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Vers un réel renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé ?

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Vote et transparenceVa-t-on enfin voir un nouveau jour se lever sur la transparence dans le monde du médicament et des produits de santé en France ? L’équivalent d’un Sunshine Act est-il prêt à faire disparaître les zones d’ombre qui ont dissimulé pendant de nombreuses années dans l’Hexagone des affaires comme celle du Mediator ? C’est ce que l’on pourrait penser en s’intéressant au projet de loi adopté par l’Assemblée nationale, le 4 octobre 2011, en première lecture après engagement de la procédure accélérée, relatif au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé.

En l’état actuel du texte, les réformes proposées sont diverses et variées, mais elles ont toutes pour but de rendre plus transparents les rapports entre l’industrie des produits de santé, les autorités sanitaires et les professionnels de santé. Loin de se contenter de simples obligations, elles prévoient des sanctions claires à l’encontre de ceux qui ne respecteraient pas les nouvelles règles que ce projet de loi prévoit d’instaurer en matière de déclaration d’intérêts.

Les membres des commissions et conseils siégeant auprès des ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale ainsi que les dirigeants, personnels de direction et d’encadrement et les membres des instances collégiales, des commissions, des groupes de travail et conseils des autorités et organismes des comités de protection des personnes ; de l’Office national d’indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales ; de l’Établissement français du sang (EFS) ; de l’Agence nationale chargée de la sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail ; de l’Institut de veille sanitaire ; de l’Institut national du cancer ; de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES) ; de l’Agence de la biomédecine ; des agences régionales de santé (ARS) ; de l’établissement public chargé de la gestion des moyens de lutte contre les menaces sanitaires graves ; de l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps), seront tenus, lors de leur prise de fonctions, d’établir une déclaration d’intérêts.
Sont aussi concernés les mêmes personnels travaillant pour la Haute Autorité de santé (HAS), l’Office de protection contre les rayonnements ionisants et l’Institut de protection et de sûreté nucléaire, ainsi que les membres du collège de l’Autorité de sûreté nucléaire et une liste d’agents de ces différentes instances mentionnés sur une liste établie par décret en Conseil d’État.

Par intérêts, il faut entendre « leurs liens, directs ou indirects personnels, de leurs conjoints, de leurs ascendants ou descendants, établis au cours des cinq dernières années avec les entreprises, établissements ou organismes dont les activités, les techniques ou les produits entrent dans le champ de compétence de l’instance au sein de laquelle l’intéressé siège, ainsi qu’avec les sociétés ou organismes de conseil intervenant dans ces secteurs. » Les déclarations d’intérêts seront rendues publiques et devront être actualisées, à l’initiative de l’intéressé, dès qu’une évolution intervient concernant ses liens d’intérêts.

Pas question pour les personnes mentionnées de prendre part aux travaux, aux délibérations ou aux votes des instances ci-dessus si elles ont un intérêt, direct ou indirect, à une affaire examinée ou si elles n’ont pas souscrit ou actualisé leur déclaration. Si l’une d’elles vient malgré tout à le faire, elle pourra encourir une peine prévue à l’article 432-12 du code pénal (cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende pour prise illégale d’intérêts). La peine sera moins lourde (30 000 euros d’amende) pour celles qui omettront sciemment d’établir ou de modifier une déclaration d’intérêts afin d’actualiser les données qui y figurent ou de fournir une information mensongère qui porte atteinte à la sincérité de la déclaration, alors qu’elles n’ont pas pris part aux travaux, aux délibérations ou aux votes.

Si ces personnels sont tenus au secret et à la discrétion professionnels dans les mêmes conditions que celles définies pour les fonctionnaires, les séances des commissions, conseils et instances collégiales d’expertise auxquelles elles participent, dont les avis fondent une décision administrative, seront intégralement rendues publiques et leurs débats seront intégralement enregistrés et publiés en ligne sur les sites internet du ministère chargé de la santé et des autorités ou des organismes mentionnés plus haut, à l’exclusion de toute information présentant un caractère de confidentialité commerciale ou relevant du secret médical, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État.

Il s’agit donc là d’un élargissement majeur des règles instaurées par la loi nº 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, dite loi Kouchner. Les nombreux décrets en Conseil d’État prévus par ce texte et nécessaires à son application devront néanmoins appeler à la plus grande prudence avant de clamer qu’un réel progrès a été fait quant à la transparence du système.

Autre volet important de ce projet de loi, l’obligation faite entreprises produisant ou commercialisant des produits dont s’occupe l’Afssaps (médicaments, produits contraceptifs, dispositifs médicaux, lait maternel collecté, produits d’entretien des lentilles de contact, lentilles de contact non-correctrices, produits de tatouage, etc.) ou assurant des prestations associées à ces produits de rendre publique l’existence des conventions qu’elles concluent avec la majorité des acteurs du monde de la santé.

Sont ainsi concernés les professionnels de santé relevant de la quatrième partie du code de la Santé publique (du médecin à l’ambulancier, en passant par le pharmacien, l’infirmier, l’orthoptiste, l’opticien-lunetier ou l’aide-soignant) ; les associations de professionnels de santé ; les étudiants se destinant aux professions relevant de la quatrième partie du même code ainsi que les associations et groupements les représentant ; les associations d’usagers du système de santé ; l’immense majorité des établissements de santé ; les fondations, les sociétés savantes et les sociétés ou organismes de conseil intervenant dans ce secteur des produits ou prestations ; les entreprises éditrices de presse, les éditeurs de services de radio ou de télévision et les éditeurs de services de communication au public en ligne ; les éditeurs de logiciels d’aide à la prescription et à la délivrance.
La même obligation s’appliquera, au-delà d’un seuil fixé par décret, à tous les avantages en nature ou en espèces que les mêmes entreprises procurent, directement ou indirectement, aux personnes, associations, établissements, fondations, sociétés, organismes et organes mentionnés ci-dessus.

Là aussi des sanctions sont prévues si ces obligations ne sont pas remplies. Le fait d’omettre sciemment de rendre publique l’existence des conventions pourra être puni de 45 000 euros d’amende, ainsi que d’autres sanctions comme l’interdiction, pour une personne physique, de fabriquer, de conditionner, d’importer et de mettre sur le marché, pendant cinq ans, les produits dont s’occupe l’Afssaps.

La mise en place d’une charte de l’expertise sanitaire est aussi prévue par ce projet de loi. Approuvée par décret en Conseil d’État, elle s’appliquera aux expertises réalisées dans les domaines de la santé et de la sécurité sanitaire à la demande du ministre chargé de la santé ou à la demande des autorités et des organismes concernés par les déclarations d’intérêts évoquées au début de cet article. Elle précisera les modalités de choix des experts, le processus d’expertise et ses rapports avec le pouvoir de décision, la notion de lien d’intérêts, les cas de conflit d’intérêts, les modalités de gestion d’éventuels conflits et les cas exceptionnels dans lesquels il peut être tenu compte des travaux réalisés par des experts présentant un conflit d’intérêts.
En l’état actuel du texte, ces experts ne semblent pas encourir de sanctions s’ils ne remplissent pas ou remplissent incorrectement la déclaration d’intérêts spécifique qui leur sera demandée. Il n’y a donc là qu’une transparence de façade, alors qu’il s’agit d’un volet pourtant essentiel dans des décisions prises à l’heure actuelle pour les produits de santé. Le terme même de “charte” dans ce contexte reflète d’ailleurs bien le manque de contraintes associées à cette proposition.
À quoi bon avec des commissions dont les membres n’ont pas de liens d’intérêts avec l’affaire dont ils s’occupent, si c’est pour qu’ils écoutent l’avis d’experts qui, eux, peuvent dissimuler les leurs sans crainte d’être sanctionnés ?

Si la transparence tend à s’améliorer, elle n’est pas encore à la hauteur de ce que peuvent espérer les citoyens, surtout ceux qui ont été victimes des manquements du système en place jusque-là. D’autant plus que projet de loi relatif à la déontologie et à la prévention des conflits d’intérêts dans la vie publique n’avance pas et qu’il est évident que si ce dernier est voté sans prévoir de sanctions à l’égard des décideurs politiques, comme le ministre de la santé ou les parlementaires par exemple, ne déclarant pas leurs intérêts, l’argent visant à influencer telle ou telle décision ne fera qu’être réparti de façon différente. Ce n’est pas un hasard si le Physician Sunshine Act n’est qu’un texte parmi de nombreux autres imposant la transparence dans la plupart des secteurs de la vie politique et économique des États-Unis d’Amérique.

Choix du médecin, du dentiste ou d’un autre professionnel de santé et remboursement par une mutuelle

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Jurisprudences

RemboursementUn patient affilié à la Mutuelle générale de l’éducation nationale (MGEN) a demandé la prise en charge de soins dentaires prévue à son contrat. S’étant adressé pour la réalisation des soins à un praticien n’ayant pas adhéré au protocole d’accord conclu entre la mutuelle et la Confédération nationale des syndicats dentaires (CNSD), il a bénéficié d’un remboursement inférieur à celui applicable aux soins délivrés par les praticiens ayant adhéré au protocole. Mécontent que le choix du dentiste lui ait fait perdre un peu plus de neuf cents euros, il a saisi le juge de proximité pour obtenir réparation de ce qu’il a estimé être un préjudice.

Alors que la juridiction de proximité déboute de sa demande le patient le 19 février 2010 après une mise en délibéré, l’avocat de la MGEN a présenté le 9 mars 2010 une question prioritaire de constitutionnalité « au regard du principe d’égalité devant la loi et de l’article 6 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, de l’article L 122-1, alinéa 3 du code de la mutualité, en ce que ce texte interdirait aux mutuelles d’instaurer des différences dans le niveau des prestations en fonction du choix de l’assuré de recourir ou non à un praticien adhérent à un protocole de fournitures de soins ou membre d’un réseau de soins, dès lors que d’autres organismes complémentaires d’assurance-maladie ne sont pas soumis à une telle prohibition ». Résultat, la Cour de cassation a eu à statuer rapidement sur cette question et en est arrivée à une décision qui a fait le bonheur du patient.

Peu importe que, selon la mutuelle, « la mise en oeuvre de deux systèmes de remboursement par la mutuelle en application du protocole conclu avec la CNSD n’est nullement discriminatoire dès lors que chacun des deux systèmes peut être librement choisi par le patient, et qu’il y a égalité entre tous les adhérents à la mutuelle qui choisissent de s’adresser soit à un dentiste conventionné, soit à un dentiste non conventionné », la Cour de cassation n’a pas suivi cette voie (n° de pourvoi : 09-10241). Si pour cette dernière il n’est pas nécessaire d’ordonner la réouverture des débats pour qu’il soit procédé à l’examen de cette question prioritaire de priorité, « selon l’article L 112-1, alinéa 3, du code de la mutualité, les mutuelles et leurs unions ne peuvent instaurer de différences dans le niveau des prestations qu’elles servent qu’en fonction des cotisations payées ou de la situation de famille des intéressés. » La juridiction de proximité a violé ce texte en appliquant « un protocole d’accord conclu entre une mutuelle et une organisation représentative des chirurgiens-dentistes fixant des tarifs de remboursement distincts pour un même acte, ce dont il résulte une différence dans le niveau des prestations de la mutuelle qui n’est fonction ni des cotisations payées, ni de la situation de famille des adhérents ».

Il s’agit là d’une décision importante à un moment où les réseaux de soins ont le vent en poupe. S’ils peuvent être justifiés par des intérêts de santé publique, il semble que les intérêts économiques de ce système pour les mutuelles viennent de trouver une de leurs limites.

Pesticides, OGM et protection des inventions biotechnologiques

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Des vaches prêtes à résister aux pesticidesLes organismes génétiquement modifiés (OGM) font régulièrement la Une en déclenchant les passions quand il est question de leur innocuité pour la santé. Au moment où l’Europe vient d’autoriser la culture d’une pomme de terre génétiquement modifiée sur ses terres et où le président Sarkozy vient d’expliquer que les contraintes environnementales ne devaient pas primer sur les intérêts économiques de l’agriculture nationale, quelques mois après un Grenelle de l’environnement très médiatisé, il est intéressant de prêter attention aux conclusions de l’avocat général de la Cour de justice européenne sur la portée de la législation de l’Union sur la protection des inventions biotechnologiques dans une affaire opposant Monsanto Technology LLC et Cefetra BV e. a. (C-428/08).

Ces conclusions commencent par un rappel des faits. « La société Monsanto est titulaire depuis 1996 d’un brevet européen relatif à une séquence génétique qui, introduite dans l’ADN d’une plante de soja, la rend résistante au gliphosate, un herbicide produit par cette même société et commercialisé sous le nom de “Roundup”. Les agriculteurs peuvent utiliser cet herbicide contre les mauvaises herbes sans nuire à la culture du soja. Le soja génétiquement modifié (“soja RR”, c’est-à-dire “Roundup ready”) est cultivé dans différents pays dans le monde, mais pas dans l’Union européenne.
En 2005 et en 2006, les sociétés défenderesses au principal ont importé d’Argentine – où le soja RR est cultivé à grande échelle, mais où Monsanto ne dispose pas de brevet relatif à la séquence génétique – de la farine de soja destinée à la production d’aliments pour animaux. Une analyse effectuée à la demande de Monsanto a révélé la présence de traces de l’ADN caractéristique du soja RR, ce qui atteste que la farine importée a été produite avec le soja génétiquement modifié pour lequel Monsanto est titulaire d’un brevet européen. »

La question posée est donc de savoir si le brevet européen couvre ou non les “résidus” d’ADN trouvés dans la farine dont vont se nourrir les animaux. Pour l’avocat général, dont les conclusions ne seront pas obligatoirement suivies par la Cour, « la protection conférée à un brevet relatif à une séquence génétique se limite aux situations dans lesquelles l’information génétique exerce actuellement les fonctions décrites dans le brevet. Cela vaut aussi bien pour la protection de la séquence en tant que telle que pour la protection des matières dans lesquelles elle est contenue. […] La directive constitue une réglementation exhaustive de la protection conférée dans l’Union européenne à une invention biotechnologique, et n’admet pas qu’une législation nationale lui confère une protection plus étendue. »

Le brevet pourrait donc avoir des limites, même si les enjeux économiques sont énormes. Voilà qui pourrait ne pas arranger le fabricant et les utilisateurs européens d’un produit, parfois à l’origine de la pollution des nappes phréatiques ou des sols, offrant ensuite des OGM résistant à ce même produit comme nourriture à des animaux qui finiront dans les assiettes des consommateurs du vieux continent…

Les déclarations d’intérêts des membres du Haut Conseil de la santé publique

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Médicaments et conflits d'intérêtsIl aura fallu attendre la fin 2009 et de nombreuses critiques dans les médias et le monde professionnel sur le manque de transparence des décisions prises en matière de vaccination contre la grippe A(H1N1) pour que paraisse la mise à jour 2009 des déclarations publiques d’intérêts des membres du collège, des commissions et des comités techniques du Haut Conseil de la santé publique (HCSP).

Ce document n’a rien d’anodin lorsque l’on connaît les missions du HCSP. Instance d’expertise créée par la loi no 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique, ce Haut Conseil doit, par exemple, « fournir aux pouvoirs publics, en liaison avec les agences sanitaires, l’expertise nécessaire à la gestion des risques sanitaires ainsi qu’à la conception et à l’évaluation des politiques et stratégies de prévention et de sécurité sanitaire ». Il est là aussi pour « fournir aux pouvoirs publics des réflexions prospectives et des conseils sur les questions de santé publique ». Le HCSP peut être consulté par les ministres intéressés, par les présidents des commissions compétentes du Parlement et par le président de l’Office parlementaire d’évaluation des politiques de santé sur toute question relative à la prévention, à la sécurité sanitaire ou à la performance du système de santé.

En matière de grippe A et de vaccination, le Haut Conseil de la santé publique est l’un des piliers du dispositif français. Il a émis plusieurs avis à ce sujet ces derniers mois et ces recommandations sur la pertinence de l’utilisation d’un vaccin plutôt qu’un autre sont suivies par les pouvoirs publics. Le choix de la France pour le vaccin avec adjuvant a été pris après que le HCSP ait jugé que cette solution était préférable à l’utilisation de vaccins sans adjuvant comme aux États-Unis. Les éventuels conflits d’intérêts de ses membres sont donc particulièrement importants, même s’il a fallu attendre l’arrêté du 19 octobre 2007 portant approbation du règlement intérieur du Haut Conseil de la santé publique pour que la loi impose la publication des déclarations d’intérêts de ses membres. Ce texte précise aussi que ces derniers « ne peuvent, en outre, recevoir des avantages en nature ou en espèces sous quelque forme que ce soit de la part des entreprises, établissements ou organismes » dont les dossiers pourraient être soumis au HCSP, ainsi qu’avec les organismes de conseil intervenant dans ces secteurs.
Difficile de croire que ces déclarations ne sont actualisées qu’à l’initiative des membres participant au HCSP dès qu’une modification intervient. C’est pourtant ce que prévoit l’arrêté…

L’étude du document mis en ligne est intéressante. Sur les vingt et un membres du comité technique des vaccinations, seuls quatre ont déclaré ne pas avoir de lien d’intérêt avec les entreprises, les établissements ou les organismes soumettant des dossiers au HCSP. Les autres reconnaissent de nombreuses interventions ponctuelles, rémunérées ou non,  pour des laboratoires comme Sanofi-Pasteur ou GlaxoSmithKline, fabricants des vaccins choisis pour la campagne de vaccination. Il faut n’y voir que des obligations professionnelles ou un hasard dans un milieu où les spécialistes ne sont pas légions et où les fonds publics pour mener à bien des études sont bien plus maigres que ce qu’essaient de faire croire les responsables politiques.
Les déclarations des autres membres sont à l’avenant…

Une démarche qualité opposable aux professionnels de santé ?

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Les médecins piégés par les référentielsLes démarches qualité sont familières aux médecins et aux autres professionnels de santé depuis de nombreuses années. Qu’il s’agisse de la certification ISO 9001 des ophtalmologistes ou de l’implication de nombreuses autres spécialités dans l’évaluation des pratiques professionnelles (EPP), de nombreuses pistes ont été explorées et ont conduit à une meilleure analyse des risques et à un accroissement de la qualité de prise en charge des patients. Les anesthésistes-réanimateurs, conscients des enjeux et confrontés à des affaires exagérément médiatisées, se sont eux aussi très vite intéressés à ces questions, au point d’obtenir une réduction significative de la mortalité dans les blocs opératoires et dans les unités de réanimation.

De toutes ces démarches qualité naissent de très nombreux documents de travail qui aident les uns et les autres à améliorer leurs pratiques. Et voilà que ces pièces sont détournées et utilisées de façon abusive par des organismes ou des tutelles pour en faire des bases de références réglementaires. C’est Marc Dahlet, président du groupe de travail sur le référentiel EPP « Tenue du dossier d’anesthésie » qui tire la sonnette d’alarme et donne l’exemple d’une telle dérive dans Les infos de Collège — Lettre de liaison du Collège français des anesthésistes réanimateurs nº 27 de juillet 2009.

Suite au décès inexpliqué d’un patient, une agence régionale de l’hospitalisation (ARH) « a déclenché une enquête administrative dans laquelle le référentiel EPP “Tenue du dossier d’anesthésie” été utilisé pour émettre des appréciations ». Il a été reproché à l’anesthésiste de ne pas avoir effectué une consultation préopératoire conforme en tous points au référentiel. Un staff et une revue de morbi-mortalité (RMM) insuffisants ont aussi été utilisés pour mettre en cause le praticien. Le référentiel, établi dans le cadre d’une démarche qualité, a donc servi de pièce à charge dans une enquête administrative.

Marc Dahlet explique que ce n’est pas la première fois que la Haute Autorité de santé (HAS) ou une autre institution est tentée d’utiliser les documents de travail relatifs à l’EPP comme des recommandations, voire même des références réglementaires. Il rappelle que, pour lui et les professionnels qui les rédigent, les documents de démarche qualité (référentiels EPP, méthodes d’audit, RMM, etc.) ne sont pas opposables et ne doivent pas être confondus avec des règlements. Des « utilisations à contre-sens » de ces documents pourraient, selon lui, « enrayer très rapidement le système de démarche qualité si elles se multiplient ».

Ce que semble malheureusement oublier ce médecin, c’est que les recommandations de la HAS n’ont pas été présentées à leurs auteurs comme pouvant devenir opposables aux praticiens. Le terme même de “recommandations” laissait penser que cela ne serait jamais le cas, jusqu’à ce que le Conseil d’État en décide autrement. Fort de cette expérience, il est facile de comprendre que les institutions tentent de renouveler l’expérience. D’autant que le fait que les recommandations soient devenues opposables n’a en rien enrayé la volonté de nombreux praticiens de participer à la rédaction de ces nouvelles contraintes. Les auteurs de référentiels, médecins ou autres professionnels de santé, doivent être conscients, lorsqu’ils participent à l’élaboration de référentiels, de manuels, de protocoles ou d’autres documents de ce type, qu’il se pourrait que des juges ou des conseillers d’État ne voient pas ces documents comme de simples aides, mais bien comme des pièces à charge, car tout peut être bon pour indemniser une victime…

Médecine, essais cliniques et OGM

Écrit par Droit-medical.com le . Dans la rubrique Evolution

Les organismes génétiquement modifiés (OGM) ne se trouvent pas que dans l’agriculture, ils se trouvent aussi en médecine. L’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) informe régulièrement sur des divulgations d’essais cliniques. Loin des actions médiatiques, cette procédure est réglementée et il s’agit d’un élément de transparence.Tubes essai

Il est intéressant de se pencher sur l’un de ces communiqués, intitulé « Essai clinique de phase 3 pour évaluer la tolérance et l’efficacité de 2 mg d’Allovectin-7® en administration intralésionnelle versus Dacarbazine (DTIC) ou Témozolomide (TMZ) chez des sujets en récurrence de mélanome métastatique », rendu public il y a quelques jours par l’Afssaps. Il concerne un « produit expérimental de thérapie génique administré à des patients atteints d’un mélanome, par injection intratumorale directe ». Ce plasmide n’est pas un OGM, mais entre dans « le cadre de la législation sur les OGM en tant que produit médicinal pour thérapie génique administré chez des sujets humains ».

Le document ne se contente pas d’indiquer les mesures prises pour la gestion des risques, il résume aussi l’évaluation des risques pour l’environnement. Parmi ces risques figurent la pathogénicité du produit chez l’homme ou chez les animaux ; la capture et la réplication du plasmide par les bactéries présentes dans l’organisme des patients ou dans l’environnement ; la dissémination suite à l’excrétion par les sujets des études, ou par intégration dans l’ADN (acide désoxyribonucléique) germinal chez l’homme ou chez les mammifères. Le risque potentiel pour l’environnement est considéré comme « minime et acceptable au regard du bénéfice clinique potentiel pour les patients atteints de mélanome métastasé « .

 

Mise à jour du 16 novembre 2012 : le communiqué n’est plus disponible sur le site de l’Afssaps, devenue Ansm, mais les instances européennes en ont mis une copie en anglais à la disposition du public — A Phase 3 Clinical Trial to Evaluate the Safety and Efficacy of Treatment with 2 mg Intralesional Allovectin-7® [bicistronic plasmid DNA vector VCL-1005 encoding Human Leukocyte Antigen (HLA)-B7 and β-2 microglobulin, formulated with the cationic lipid delivery system DMRIE-DOPE] Compared to Dacarbazine (DTIC) or Temozolomide (TMZ) in Subjects with Recurrent Metastatic Melanoma.