Quelques précisions sur la révision des lois de bioéthique

Écrit par Charles Duchemin le . Dans la rubrique Presse

C’est le janvier 2010 que le rapport d’information fait au nom de la mission d’information sur la révision des lois de bioéthique n° 2235 a été déposé à l’Assemblée nationale. Dirigé par le député Jean Leonetti, ce travail suivait de quelques mois le rapport des états généraux sur ce sujet en juillet 2009. Respectant le calendrier prévu, la ministre de la santé, Roselyne Bachelot, a présenté à la presse le projet de loi relatif à cette révision des lois de bioéthique le 31 août 2010. Malgré deux mesures phares, la possibilité pour les enfants nés grâce à un don de gamètes (sperme ou ovocyte) de connaître l’identité du donneur et celle donnée aux couples hétérosexuels pacsés d’avoir recours à la procréation médicalement assistée, la nouvelle loi ne devrait pas entraîner de révolution dans le domaine de la bioéthique, selon la ministre, pour qui « le respect de l’intégrité du corps ou le refus de la marchandisation des éléments du corps humain » ne sont pas remis en cause.

Anonymat du donneur de sperme

La levée de l’anonymat des donneurs de gamètes fait la Une des journaux. À sa majorité, toute personne née grâce à un don de sperme ou d’ovocytes devrait pouvoir obtenir le profil du donneur (son âge, ses données médicales, sa catégorie socioprofessionnelle ou sa région) et même connaître son identité si ce dernier a donné son accord au moment du don. Ce choix laissé au donneur éviterait de voir le nombre de dons baisser. « Même en cas de refus de la part du donneur, la réponse sera celle d’une personne assumant son choix, en toute connaissance de cause, et non une impossibilité abstraite imposée par la loi. Cette disposition est de nature à responsabiliser le don », selon la ministre.

L’assistance médicale à la procréation (AMP) ne devrait pas être ouverte aux couples homosexuels ou aux célibataires. Pas question non plus, d’autoriser la gestation pour autrui (les mères porteuses) ou le transfert d’embryons post-mortem. Seuls des critères purement médicaux permettront de recourir à l’AMP, y compris pour les hétérosexuels pacsés qui n’ont pas cette possibilité jusque-là.

Il n’est pas toujours facile pour un patient atteint d’une maladie génétique grave d’en informer sa famille. La loi devrait évoluer et permettre à un praticien, sans violer le secret médical, de l’annoncer aux parents désignés par le malade sans que ceux-ci sachent qui a donné leur nom (une disposition qui existe déjà dans la loi du 6 août 2004, mais qui n’est pas appliquée pour des raisons juridiques). Ces derniers pourront poser des questions et recevoir une information adaptée dans ce moment souvent difficile à surmonter. Pas de changement, par contre, pour les conditions d’accès au diagnostic pré-implantatoire (DPI) : il n’y a aura pas de dépistage de la trisomie 21 couplé au DPI, par exemple.

À notre époque, le nombre de dons d’organes reste un problème en France. Alors que les patients en attente de greffe sont chaque jour plus nombreux, celui des donneurs stagne. La création d’un registre géré par l’Agence de la biomédecine et les modifications législatives devraient ouvrir la voie aux dons croisés. Des “paires” donneurs/receveurs pourront ainsi être immunologiquement appariées.

On sait que la proposition de loi tendant à promouvoir et organiser la collecte, la conservation et la recherche relative au cordon ombilical n’a pas avancé depuis le mois de février 2010, date à laquelle il a été déposé au Sénat. Le projet de loi prévoit d’interdire de prélever les cellules du sang de cordon pour soigner son propre enfant. Par contre, le régime juridique des cellules souches hématopoïétiques quel que soit leur mode de prélèvement, y compris celles issues du cordon, sera harmonisé. Le cordon ombilical ne sera plus considéré comme un déchet de bloc opératoire, mais comme une ressource susceptible d’être utilisée pour traiter des patients, au même titre que la moelle osseuse.

Concernant le moratoire sur la recherche à base d’embryon et de cellules souches embryonnaires, le projet de loi prévoit sa disparition, mais maintient le principe de son interdiction et le régime d’autorisations dérogatoires.

Ce texte sera examiné en Conseil des ministres à la fin septembre, puis discuté au Parlement avant la fin de l’année. Le principe voulant que les lois bioéthiques soient révisées à intervalles réguliers devrait être abandonné à l’occasion du vote de cette loi, si les passages du projet à l’Assemblée nationale et au Sénat ne réservent pas trop de surprises.

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Commentaires (2)

  • J. Monty

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    Je crois qu’encore une fois le législateur, pour répondre à quelques cas individuels, et sans doute douloureux, risque de tuer le don de sperme… dans l’oeuf.
    L’interrogation des enfants sur leur véritable géniteur débouche peu souvent à mon sens sur une véritable quête d’identité.
    En revanche, cette possibilité lui étant offerte par loi, l’enfant ne pourra que culpabiliser en n’effectuant pas une telle recherche.
    A ce sujet, je viens justement de lire un roman, un thriller, dont l’intrigue repose sur cette question de l’anonymat. Je vous le conseille, 2620 de Jack Narval.

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  • Anthony

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    Bonjour! Désolé je ne pense pas avoir posté le message au bon endroit mais je ne savais pas ou poser des questions.
    J’aurais aimé avoir votre avis concernant les soins futiles: qu’est ce que cela représente pour vous? Coment réussir a cerner la définition juridique de ce terme? Comment traiter ce sujet?
    De meme quand savoir que les soins sont devenus futiles?
    Qui peut en décider dans le cas ou le malade est inapte
    Risque t’on a cause des restrictions budgétaires de voir médecin reconnaitre des soins futiles juste par ce que les soins sont cher et peu de chance de réussite?
    Comment d’après vous risque d’évoluer la notion?

    Merci de votre aide !

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