Aucun lien entre le tabac et le cancer

Écrit par Charles Duchemin le . Dans la rubrique Humeur

Les poumons des fumeursC’est le 2 novembre 2009 que le chef de l’État a présenté un nouveau plan cancer. Alors que le déficit budgétaire s’élèvera à plus de 117 milliards d’euros en 2010 d’après la loi de finances, le président de la République a annoncé que 750 millions d’euros seraient consacrés à des dépenses nouvelles sur 4 ans (soit moins de 200 millions par an) en matière de cancer. Trois objectifs : l’excellence des soins ; réduire les inégalités face à la maladie ; vivre après le cancer.
20 % de spécialistes en plus en oncologie, en radiothérapie ou en hématologie à l’horizon 2013, telle est l’une des volontés affichées de ce plan cancer. 15 % du budget de la recherche devrait être alloué à l’étude des risques environnementaux afin de mieux appréhender les risques émergents.

C’est pour cette raison que quand, tout juste une semaine plus tard, le gouvernement et les députés de l’Union pour un mouvement populaire (UMP), sous la bannière du Président, font bloc pour que la hausse du tabac soit limitée à 6 %, alors que seule une augmentation de 10 % a un véritable impact en santé publique, il est logique de penser que le tabac et le cancer ne doivent pas être liés. À moins que certains ne pensent qu’il est plus intéressant de collecter les taxes sur le tabac ou les bénéfices sur les ventes plutôt que d’éviter aux citoyens d’avoir un cancer, et que d’autres estiment qu’il est bon pour l’emploi au sein de l’industrie pharmaceutique de pouvoir continuer à vendre de coûteuses chimiothérapies, il y a des décisions difficiles à comprendre.
La répartition des recettes liées à cette augmentation du prix du tabac est intéressante : 80 % pour l’État ; 11 à 12 % pour les fabricants, satisfaits par cette décision, ce que l’on peut comprendre en cette période de crise pour les ménages et de nombreuses petites et moyennes entreprises ; 6 % pour les buralistes, dont le chiffre d’affaires a augmenté depuis 2004, et le reste pour la société qui distribue le tabac.
Cette hausse représente 50 millions d’euros pour les buralistes, en plus des 162 millions reçus chaque année au titre du contrat d’avenir. Sur quatre ans, s’il n’y a pas de nouvelle hausse d’ici là, cela représente 698 millions d’euros…

Il y a d’autres raisons de croire que le tabac et le cancer, ou la santé tout simplement, ne sont pas liés : les avis du ministre de la santé, Roselyne Bachelot, ne sont pas suivis. Elle souhaitait une augmentation du prix du tabac de 10 %, c’est le chiffre de 6 % qui a été retenu. Elle souhaitait des photos-chocs de grande taille sur les deux faces des paquets de cigarettes, ce n’est qu’une image de petite taille sur le seul verso du paquet qui sera présente.
Le président de la République aime à donner la France en exemple quand elle fait mieux que ces voisins, mais pour le tabac, il semble préférer que l’Hexagone fasse tout simplement la même chose que les autres états membres… Encore une fois, pas question de mécontenter le « premier réseau français de service de proximité », comme aiment à se faire appeler les buralistes. Alors que les émissions de décoration d’intérieur font fureur, ces commerçants ne voulaient pas voir leurs rayonnages ressembler « à des salles mortuaires ». On ne sait jamais, cela aurait pu faire chuter leurs ventes, peu importe l’épidémie de tabagisme

Pour la grippe A, il n’aura fallu que l’avis de quelques experts, dont les déclarations d’intérêts étaient, pour certains, confuses au moment du choix, pour débloquer un milliard d’euros pour une maladie infectieuse que l’on a très vite su moins meurtrière que la grippe saisonnière. Pour le cancer, dont les facteurs de risque et la mortalité sont documentés depuis de nombreuses années, 750 millions d’euros sur quatre ans seront suffisants…

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Commentaires (4)

  • Bruno

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    Augmenter le prix du tabac ne baisse que les ventes officiel, le nombre de buraliste mais pas le nombre de fumeur;il et trop facile de ce procurer du tabac en dehors du circuit légale.messieurs les savants quid des drogues « dure » pastis,cannabis,et autres qui tue en toutes convivialités sur nos routes et dans nos maisons car les enfants trouvent toutes sorte de drogues a la porte des écoles,meme rurale ?

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  • buraliste

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    Je tenais, en tant que buraliste, à apporter quelques précisions quant à ceux qui est écrit dans l’article.
    Premièrement, les buralistes ne sont jamais battus contre les règles de santé publique ( interdiction, augmentation etc….)
    Les buralistes font le commerce ( la débite ) de tabac pour le compte de l’état et sont des collecteurs de taxes à ce titre.
    Pou exercer, ils doivent s’enquérir de droit de redevance et de bon nombre d’obligations draconniennes pour accéder à cette profession, notamment financière .
    Deuxièmement, dire que 6% d’augmentation vont gonfler les caisses des buralistes est méconnaître complêtement le problème.
    Dire que cela s’ajoute aux sommes versées par le contrat d’avenir est également faux car ces sommes viennent exclusivement en compensation de perte de chiffre d’affaire.
    petit rappel: 9000 buralistes ont du baisser leur rideau depuis 2003.
    9000 buralistes,9000 familles ont ainsi perdu leur unique patrimoine étant redevable sur leur denier personnel de l’ensemble de leur dettes ( un buraliste ne pouvant exploiter qu’en entreprise individuelle ou en snc et non en société )
    Troisièmement, les trafics, contrebandes et ventes transfrontalières de tabac représentent 2 milliaards de pertes fiscales…plus de 20% des cigarettes fumées en france proviennent de l’étranger…pensez vous que ces fumeurs se feront soigner dans le pays où ils se sont procurer leur tabac ?
    Notre réseau est le garant de l’application des directives en matière de santé publique. Qu’en serait-il si vous pouviez trouver du tabac en supermarchés, à des distributeurs ou en libre vente sur internet ?

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  • Philippe

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    Il y a régulièrement des secteurs d’activité qui disparaissent alors que d’autres émergent… Comment vouloir que le tabac soit encore porteur quand on sait les ravages dont il est à l’origine ! Les buralistes doivent se réorienter professionnellement, et alors !? Des millions de Français doivent le faire chaque année. 9 000 familles de buralistes ont perdu leur unique patrimoine depuis 2003, comparé au plus de 360 000 familles qui ont perdu un être cher à cause du tabac dans le même temps (60 000 décès/an x 6 ans), ça donne à réfléchir !! Un mort n’a aucune chance de se reconvertir, lui…
    Quand le prix augmente, tous les fumeurs ne se reportent pas sur la contrebande. Il y en a qui arrêtent de fumer et c’est le but.
    On ne doit rien faire parce qu’il y a du trafic ? Quand on voit le peu de moyens dont disposent les policiers et les douaniers, on se demande si l’état a vraiment envie de lutter contre ça, même s’il perd les taxes sur ces produits.
    La prévention est tout aussi nulle et dès que c’est possible, on détourne la loi anti-tabac.
    Plutôt que de se dire qu’il faut conserver des buralistes pour éviter 2 milliards de pertes de recettes fiscales, mieux vaut se demander comment faire pour lutter efficacement contre la consommation de tabac afin que les gens n’aient pas besoin de se faire soigner ! Comment faire pour leur éviter les bronchites chroniques, les infarctus, les chimiothérapies, etc.
    On est dans un système hypocrite où l’état a besoin des taxes sur le tabac pour faire plein de choses et pas seulement pour combler le trou de la sécu en partie creusé par le tabac.
    L’état ménage les buralistes, car ils sont des collecteurs de taxes et qu’à ce titre ils doivent montrer patte blanche : je ne vois pas en quoi cela rend le tabac moins nocif et justifie la pérennité du système ?
    Vous avez cliqué sur les liens dans l’article ?
    La lutte contre le tabagisme en France et dans le monde, c’est un peu la même chose que la lutte pour la planète : on a le droit à plein de blabla et d’esbroufe médiatique, à de nouvelles taxes, mais dans les faits on protège les intérêts financiers avant de protéger réellement la santé des citoyens et celle de la planète…

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  • Philippe

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    55,6 milliards de cigarettes vendues en France au cours de l’année 2009, soit une augmentation d’environ 2% d’après les chiffres du distributeur d’Altadis. Il n’y aurait pas une hausse de la consommation mais une baisse des achats transfrontaliers de l’ordre de 7%… Moins de buralistes avec une consommation qui ne diminue pas : ça donne une idée de l’efficacité des pseudo actions du gouvernement en matière de lutte contre le tabagisme…

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