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Et si on fermait les Urgences à 22 h ?

Écrit par Radoslava Dvorska le . Dans la rubrique Evolution

Malade en fauteuil roulantPourquoi ne pas fermer l’accès direct aux services d’urgence à l’hôpital après 22 h ? C’est la question qu’a posée aux députés de son pays le ministre de la santé slovaque, Ivan Uhliarik, en leur soumettant un projet de loi allant dans ce sens. Plus question de pousser directement la porte des Urgences après dix heures du soir si le texte est adopté, les patients devront appeler un centre de régulation hospitalier ou un service d’ambulances s’ils veulent être admis.

Selon Ivan Uhliarik, les services d’urgence dans les hôpitaux slovaques ne sont pas suffisamment fréquentés la nuit pour qu’ils soient jugés rentables, mieux vaut donc renvoyer une partie du personnel chez lui et réguler les appels de ceux qui estiment devoir être vus rapidement. Jusque-là, quand ils en ont besoin, les Slovaques sont habitués à être accueillis aux Urgences le soir, le week-end et les jours fériés. Même si les services hospitaliers d’urgence ne sont pas engorgés par des consultations médicalement non justifiées, contrairement à un phénomène qui se développe en France où le taux de ces consultations peut atteindre 20 %, les malades slovaques pourraient bien devoir montrer patte blanche avant de voir aux Urgences une blouse de la même couleur à partir de janvier 2012.

Eva Madajova, présidente de l’association pour la protection des droits des patients, s’insurge contre cette proposition. Pour elle, la fréquentation des services d’urgence est suffisante pour justifier qu’ils soient ouverts la nuit. Elle estime que la population est attachée à ce fonctionnement et qu’il serait préjudiciable de le réformer.
Un avis que ne partage pas Ladislav Pazstor, président de l’association des médecins libéraux, pour qui cet ajustement des horaires d’ouverture des services d’urgence à l’hôpital ne fait que mettre le droit slovaque en conformité avec la directive européenne sur le temps de travail dans le secteur de la santé publique. Il explique par ailleurs que les cas les plus graves seront pris en charge par les médecins libéraux de garde et les services d’aide médicale urgente (SAMU).

En France, l’idée de mettre en place des plateformes téléphoniques complétant les services offerts par le 15 ou le 112 pour réguler les urgences est lancée depuis plusieurs années, mais à l’inverse de la Slovaquie, c’est pour lutter contre la saturation des services hospitaliers que des propositions sont faites, pas pour les fermer faute de fréquentation. L’état de santé de la population slovaque serait-il meilleur que celui de la population française ? Pas vraiment. Autres lieux, autres moeurs…

Le malaise de certains professionnels de santé dénoncé par le Médiateur de la République

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Le malaise des médecins hospitaliersAprès des débuts qui ressemblaient plutôt à une nouvelle façon de faire pression sur les médecins et autres professionnels de santé, les mauvaises langues disent qu’il semble que le pôle santé sécurité soins du Médiateur de la République, dont les valeurs sont l’humanisme, l’équité, le respect et l’impartialité selon la synthèse d’activité annuelle 2010 de cette institution, ait reçu de nouvelles instructions destinées à appuyer la nouvelle politique de médecine de proximité voulue par les pouvoirs publics à un peu plus d’un an d’une échéance électorale majeure. Les missions du Médiateur de la République, il convient de le rappeller, sont d’« améliorer les relations entre le citoyen et l’administration par la médiation », de « faire avancer le droit » et d’« agir au niveau international pour la promotion des droits de l’homme, de la démocratie et de la bonne gouvernance. »

Faut-il écouter ces railleries ? Mieux vaut penser que la prise de conscience du malaise des professionnels de santé par ce pôle santé sécurité soins (P3S) est due à la simple analyse des requêtes qu’il a reçues en deux ans d’existence. En effet, sur plus de 10 000 enregistrées en 2010, 18 % de celles-ci « proviennent de professionnels, en situation de dialogue bloqué avec un patient, subissant un isolement professionnel après un accident médical, ou menacé dans leur activité… ils sont à la recherche d’un interlocuteur indépendant et neutre. C’est pourquoi P3S a mis en place au cours de l’année une cellule d’accompagnement et de soutien des professionnels qui intervient dans la prise en charge du stress post traumatique de professionnels confrontés à des situations complexes et sensibles, associées à une rupture de dialogue avec les acteurs concernés sans perspective de solutions. » Une cellule qui ne semble concerner, pour l’heure, que les médecins anesthésistes.
Pas question pour autant de parler du malaise des professionnels libéraux dans leurs rapports avec l’administration, c’est celui des professionnels de santé hospitaliers qui est mis en avant. Victimes d’agressions physiques, surcharge de travail dans les services d’Urgence, c’est à eux que va la compassion du P3S. Une violence qui augmente au fil du temps : « la Sham (Société hospitalière d’assurance mutuelle), qui assure la majorité des établissements publics hospitaliers, a ainsi pu constater par rapport à 2008 une augmentation de plus de 25 %. La majorité d’entre elles relevant de violences physiques (80 % contre 70 % en 2008) suivies des injures ou menaces (13 %). »
La charge et les conditions de travail « nourrissent l’épuisement des professionnels », selon ce travail, et sont donc dénoncés. Réaffectation des agents épuisés, écoute et prévention feraient partie des solutions à ces problèmes dans les grands établissements. Dans les structures plus petites, sous l’égide et le contrôle des ARS [agences régionales de santé, NDLR], le cadre d’une communauté hospitalière de territoire pourrait être d’une aide précieuse, selon le P3S, appuyant ainsi les choix politiques récents en toute indépendance. Un soutien que l’on retrouve lorsqu’il est question de l’engorgement des urgences, source de stress à l’hôpital, et « l’installation de maisons médicales de garde, souhaitée par le ministre de la santé ».

Autre point intéressant mis en avant par le P3S, en pleine affaire du Mediator, il y a « une vraie réflexion à mener, quant à la protection des « signalants » et à la valorisation du signalement : un médecin, une équipe soignante signalant un événement indésirable grave continuent-ils à être soumis au même risque de sanction administrative ou judiciaire que s’ils s’abstenaient de cette déclaration ? […] La protection des signalants est donc une question fondamentale, un préalable à toute démarche efficace de mise en œuvre d’une politique nationale de gestion des risques dans les établissements de santé.
Déjà, en mai 2006, le comité des ministres du Conseil européen, recommandait aux États membres, de promouvoir le développement d’un système de notification des incidents relatifs à la sécurité des patients, non punitif, juste dans sa finalité et conçu dans l’esprit d’une démarche volontaire, anonyme et confidentielle.
Il s’agit donc que les enquêtes rétrospectives de recherche de causes soient entièrement anonymisées. Le caractère anonyme de ces enquêtes doit concerner tant le nom des professionnels de santé impliqués que celui de l’établissement, et bien entendu l’identité du malade. Ceci garantira aux professionnels de santé que les conclusions de l’enquête ne puissent être exploitées dans une procédure contentieuse future.
Par ailleurs, il apparaît nécessaire de soustraire au risque de sanction administrative les professionnels de santé qui, à la suite d’un signalement, pourraient se voir reprocher des fautes professionnelles sanctionnables.
Allant plus loin, la participation volontaire et responsable d’un professionnel de santé à l’objectif de sécurité des soins ne devrait-elle pas être un élément positif à prendre en compte dans son évaluation ? »

En parallèle, les services du Médiateur de la République insistent sur la maltraitance dans les établissements de soins. Problème rarement dénoncé par les patients ou leurs familles de peur de représailles, il est pourtant indispensable d’agir et le P3S peut être utile dans un tel cas. Il est aussi question de l’initiation « d’une mission d’enquête sur la “maltraitance financière” des personnes âgées dans les établissements de santé dont le rapport est attendu pour le premier trimestre 2011 ».
Accès au dossier médical, fin de vie, non-respect des droits des patients en psychiatrie, application du principe de laïcité à l’hôpital, difficultés d’accès aux soins des détenus sont d’autres sujets traités dans ce document.

À la lecture de cette synthèse annuelle, une évidence s’impose : la communication du P3S a été revue en profondeur. Fini le discours agressif envers les professionnels de santé et la partialité affichée en faveur des patients, c’est avec beaucoup plus de douceur que les messages sont diffusés : « Son rôle de médiateur dans des dossiers liés à un préjudice susceptible d’entraîner des poursuites disciplinaires ou d’engager une responsabilité pénale, civile ou administrative, fait de lui [le P3S, NDLR] un observateur privilégié des événements indésirables graves et des pratiques non conformes ou contraires à l’éthique. Ces situations susceptibles de mettre en danger la vie d’autrui ou de menacer des personnes vulnérables (enfants, personnes âgées…) nécessitent parfois le déclenchement du dispositif d’alerte de l’autorité concernée. »

Accessoirement et même si peu nombreux sont ceux qui attachent encore de l’importance à la chose, il est surprenant qu’un document qui est là pour donner une image de sérieux au travail réalisé par le P3S comporte autant de fautes d’orthographe. La maîtrise du français semble tout aussi ardue que l’exercice de la médecine…

Ne pas respecter le règlement intérieur d’un hôpital peut valoir une condamnation pour homicide involontaire

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Jurisprudences

Panneau hôpitalRares sont les médecins qui s’intéressent de près au règlement intérieur de l’établissement hospitalier au sein duquel ils travaillent. À leur décharge, les tâches administratives auxquelles ils sont de plus en plus souvent soumis font qu’ils préfèrent consacrer leur temps restant à assurer leur formation continue, sans pour autant négliger la prise en charge des malades. Une jurisprudence du début de l’année 2010 montre qu’ils feraient néanmoins mieux de relire ce règlement intérieur et de le respecter.

Un soir de février 2003, une jeune femme de 35 ans chute lourdement sur sa terrasse dans le sud de la France. C’est suite à ce traumatisme qu’elle est admise en urgence, dans la nuit, dans une antenne du centre hospitalier universitaire de sa région. À son arrivée au service des urgences, seul un interne est présent, le médecin senior de cette unité de soins n’est pas là. Comme c’est d’usage, ce dernier ne se déplace qu’à la demande du service. Nombreux sont les services qui fonctionnent ainsi et le médecin senior a l’autorisation de son chef de service pour agir de la sorte. Habituellement tout se passe bien, l’interne prend en charge le patient, prescrit les examens complémentaires, fait le diagnostic, instaure le traitement et oriente le patient vers le service où il sera hospitalisé. Mais en cet hiver 2003, les choses ne se passent pas de cette façon…
À son arrivée au service des urgences, la jeune femme n’est pas dans un état préoccupant et il n’est donc pas fait appel au médecin senior. Elle est envoyée en radiologie par l’interne. À son retour aux urgences, après la prise des clichés, malgré des signes d’hémopneumothorax (du sang et de l’air dans des régions du thorax où l’on ne devrait pas en trouver), l’interne ne juge toujours pas nécessaire d’appeler le médecin senior. Erreur d’appréciation ou peur de se faire rabrouer par son supérieur comme c’est parfois le cas, il gère seul la situation alors que le pronostic vital de la jeune femme est en jeu. Le protocole adéquat n’est pas mis en place et la patiente décède deux jours plus tard d’un arrêt cardiocirculatoire. Tout le monde s’accorde à dire que « cette faute patente est la cause indirecte et certaine du décès ».

C’est sur le règlement intérieur de l’hôpital que s’est appuyée, le 9 mars 2010 (pourvoi nº 09-80543), la Cour de cassation pour confirmer l’arrêt de la cour d’appel ayant déclaré coupable le centre hospitalier du délit d’homicide involontaire. Pour la Cour, il y a eu défaillance dans l’organisation de l’établissement. Cette défaillance consiste en l’absence de médecin senior dans ce service alors que le titulaire était autorisé à s’absenter par son supérieur hiérarchique, responsable de toutes les unités des services des urgences, et ce, en infraction au règlement intérieur de l’établissement qui impose la seniorisation dans chaque unité sectorisée de ces services ainsi que l’accueil par un médecin senior de chaque patient à charge pour lui, éventuellement, sous sa responsabilité d’attribuer le suivi de ce patient à un interne ou faisant fonction. Cette désorganisation fautive n’a pas permis de prendre, dès l’arrivée de la patiente, les mesures appropriées qu’un médecin senior aurait dû mettre en oeuvre, mais surtout dès le retour de cette dernière du service des radiographies puisque c’est à ce moment-là que le processus vital s’est enclenché pour défaut de mise en place d’un protocole adéquat qui aurait permis d’éviter l’arrêt cardiocirculatoire alors que l’existence de la pathologie majeure était révélée.

C’est la responsabilité pénale du centre hospitalier en tant que personne morale qui a ainsi été reconnue. C’est bien le non-respect du règlement intérieur qui, pour les juges, est à l’origine de la faute directement responsable du décès de la patiente. Mieux vaut donc prendre quelques minutes pour relire ce règlement si l’on est amené à intervenir dans un établissement de soins…

Le DMP et un master pour les infirmiers anesthésistes sous le sapin

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Croire au Père NoëlEn marge d’un déplacement à Bordeaux, le 22 juillet 2010, pour signer le premier contrat de performance hospitalière, conclu entre le Centre hospitalier universitaire de Bordeaux, l’Agence régionale de santé et l’Agence nationale d’appui à la performance des établissements de santé et établissements médico-sociaux, Roselyne Bachelot, ministre de la santé, a fait le point sur le dossier médical personnel (DMP). Très loin des grand’messes médiatiques des débuts, c’est quasiment en catimini que l’annonce du déploiement sur l’ensemble du territoire en décembre 2010 a eu lieu. Il faut dire qu’après de multiples reports et de nombreux couacs, le DMP joue les Arlésiennes depuis 2004.

Selon la ministre de la santé, ce déploiement devrait être progressif et se poursuivre en 2011, puisque les expérimentations menées sur plus d’un million de dossiers médicaux personnels dans plusieurs régions semblent concluantes. Les patients auront un accès direct par Internet à leur DMP avec pour objectif une meilleure coordination des soins, mais surtout la réalisation d’économies pour la Sécurité sociale.

Lors de ce déplacement, Roselyne Bachelot a également reçu une délégation d’infirmiers anesthésistes pour leur confirmer ses engagements vis-à-vis d’une reconnaissance de leur diplôme au niveau master. Le processus de masterisation serait en cours, en collaboration avec le ministre de la recherche et de l’enseignement supérieur, et devrait aboutir avant la fin 2010.

Dernier point : concernant le contrat de performance hospitalière, 50 établissements devraient être engagés dans la démarche à la fin du mois de décembre 2010. L’un des objectifs est d’améliorer la satisfaction des usagers : au moins 80 % des patients devront être satisfaits. Les urgences devront, par exemple, prendre en charge 80 % des patients en moins de 4 heures. En plus de la réduction des délais de prise en charge aux urgences, l’amélioration de la gestion des blocs opératoires et celle de la gestion des lits sont au programme.

Toutes ces mesures devraient donc être en place pour l’arrivée du Père Noël. Enfin, pour ceux qui y croient encore…