Médecins agréés par le préfet : ne pas confondre fonction publique et permis de conduire

Écrit par Marie-Thérèse Giorgio le . Dans la rubrique La forme, Perspectives

L’expression « médecins agréés » prête parfois à confusion puisqu’elle désigne à la fois les médecins agréés pour la fonction publique et les médecins agréés pour les permis de conduire. Les deux agréments sont bien délivrés par le préfet, mais les rôles de ces médecins sont radicalement différents. Certains médecins peuvent néanmoins être agréés à la fois pour la fonction publique et pour les permis de conduire.

Médecins agréés pour la fonction publique

Chaque administration doit s’attacher un ou plusieurs médecins, généralistes ou spécialistes, qui figurent sur une liste préfectorale établie dans chaque département. Cette liste peut généralement être consultée sur le site internet de la préfecture du département.

C’est le décret nº 86-442 du 14 mars 1986 qui précise le mode de désignation et le rôle des médecins agréés.Un médecin donne son accord

Ces médecins agréés sont nommés pour 3 ans par le préfet, sur proposition du directeur général de l’Agence régionale de santé, après avis du Conseil départemental de l’ordre des médecins et du ou des syndicats départementaux des médecins. Ils sont choisis, à leur demande ou avec leur accord, parmi des médecins de moins de 65 ans qui ont au moins 3 ans d’exercice professionnel (un généraliste doit avoir exercé au moins un an dans le département dans lequel la liste est établie).

Bien que la médecine agréée soit complexe et présente de nombreuses spécificités pour chacune des fonctions publiques, le diplôme universitaire de médecine agréée est souhaitable, mais non indispensable, pour figurer sur la liste des médecins agréés de la préfecture. Ce diplôme universitaire existe depuis une dizaine d’années, il enseigne la technique de l’expertise pour les 3 fonctions publiques, la formation représente environ 8 journées de cours sur une année. Auparavant, les médecins agréés étaient formés de manière informelle par les anciens médecins agréés (exercice au sein d’un même cabinet, par exemple).

Les médecins sont agréés pour l’ensemble des trois fonctions publiques : la fonction publique d’État ; la fonction publique hospitalière et la fonction publique territoriale. Ils effectuent des examens médicaux (des expertises) à leur cabinet pour les fonctionnaires d’une administration, afin de statuer sur l’aptitude physique pour l’admission aux emplois publics, les congés de maladie ordinaire, les congés de longue maladie ou de longue durée, la réintégration à l’issue de ces congés et les contrôles pendant les périodes de maladie.
Un médecin agréé ne peut pas examiner un fonctionnaire dont il est le médecin traitant.

S’ils le souhaitent, ces médecins agréés peuvent également, siéger dans un comité médical départemental. Ce comité se réunit régulièrement en commission de réforme.
Le comité médical départemental donne à l’administration son avis sur les éventuelles contestations d’ordre médical à propos de l’admission des candidats aux emplois publics, l’octroi et le renouvellement des congés de maladie, des congés de longue maladie, des congés de longue durée, une mise en disponibilité d’office d’un fonctionnaire pour raison de santé, le reclassement de l’agent sur un autre emploi dans les suites d’un problème de santé, etc.
La commission de réforme peut être sollicitée, quant à elle, pour les accidents du travail, les maladies professionnelles, les maladies contractées en service, une mise à la retraite pour invalidité, une pension d’invalidité temporaire, etc.

Il existe un comité médical pour chaque administration : la Poste, la Police, les collectivités locales, les hospitaliers, la fonction publique d’État, etc.
Un médecin agréé pour la fonction publique peut choisir de participer au comité médical de la Police qui se réunit le premier lundi matin du mois et siège ensuite en commission de réforme les 3 autres lundis du mois, par exemple. Un même médecin peut ainsi participer à des comités médicaux pour diverses administrations, à partir du moment où les séances du comité médical ne se tiennent pas sur les mêmes demi-journées de la semaine.
Cette activité en comité médical et commission de réforme est peu attractive ; peu de médecins y prennent part puisque l’indemnisation avoisine 50 € pour 3 h de travail (une vingtaine de dossiers peuvent être examinés au cours d’une même séance). C’est un arrêté du 3 juillet 2007 qui fixe la rémunération de ces médecins.

Il est intéressant de noter que l’article R 4127-104 du code de la santé publique rappelle que les médecins agréés sont bien tenus au secret médical : « Le médecin chargé du contrôle est tenu au secret envers l’administration ou l’organisme qui fait appel à ses services. Il ne peut et ne doit lui fournir que ses conclusions sur le plan administratif, sans indiquer les raisons d’ordre médical qui les motivent.
Les renseignements médicaux nominatifs ou indirectement nominatifs contenus dans les dossiers établis par ce médecin ne peuvent être communiqués ni aux personnes étrangères au service médical ni à un autre organisme. »

Le médecin agréé pour la fonction publique ne doit pas être confondu avec le médecin statutaire, praticien salarié par une administration ou une entreprise dont les employés sont assimilés fonctionnaires et qui est chargé de contrôler les arrêts de travail des employés. C’est ainsi qu’un peu plus de cent médecins statutaires sont salariés par EDF et chargés de contrôler l’absentéisme des agents.
Ponctuellement, un médecin agréé pour la fonction publique peut néanmoins être mandaté par une administration, par exemple un hôpital qui relève de la fonction publique hospitalière, pour jouer le rôle de médecin statutaire et dire si tel ou tel arrêt d’un fonctionnaire ou assimilé est justifié au sein d’une entreprise qui emploie ce type de personnel.

Les médecins agréés pour la fonction publique ne doivent pas non plus être confondus avec les praticiens agréés pour délivrer un certificat médical permettant l’obtention d’un titre de séjour pour raisons de santé dont la liste est disponible auprès de chaque préfecture. Ces derniers ne sont pas l’objet de cet article.

Médecins agréés pour les permis de conduire

Ces médecins assurent, sous l’autorité du préfet de leur département, le contrôle médical réglementaire des conducteurs titulaires d’un permis de conduire adapté au véhicule qu’ils conduisent. Un permis de conduire inclut une aptitude médicale basée sur des critères définis par l’arrêté du 31 août 2010. Les aptitudes médicales ne sont délivrées que par des médecins, le plus souvent des médecins libéraux, généralistes ou spécialistes, spécialement agréés par les préfets. L’agrément est donné pour 2 ans (un projet est en cours pour allonger la durée de cet agrément à 5 ans) à des médecins âgés de moins de 70 ans, qui ont bénéficié d’une formation initiale et éventuellement d’une formation continue à l’Institut national de sécurité routière et de recherche (INSERR). Cet organisme assure une formation initiale de 3 jours pour les médecins appelés à siéger dans les commissions médicales primaires du permis de conduire ou qui assurent ce type d’expertise dans leur cabinet.

Les médecins agréés disposent de 2 modes d’exercice pour exercer le contrôle médical réglementaire des conducteurs :

— Les médecins agréés exercent à leur cabinet

Les médecins agréés effectuent des examens médicaux pour les candidats aux permis de conduire des groupes léger et lourd, les visites médicales périodiques de renouvellement (un chauffeur poids lourd, par exemple, doit passer une visite médicale tous les 5 ans jusqu’à l’âge de 60 ans, puis tous les 2 ans). Dans ce cadre, le médecin peut seulement prononcer une aptitude normale, sans restriction. S’il décide que le conducteur de poids lourd doit être revu au bout de 2 ans, et non de 5 ans compte tenu d’un problème de santé, il doit aussitôt l’adresser à la commission médicale primaire de la préfecture. Il en est ainsi pour tout problème médical dépisté.

— Les médecins agréés exercent en commission médicale primaire dans les locaux de la préfecture

Chaque commission est composée de 2 médecins, qui sont le plus souvent des praticiens (généralistes ou spécialistes) qui assurent également des visites médicales pour les permis de conduire à leur cabinet (mais cette condition n’est pas nécessaire). Dans le cadre de la commission, les médecins voient les conducteurs en première instance, après toute suspension ou annulation du permis de conduire (suite à la conduite d’un véhicule sous l’emprise de l’alcool ou de stupéfiants, par exemple), mais également les conducteurs adressés par les médecins agréés de ville qui n’ont pas pu statuer.

Dans le cadre de la commission médicale primaire, la décision d’aptitude ou d’inaptitude à la conduite est prise de manière collégiale par les deux médecins présents. En cas de doute sur l’aptitude, ces médecins peuvent adresser le conducteur à un médecin spécialiste agréé. Ils peuvent, par exemple, adresser un conducteur épileptique à un neurologue agréé par le préfet.

Toute visite médicale pour le permis de conduire peut être réalisée au sein de cette commission médicale primaire. Néanmoins, les commissions médicales ont des délais de rendez-vous très importants (plusieurs mois), compte tenu du nombre croissant de suspensions et d’annulations de permis en raison du renforcement des contrôles routiers. Historiquement, l’ensemble des visites médicales se déroulait dans le cadre des commissions médicales de la préfecture, mais pour alléger le fonctionnement de ces commissions médicales primaires, un certain nombre de visites médicales ont été déléguées à des médecins agréés de ville.

Le prix des visites médicales pour le permis de conduire s’élève à 33 €, que la visite soit réalisée en cabinet de ville ou dans le cadre de la commission préfectorale. Ces consultations ne sont pas prises en charge par l’assurance-maladie.

Pour l’usager, il est donc indispensable de bien faire la distinction entre les différents médecins agréés au moment où ils sollicitent une consultation en vue de l’obtention du document dont ils ont besoin. S’adresser à un médecin agréé pour la fonction publique pour un problème de permis de conduire équivaut à une perte de temps s’il n’est pas aussi agréé pour le permis (ce qui est loin d’être systématique). Mieux vaut avoir choisi le bon médecin agréé si l’on ne veut pas attendre à nouveau pour voir celui qui convient…

 

Propos recueillis auprès du Docteur Roland Cocozza, médecin agréé pour les visites médicales du permis de conduire et médecin agréé pour la fonction publique. Enseignant au DU de médecine agréé à l’université Lyon I.

 

Site internet conseillé

Fédération des médecins agréés

 

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Commentaires (3)

  • marc88

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    Médecin retraité depuis 4ans , je souhaite reprendre les consultations pour l’aptitude au permis de conduire dans mon ancienne maison médicale ou je pourrais disposer d’un bureau. Quel sera ma situation vis a vis du fisc?
    merci

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  • barbie84

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    bonjour je suis aide soignante de nuit en CLM depuis 2 ans pour ablation de hernies discales lombaires j’ai fait la demande de maladie pro qui a ete accepté par un expert agréé mais la mon dossier est a la commission de réforme qui doit valider ou pas !! ma question est est ce que la commission peut refuser l’avis de l’expert ? et est -il vrai que le mi-temps thérapeutique n’existe pas pour les postes de nuits ? merci

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  • GICET74

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    Bonjour,
    le médecin-chef d’un SDIS (médecin pompier professionnel) peut-il être médecin agréé et effectuer les visites de recrutement des agents administratifs (fonction publique territoriale) du service dans lequel il exerce ? Merci pour votre réponse.

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