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Ministres de la santé, anorexigènes, laboratoires Servier et génériques

Écrit par Charles Duchemin le . Dans la rubrique Humeur

Signature sur un documentLe rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (IGAS) a été rendu public hier et il a le mérite de faire l’historique du drame que représente le retrait tardif du marché du benfluorex, dont la dénomination commerciale est Mediator®, considéré comme un anorexigène dérivé de l’amphétamine par l’Organisation mondiale de la santé et les auteurs du rapport. Lors de la conférence de presse qui a suivi la présentation de ce document, Xavier Bertrand, actuel ministre du travail, de l’emploi et de la santé, accompagné de Nora Berra, secrétaire d’État chargée de la santé, a reconnu de façon courageuse qu’il assumait une part de responsabilité, en tant que ministre de la santé et des solidarités du 3 juin 2005 au 26 mars 2007, dans cette affaire alors que la suspension de l’autorisation de mise sur le marché (AMM) du benfluorex date du 30 novembre 2009.

Le Mediator n’est pas le premier anorexigène des laboratoires Servier à voir son AMM suspendue. Le rapport de l’IGAS fait état de la fenfluramine, dont le nom dans les officines était Ponderal®, commercialisé depuis 1963, et le dexfenfluramine, appelé Isomeride®. C’est en 1995 que la dangerosité des fenfluramines a été établie, selon le rapport, et c’est le 15 septembre de cette même année que leur AMM a été suspendue, alors que le Ponderal était suspecté d’être à l’origine d’hypertension artérielle pulmonaire chez l’homme depuis 1981 et l’Isomeride depuis 1992. Or, pour les membres de la commission d’enquête de l’IGAS, les fenfluramines et le benfluorex sont pharmacologiquement, méthodologiquement et chronologiquement liés.

S’il est peu probable d’envisager que la responsabilité des ministres de la santé depuis 1981 puisse être recherchée, ceux ayant exercé leurs fonctions depuis la fin de 1995 pourraient avoir à répondre à des questions embarrassantes devant les commissions parlementaires qui vont chercher à faire la lumière, tout du moins en théorie, sur les dysfonctionnements ayant conduit à la mort de plusieurs centaines de patients.
Que faut-il attendre de ces commissions parlementaires franco-françaises ? On aurait pu être tenté de répondre « pas grand-chose », si ce n’est des rapports visant à minimiser le rôle des décideurs politiques et de l’administration, comme dans le cas de la gestion de la pandémie de grippe A(H1N1), mais la virulence du rapport de l’IGAS pourrait faire réfléchir les élus, surtout après que Xavier Bertrand ait reconnu que l’administration et les ministres de la santé avaient une part de responsabilité dans l’affaire Mediator. Même si les laboratoires Servier vont être en première ligne, l’opinion publique pourrait ne pas apprécier que les anciens responsables gouvernementaux, de droite comme de gauche, jouissent une nouvelle fois de la magnanimité de leurs pairs.
Autre élément à prendre en compte, la justice va être amenée à se prononcer sur le dossier à un moment ou à un autre, les premières auditions ayant déjà commencé. Des ministres seront-ils entendus ? C’est possible si leur responsabilité est mise en cause, comme cela a été le cas au moment de l’affaire du sang contaminé. Pourraient-ils être condamnés ? En théorie, oui, mais là encore, cette même affaire du sang contaminé a montré qu’il était difficile de s’attaquer à la responsabilité d’un ministre de la santé, même si la justice s’exerce, bien entendu, en toute indépendance…

Seuls le Mediator et les laboratoires Servier sont cités, mais il ne faut pas oublier qu’il existait des génériques à ce produit et il est intéressant de relire le communiqué de l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) publié à ce moment : « L’Afssaps suspend l’autorisation de mise sur le marché des médicaments contenant du benfluorex.
Mediator 150 mg®, Benfluorex Mylan® et Benfluorex Qualimed® ne seront plus disponibles à compter du 30 novembre 2009.
Leur autorisation de mise sur le marché (AMM) est suspendue en raison d’une balance bénéfice-risque jugée défavorable par la Commission d’AMM compte-tenu du risque avéré de valvulopathie et de l’efficacité modeste dans la prise en charge du diabète de type 2.
L’Afssaps recommande par mesure de précaution de procéder à un interrogatoire et un examen clinique de tous les patients ayant eu un traitement par benfluorex dans le passé, à l’occasion de leur prochaine consultation médicale.
Les patients qui sont, à ce jour, traités par benfluorex doivent arrêter leur traitement et consulter, sans urgence, leur médecin traitant. »
Il est étonnant qu’il n’y ait pas plus de communication auprès des patients à ce sujet et que des AMM aient été données à ces génériques en 2008 alors que des soupçons d’effets indésirables graves pesaient sur la molécule princeps.

 

Ministres et secrétaires d’État à la santé en poste de 1981 à 1995

Jusqu’au 13 mai 1981, Jacques Barot, est ministre de la santé et de la sécurité sociale ; Rémy Montagne, secrétaire d’État auprès du ministre de la santé et de la sécurité sociale, tout comme Jean Farge (démissionnaire le 12 mai 1981).

Du 21 mai 1981 au 22 juin 1981, Edmond Hervé, est ministre de la santé.

Du 22 juin 1981 au 22 mars 1983, Jack Ralite est ministre de la santé.

Du 22 mars 1983 au 20 mars 1986, Edmond Hervé est secrétaire d’État auprès du ministre des affaires sociales et de la solidarité nationale, chargé de la santé.

Du 25 mars 1986 au 10 mai 1988, Michèle Barzach est ministre déléguée auprès du ministre des affaires sociales et de l’emploi, chargé de la santé et de la famille.

Du 13 mai 1988 au 2 octobre 1990, Claude Évin, est ministre délégué auprès du ministre des affaires sociales et de l’emploi, chargé de la santé et de la protection sociale, puis ministre de la solidarité, de la santé et de la protection sociale ; Léon Schwartzenberg, ministre délégué auprès du ministre de la solidarité, de la santé et de la protection sociale, chargé de la santé (du 13 mai au 8 juillet 1988).

Du 2 octobre 1990 au 3 avril 1992, Bruno Durieux est ministre délégué auprès du ministre des affaires sociales et de la solidarité, chargé de la santé, puis ministre délégué auprès du ministre des affaires sociales et de l’intégration, chargé de la santé.

Du 5 avril 1992 au 30 mars 1993, Bernard Kouchner est ministre de la santé et de l’action humanitaire.

Du 31 mars 1993 au 12 mai 1995, Simone Veil est ministre d’État, ministre des affaires sociales, de la santé et de la ville ; Philippe Douste-Blazy, ministre délégué auprès du ministre d’État, ministre des affaires sociales, de la santé et de la ville, chargé de la santé.

 

Ministres et secrétaires d’État à la santé en poste de 1995 à 2009

Du 19 mai 1995 au 8 novembre 1995, Élisabeth Hubert est ministre de la santé publique et de l’assurance-maladie.

Du 8 novembre 1995 au 3 juin 1997, Hervé Gaymard est secrétaire d’État auprès du ministre du travail et des affaires sociales, chargé de la santé et de la sécurité sociale.

Du 5 juin 1997 au 7 juillet 1999, Bernard Kouchner est secrétaire d’État auprès du ministre de l’emploi et de la solidarité, chargé de la santé, puis chargé de la santé et de l’action sociale.

Du 28 juillet 1999 au 6 février 2001, Dominique Gillot est secrétaire d’État auprès du ministre de l’emploi et de la solidarité, chargé de la santé et de l’action sociale.

Du 6 février 2001 au 7 mai 2002, Bernard Kouchner est ministre délégué à la santé, auprès de la ministre de l’emploi et de la solidarité.

Du 8 mai 2002 au 31 mars 2004, Jean-François Mattéi est ministre de la santé, de la famille et des personnes handicapées.

Du 1er avril 2004 au 31 mai 2005, Philippe Douste-Blazy est ministre de la santé et de la protection sociale.

Du 3 juin 2005 au 26 mars 2007, Xavier Bertrand est ministre de la santé et des solidarités.

Du 26 mars 2007 au 15 mai 2007, Philippe Bas est ministre de la santé, des solidarités, de la sécurité sociale, des personnes âgées, des personnes handicapées et de la famille.

Du 19 mai 2007 au 14 novembre 2010, Roselyne Bachelot-Narquin est ministre de la santé, de la jeunesse et des sports, puis de la santé et des sports.

Le gouvernement de la santé remanié

Écrit par Charles Duchemin le . Dans la rubrique Humeur

Dérouler le tapis rougeTout le monde l’attendait depuis plusieurs semaines… Un nouveau gouvernement Fillon a été annoncé le 14 novembre 2010, en plein débat à l’Assemblée nationale du projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2011.

Tout d’abord, Roselyne Bachelot-Narquin quitte l’avenue de Ségur, dont elle était locataire depuis le 18 mai 2007, pour s’occuper du ministère des solidarités et de la cohésion sociale. Fidèle de François Fillon, sa parfaite gestion de la campagne de vaccination contre la pandémie grippale et son soutien sans faille aux médecins libéraux qui a renforcé la cohésion au sein de la profession, en totale solidarité avec l’industrie pharmaceutique française qui était durement touchée par la crise, lui valent d’être reconduite au sein d’un gouvernement qui devrait gérer les affaires de l’État jusqu’aux prochaines élections présidentielles de 2012. Omnipraticien de la politique, Roselyne Bachelot-Narquin qui, d’après Wikipedia, a été déléguée à l’information médicale au sein du laboratoire ICI Pharma de 1969 à 1976, puis titulaire d’une pharmacie à Angers de 1984 à 1991 et, en parallèle, chargée des relations publiques chez Soguipharm de 1984 à 1989, devrait pouvoir mettre son expérience du contact au service de ses nouvelles fonctions.

La ministre de la santé et des sports tire sa révérence, place au ministère du travail, de l’emploi et de la santé et à un secrétariat d’État à la santé.
À la tête de ce grand ministère, un homme à la hauteur de la tâche, connu pour dormir très peu, qui sait à quoi il s’attaque puisqu’il a déjà été ministre de la santé dans le gouvernement Fillon 1 : Xavier Bertrand. Cet homme du Président a la lourde tâche de reprendre les affaires et le travail d’Éric Woerth, de décharger Christine Lagarde et Laurent Wauquiez de la charge que représentait l’emploi pour eux, tout en assurant le suivi de la santé.
Dans ce dur labeur, Xavier Bertrand sera secondé par Nora Berra qui devrait sans difficulté trouver les mots qui réconfortent la population médicale vieillissante depuis qu’elle a occupé les fonctions de secrétaire d’État aux aînés. Fille d’un tirailleur algérien, nul doute qu’elle mènera un combat acharné pour défendre les intérêts de la santé. Pour Wikipedia, elle a grandi « dans le quartier des RZD et dans la banlieue de Lyon, étudié au lycée Ampère avant de partir faire médecine à Oran. De retour en France, elle travaille à partir de 1991, au service d’immunologie à l’hôpital Édouard Herriot de Lyon, puis dans divers laboratoires pharmaceutiques entre 1999 et 2009. » Dans sa biographie officielle, encore en ligne pour quelques heures sur le site du secrétariat d’État aux aînés, il est facile de trouver les précisions sur son parcours sont un peu différentes : « Après avoir fait son internat en pharmacologie clinique à l’hôpital Édouard Herriot, elle devient à 1992 praticien attaché au service d’exploration fonctionnelle rénale. De 1992 à 1999, elle a enseigné notamment dans deux écoles d’infirmières lyonnaises et a parallèlement encadré des internes et des étudiants.
Elle travaillera pendant 10 ans, de 1999 à 2009, en tant que médecin des affaires médicales au sein de laboratoires pharmaceutiques français et internationaux dans les domaines d’expertise suivants : VIH, Hépatite B et cancer du col de l’utérus.
Par ailleurs, de 1991 à 2009, Nora Berra est également praticien attaché au service d’immunologie clinique à l’hôpital Édouard Herriot, s’occupant principalement des patients atteints du VIH. Elle poursuit son engagement en étant membre du réseau ville-hôpital, réseau entre professionnels de santé, dans le cadre de la formation des médecins libéraux dans la prise en charge de la pathologie du VIH.
Elle poursuit ses travaux de recherche en étant investigatrice des essais de recherche clinique, à travers une dizaine de publications. » Seules trois d’entre elles semblent être reprises par PubMed, dont une lettre publiée dans le Lancet en 1992 relative aux effets bénéfiques des immunoglobulines en intraveineux chez les patients atteints par le sida.

La fin du mois de novembre devrait être chargée pour le ministre et la secrétaire d’État : reprises des débats sur le projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2011, remise du rapport de la mission confiée à Élizabeth Hubert par le chef de l’État sur la médecine de proximité, etc. De quoi se faire rapidement une idée de l’orientation que souhaite donner ce nouveau gouvernement à la politique de santé dans les deux années qui viennent.