaccination des salariés. Ces actes de prévention sont laissés aux bons soins du médecin traitant, le médecin du travail s’assurant simplement que les vaccinations sont à jour.
Ce n’est sans doute pas un hasard si la solution des médecins de santé au travail est évoquée. Ces derniers sont salariés et ils font déjà l’objet d’incitations, pour de ne pas dire de pressions, pour se rendre dans les centres de vaccination. Il leur a, par exemple, été expliqué que s’ils étaient volontaires, un souhait relatif aux horaires de leurs réquisitions pourrait être pris en compte. D’autres ont reçu des documents dans lesquels il est clairement précisé qu’ « à défaut de volontaires suffisants, les réquisitions s’effectueront donc sur un mode plus impératif ».
Alors que le Royaume-Uni, l’Allemagne ou la Belgique n’éprouvent aucune difficulté à faire vacciner les personnes qui le désirent, sur leur territoire, par le biais d’une partie des médecins généralistes qui croient en cette prévention de masse, la France en est encore à chercher des solutions pour imposer à tous les professionnels de santé un vaccin contesté, même si un certain nombre d’entre eux propose de le faire au sein de leur cabinet. Les réquisitions, qui devaient ne concerner que des personnels volontaires, servent maintenant à obliger les professionnels de santé à effectuer des gestes qu’ils refusent pour eux-mêmes ou pour leurs proches, et ce, malgré une pression médiatique qui s’intensifie et qui pousse la population vers les centres de vaccination, permettant ainsi aux pouvoirs publics de donner l’impression de répondre à une demande…
La réquisition des professionnels de santé dans le cadre de la campagne de vaccination contre le virus H1N1v répond à des règles de droit précises. La clé de voûte de ces dispositions est un arrêté du ministre de la santé censé être une mesure d’urgence face à menace sanitaire grave due à une maladie transmissible. Cet arrêté relatif à la campagne de vaccination contre le virus de la grippe A(H1N1) 2009 a été pris le 4 novembre 2009 et publié au Journal officiel de la République française du 6 novembre.
Lire les visas et les considérants de l’arrêté permet de suivre les évènements qui ont conduit le gouvernement à prendre cet arrêté :
Vu le code de la santé publique, notamment ses articles L. 3131-1 et L. 3131-8 ;
Vu le plan national de prévention et de lutte « Pandémie grippale » n° 150 / SGDN / PSE / PPS du 20 février 2009 et ses fiches techniques ;
Vu l’avis du Haut Conseil de la santé publique relatif à la pertinence de l’utilisation d’un vaccin pandémique dirigé contre le virus grippal A (H1N1) 2009 en date 22 juin 2009 ;
Vu l’avis du Haut Conseil de la santé publique relatif aux recommandations sur les priorités sanitaires d’utilisation des vaccins pandémiques dirigés contre le virus grippal A (H1N1) 2009 en date du 7 septembre 2009 et actualisé les 2, 23 et 28 octobre 2009 ;
Considérant que l’Organisation mondiale de la santé a déclaré la mise en œuvre de la phase 6 du plan mondial de préparation à une pandémie de grippe ;
Considérant l’évolution de la situation épidémique sur le territoire national décrite par l’Institut de veille sanitaire depuis le début de la pandémie ;
Considérant la nécessité de prendre les mesures d’urgence adaptées à la protection de la population contre la menace sanitaire grave que constitue le virus de la grippe A (H1N1) 2009 ;
Considérant que la vaccination contre le virus de la grippe A (H1N1) 2009 constitue une mesure de prévention prise dans l’intérêt de la santé publique pour faire face à la contamination par le virus de la grippe A (H1N1) 2009 et protéger ainsi la santé de la population ;
Considérant que l’Etablissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires a acquis des doses de vaccins Pandemrix, Focetria et Celvapan afin de lutter contre l’épidémie de grippe A (H1N1) 2009 et que ces vaccins ont obtenu les autorisations de mise sur le marché délivrées par les autorités compétentes ;
Considérant qu’ont également été acquises des doses de vaccins Humenza et Panenza, pour lesquels la délivrance d’une autorisation de mise sur le marché est en cours d’étude ;
Considérant que les livraisons des vaccins autorisés permettent de mettre en place une campagne de vaccination pour la population qui le souhaite ;
Considérant que les vaccins sont conditionnés, pour leur majeure partie, en multidoses et que les établissements de santé et le secteur ambulatoire n’ont pas la capacité d’assurer la mise en œuvre d’une campagne de vaccination nationale compte tenu du risque d’afflux important de patients grippés pendant le pic épidémique ;
Considérant que l’organisation de la campagne de vaccination doit prendre en compte les calendriers de livraison des vaccins, l’enjeu sanitaire d’une protection rapide des populations les plus exposées ou les plus à risque et la nécessité d’adapter l’offre de vaccination en fonction des publics
C’est pour ces raisons qu’il a été arrêté qu’une campagne de vaccination était nécessaire. Son organisation est assurée par le représentant de l’État territorialement compétent et repose sur des centres spécifiques ainsi que sur des équipes mobiles de vaccination notamment appelées à intervenir dans les lieux de vie collective ou fermés.
C’est dans ce cadre que le représentant de l’État procède à toute réquisition nécessaire aux besoins de cette campagne.
Dans certaines régions, l’appel au volontariat des médecins a été un échec. C’est le cas dans le Calvados où sur 1 200 courriers adressés aux médecins libéraux, seuls 60 ont répondu à l’appel du gouvernement pour participer à une campagne de vaccination que la grande majorité du corps médical ne cautionne pas, au même titre que certains états européens qui refusent même d’acheter des vaccins. En toute discrétion, les autorités, ne voulant pas reconnaître les raisons de ce manque de mobilisation et ayant besoin de 600 praticiens, ont choisi de ne plus réquisitionner les seuls volontaires, mais d’obliger tous les médecins libéraux à se rendre dans les centres de vaccination.
Après l’Union régionale des médecins libéraux (URML) de l’île de La Réunion qui a appelé à refuser cette campagne de vaccination, alors que les praticiens avaient déjà eu à faire face à la pandémie dans l’hémisphère sud où ils sont situés, c’est l’URML Basse-Normandie qui a choisi de ne pas céder aux ordres de l’administration. Après avoir refusé d’offrir aux médecins de ville la possibilité de vacciner les patients habitués à leur faire confiance, au moment où il est question d’enfin autoriser cette vaccination dans leur cabinet, les pouvoirs publics décident de les contraindre à se rendre dans des gymnases pour vacciner des personnes qu’ils n’ont jamais suivies pour leur injecter un produit avec lequel on a tâtonné jusqu’à ces derniers jours pour savoir combien de doses devront être utilisées. Il est maintenant question de forcer ces médecins à fermer leur cabinet où l’on annonce pourtant que les patients se bousculent…
Dès le 9 novembre 2009, l’URML de Basse-Normandie a examiné de façon attentive les arrêtés préfectoraux à l’origine des réquisitions dans cette région. Elle a estimé qu’en l’état, ces réquisitions ne respectaient pas la procédure réglementaire ou pouvaient être source de confusion. L’URML a donc engagé dès le 10 novembre une procédure de référé en suspension-annulation près le tribunal administratif de Caen.
Plusieurs motifs ont été invoqués, parmi lesquels l’absence de référence au « plan blanc élargi » prévu à l’article L 3131-8 du code de la santé publique sur lequel repose la possibilité pour le préfet de département de réquisitionner dans le cadre de mesures d’urgence en cas de menaces sanitaires graves face à une maladie transmissible ; le fait que le Procureur de la République n’a pas fait partie des destinataires des arrêtés comme la loi le prévoit ; l’absence de précision de la nature de la prestation requise ou, enfin, que le courrier reçu par les praticiens leur demande de se rendre une ou deux heures plus tôt que prévu par les arrêtés dans les centres de vaccination sans préciser si ce temps est rémunéré et qui est responsable si un accident survient durant cette période.
Le juge des référés a rejeté ces premières demandes. Un autre référé a été déposé par l’URML au motif que la carence en volontaires n’a pas été prouvée et que tous les volontaires n’ont pas été sollicités. S’assurer que toutes les procédures sont correctement respectées est le seul moyen de garantir aux médecins que leur responsabilité ne sera pas engagée si des effets indésirables graves finissent par être mis en évidence.
Mécontent que les médecins s’opposent ainsi aux décisions administratives, le chef du service juridique de la préfecture a réagi en mettant en cause l’éthique des praticiens. Selon lui, c’est pour protéger leurs intérêts privés et laisser ouvert leur cabinet que les médecins de Basse-Normandie agissent ainsi. Après avoir décidé du montant des indemnisations des praticiens réquisitionnés, il est étonnant que les pouvoirs publics se servent de l’argument de leur faible niveau pour fustiger les médecins. Il est tout aussi surprenant de voir l’intérêt public mis en avant par les autorités quand on sait que c’est l’intérêt des laboratoires pharmaceutiques qui a primé quand il s’est agi de signer les contrats relatifs à l’achat de 94 millions de doses de vaccins…
Après avoir parlé de volontariat des professionnels de santé pour participer à la campagne de vaccination contre la grippe A(H1N1) et de la réquisition afin de simplifier les conditions assurantielles, nombreux sont les médecins et les infirmiers qui commencent à comprendre que ces mesures servent maintenant à les contraindre à vacciner la population, alors même qu’ils ne veulent pas se faire vacciner eux-mêmes. Le volontariat n’est plus de mise et l’autorité publique est appelée à la rescousse de mesures gouvernementales discutées. Si le médecin est tenu de déférer aux réquisitions de l’autorité publique sous peine d’amende, le professionnel de santé est-il obligé de vacciner pour autant ?
Il n’est pas dans les habitudes de Droit-medical.com de relayer les discours syndicaux, mais le sondage informel réalisé par le syndicat national des professionnels infirmiers (SNPI), à l’aide d’une lettre d’information adressée à plus de 12 000 d’entre eux, mérite que l’on s’y intéresse. Plus de 2 000 infirmiers ont répondu. Sans que cette population puisse être représentative de l’ensemble de la profession, il est intéressant de noter que 63 % de ceux qui se sont exprimés ont choisi le refus de la vaccination contre la grippe A(H1N1). Seuls 26 % « vont se faire vacciner », sachant que les infirmiers, selon le ministère de la santé, ne sont que 29 % à se faire immuniser contre la grippe saisonnière.
Le SNPI rappelle les résultats de deux autres sondages. L’un, réalisé par le journal international de médecine (JIM), montre que 61 % des médecins interrogés ont répondu qu’ils étaient contre une vaccination systématique des sujets de 6 mois à 24 ans contre la grippe A(H1N1) ; l’autre, effectué par un magazine infirmier anglais Nursing Times, établit que seuls 37 % des infirmiers du National Health Service (NHS) souhaitent se faire vacciner contre cette même maladie.
Le gouvernement s’en tient pour l’instant à la circulaire du 21 août 2009 « Planification logistique d’une campagne logistique contre le nouveau virus A(H1N1) ». Il est prévu que « toute équipe de vaccination devra s’auto-vacciner lors de la première vacation » et considère que les autres professionnels de santé font partie des populations à vacciner en priorité. Seuls les infirmiers diplômés d’État hospitaliers et les praticiens hospitaliers ne pourront pas être contraints de participer aux vacations. « Les professionnels de santé mobilisés pour la campagne de vaccination le seront, au plan juridique, sous le régime de la réquisition par arrêté préfectoral motivé. Dans le cadre des plans blancs élargis, ces réquisitions se fondent sur l’article L 3131-8 du code de la santé publique. La réquisition permettra d’apporter aux professionnels concernés une couverture juridique renforcée. »
La question de la vaccination obligatoire des professionnels de santé reste donc plus que jamais au coeur de la future campagne d’immunisation.