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Pas de sexe pour les assureurs

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Jurisprudences

Variation en fonction du sexeEn octobre 2010, l’avocat général de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) avait conclu qu’il était « incompatible avec les droits fondamentaux de l’Union de tenir compte du sexe de l’assuré en tant que facteur de risque dans les contrats d’assurance », avis qui n’engageait pas pour autant les juges de cette instance. Le 1er mars 2011, ces derniers ont néanmoins abondé dans le même sens que l’avocat général.

L’égalité entre les hommes et les femmes est un droit fondamental en Europe et la Cour est là pour sanctionner les discriminations directes ou indirectes en ce domaine. Peu importe le sexe d’un citoyen, l’accès à des biens et à des services et leur fourniture doit être identique pour tous. La prise en considération du critère du sexe comme facteur pour l’évaluation des risques en assurance concernant les contrats privés d’assurance vie est bien un élément discriminatoire au regard de la directive 2004/113/CE.

Pour la Cour, les droits fondamentaux au sein de l’Union européenne sont garantis par la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, signée à Rome le 4 novembre 1950, et sa Charte des droits fondamentaux interdit toute discrimination fondée sur le sexe. Ces textes imposent que l’égalité entre les hommes et les femmes soit assurée dans tous les domaines.

Malgré cela, concernant les assurances et les retraites privées, volontaires et non liées à la relation de travail (celles liées au travail étant régies par des textes différents), la directive 2004/113/CE prévoit en son article 5 que :
« 1. Les États membres veillent à ce que, dans tous les nouveaux contrats conclus après le 21 décembre 2007 au plus tard, l’utilisation du sexe comme facteur dans le calcul des primes et des prestations aux fins des services d’assurance et des services financiers connexes n’entraîne pas, pour les assurés, de différences en matière de primes et de prestations.
2. Nonobstant le paragraphe 1, les États membres peuvent décider avant le 21 décembre 2007 d’autoriser des différences proportionnelles en matière de primes et de prestations pour les assurés lorsque le sexe est un facteur déterminant dans l’évaluation des risques, sur la base de données actuarielles et statistiques pertinentes et précises. Les États membres concernés en informent la Commission et veillent à ce que des données précises concernant l’utilisation du sexe en tant que facteur actuariel déterminant soient collectées, publiées et régulièrement mises à jour. Ces États membres réexaminent leur décision cinq ans après le 21 décembre 2007 en tenant compte du rapport de la Commission mentionné à l’article 16, et transmettent les résultats de ce réexamen à la Commission. »
C’est ce paragraphe 2 qui est au centre de l’affaire portée devant la Cour (nº d’affaire C-236/09).

La décision de la CJUEest claire à ce sujet : « Selon la jurisprudence constante de la Cour, le principe d’égalité de traitement exige que des situations comparables ne soient pas traitées de manière différente et que des situations différentes ne soient pas traitées de manière égale, à moins qu’un tel traitement ne soit objectivement justifié […]
Il est constant que le but poursuivi par la directive 2004/113 dans le secteur des services d’assurance est, ainsi que le reflète son article 5, paragraphe 1, l’application de la règle des primes et des prestations unisexes. Le dix‑huitième considérant de cette directive énonce explicitement que, afin de garantir l’égalité de traitement entre les femmes et les hommes, l’utilisation du sexe en tant que facteur actuariel ne devrait pas entraîner pour les assurés de différence en matière de primes et de prestations. Le dix-neuvième considérant de ladite directive désigne la faculté accordée aux États membres de ne pas appliquer la règle des primes et des prestations unisexes comme une « dérogation ». Ainsi, la directive 2004/113 est fondée sur la prémisse selon laquelle, aux fins de l’application du principe d’égalité de traitement des femmes et des hommes consacré aux articles 21 et 23 de la charte, les situations respectives des femmes et des hommes à l’égard des primes et des prestations d’assurances contractées par eux sont comparables.
Dans ces circonstances, il existe un risque que la dérogation à l’égalité de traitement entre les femmes et les hommes prévue à l’article 5, paragraphe 2, de la directive 2004/113 soit indéfiniment permise par le droit de l’Union.
Une telle disposition, qui permet aux États membres concernés de maintenir sans limitation dans le temps une dérogation à la règle des primes et des prestations unisexes, est contraire à la réalisation de l’objectif d’égalité de traitement entre les femmes et les hommes que poursuit la directive 2004/113 et incompatible avec les articles 21 et 23 de la charte.
Par conséquent, cette disposition doit être considérée comme invalide à l’expiration d’une période de transition adéquate. »
La date à laquelle le sexe ne pourra plus être utilisé par dérogation comme facteur actuariel a été fixée au 31 décembre 2012 et il est intéressant de noter que cette décision ne concerne pas que les contrats d’assurance vie, mais bien tous les contrats d’assurance.

Plusieurs assureurs interrogés par la presse suite à cette décision ont indiqué qu’elle allait avoir pour conséquence l’augmentation des primes de nombreux contrats, comme ceux concernant les jeunes conductrices qui, d’après eux, sont soumises à des tarifs moindres, les statistiques montrant qu’elles ont moins d’accidents que les jeunes conducteurs. Pas un mot sur le fait que cette mutualisation des risques puisse entraîner une baisse des primes concernant justement ces jeunes conducteurs : surprenant, non ?

Congé d’allaitement pour les pères salariés

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Père s'endormant en donnant le biberonLa Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) a tranché : les pères salariés ont droit à un congé dit « d’allaitement » indépendamment du statut professionnel de la mère de leur enfant.

C’est une nouvelle fois au motif de « discrimination par le sexe » que la Cour s’est prononcée dans une affaire (C 104/09) opposant un salarié espagnol à son employeur. La loi ibérique, dans le cas où les deux parents travaillent, prévoit que les mères ou les pères peuvent, pendant les neuf premiers mois suivant la naissance de leur enfant, bénéficier d’un congé dit « d’allaitement », congé qui permet de s’absenter du lieu de travail pendant une heure ─ celle-ci pouvant être divisée en deux fractions ─ ou de réduire la journée de travail d’une demi-heure. Conformément à ce texte, un salarié a demandé ce congé d’allaitement à la société qui l’emploie. Cet avantage, prévu par la loi, lui a été refusé au motif que sa femme était travailleuse indépendante. En effet, le texte espagnol relatif au congé d’allaitement précise que les deux parents doivent être salariés pour que le père puisse bénéficier du congé. L’employé a décidé de faire appel à la justice pour ce qu’il estimait être une discrimination.

La Cour supérieure de justice de Galice (Tribunal Superior de Justicia de Galicia), saisie en instance d’appel, a relevé que « les évolutions réglementaires et jurisprudentielles nationales ont détaché ce congé du fait biologique de l’accouchement. Alors qu’il avait été institué en 1900 pour faciliter l’allaitement naturel de la mère, il peut être octroyé, depuis quelques années, même en cas d’allaitement artificiel. Désormais, il doit être considéré comme un simple temps d’attention à l’enfant et comme une mesure de conciliation entre la vie familiale et la vie professionnelle à l’issue du congé de maternité. Néanmoins, aujourd’hui encore, ce n’est que si la mère est une travailleuse salariée et jouit donc, à ce titre, du droit au congé d’allaitement, que le père peut bénéficier du congé à sa place. »

Subodorant le caractère potentiellement discriminatoire d’un tel texte, la cour espagnole a préféré utiliser une procédure de renvoi préjudiciel avant de prendre sa décision. En agissant ainsi, elle a pu interroger la CJUE sur l’interprétation du droit européen en la matière. Il existe, en effet, des directives relatives à la mise en œuvre du principe de l’égalité des chances et de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d’emploi et de travail, la dernière en date étant la directive 2006/54/CE du Parlement européen et du Conseil du 5 juillet 2006.

Pour la CJUE, « ces directives s’opposent à une mesure nationale qui prévoit que les mères travailleuses salariées peuvent bénéficier d’un congé d’allaitement alors que les pères travailleurs salariés ne peuvent en bénéficier que lorsque la mère de leur enfant est également une travailleuse salariée. » Pour la Cour, il y a bien là une discrimination fondée sur le sexe, discrimination qui « ne peut être justifiée ni par des objectifs de protection de la femme ni par la promotion de l’égalité de chances entre hommes et femmes. » Pas question non plus pour la CJUE de rester sur une vision passéiste du rôle du père au sein de la famille : « le fait que seule la mère salariée soit titulaire du droit de bénéficier du congé, alors que le père ayant le même statut ne peut pas en bénéficier directement, est de nature à perpétuer une distribution traditionnelle des rôles, en maintenant les hommes dans un rôle subsidiaire en ce qui concerne l’exercice de leur fonction parentale. »

Messieurs, à vos biberons !

Le sexe n’est pas un facteur de risque comme un autre…

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Différences entre l'homme et la femme« Il est incompatible avec les droits fondamentaux de l’Union de tenir compte du sexe de l’assuré en tant que facteur de risque dans les contrats d’assurance » : c’est ce qui ressort des conclusions de l’avocat général de la Cour de justice de l’Union européenne dans une affaire opposant l’État belge à une association de consommateurs et à deux particuliers suite à une disposition prise par la Belgique visant à transposer la directive 2004/113/CE. Les plaignants souhaitaient voir annuler la partie du texte autorisant des différences proportionnelles en matière de primes et de prestations versées aux assurés lorsque le sexe est un facteur déterminant dans l’évaluation des risques et que de telles différences peuvent être fondées sur des données actuarielles et statistiques pertinentes et précises. Cette disposition ne faisait que reprendre l’exception prévue pour les États en matière d’application de la directive 2004/113/CE, texte qui interdit toute discrimination fondée sur le sexe dans l’accès à des biens et services et dans la fourniture de ceux-ci.
La cour constitutionnelle belge ayant eu à statuer sur ce litige a décidé d’interroger la Cour de justice de l’Union européenne à ce sujet (affaire C-236/09). Cette dernière n’a pas encore donné sa réponse, mais les conclusions de l’avocat général qui ne lient pas la Cour sont tout de même particulièrement intéressantes. La question qui se pose est de savoir si la dérogation énoncée dans la directive 2004/113/CE est compatible avec des normes de droit supérieur, à savoir le principe de l’égalité de traitement des hommes et des femmes consacré par le droit de l’Union.

Pour l’avocat général, des différences biologiques clairement démontrables pourraient justifier des différences de traitement entre les sexes. Mais ce constat ne suffit pas, encore faut-il voir si les situations dans lesquelles se trouvent les hommes et les femmes en ce qui concerne les facteurs de risque déterminants pour les prestations d’assurance peuvent différer d’une manière pertinente en droit. Pour l’avocat général, la règle dérogatoire en cause ne vise pas des différences biologiques claires entre les assurés, mais concerne des situations dans lesquelles des risques d’assurance différents pourraient en tout cas être statistiquement rattachés à l’appartenance sexuelle. De nombreux autres facteurs joueraient néanmoins un rôle important pour l’appréciation des risques d’assurance. C’est ainsi, principalement, que l’espérance de vie serait fortement influencée par des éléments économiques ou sociaux, comme, par exemple, la nature et l’importance de l’activité professionnelle, l’environnement familial et social, les habitudes alimentaires, la consommation de denrées d’agrément ou de drogues, les activités de loisirs et la pratique du sport.
Il serait juridiquement inapproprié de déterminer les risques d’assurance en fonction de l’appartenance sexuelle de l’assuré. Les différences individuelles qui ne présentent un lien avec cette appartenance sexuelle que de manière statistique ne pourraient pas entraîner une différence de traitement des assurés de sexe masculin et de sexe féminin au moment de la conception des produits d’assurance. Dans ce contexte, elle souligne en particulier que le sexe est une caractéristique qui, à l’instar de la race et de l’origine ethnique, est inséparable de la personne de l’assuré sur laquelle celui-ci n’a aucune influence. Contrairement à l’âge, par exemple, le sexe d’une personne ne serait pas soumis à des modifications naturelles.

En conclusion, l’avocat général estime qu’il est incompatible avec le principe de l’égalité de traitement des hommes et des femmes consacré par le droit de l’Union d’appliquer des facteurs de risque fondés sur le sexe pour déterminer les primes et les prestations d’assurance. Elle propose à la Cour d’annuler la disposition dérogatoire correspondante de la directive 2004/113/CE.

On imagine le bouleversement que pourrait produire une telle décision dans le monde de l’assurance. C’est pour cette raison que l’avocat général préconise qu’une telle mesure ne produise ses effets qu’à l’avenir, en respectant une période transitoire de trois ans après le prononcé de la Cour si ses conclusions étaient suivies.

De bonnes résolutions de fin d’année pour les jeunes Européens

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Le Conseil et des représentants des gouvernements des États membres de l’Union européenne s’occupent de tout. À tel point que l’une de leurs résolutions, qui vient d’être publiée au Journal officiel de l’Union européenne du 13 décembre 2008, concerne le bien-être des jeunes. N’est-ce pas un brin prétentieux de penser pouvoir régenter le bien-être quand on est un homme politique ? La santé des jeunes est mise sur le même plan que leur bien-être, ce qui explique cette brève.Jeunes européens insouciants et en pleine santé

Dès 2001, la Commission européenne a estimé que « la santé devait être considérée comme un facteur d’intégration sociale et d’autonomie des jeunes et comme un corollaire indispensable au développement de leur citoyenneté active ».

Cette résolution fait différents constats sur la santé des jeunes Européens : « certains domaines tels que l’alimentation, l’activité physique, la consommation abusive d’alcool, la santé sexuelle et mentale sont particulièrement préoccupants ». C’est avec un certain paternalisme que ce travail veut promouvoir un mode de vie sain dans le domaine de la vie sexuelle de la jeunesse. Il faut aussi noter que la consommation d’alcool et de drogues est mise sur le même plan que la dépendance aux technologies de l’information et de la communication. Pour le Conseil et les représentants des États, le décrochage scolaire ou l’égalité des sexes jouent un rôle sur la santé.
Belle profession de foi quand le texte souligne qu’ « il est nécessaire d’aider les jeunes à devenir plus responsables de leur santé, à améliorer l’opinion qu’ils ont d’eux-mêmes et à augmenter leur autonomie, notamment en les rendant plus conscients des bienfaits d’un mode de vie sain et des risques liés à leur santé » et qu’ « il convient d’accorder une attention particulière à la santé mentale des jeunes, notamment en favorisant une bonne santé mentale ».

Une interrogation tout de même en s’intéressant à ce texte : que vont penser les jeunes à la lecture de ce texte de vieux ?

Loi, sexe et handicap

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Congrès

Fauteuil« L’appréhension juridique de la sexualité des personnes handicapées », voilà quel est le thème du prochain congrès organisé par le Centre technique national d’études et de recherches sur les handicaps et les inadaptations (CTNERHI).
Il se déroulera à Paris, le 22 septembre 2008 de 9 h 30 à 17 h, 236 bis rue de Tolbiac dans le 13e arrondissement. Il a été mis au point par Jean-Baptiste Thierry, maître de conférences à l’université de Nancy.

Ce thème est judicieusement choisi, car selon les organisateurs « les relations sexuelles des personnes handicapées physiques, mentales ou psychiques, soulèvent de nombreux problèmes. Cette sexualité souvent cachée est généralement abordée sous l’angle psychologique, sociologique, mais peu sous l’angle juridique. Or le droit intervient pour interdire ou autoriser ces relations et en régit les conséquences, notamment en ce qui concerne la parentalité. L’accès à la condition de parents ne se pose pas dans les mêmes termes lorsque ce sont des personnes handicapées mentales qui sont concernées. Les pratiques contraceptives qui existent nécessitent d’être bien connues, car sous l’apparente banalité de certaines d’entre elles, cela ne doit pas faire oublier que le majeur protégé doit apporter son consentement. L’éventuel recours à un tiers doit être également envisagé. Les enjeux éthiques, psychologiques, éducatifs et juridiques sont ici fondamentaux. »

Tous les renseignements et les modalités d’inscription sur le site du CTNERHI.